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Les Foudres du Metal 2025 : le palmarès de la première édition

samedi 11 octobre 2025
Raton

Amateur de post-musique, de breakdowns et de gelée de groseilles.

Le débat sur l’exposition du metal dans le mainstream est une querelle à laquelle on ne parviendra pas à donner une réponse aujourd’hui. Certains pensent que l’essence du genre est de demeurer dans l'underground ou du moins de conserver un minimum de confidentialité sans quoi il se pervertirait, tandis que d’autres rêvent d’une diffusion plus large voire d’une institutionnalisation aux côtés des genres adoubés par les médias traditionnels.

Au milieu de tout ça, Horns Up a toujours tenu la même ligne, à savoir célébrer et valoriser la niche, autant pour les fans acharnés-es de longue date que pour les curieux-ses extérieurs-es aux musiques extrêmes (ce que les collègues de Vivement Doomanche détaillent à merveille dans leur dernier épisode sur le sujet). Et c’est dans cet état d’esprit que nous nous sommes intéressés aux Foudres, la première cérémonie d’ampleur pour récompenser les acteurs et actrices de la scène metal française. Nous sommes allés à la première conférence de presse, avons suivi la construction du projet, avons même participé au jury professionnel et enfin, avons participé à la grande célébration, le jeudi 9 octobre au Bataclan. Voici ce qu’il s’y est passé.

L’équipe organisatrice a fait un choix original pour une cérémonie de remise de prix. Plutôt qu’une configuration 100% assise comme on peut en voir aux Césars, les Foudres ont tenu à avoir une fosse ouverte au public pour garder l’essence des musiques saturées et de leur appréciation live. Un choix auquel on adhère dans l’idée et qui a globalement souligné le sens de l’événement, mais qui a montré ses limites en fin de show avec un bruit ambiant qui venait couvrir les présentations et remises de prix.

La cérémonie a été présentée par Thomas VDB, humoriste et ancien journaliste musical, grand amateur de musiques saturées, accompagné parfois de ses homologues Dedo et Harold Barbé. Autour de 20h, VDB présente les intentions de l’événement en parlant de l’importance de célébrer la création metal française, en soulignant avec humour : « c'est énorme le metal français, c’est une niche énorme, c’est quasiment un chenil ». Il laisse la place à Gravekvlt qui livre un show impeccable et bourré d’énergie rock’n’roll. Leur présence, comme représentants du metal extrême, est plus qu’appréciable et prouve la culture musicale et de scène des organisateurs-trices.

Evénement de l’annéeProjet éditorial de l'année | Performance live de l’année | Révélation de l'année | Artwork de l'année | Création audiovisuelle de l’année | Engagement sociétal et environnemental de l'année | Album de l'année | Métiers de l'ombre | Artiste de l'année | Prix des Foudres | Foudre d'honneur

 

Evénement de l’année

Présentée par Vanessa Guide, actrice et fan de metal qui vient souligner le caractère « cathartique et fédérateur » du style, et Aldebert qui tourne en ce moment avec son show metal pour enfants Helldebert.

Remis au Hellfest 2025, face à l’exposition Diabolus in Musica de la Philarmonie de Paris et le Motocultor 2025.

Les représentants du festival se disent « contents d'ouvrir le bal » et soulignent que « le Hellfest est un évènement qui rassemble beaucoup de talents, beaucoup de personnes », adressant ce prix à toutes les personnes ayant rendu l’expérience possible, tout en annonçant Ultra Vomit comme premier nom pour l’édition 2026.

 

 

Projet éditorial de l'année

Présenté par Laurence Romance, ancienne présentatrice de l’émission culte Metal Express et accessoirement mère de James Kent, aka Perturbator qui rappelle avec ironie que si le metal est souvent présentée comme une musique de « demeurés », les projets éditoriaux célébrant les musiques extrêmes prouvent le contraire.

Remis à Children of the Sabbath, le livre qui vient célébrer le meilleur de Black Sabbath, rédigé par Mathieu Yassef, Gabriel Redon et Guillaume Fleury, et illustré par Emgalaï. Sur scène, Gabriel et Mathieu en profitent pour remercier les personnes qui ont participé au podcast qui a donné naissance au livre et dédie le prix « à un grand monsieur, John Michael Ozzy Osbourne ». Vous pouvez toujours revoir l’émission que nous avons tournée avec l’équipe du livre sur YouTube.

 

 

Performance live de l’année

Après un interlude assuré par Stéphan Forté, ex-Adagio et prodigue de la guitare prog et néoclassique, le prix est remis par Victor le Masne, compositeur et directeur musical de la musique des Jeux Olympiques de Paris 2024. Ce dernier souligne à quel point, pour lui, « le metal est une vraie musique révolutionnaire ».

Le prix est remis à la performance de Gojira au festival de Carcassonne 2025. Montent sur scène, Christian Andreu, guitariste et Jean-Michel Labadie, bassiste du groupe. Visiblement peu à l’aise pour les discours, mais touchés, ils remercient le public et ironisent sur le fait qu’ils vont devoir davantage s’habituer aux récompenses.

 

 

Révélation de l'année

Remis par les deux membres de Gojira, c’était un prix qu’on attendait particulièrement, car il vient célébrer les groupes montants qu’on a à coeur de promouvoir sur Horns Up. 

Les trois finalistes nommés étaient le groupe de black metal mélodique Houle (émission toujours disponible ici), le supergroupe de nu-metalcore ten56. et le projet de metalcore moderne Revnoir. Ce sont ces derniers qui empochent la récompense et déclarent avec émotion : « c’est beaucoup d'honneur, on existe depuis 2 ans, et on veut le partager avec tous les petits groupes qui regardent les grands ».

Avant de reprendre les remises de prix, Grandma’s Ashes, l'étoile montante du rock courroucé, prend la scène et vient teaser son prochain album, Bruxism, prévu pour le 24 octobre. Malgré quelques soucis de son, le show des Françaises est maîtrisé à la perfection, élégant et convaincant, avec notamment l’apparition de growl dans le chant d’Eva. S’ensuit un entracte assuré par DJ ADORÅ, entre techno et metal.

 

 

Artwork de l'année

Ce prix est remis par le duo le plus surprenant de la soirée, avec la streameuse et fan de metal, habituée de la Hellfest TV, Trinity, ainsi que le premier batteur de Motörhead, Lucas Fox.

Face à l’identité visuelle des 40 ans de Loudblast signée Fortifem et l’artwork du dernier Landmvrks par Guy Mishima, c’est Yoann Lossel pour la sublime pochette du dernier Alcest qui l’emporte.

 

 

Création audiovisuelle de l’année

Le prix est décerné par Stéphane Hervé, auteur, ancien journaliste musical pour Rage, et musicien, et l’influenceuse La Dame Metal, qui célèbrent, un peu maladroitement, les oeuvres qui font « vibrer nos yeux autant que nos oreilles ».

La récompense est remise à Hotu et Vithia pour le clip de « Neo Paris » de Rise of the Northstar, face aux amis des Furtifs et leur documentaire Que ton règne vienne (interview de son réalisateur Mathias Averty toujours en ligne également), et l’émission Bang!Bang! de RSTLSS.

 

 

Engagement sociétal et environnemental de l'année

Pour ce prix aussi attendu qu’il peut être délicat à donner, l’objectif étant de récompenser des initiatives progressistes, sans tomber dans le socialwashing, c’est Pascal Gueugue, à la tête de la Fédération des Musiques métalliques et co-créateur de l’événement, et les trois musiciennes de Grandma's Ashes qui montent sur scène. Ces dernières soulignent l’importance du prix « dans un milieu qui peut se montrer très excluant et polluant […] pour que les musiques extrêmes soient plus ouvertes ».

Le trophée revient à More Women on Stage, le collectif qui agit pour « mettre en avant les femmes et les minorités de genre dans le spectacle vivant » et qui en profite pour annoncer le More Women on Stage Fest les 12 et 13 juin 2026.

Pour cette Foudre, exception est faite et tous les nommés montent sur l’estrade pour présenter leurs projets. Aux côtés de More Women on Stage, l’Aütfest, un festival dont les bénéfices sont reversés à des assos locales de personnes concernées par l’autisme, et Savage Lands, l’association qui allie metal et soutien à la biodiversité, première ONG à être signée sur un label (Season of Mist).

 

 

Album de l'année

Décerné par Laurent Karila, psychiatre addictologue et fan de metal, et Yann et Jamie de Mass Hysteria.

Face à Krystal Metal de Sun et Les Chants de l’Aurore d’Alcest, c’est The Darkest Place I’ve Ever Been de Landmvrks qui l’emporte, sous un tonnerre d’applaudissements (on l'avait particulièrement apprécié aussi). Le groupe étant en tournée étasunienne, ce sont le producteur et l’éditeur de Landmvrks qui récupèrent la statuette et en profitent pour remercier le public « qui va voir du metal toute l’année ».

Troisième groupe de la soirée à se produire, Revnoir ne bénéficie pas d’un son idéal, avec une batterie et une basse trop en avant qui éclipsent les très justes vocalises du chanteur. Représentant un metalcore moderne, loin de notre ligne éditoriale, Revnoir livre toutefois une prestation très convaincante pour le style, avec beaucoup de répondant de la part du public.

 

 

Métiers de l'ombre

Pour ce prix ô combien nécessaire, c’est Norbert Krief, guitariste de Trust, qui vient honorer celles et ceux sans qui nous n’aurions « pas d’albums qui traversent le temps » ou de concert mémorables. C’est aussi le seul ce soir à évoquer l’histoire récente et tragique du Bataclan, en se réjouissant « que ce lieu chargé d'émotions vive encore et rêve encore ».

Pour l’occasion, la récompense est multiple et vient célébrer Fred et Lorène du booker Garmonbozia, ainsi que Corentin Charbonnier, photographe, éditeur et anthropologue, aussi derrière l’exposition Diabolus in Musica de la Philharmonie de Paris.

 

 

Artiste de l'année

Remis par le vidéaste Julien Ménielle (dont vous avez la participation à l’émission HU juste ici), qui vient ironiser avec tendresse sur l’appellation de « grande famille du metal », en soulignant que « comme dans toutes les familles, il y a un tonton facho ou un cousin sexiste » et vient donner des exemples scientifiques d’études récentes sur les auditeurs-trices de metal.

En concurrence avec Rise of the Northstar et Last Train, c’est Landmvrks qui « ramène la coupe à la maison » selon le mot de leur producteur, après la diffusion d’un message vidéo du groupe, toujours aux Etats-Unis.

 

 

Prix des Foudres (meilleures ventes metal en France)

Présenté par l’excellent Luc Frelon (Fip Metal), ce prix vient couronner le groupe qui a fait les meilleures ventes de l’année dans le style metal et revient donc assez logiquement à Ultra Vomit pour Le Pouvoir de la puissance.

Fidèles à eux-mêmes, les Nantais cabotinent sur scène, tout en étant visiblement touchés : « Ca fait 20 ans qu'on a sorti notre premier album Mr Patate et il y a eu un peu de chemin, on va pas se mentir […] si on m'avait dit qu'on ferait une tournée des Zénith, j'y aurais jamais cru » selon les mots de Fetus.

 

 

Foudre d'honneur

Pour clore la soirée, ce sont Jean-Charles Desgroux, auteur et spécialiste des musiques extrêmes et ni plus ni moins que Pio Marmai qui viennent remettre un prix d’honneur à Gojira, notamment en hommage aux 20 ans de From Mars to Sirius.

Après un discours maladroit mais amusant de Christian Andreu, le guitariste, un film hommage au groupe est diffusé.

Le maître de cérémonie, Thomas VDB, annonce la fin de soirée, ponctuée par un set toujours réussi de Carpenter Brut, qui conclut sur son inévitable reprise de « Maniac ».

 

Merci à Elodie de l'agence Singularités pour l'invitation, à l'équipe des Foudres et notamment à Pascal, au Bataclan et à tous les groupes qui ont rythmé la soirée.