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vendredi 22 mai 2015

Desertfest London - Jour 2

Camden - Londres

Romain

Drogué alcoolique aimant les amplis qui vomissent des basses bien grasses.

Les oreilles bourdonnent moins, les cervicales ont pu se reposer, bien, on peut attaquer le deuxième jour. La journée d’aujourd’hui sera pour le moins différente des deux autres stylistiquement parlant. En effet, la programmation de l’Underworld a décidé de consacrer une partie de son affiche de ce samedi aux musiques expérimentales.

Mais d’abord, j’entame la journée avec un tour au Jazz Cafe, dont la prog de la journée est aussi dédiée à un style bien défini : le rock progressif.

 

LANDSKAP

Landskap sera donc le seul groupe de la scène prog que je verrai aujourd’hui et durant le festival. Le groupe marquera donc également mon seul passage au Jazz Cafe, qui bien que plutôt rempli pour cette heure hâtive voit ses premiers rangs entièrement désertés. Au moins cela permet une bonne visibilité de la scène. On a donc droit pour commencer la journée à un groupe de progressif dans la plus pure des traditions, bien qu’incorporant des éléments propres au rock psychédélique. Morceaux de 20 minutes alternant les changements de signature rythmique et de tonalité, compos très old-school… Oui, nous sommes presque de retour dans les années 1960. Le groupe n’hésite pas non plus à sortir des clous de temps en temps au niveau de ses arrangements. Et tant qu’à faire oldie, autant le faire jusque bout, le groupe a décidé d’ajouter un orgue Hammond à sa formation ! Malheureusement, ce dernier est difficilement audible, écrasé par le mix. Il faut tendre l’oreille pour le deviner, et lorsqu’on parvient à l’entendre, ses parties ne sont pas souvent très intéressantes. Bref, un concert placé sous le signe du vintage tout en ayant réussi à amener une touche de modernité dans ses compositions.

 

THE VINTAGE CARAVAN

Je me dirige ensuite, encore une fois pour l’unique fois de la journée, vers l’Electric Ballroom pour assister à la prestation de Vintage Caravan, l’une des formations que j’attendais particulièrement aujourd’hui. Et je peux dire que j’ai été plutôt déçu. Malgré la puissance qui aurait dû être présente pour accompagner les compositions du trio islandais, l’ensemble du concert fut très mou. Pourtant le groupe a  tout pour nos offrir un show énergique et est même plutôt actif sur scène. Mais l’alchimie n’opère pas entre le combo et le public, la musique manque de patate. Et ce ne sont pas les effets visuels qui vont parvenir à combler cela. Je reste néanmoins jusqu’à la fin du set dans l’espoir que le concert décolle. En vain.

 

SLY & THE FAMILY DRONE

Allez, le trip expérimental de la journée peut réellement débuter. Direction l’Underworld donc. Je m’apprête à entrer dans la salle avec un sentiment mêlant curiosité et appréhension après avoir vu quelques images live du groupe qui va suivre. Sentiment amplifié en entendant les premières personnes sortir quitter les lieux quelques minutes à peine après le début du set : « C’est du bruit ». Bon, c’est sûr que dans le genre atypique, on fait difficilement mieux. Prenez le nom d’un groupe de funk des années ’70, détournez-le légèrement, placez les musiciens au milieu de la salle et donc du public, virez tout ce qui est instrument hormis les percussions... Ça y est, vous avez déjà une première image qui se dessine. Un seul batteur ne quittant pas son poste et partageant certains éléments de son kit avec un de ses deux autres collègues qui, comme le dernier musicien, passe le plus clair de son temps à bidouiller des machines électroniques et à coller son micro un peu partout, provoquant larsens et autres bruits étranges. Il faut un temps pour entrer dans l’univers du trio, mais une fois qu’on est dedans c’est lourd. Très lourd. Expérimental mais lourd. Difficilement définissable vu l’absence de repère : ça ne ressemble en rien à ce qu’on connait, le principe de l’expérimental me direz-vous. On se rapproche d’ailleurs souvent de la musique concrète. Cependant, on sent que les « morceaux », car il semblait étrangement qu'il y en ait, ont l'air véritablement structurés. Moment fort du concert : l’un des « musiciens » distribue généreusement des baguettes et éléments de batterie dans le public, l’invitant à jouer avec lui. Puis monte torse-poil en haut de deux mètres d’amplis, caisse claire et baguette en main, avant de le passer à un autre membre du public (moi en l’occurrence) et de redescendre, puis monter sur un autre ampli, en slip cette fois-ci. Et puis ça finit en joyeux bordel. Heureusement que nous ne sommes pas en France, vu le sens du rythme de mes compatriotes, j’aurais été effrayé du résultat. Bref, une expérience musicale à vivre au moins une fois en live. Car c’est sûr, je doute que l’envie me prenne un jour de les écouter en studio. Mais ce concert reste l’un des moments forts du week-end. Vous vous demandiez ce qu’il se passerait si trois batteurs composaient ensemble ? Vous avez votre réponse.

Encore secoué par la « sonic explosion » à laquelle je viens d’assister, pour citer l’une des personnes m’accompagnant, j’ai juste le temps de voir une quinzaine de minutes du set de Jeremy Irons avant de retourner bouffer une dose d’expérimental à l’Underworld. Du coup je ne parviens pas du tout à entrer dans le concert, surtout qu’encore une fois au Black Heart, étant arrivé après le début, je suis au fond et je ne vois rien. Mais le son est très fort. Et il fait chaud. Bien, j’ai quand même eu le temps de prendre un enregistrement avant de repartir.

 

SHIT AND SHINE

Deux bonhommes derrière des synthétiseurs, un batteur, that’s it. On est encore une fois ce soir bien éloigné du stoner, puisque le set auquel je vais assister est bien plus orienté musique électronique. Quel type de musique électronique ? Je n’en ai pas la moindre idée, je ne suis pas assez calé dans le sujet. Tout ce que je peux vous dire est que c’est encore une fois bien expérimental. On a droit à du vocoder, des boîtes à rythme appuyant la batterie et rendant le beat encore plus massif, des sons de synthés analogiques bien perchés… Le tout avec deux musiciens n’ayant pas laissé apparaître leur visage du concert, en permanence caché derrière une épaisse masse de cheveux. Le batteur aurait d’ailleurs sans doute fait la même chose s’il n’était pas atteint d’une calvitie. Musicalement, c’est encore une fois très lourd tout en conservant un aspect assez planant. Comme pour le groupe ayant précédé à l'Underworld, je ne pense pas avoir envie de réécouter le trio en studio, mais dans ces conditions live, on passe encore une fois un bon moment sortant de l’ordinaire.

 

ANTHROPROPHH

La journée continue, et l’Underworld entame une progression vers des styles un peu plus écoutables par le plus grand monde, dérivant vers le drone et le sludge. Car oui, le drone est plus facilement écoutable que les formations que j’ai pu écouter plus tôt dans la journée. Mais on reste encore une fois dans l’étrange avec Anthroprophh et son nom impossible à écrire. Ce n’est pas devant une salle bien remplie que se produit le trio. Mais le groupe est là et assure son set de manière très calculée. Ainsi, on observe le frontman alterner habilement entre la guitare, le chant et l’orgue, ce dernier instrument conférant une belle part de psychédélisme au groupe lorsqu’il n’était pas utilisé pour créer des sons très expérimentaux. La basse fait alors très bien le travail des cordes à elle toute seule. C’est donc hyper énergique et rempli de basses fréquences. Mais le groupe ne se cantonne pas à ces compositions énervées et offre également quelques interludes beaucoup plus calmes, le bassiste s’équipant alors d’une contrebasse électrique. Les longues notes jouées à l’archet créent alors une ambiance qui aurait pu être reposante si les cordes de la guitare électrique n’étaient pas grattées de manière frénétique au même moment. On oscille donc au long du concert entre drone, ambient et noise.Concert atypique encore une fois ce samedi.

 

BRANT BJORK

Brant Bjork semblait être un concert attendu par de nombreux festivaliers. Cependant, préférant assister aux autres concerts ayant eu lieu au même moment, je n’étais pas présent devant l’ex-Kyuss et ex-Fu Manchu. Mais selon les dires de certains retrouvés autour de plusieurs bières après les concerts, ce n’était pas plus mal :
« De la merde. Trop mou, du rock de hippies. [En même temps on est au Desertfest]
- C’est pas de la merde mais en fait il ne se passe pas grand-chose, c’est assez plat.
- Au niveau des riffs à la guitare, c’était un petit peu redondant, on avait un petit peu des allitérations au niveau de la batterie qui étaient assez prononcées, mais au niveau du public ça suivait pas. Il n’y avait absolument aucune ambiance. Ce mec il fait la même chose depuis dix ans, il a toujours pas changé sa setlist, au niveau du renouveau on a que dalle. C’est assez décevant. Ça pourrait amener beaucoup de choses, mais ça va pas. Il manque quelque chose de fort, il faudrait vraiment qu’ils repartent sur des nouvelles idées parce que c’est plat. Ça pourrait donner tellement de choses, au niveau de la basse-batterie on est pas mal, mais il manque de l’imagination. »
Merci pour ce témoignage.

BONG

Lents riffs simplistes répétés pendant d’inlassables minutes. L’occasion de jouer uniquement deux pistes, toutes deux issues du dernier album en date Stoner Rock et de tenir le set pendant une heure. Une pause planante à l’Underworld arrivée au moment idéal de cette longue journée. Des basses lourdes et pesantes à souhait accompagnées de sitar et de voix au bord du spiritualisme. Du drone à l’état pur, hypnotisant et abrutissant. Le public présent semblait communier aux légers coups de baguettes se faisant attendre pendant plusieurs dizaines de minutes. Ici, tout est dans la progression. Comment mieux décrire l’atmosphère créée ce soir par les Anglais ? Pendant une heure, le temps semble s’être arrêté. Le show de Bong fut bon, très bon. Je me demandais alors pourquoi n’avoir placé le groupe en tête d’affiche, mais c’était avant de savoir ce qui allait m’attendre avec Obake.

 

OBAKE

Après un rappel à l’ordre sur la prononciation du groupe par d'autres festivaliers (O-Ba-Ké, le groupe tirant apparemment son nom d'un mot japonais), je foule des pieds pour la dernière fois un Underworld que j’aurais eu le temps d’observer sous tous les angles aujourd’hui. Obake se charge donc d’headliner la salle ce samedi. Et pour clôturer, nous avons droit au groupe le plus accessible de la journée, bien qu’encore une fois péniblement définissable. Comme les autres formations ayant précédé dans le même lieu, Obake sait créer une atmosphère lui étant propre. Ainsi, le quintet tout droit venu d’Italie vient nous jouer un sludge peu ordinaire : intégrant des instruments électroniques, le groupe alterne entre les moments ultra violents accompagnés de chant growlé et les passages à la limite de l’ambient, calmes et appuyés par des nappes au clavier. Les transitions entre ces différents passages se font alors en beauté, tantôt subitement, tantôt après de lentes progressions. Petit point noir : la voix n’étant pas toujours facilement audible. Mais on peut néanmoins observer que le chanteur parvient à la moduler aisément, rappelant d’ailleurs de temps à autres celle de Kirk Windstein. Comment définir ce que je viens de voir ? Du sludge psychédélique peut-être ? Toujours est-il que ce fut l’une des plus belles découvertes de ce festival, venant conclure en beauté cette deuxième journée.

 

Il semblerait qu’une bonne partie des festivaliers se soit donné rendez-vous au Black Heart pour cette fin de soirée. C’est donc dans une ambiance torride que j'assiste aux dernières minutes du show ultra-vitaminé d'Hang The Bastard. L'occasion de puiser un peu d'énergie avant l'after-party. Car puisqu’on est au Black Heart, autant en profiter dans la partie pub étant ce soir bien remplie. On prend quelques pintes puis on se rentre, autant abruti par les différentes substances ingérées que par la lourdeur des différents riffs avalés toutes la journée.

Merci à Jessica Lotti pour ses photos.

 

Lire le report du premier jour.