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samedi 4 octobre 2025

Dark Tranquillity + Soen + Equilibrium + Iotunn @Paris

Bataclan - Paris

Team Horns Up

Compte groupé de la Team Horns Up, pour les écrits en commun.

Il y a un peu moins d'un an, le Bataclan accueillait Dark Tranquillity dans une tournée de promotion de son dernier album, Endtime Signalsqui nous a régalé.

Mardi dernier, les Suédois étaient déjà de retour dans cette même salle, mais cette fois-ci avec quelques surprises dans leurs bagages ! Outre des groupes de qualité pour l'accompagner, la bande de Göteborg nous a concocté une setlist « premium » pour fêter devant son public les 20 ans de Character et les 30 ans de The Gallery

Retour sur cette soirée en texte et en photos !

 

Iotunn

Varulven : Pour une fois dans l’histoire des concerts de metal parisiens, il ne fallait pas manquer le tout premier groupe. Car cette fois, il ne s’agit pas d’un simple petit groupe de niveau moyen, mais bien d’une possible étoile montante pour les années à venir. En effet, les Danos-Féroiens de Iotunn constituent l’une des sensations de ces dernières années dans les cercles death mélo et death prog. Grâce à leur musique alambiquée aux progressions spatiales, qui rappellent quelques grands noms du metal extrême prog comme Opeth ou Borknagar, mais avec un feeling mélodeath scandinave beaucoup plus prégnant.

Pour sa version live, on retrouve pendant ces (seulement) trois (longs) morceaux tout ce qui fait l’intérêt de la formation sur disque : on passe de manière très fluide de rythmiques massives à des envolées plus progressives, le tout parsemé de mélodies subtiles et très travaillées. Le seul point noir demeure l’absence de Jon Aldara au micro, qui constitue l’un des, si ce n’est le gros point fort du groupe, grâce à sa voix si unique et très versatile. Fort heureusement, son remplaçant, Morten Bering Bryld, s’en sort très bien. Non seulement pour reproduire les lignes vocales originelles quasiment à l’identique, mais aussi pour porter les compositions grâce à toute la solennité qui émane de ses parties de chant. Malgré un temps de jeu très court, Iotunn a montré que ses qualités studio étaient transposables à une expérience live, et qu’il demeure l’un des groupes les plus intéressants de cette nouvelle mouvance mélodeath progressive. En espérant que nous pourrons revoir très vite le groupe sur une tournée en tête d’affiche.

Setlist :
Mistland
Kinship Elegiac
The Tower of Comisc Nihility

 

Equilibrium

Varulven : On ne peut pas dire que le groupe suivant soit fait du même bois que Iotunn. Groupe phare de la tendance la plus « pouet pouet » du folk metal, Equilibrium est clairement le groupe le moins qualitatif de la soirée, et le plus à part de l’affiche. Après des premiers albums de folk metal épique intéressants, malgré leur côté kistch assumé, les Allemands se sont enfoncés toujours plus loin dans l’éthylisme débile avec l’album Armaggeddon et son atroce « Born to be Epic », dont le break de pipeau me traumatise toujours. Puis, c’est un virage à 180 degrés qui va s’opérer ensuite, le groupe adoptant un style metal moderne et metalcore qui n’aura aucun lien avec l’univers medieval fantasy des premiers albums. Autant dire que j’appréhende de revoir René Berthiaume et sa bande ce soir.

Et ça commence très mal dès l’ouverture sur l’horripilante « Born to be Epic », qui malgré sa refonte en version metal moderne, conserve son break au flutiau repris par une partie du public situé derrière moi. Absolument horrible. Mais alors que le concert se passe, ce n’est pas aussi affreux que je l’imaginais. Entendons-nous bien, je suis loin d’apprécier ce que j’entends, mais je suis plus dans une indifférence que dans le rejet. En effet, il n’y a pas grand-chose pour m’accrocher dans ce Equilibrium version 2025. Hormis quelques guitares leads pas inintéressantes, le classique « Blut im Auge » et les gros synthés qui m’ont fait me taper des barres tellement c’était digne du cheap des 80's, on retrouvait tout ce qui fait le metalcore le plus moderne : riffs énormes, mais d’une pauvreté inquiétante, approche musicale uniquement focalisée sur la puissance et la violence et une attitude pour montrer à quel point on est badass. Enfin, ce concert m’aura au moins donné l’occasion de lâcher quelques vannes à l’amie qui m’accompagnait. Qu’il semble désormais bien loin, le temps de Turis Fratyr et de Sagas...

Setlist :
Born to be Epic
Renegades - A Lost Generation
Bloodwood
Blut im Auge
Cerulean Skies
Shelter
Nexus

 

Soen

Michaël : Arrivé quelques minutes avant la fin du set d'Equilibrium, je fais malheureusement le même constat que l'ami VarulvenEquilibrium fait partie des groupes de la mouvance folk / death mélo des années 2005/2015 qui se sont perdus dans le metal festif et champagne, au point d'en arriver à se caricaturer. Un constat bien triste, presque pathétique, heureusement compensé par le fait de voir leur succéder sur les planches du Bataclan les talentueux Soen.

En 2023, Soen avait distillé son metal progressif avec brio à l'Elysée Montmartre. Le public parisien avait donc hâte de les revoir, pour continuer à s'imbiber de ce bedroom metal dont ils ont le secret. Et autant couper court à tout suspense : la bande à Joel Ekelöf a branché la machine à tubes et emporté tous ceux qui ont ouvert suffisamment leurs chakras.

En dépit d'une setlist de seulement 8 titres - contre 9 la veille, d'ailleurs, l'excellente « Deceiver » étant passée à la trappe -, Soen a fait ce qu'il fait de mieux. Faisant la part belle aux titres réussis d'un dernier album qui l'est tout autant (« Memorial », « Sincere », « Unbreakable » et « Violence »), Soen nous a emmené dans son univers avec talent. Porté par un Martin Lopez chirurgical, un Cody Ford dont les soli sont aussi propres que sa chemise ouverte jusqu'au nombril et un Lars Åhlund arborant des bacchantes aussi larges que son talent, le groupe a convaincu.

Alors certes, tout n'a pas été parfait. En faisant le choix de retenir plusieurs titres à tempo lents, Soen s'est un peu tiré une balle dans le pied. Pas simple en effet pour eux de se retrouver dans un lineup aussi hétérogène et metal ; les die hard fan de death mélo ont du être décontenancés par un metal aussi mielleux. On regrettera également un son pas terrible, dont le Bataclan est malheureusement souvent coupable. Enfin, on regrettera le départ du bassiste Oleksii Kobel qui était une vraie machine en live.

Mais ne boudons pas notre plaisir. Soen a ce petit truc en plus, et tous ceux qui pensent le contraire ont tort.

Setlist :
Sincere
Antagonist
Martyrs
Lascivious
Unbreakable
Memorial
Lotus
Violence

 

Dark Tranquillity

Michaël : Pour fêter les 20 ans de Character et les 30 de The Gallery, Dark Tranquillity a décidé de voir les choses en assez grand en concoctant une tournée où le groupe jouera 5 titres de chacun de ces albums qui ont façonné la scène et leur carrière. Recette classique des groupes qui ont de la bouteille, ce type de tournée est un évènement pour les fans de la première heure qui peuvent découvrir (en live) certains titres jamais joués, ou redécouvrir des vieilleries. Pour l'occasion, Dark Tranquillity a joué cinq de titres de The Gallery d'une traite - avec un décor reprenant l'artwork de l'album - avant d'enchainer à son tour cinq titres de Character dans les mêmes conditions.

Une organisation simple, efficace, propre. Surtout, un immense plaisir que d'écouter le titre « The Emptiness From Which I Fed », joué pour la première fois en live à l'occasion de cette tournée, ou bien encore des titres comme « The Dividing Line » et « My Negation » que je n'avais jamais entendus en live. Ce genre de tournée anniversaire a pour magie de nous inviter à nous replonger dans des albums qui ont marqué notre jeunesse mais qui nous ont parfois ensuite abandonné. Un immense moment de nostalgie, mâtiné de regrets d'avoir parfois raté certaines dates étant jeune !

Lors de leur dernier passage, le groupe nous avait offert 18 titres, contre seulement 15 ce soir. Le format de la tournée, avec 4 groupes, a surement conditionné cette réduction. Du coup, une fois les 10 titres des deux albums précités joués, le groupe a un peu mis le mode pilotage automatique avec un enchainement de grands classiques : « Not Nothing » (toujours aussi excellente) et « Unforgivable » issus du dernier opus, les indétronables « Misery's Crown » et « Terminus (Where Death is Most Alive) » issus de Fiction et, enfin, « Atoma », tiré de l'album homonyme.

Lorsque l'on voit un groupe aussi souvent sur scène, on finit toujours par espérer plus de prises de risques, d'autant plus avec une discographie aussi riche et variée. Pourquoi ne pas jouer un autre titre d'Atoma, par exemple ? Pourquoi ne pas jouer quelques autres titres plus rares, quitte à faire une tournée exceptionnelle ? Naturellement, je chipote ; cette date a encore été une masterclass des Suédois. J'en attendais toutefois peut-être un peu plus, compte tenu du contexte.

Quoi qu'il en soit, on ne peut réellement que regretter deux choses, au terme de cette prestation une nouvelle fois convaincante de Dark Tranquillity. Tout d'abord, un Bataclan qui fait des siennes avec un son - comme cela peut parfois être le cas - assez approximatif (sous-mixage du clavier et des effets sonores ; guitares manquant cruellement de puissance). Ensuite et surtout, même si l'on apprécie Mikael Stanne pour son talent, sa bonhommie et sa constance, les boot cut jeans qu'ils portent sont vraiment un crime contre l'humanité. Réagit, Mikael, réagit !

Pour le reste, Dark Tranquillity aura de nouveau démontré qu'il est l'un des meilleurs groupes de la scène en live. On en redemande, surtout qu'on me glisse dans l'oreillette qu'il y a des fans hardcore de Fiction (sorti en 2007) dans la rédaction qui ne diraient pas non à en écouter un peu plus lors d'une nouvelle tournée anniversaire...

Setlist :
Punish My Heaven
Edenspring
Lethe
The Emptiness From Which I Fed
The Dividing Line
The New Build
One Thought
Through Smudged Lenses
My Negation
Lost to Apathy
Not Nothing
Atoma
Unforgivable
Terminus (Where Death is Most Alive)
Misery's Crown

 

Remerciements à Garmonbozia, pour l'accréditation, et au Bataclan, pour l'accueil.

Photos