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Album

08 septembre 2022 - ZSK

Final Light

Final Light

LabelRed Creek Recordings
stylePostcore/Synthwave
formatAlbum
paysFrance / Suède
sortiejuin 2022
La note de
ZSK
8/10


ZSK

"On est tous le boomer de quelqu'un d'autre."

S’il y a bien une entité capable de faire naître des coopérations inédites et grandioses, c’est bien le festival néerlandais Roadburn. Et en termes de collaborations françaises, nous avons été un peu gâtés avec notamment les shows réunissant Regarde Les Hommes Tomber et Hangman’s Chair. Dans cette même galaxie - c’est même un peu toujours le lien que l’on retrouve à chaque fois - figure aussi James Kent, alias monsieur Perturbator. Et c’est encore de lui qu’il va être question. Mais cette fois-ci, la collaboration sera plus internationale. Le Roadburn a en effet commandé un projet réunissant James et Johannes Persson, chanteur de Cult Of Luna. Le tout était booké depuis 2020 mais le Covid a bien évidemment retardé la performance, qui n’a donc eu lieu qu’en avril dernier. Histoire de rattraper le temps perdu et de faire plaisir à tout le monde malgré tout, pour une fois cette collaboration ne sera pas une « exclusivité » du Roadburn. James et Johannes ont donc finalement décidé de sortir l’« album » sous le nom Final Light, via le label du Suédois, Red Creek. Si j’avoue ne pas avoir vérifié, je pense que ce doit être la première fois qu’un projet estampillé Roadburn sort sous forme d’album studio - car Final Light n’est pas qu’une simple captation Live. Nous voilà donc avec une coopération musicale qui s’annonçait intéressante et prometteuse dès le départ, sachant que les deux musiciens œuvrent dans des sphères forcément éloignées. Alors, le maestro de la Synthwave avec le maestro du Postcore, qu’est-ce que ça peut donner ?

Eh bien… du Postcore teinté de musique électronique à tendance Synthwave. Ou de la Synthwave teintée de musique à tendance Postcore, enfin peu importe l’ordre, disons malgré tout qu’il n’y aura pas de surprise. Si l’on creuse bien, je pense que l’on peut trouver quelques groupes qui ont déjà fait de la musique « Post » avec des touches électroniques, mais attention, on parle ici de deux grands pontes dans leurs styles. Final Light va donc nous donner exactement ce qu’il promettait. Mais on peut s’attendre à un résultat assez formidable. Final Light fait donc, basiquement, du mélange entre Perturbator et Cult Of Luna. Mais on sait que Perturbator est capable d’être versatile dans ses sphères électroniques, et Cult Of Luna reste le haut du panier du Postcore. Les 6 morceaux de Final Light se partagent donc entre nappes électroniques qui, mine de rien, posent une ambiance astrale qu’on n’a pas forcément déjà entendu chez Perturbator ; et des compos Postcore qui s’articulent entre grattes bien rêches et lourdes et les vocaux arrachés de Persson. Prévisible certes, mais la mixture est maîtrisée et la collusion entre les deux univers donne tout de même naissance à quelque chose d’assez monumental à première vue. L’ouverture sur "Nothing Will Bear Your Name" prend bien le temps de poser l’ambiance, avec un James Kent qui se situe plutôt dans la lignée de Lustful Sacraments, le côté goth/coldwave en moins et surtout une vibe futuriste en plus. Au milieu du morceau, c’est le versant Johannes Persson qui débarque presque sans crier gare et de manière ultra écrasante, pour un départ qui pose bien les deux mondes musicaux côte à côte pour mieux les faire se rencontrer ensuite.

Si les 6 morceaux de Final Light se basent un peu tous sur la même formule - compos Postcore bien pesantes, chant éraillé et lignes de synthé, l’équilibre changeant fréquemment - Final Light arrive rapidement à happer son auditoire avec quelques moments remarquables, comme par exemple ce passage électro-futuriste assez dépaysant au cœur de "In the Void". Les deux musiciens sont inspirés et l’alchimie, bien que simple, se fait assez rapidement, et même naturellement. Le morceau-titre en est d’ailleurs probablement le point culminant tant l’univers sonore fonctionne à chaque instant, tant les guitares et les synthés s’harmonisent ou se répondent, tant le chant est bien placé, tant les aérations arrivent à point nommé, tant certains passages tutoient même l’épique. A côté de ça, si un "It Came With the Water" n’a vraiment rien de surprenant, un "The Fall of A Giant" est capable de varier les plaisirs avec un paysage plus mélodique et cotonneux, que ce soit pour les guitares et les synthés. Il est vrai que Final Light est peut-être un peu redondant, d’autant que le chant de Johannes Persson ne variera pas d’un pouce tout du long et il faut s’y faire, surtout si vous n’êtes pas un amateur de Cult Of Luna à la base (ce qui est un peu mon cas je dois bien l’avouer). "Ruin to Decay" clôt l’aventure sur une progression assez atmosphérique qui laisse encore de la place à quelques moments électroniques gracieux avant d’arriver à un final assez dantesque. Il est vrai que Final Light ne donne pas plus que ce qu’il a promis, mais pour un projet vu (pour l’instant ?) comme un « one-shot » et presque sans prétention (Final Light n’a même pas de page dédiée sur les réseaux sociaux) le résultat en vaut largement la peine. Vous vouliez Cult Of Luna feat. Perturbator, ou l'inverse ? C’est ce que vous aurez. Mais encore une fois, vu le pedigree des deux musiciens, Final Light est un album de grande qualité, qui ne révolutionne rien au-delà de sa mixture attendue mais pose un univers déroutant et prenant. Alors merci le Roadburn pour avoir permis cette belle création sonore.

 

Tracklist de Final Light :

1. Nothing Will Bear Your Name (6:08)
2. In the Void (8:58)
3. It Came With the Water (7:17)
4. Final Light (8:33)
5. The Fall of A Giant (6:48)
6. Ruin to Decay (10:14)