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vendredi 8 avril 2016

Overkill @ MJC L'Antipode, Rennes

MJC L'Antipode - Rennes

Paul

Petit point rapide, je dois commencer par dire que j'ai raté le premier groupe (à cause du bus), mais que ce n'était pas très grave puisque detoute façon j'étais venu voir Overkill (comme tout le monde ou presque, vu le nombre de personnes qui étaient en train de fumer dans l'espace prévu à cet effet situé à l'entrée de la salle alors que One Machine finissait de jouer...).

Ma foi, la MJC L'Antipode est une belle petite sallounette, un peu perdue dans la ville (et plus encore dans le pays), ce qui donnait un côté incongru fort agréable à la présence de ces légendes vivantes du Thrash dans la capitale bretonne. J'ai trouvé qu'il y avait beaucoup de spectateurs, preuve que le succès d'un plateau Thrash de qualité en région est possible, et ce, même avec une date parisienne programmée le lendemain au Trabendo. Sapé comme jamais, même la sur-représentation clichesque de la vieille viande saoule puante à patches dans la fosse n'est que peu parvenue à altérer mon enthousiasme printanier.

Mais venons-en au concert en lui-même : comme d'hab', le son a été équilibré au fur et à mesure. Sans être vraiment brouillon au début du set pour autant, il s'est nettement amélioré au fil du temps et a permis au public de profiter confortablement de la suite ininterrompue de classiques jouée les musiciens.

La setlist était variée, pensée de manière à éviter la linéarité. Le jeu de lumières, au poil, mettait bien en valeur le fait que le set avait du relief (avec par exemple les effets sur l'intro de « Coma » ou celle de « Bare Bones », qui rappelle par ailleurs fortement le « Cremation » de King Diamond). Nous avons donc bien entendu eu droit à un paquet de morceaux rentre-dedans (il faut dire que c'est quand même pour se faire violemment botter l'arrière-train que l'on décide d'aller à un concert de Overkill en premier lieu...), mais aussi à quelques autres plus sophistiqués qui permettent heureusement de faire retomber un instant la tension. En tous cas, Overkill nous donne toujours de nouvelles bonnes raisons de secouer la tête. Même s'il y a eu comme un creux au milieu de la setlist, qui est légèrement retombée après une entrée en matière fracassante, c'est dans la dernière ligne droite que la bonne heure et demie de concert a connu son apogée, grâce un Bobby « Blitz » inarrêtable et un public de plus en plus chaud (sans revenir sur le paramètre son & lumière).

D'ailleurs, notons que ce sont les morceaux vraiment « drivés » par Blitz, comme « Feel the Fire », « Horrorscope » ou encore « Overkill », qui nous permettent de comprendre à quel point c'est un grand chanteur, capable de faire retentir sa voix unique sur différents registres Heavy/Thrash plus standards (et pas seulement dans celui des suraigus râpeux qu'il maîtrise à la perfection et dont il a fait sa marque de fabrique). Parenthèse : quand on apprend au même moment qu'Axl Rose a probablement été appréhendé pour remplacer Brian Johnson à la tête d'AC/DC, on s'estime alors en droit de se poser quelques questions...

Cependant, le schéma répétitif de présentation des morceaux (avec cette coupure – qui devient vite intempestive – avant la mise en place finale) et la quasi-absence de communication avec le public viennent gâter un peu mon plaisir. Le set a mis longtemps à démarrer à ce niveau-là, et je n'arrive pas à comprendre pourquoi, étant donné l'aptitude à l'entertainment dont a fait montre le chanteur à la fin de la soirée (il a en effet réussi, en envoyant une ultime décharge d'énergie, à « attraper » et faire participer la totalité du public présent dans la salle). Un effort supplémentaire fourni sur l'aspect affectif de la représentation leur permettrait de se mettre les spectateurs dans la poche beaucoup plus rapidement. À mon avis, l'impassibilité des musiciens (sur laquelle je reviendrai par la suite), couplée à leur démarche « Fuck you! » historique et les doigts d'honneur qui l'accompagnent, levés de manière aléatoire par certains membres du groupe à l'intention du public, n'est pas vraiment un vecteur de convivialité.

Pour ce qui est du groupe en lui-même, commençons par aborder ses points « faibles » (façon de parler...) sur scène. Tout d'abord, je dois dire que l'attitude et la technique du batteur m'ont dérangé. Inexpressif au possible (concentré, me direz-vous), ce gars-là est très bon en rythmique, puissant et endurant, mais dès qu'il s'agit de faire un break, accélère ou ralentit un peu à chaque fois (un comble, pour une musique qui nécessite une grande précision afin d'être correctement exécutée). Quant aux cassures de tempo si caractéristiques et si jouissives en version studio, c'est simple, il les craque à chaque fois et les autres musiciens doivent adapter leur jeu aux insuffisances du sien. Dommage ! Mais, sans avoir pu trouver plus d'informations sur le compte du gaillard (ni son nom, ni son histoire...), il me semble qu'il officiait ce soir-là en tant que remplaçant du batteur « officiel » Ron Lipnicki (pour une durée indéterminée ? Mystère...). J'aurais personnellement préféré voir un vrai pro derrière les fûts.

Globalement, le problème live de ce groupe, c'est que leur prestation scénique repose tout entière sur les épaules, menues mais solides, du frontman Bobby « Blitz ». Les autres, avec leurs ganaches d'ex-taulards camés à qui on ne la fait pas, sont en fin de compte assez transparents sur scène (mais font, à l'exception du batteur et soli compris, une performance musicale irréprochable). J'avais constaté le même souci avec Primal Fear à Paris en février dernier : c'était l'incroyable Ralf Scheepers qui attirait tous les regards, et à chaque fois qu'il quittait la scène (lors d'un long solo de guitare par exemple, ce que Blitz a également fait à de nombreuses reprises à Rennes), je ne savais plus où donner de la tête, désorienté que j'étais face au manque de charisme des autres membres du groupe (une fois dépassés le cuir et le métal qu'ils arboraient tous avec fierté). C'est un peu le « cheerleader effect » version poids lourds : la charme se dissipe une fois les rangs rompus. On veut plus d'AC-TION sur scène, c'est la signature de ceux qui sont plus grands encore (je pense ici évidemment à Iron Maiden, Judas Priest, Manowar et les autres...).

Mais parlons plutôt de ce diable de Blitz, la boule de nerfs extraordinaire. Les mots me manquent pour décrire cette bête de scène : à la fois sautillante, pleine de malice et habitée, impitoyable. Par le chien, quelle énergie ! Tel un animal blessé, on le voit constamment à l'affût, même lorsqu'il quitte la scène un temps pour aller s'abreuver, toujours prêt à sauter au cou de son pied de micro qu'il envoie régulièrement voltiger en l'air. Certes, son headbanging tendutraduit un âge avancé, mais tous les autres rouages de la machine semblent tourner à la perfection. Authentique père kangourou du Metal et seul homme digne de pratiquer l'art martial qui porte son nom, l'Éclair a quasiment fait le show à lui tout seul. Sidérant.

C'était la première fois que je voyais Overkill en concert, et je dois dire que je n'ai pas été déçu. Les Américains se sont montrés à la hauteur de leur réputation et n'ont été avares ni de leur temps ni de leur énergie avec le public rennais. Comme j'avais peur de louper leur passage au Hellfest 2016, un grand merci à Garmonbozia et à l'Antipode pour m'avoir permis de remédier à ce problème.

Une nouvelle fois, merci à Garmonbozia pour l'accréditation, ainsi qu'à Vivien et Valentin pour les bières partagées avant et après le concert.