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Children of Bodom : Retour sur une success story. 1/2

dimanche 9 mai 2010
U-Zine

U-zine.org, webzine musical metal actif entre 2004 et 2015. Fermé en 2015 suite à sa fusion avec 2Guys1TV, ses articles (chroniques, live-report, interview, dossiers, ...) sont désormais disponibles directement sur Horns Up via ce compte !

Il y a certains groupes qui divisent tout autant qu’ils fascinent. Children of Bodom en fait partie. En une dizaine d’années, les finlandais se sont imposés sur la scène européenne et plus largement au niveau international. Sous l’égide d’Alexi Laiho, guitariste vedette du groupe, les enfants de Bodom ont apporté un vent d’air frais sur le metal mélodique réussissant à innover et à impressionner là où tant de groupes du genre ont échoués. Alors que l’on va bientôt fêter les dix ans de « Follow The Reaper », album phare du groupe, U-zine a souhaité revenir sur l’histoire du groupe en offrant à ses lecteurs l’ensemble des chroniques du groupe et quelques éléments pour mieux comprendre les raisons d’un succès.

Sommaire de la première partie.

I. Quelques éléments historiques
II. Chroniques de Children of Bodom
III.Conclusion

I. Quelques éléments historiques

En 1993, Alexi Laiho et Jaska Raatikainen, amis d’enfance fondent le groupe Inhearted. Après quelques mouvements de line-up au cours des années suivantes, Henkka Seppälä, Alexander Kuoppala et enfin Janne Wirman rejoignent le groupe. Signant chez un petit label belge, le groupe va sortir deux démo qui vont rester globalement « confidentielles. Néanmoins, flairant le bon coup, Spinefarm Records leur propose un juteux contrat pour les jeunes Finlandais originaires d’Espoo et c’est ainsi que Something Wild va voir le jour. A cette occasion de cette première sortie nationale, le groupe va changer de nom pour Children of Bodom.

Pour ceux qui ne le sauraient pas encore, ce nom provient d’une sombre affaire de meurtre des années 60, le triple homicide du Lac Bodom. Dans cette affaire, quatre corps mutilés de jeunes gens furent retrouvés à même le sol près d'une tente de camping. Le groupe était composé de deux filles de 15 ans et de deux garçons, l'un de 18 ans, l'autre de 20 ans. Trois d'entre eux ont trépassé cette nuit-là : Maila Irmeli Björklund, Anja Tuulikki Mäki et Seppo Antero Boisman. Un seul d’entre eux, Nils Wilhelm Gustafsson, survécu mais atteint de graves séquelles physiques. Le meurtrier se serait servi d'une hache ou d'une gigantesque faux pour mettre fin à la vie de ses victimes dans une barbarie incommensurable. Le quatrième adolescent, Nils, amnésique passa même une année entière dans un asile psychiatrique.
La police finlandaise, après moult enquêtes ne trouva pas le meurtrier. Cependant, devant l’ampleur et la passion autour de cette histoire, un homme se présenta de lui même au commissariat pour se dénoncer. La police mit très vite un terme à la mascarade en obtenant les aveux contraires de l’homme s’étant accusé à tord. D’autres suspects furent interrogés, dont Nils, survivant à cette histoire sans pour autant y donner suite.
Cette affaire reste toujours un mystère et il n’en fallait pas plus pour les natifs d’Espoo pour trouver là assez de mystères et de violences comme source d’inspiration. Le groupe y avait trouvé un emblème (Faucheuse), un esprit (Mystère) et une vitrine publicitaire.

En 1998, le groupe signe chez Nuclear Blast. En effet, Children of Bodom, en pleine période d’expansion et de tournées se retrouve à faire la première partie d’un concert de Dimmu Borgir. L’occasion pour tous les observateurs de sentir le génie des finlandais et de leur proposer un contrat digne de ce nom. C’est ainsi qu’Hatebreeder voit le jour en 1990 et qui scelle définitivement l’intérêt grandissant pour le groupe. Comme on le verra lors des chroniques suivantes, Hatebreeder est une grande réussite qui a fait se propager le nom de COB à travers l’Europe mais également, comme souvent, en Asie. Et c’est la même année que lors d’une tournée avec In Flames et Sinergy le groupe enregistre l’album Tokyo Warhearts au Japon. Le groupe a toujours rappelé son amour pour le peuple japonais.

C’est sur ces dires que je vous propose de nous accompagner à continuer de retracer l’histoire du groupe et de cette success story qui n’est pas dénuée de sens.

Quelques précisions à ce sujet. Nous n’avons pas trouvé bon de retracer l’histoire personnelle de chaque membre, pléthore de sites web le font d’ores et déjà. En outre, je tiens à m’excuser de mon amour pour l’utilisation de néologismes. En tant qu’admirateur des écrits d’Emmanuel Joseph Sieyès, il a peut-être déteint sur moi.

II. Chroniques de Children of Bodom

Intéressons nous dès lors au coeur de ce dossier, à savoir l'ensemble des chroniques des albums de Children of Bodom. Par ordre chronologique évidemment.

Chronique de Something Wild :

1997, Espoo, Finlande. Cinq jeunes finlandais formant le groupe Inhearted viennent à bout d’un album dénommé Something Wild. Cet album, voué à une diffusion limitée par une petite maison de disque, va bénéficier de l’intérêt de Spinefarm Records qui va immédiatement signer le groupe. Inhearted changera dès lors d’appellation pour devenir « Children of Bodom ». Bodom provenant d’un fameux lac en Finlande qui fut, dans les années 60, le théâtre d’un triple meurtre jamais élucidé.

L’album démarre sur « Deadnight Warrior » et son fameux sample du film « Ca » de Stephen King. Dès les premières minutes, on constate à quel point la musique des finnois a évoluée à posteriori. Cet opus est sombre, et la qualification même de death mélodique peut être discutée. Les influences classiques sont évidentes dans « Red light in my eyes part II » dont les premiers arpèges ne sont que le premier thème de la 25e symphonie de Mozart et dont le refrain utilise les premières mesures du mouvement "Confutatis" du requiem en ré mineur de Mozart. Alexi Laiho emprunte dans ses compositions des éléments de Black metal en jouant notamment sur une voix bien plus criarde que sur les futurs opus et un accordage de guitare plus bas.

Cet album peut difficilement être classé et est l’un des précurseurs d’un metal qui se nourrit de diverses influences, black, heavy, mélodique, thrash… Bien qu’extrême, l’écoute est fluide et ne lasse en aucun cas, quand bien même le black metal vous rendrait catatonique.

Des couplets épiques de «The nail » aux mélodies endiablées de « Red light in my eyes part I », le cœur de l’album est vraiment prenant. « Lake Bodom » reste probablement la chanson la plus aboutie dont l’introduction reste une référence et l’une des seules qui continue à être jouée par les finlandais. L’accord guitare/clavier est fort maitrisé malgré le jeune âge à cette époque des musiciens (Alexi Laiho et Janne Wirman n’avait que 17 ans). Laiho commence alors tout doucement à se forger une réputation de « Guitar Hero » notamment par l’épique outro de « The Nail » dont les passages en Sweep picking auront raison des nerfs des guitaristes en herbe.

« Touch like an angel of death », achève un album court (seulement 36 minutes), mais intense, dont les compositions témoignent de l’immense talent des jeunes finlandais.

Le bémol est évidemment à mettre sur la production qui est de piètre qualité. Néanmoins, j’ai tendance à croire que c’est ce qui fait le charme de cet album. Loin d’un son édulcoré et « trop carré » d’un Are you Dead yet ?, Something Wild mérite plus que jamais son appellation. Comme une substance insaisissable, sauvage… un diamant brut.

Cet album reste certainement le plus confidentiel de Children of Bodom dans notre pays bien qu’il eut un succès immédiat en Finlande. Même de nos jours, peu sont ceux qui se sont penchés sur cet opus. Bien que très hétérogène, le death/black mélodique qu’il contient est d’une grande qualité, et préfigure à ce qui sera un des plus grands groupes de death mélodique de ces dix dernières années. Il suffit de constater le nombre de vocations de guitariste que le groupe a crée, ou le nombre de groupe qu’ils ont influencés (Norther…). Malheureusement, s’il est oublié par les récents fans de Children of Bodom, il l’est également par les membres du groupe, qui n’ont pas joués la plupart de ces chansons depuis plus de 7 ans.

A ne pas manquer : Red light in my eyes part I, Lake Bodom, The nail.

Note : 8/10

Chronique d’Hatebreeder :

Après un Something Wild de grande facture, les finlandais nous reviennent avec ce qui va s’avérer être le meilleur album de l’histoire du groupe jusque lors. Hatebreeder est enregistré en 1999 sous le label Nuclear Blast ayant flairé le bon coup dès 1997.

Côté décor, la recette n’a pas changée. La faucheuse est encore là, pour présager de notre sort après l’écoute de cet album. Côté musique, le groupe peut enfin jouir d’une production digne de ce nom et ratisse très large. Difficilement « étiquetable » et fort de nombreuses influences, dont le classique comme en témoigne le break de « Children of Bodom », Hatebreeder satisfait de l’adepte de musique extrême au fan de metal mélodique.

L’autre point fort de cet album réside dans les qualités techniques des membres. Cet album est la révélation d’Alexi « Wildchild » Laiho, comme il aime à se surnommer. Il ne cesse d’impressionner par sa rapidité, son aisance technique dans les notes les plus hautes, sans pour autant aller à l’encontre de toute musicalité et à vouloir « en faire trop ». L’intro de « Toward Dead ends » ou la dernière minute de « Black Widow » reste une torture pour tout apprenti guitariste. Cependant, le talent du groupe ne s’arrête pas à son charismatique leader. Janne Wirman au clavier donne une dimension inégalée à la musique de Bodom. Ces qualités de solistes notamment sur « Bed of Razors » ou « Downfall » vont jusque faire de l’ombre au petit lutin blond. Sans être éblouissants, mais apportant chacun leur pierre à l’édifice, Henkka Seppälä (basse), Jaska Raatikainen (Batterie) et Alexander Kuoppala (Rythmique) aide à l’accouchement d’un joyau « metallistique ».

L’album commence sur les chapeaux de roues avec "Warheart", témoignage de la capacité du groupe à allier agressivité, rapidité et virtuosité. Un début gorgé d’énergie puisque c’est "Silent Night Bodom Night" qui suit. Cette dernière, écrite par Kimberly Goss (chanteuse de Sinergy) est l’hymne de Children of Bodom depuis lors.
Côté paroles, le groupe prend le sujet de la mort et de la faucheuse (The « reaper » en anglais) très à cœur. « I have chosen darkness to be my guide. War is in my heart, death is by my side » ou bien encore « Warheart! Hate your fellow as yourself ». Plus réjouissante, la grandiose « Bed of razors » nous emmène dans un tumulte de joie de vivre : « The razor caressed your flesh and your arms turned red,I feel your vast desire ». Une entreprise de destruction en corrélation avec cette musique, punchy par moment, mélancolique par d’autres comme dans Hatebreeder, usant et abusant de gammes mineures. Néanmoins, on regrette que les paroles ne soient pas aussi recherchées que les partitions.

Agglutinement de divers riffs, manquant cruellement de cohérence, « Wrath Within » est le réel point faible de cet album. Néanmoins, son solo catchy nous fait vite oublier ce léger bémol.

"Downfall" achève ce remarquable album. Cette dernière est, et restera la meilleure chanson de Children of Bodom de par sa longue intro montant en puissance, ces refrains entrainant, son ambiance sombre et son solo brise poignet un tantinet démonstratif, avouons-le. Néanmoins, le tout forme la quintessence de leur musique.

Comment résumer cet album ? Children of Bodom frôle la perfection, nul besoin d’aligner les superlatifs, Hatebreeder est jusque là inégalé. Il suffit d’écouter le live « Tokyo Warhearts » pour s’en assurer. Chaque titre de cet album est original, a sa propre identité, et ne cède à aucun moment à une volonté de « remplissage ». Nous sommes loin de la période Are you Dead yet ?

A ne pas manquer : Silent Night Bodom Night, Warheart, Downfall, Bed of Razors, Black Widow…

Note : 9,5/10

Chronique de Tokyo Warhearts :

Alors que le groupe n’a donné la vie qu’à deux albums, Children of Bodom se lance dans la périlleuse entreprise de l’album live. Enregistré les 10 et 11 juillet 1999, soit tout juste quelques mois après la sortie d’Hatebreeder, les finlandais, qui ont toujours clamés leur amour du public japonais, nous permettent d’apprécier leurs réelles qualités.

C’est par une courte introduction au clavier tirée de la bande sonore de Miami Vice « Crockett’s thème » que l’album débute. C’est alors une montée en puissance avant que "Silent Night Bodom Night" vienne tout balayer et nous faire headbanger frénétiquement. Premier constat, l’enregistrement est bon et surtout le jeu des finlandais est très propre en live. Les fans de la première heure, qui peuvent jouer au « air guitar » sur tous les morceaux, se doivent de reconnaître à quel point Alexi Laiho et surtout Alexander Kuoppala reproduisent à merveille les partitions. S’accordant tout de même quelques improvisations par moment, on est loin du jeu parfois approximatif du « Chaos Ridden Years » qui a vu le jour en 2006.

S’en suivent, « Lake Bodom » et « Warheart » qui constituent le noyau dur de ce live. Le début de l’album est d’une remarquable qualité, ce qui est à mettre en corrélation avec un jeu de scène globalement pauvre comme on peut le voir sur de rares lives antérieurs aux années 2000. On sent un groupe motivé mais posé, qui est plus concentré sur la propreté de son jeu que sur la prestation scénique en elle même.

« Bed of razors », certainement l’une des meilleurs du groupe prend décidément toute son ampleur en live avec un solo très catchy qui semble emporter le suffrage des japonais. On assiste ensuite au début d’une grande tradition chez les enfants de Bodom à savoir le fameux "War of razors". Cela consiste en un échange, une guerre clavier/guitare de quelques minutes par laquelle le groupe souhaite mettre en exergue les qualités de musiciens du groupe. Alexi Laiho et Janne Warmen s’en donnent à cœur joie avant de repartir sur les chapeaux de roues par un « Deadnight Warrior » aussi efficace en live qu’en studio.

Le groupe maintient l’intensité avec les plus grands succès de son album Hatebreeder dont le titre éponyme, mais également « Toward Dead end » et « Downfall », cette dernière étant jouée à la perfection. Remarquable. « Touch like an angel of death » est la surprise de cet album, sa longue introduction est en effet une reprise d’une composition d’Hans Zimmer pour le film Rock. Un choix comme prémisse de l’amour du groupe pour les reprises.

Cependant, tout n’est pas si idyllique. Et si le jeu « live » du groupe est remarquable on peut tout d’abord regretter l’absence de certains titres phares comme « Children of Bodom » ou bien encore « Black Widow ». De plus, il faut se contenter de 45 minutes, ce qui est on ne peut plus frustrant tant la qualité de cette tournée fut grande. Le packaging vient néanmoins nous conforter dans le bon choix qu’est de posséder cet album, notamment en ce qui concerne la pochette nous rappelant les dessins animés japonais, et un certain Godzilla.

Malgré quelques problèmes techniques qui ont empêché la sortie d’un DVD en simultané avec cet album, Children of Bodom est venu confirmer à quel point il était un groupe talentueux. Cet album reste aujourd’hui une relique à conserver à tout prix tant la plupart des chansons alors jouées ne le seront peut être plus jamais par le groupe. Un « must-have ».

Note : 8/10

A ne pas rater : Silent Night Bodom Night, Bed of Razors, Downfall.

Chronique de Follow The Reaper :

Alors qu’Hatebreeder n’est présent dans les bacs que depuis un an et demi, Children of Bodom nous revient avec un troisième opus. La faucheuse, dans son nouvel univers bleu, nous apporte dix nouvelles chansons directement du nord. Et ce n’est pas sans excitation que nous nous sommes lancés dans l’écoute de cet album.

Aux premiers abords, les ingrédients sont les mêmes. Néanmoins force est de constater que Bodom s’essaye pour la première fois à du mid-tempo, que le son de guitare se modernise et que Janne ne s’est jamais autant amusé. En effet, le clavier est bien plus présent que sur les précédents opus. « Children of Decadence » ou bien encore « Mask of sanity » ouvre la voix à un metal mélodique vraiment entrainant. Alexi Laiho confirme à quel point il maitrise la six cordes notamment dans « Hate Me » avec un solo bref, mais tellement efficace. Sa voix quant à elle, n’est plus aussi assimilable à une voix de black. Il suffit de comparer "Hate Me !" à "Lake Bodom" pour constater le chemin parcouru en seulement trois ans.

Les quatre premières chansons constituent le noyau dur de l’album. « Follow the reaper » et son intro speed et agressive mais également « Bodom after midnight » dont le refrain scandé est catchy à souhait, viennent tout balayer sur leur passage. Les quarante minutes de l’album défilent à une vitesse déconcertante sans qu’il n’y ait un quelconque signe d’essoufflement. En guise de piqûre de rappel, "Everytime I die" et son mid-tempo a raison de nos cervicales.

Bodom n’a jamais autant réussi à maitriser ce flot incessant de notes et ne cesse de nous surprendre. La palme de la meilleure chanson revient à la brillantissime "Kissing the Shadows". Le duel clavier/guitare sur ce solo de près de deux minutes reste un modèle du genre. Un riff d’introduction épique, un Alexi Laiho qui ne se fait pas prier pour chanter sur les passages néoclassiques… Tout ce qui fait Children of Bodom y est présent. Ce cocktail détonnant de mélodie et de violence n’avait jusque lors jamais atteint de tels sommets.

Néanmoins, quelques aspects négatifs viennent ternir cet excellent bilan. En effet le niveau est hétérogène, des chansons comme ""Taste of my scythe" ou "Northern comfort" peinent à trouver leur place. De plus, et d’après les dires d’Alexi Laiho lui même, la production de Follow the reaper est à revoir. Et il est vrai que le mixage notamment sur Everytime I die n’est pas ce qui se fait de mieux d’autant plus que la basse est inexistante tout au long de l’album.

En guise de conclusion, Follow the reaper est un très bon album, surement le meilleur de Children of Bodom dans la décennie 2000. Malgré les quelques défauts précités, certaines chansons comme"Everytime I die" ou "Kissing the Shadows" resteront assurément à la postérité. Follow the reaper représente avec les deux précédents albums le meilleur de Bodom. Hate Crew Deathroll et ses compositions modernes, « américanisées » suis-je tenté de dire, sonneront le glas de l’hégémonie du groupe.

Un « must-have » comme disent les américains. Are you ready to follow the reaper ?

Chansons à retenir : Kissing the Shadows, Everytime I die, Hate me, Follow the reaper.

Note : 8,5/10

Chronique d’Hatecrew Deathroll :

C’est en 2003 que Children of Bodom nous revient avec son quatrième opus : HateCrew Deathroll. Après trois albums qui ont fait la renommée internationale du groupe, l’attente était grande envers les finlandais depuis la déception qu’avait procurée pour bon nombre de fans de Death mélodique la sortie de l’album Reroute to remain d’In Flames quelques mois plus tôt.

Cet album des finlandais commence sur les chapeaux de roues avec l’excellente « Needled 24/7 ». Cette chanson très catchy reste avec le recul celle qui se rapproche le plus de ce qu’était Children of Bodom dans sa période pré-HCDR. La suite de l’album révélant une évolution du groupe qui va sortir de ce classement de … quel genre au fait ? Il a toujours été difficile de classer le groupe dans une case de part ses nombreuses influences. Death Mélodique ? Power metal ? Hate Crew Deathroll va probablement rendre la classification d’autant plus difficile.

Premier constat, la musique des enfants de Bodom s’est fortement musclée. Si les solos sont toujours aussi heavy et travaillés (notamment celui de "Bodom Beach Terror"), les riffs de guitares sont bien plus lourds, et amène cet album sur la voie d’une musique thrash. « Chokehold » et ses riffs rapides où la double pédale est de rigueur, mais également par des vocals où tout le groupe s’en donne à cœur, joie oriente le groupe vers cette voie thrash. D’ailleurs, Laiho ne s’est jamais caché de son intérêt pour ce style et le punk (Il est membre du groupe punk/rock Kyllahullut).

Second constat, Bodom ne fait plus des passages néo classiques et des parties mélodiques son cheval de bataille. A l’exception de « Lil' Bloodred Ridin' Hood » et de la très heavy « Angel’s don’t kill », on reste un peu sur notre faim. D’autant plus que certains solos comme celui de « Triple Corpse Hammerblow » nous fait plus penser, par son manque d’inspiration, à un passage obligé pour le groupe que par un réel aboutissement de la composition. Finalement, Children of Bodom utilise à de nombreuses reprises des voix en chœur sur les refrains de « You’re better off Dead » ou « Hate Crew Deathroll » ce qui reste une innovation par rapport aux précédents opus.

S’il ne fallait en retenir qu’une, je choisirai sans vergogne « Angel’s don’t kill ». Ce n’est que la seconde fois que Children of Bodom s’essaye réellement à du mid tempo, et il le réussit d’une façon magistrale. Derrière une ryhthmique puissante, Laiho nous gratifie d’un des meilleurs solo de l’histoire du groupe. La chanson la plus complète de l’album. « Sixpounder » est également une des œuvres majeurs de cet opus. Les guitares y sont lourdes (et droppées), les interludes guitaristiques d’Alexi plutôt inspirées, et la déferlante de notes et d’énergie renverse quiconque s‘aventurant à l’écouter. A l’inverse, « Triple Corpse Hammerblow », « Lil' Bloodred Ridin' Hood » lassent très vite de part leur manque d’inspiration global. L’album est très hétérogène, de même que certaines chansons.

Côté production, rien n’est à revoir. Si l’on pouvait reprocher l’absence de la basse dans le mix des précédents albums, ici le cocktail est détonnant et tous les ingrédients sont dosés à la perfection. Côté artwork, la faucheuse est de retour dans un univers rouge, au sein de buildings. Rien d’original, la couleur rouge ayant déjà été à l’honneur pour Something Wild. On aurait espéré un effort supplémentaire. Les paroles quant à elle sont toujours aussi « bodomesque », à savoir traitant naïvement de la mort ou d’autres sujets passionnants. Néanmoins, si de telles paroles ne choquent pas dans un album sombre, cela peut parfois frôler le ridicule dans cet opus.

« Hatecrew deathroll » vient clôturer cet album de la plus belle des manières. Entrainante, catchy, cette chanson deviendra très vite l’hymne de Children of Bodom de part son refrain fédérateur que les finlandais aimeront faire scander par le public. « We’re the Hatecrew we stand and we won’t fall […]»

En guise de conclusion, Hatecrew Deathroll est un bon album qui marque un début d’évolution du groupe. En reléguant les claviers aux seconds rôles et par ces riffs thrash, lourds, Bodom innove réellement après 3 albums qui s’inscrivent dans une même lignée. Il est évident que les amateurs des longues envolées néo classiques présentes dans les trois précédents opus du groupe ne trouveront pas leur compte ici. Néanmoins, Bodom s’ouvre la voix d’un nouveau public qui aime cette musique tantôt lourde, tantôt rapide parsemées des solos heavy de Laiho. Comme un signe de cette orientation vers une musique plus thrash, la version finlandaise de l’album contient une reprise de « Silent scream » de Slayer.

Chansons à retenir : Sixpounder, Angel’s don’t kill, Needled 24/7.

Note : 7,5/10

Chronique d’Are you Dead yet ?

C’est en septembre 2005, après que Roope Latvala ait rejoint le groupe en remplacement d’Alexander Kuoppala que Children of Bodom donne naissance à Are you Dead yet ? son cinquième opus.

Cet album marque un tournant significatif dans la carrière des finlandais, bien qu’il y ait eu certains signes avant coureur dans Hate Crew Deathroll. Le son des finlandais est très « américanisé », très lourd, guitares droppées, mais surtout on sonne le glas des influences power metal et néo classique des précédents opus. Pour preuve les titres phares de l’album « In your face » et « Are you Dead yet ? » ont relégué le clavier au statut de vague accompagnement. « Punch me i bleed » consacre l’évolution du groupe vers un metal mid tempo, très sec, incisif… mais manquant cruellement d’inspiration. Heureusement que son solo est une petite merveille afin de relever le niveau. « If you want peace… prepare for war » , « Bastards of Bodom » et « Next in line » ne sont jamais parvenues à me procurer le moindre plaisir. L’écoute devenant même très vite fastidieuse et ennuyeuse.

Comme tout groupe qui se sent aller dans le mur, Bodom se sent obliger de nous gratifier d’un « We’re not gonna fall », une sorte de plaidoyer pour s’auto convaincre que la route prise est la bonne. Cependant, la chanson en question est une des meilleurs de l’album… les cris en chœur et le solo clavier/guitare sont parmi les grands moments mélodiques de l’album. Ils sont assez rares pour le souligner. « Living Dead beat », dont le son d’intro fait penser à un mauvais fichier MIDI possède néanmoins le meilleur solo de l’album et constitue une très bonne chanson d’ouverture de concert. D’ailleurs, force est de constater que cet album a un rendu « live » vraiment intéressant. In your face a tous eu raison de nos cervicales lors de leurs différents passages en France. Néanmoins, la recette ne prend pas sur cd.

"Trashed, Lost & Strungout" est de loin la chanson la plus aboutie de l’album. Thrashy, groovy, catchy et avec des vocals assez innovantes, Bodom trouve ici un second souffle dans cet album moribond. Et comme signe de l’évolution du groupe, c’est la seule à n’avoir pas été enregistrée dans le même studio, ayant fait l’objet d’un EP diffusé quelques mois auparavant.

De nombreuses interrogations nous viennent à l’esprit, mais celle qui prédomine est relative au clavier. Qu’as t-on fait de ces solos de clavier et de ces mélodies caractéristiques du son de Bodom ? La mayonnaise ne prend plus. Si auparavant, la qualité des compositions venait pallier à quelques égarements dans les paroles, désormais les « I don’t give a flying fuck motherfucker » répétés à outrance dans « In your face » ne font pas mouche pour les plus de 16 ans. De plus, si le concept de la faucheuse était en premier lieu innovant et créatif (une album – une couleur), on semble avoir fait le tour de la question par cette pochette ratée.

Are you Dead yet ? est un album bien moyen qui confirme tout le mal que l’on pense de l’évolution du groupe. Très hétérogène, reléguant le clavier et les rythmiques mélodiques au passé, cet opus nous laisse sur notre faim. Certes, et au risque de faire l’objet de critiques, je me place dans le groupe des « c’était mieux avant ». Je suis peut-être un vieux con, mais j’aime bien trop Children of Bodom pour écouter un tel album.

Chansons à retenir : Trashed Lost & Strungout, Living Dead Beat et le solo de Punch me I bleed.

Note 6/10

Chronique de Blooddrunk :

Dans le genre des groupes qui sortent un album pour sortir un album, Children Of Bodom en impose. Trois ans après la sortie de Are You Dead Yet ? et après pas mal de tournées dont une avec Slayer lors du Unholy 2006, les revoici avec un Blooddrunk qui ne ravira pas les vieux fans et sans doute pas non plus les fans de Are You Dead Yet ?.



En effet, on sait que Children Of Bodom depuis Hate Crew Deathroll est sur la pente descendante et glisse à chaque nouvelle sortie. Et ce n’est pas Blooddrunk qui va inverser les choses. En fait, Are You Dead Yet ?, s’il n’était pas exempt de tout reproche, avait au moins la décence de proposer des tubes qu’on chantait ou qui au moins nous faisait remuer (le titre éponyme, « In Your Face » , « Living Dead Beat » étaient tout de même bien fédérateurs). Sur Blooddrunk, la tendance n’est pas au tube mais à sortir le plus de titres anecdotiques en un seul album. Entre les titres rapides déjà entendus cent fois (« Hellbounds On My Trail » me faisant penser à « Needled 24/7 ») et la ballade « Banned From Heaven » qui rappellent étrangement un « Angels Don’t Kill », on n’est pas du tout gâté. Je veux bien qu’on ne fasse pas des chats avec des chiens mais quand même, il y a un seuil à ne pas dépasser.



Alors comment expliquer ce nouvel échec ? 
Sans doute, est-ce du à une lassitude ou un désintérêt des musiciens qui sont en majorité là depuis le début du groupe en 1997. Janne Warman, pour ne citer que lui, a perdu sa créativité et son originalité. Il suffit d’écouter ses soli en duo avec Alexi qui n’ont pas de fils conducteurs comme dans le passé à l’exception de « Tie My Rope » et « Roadkill Morning » qui, eux, sont percutants. 
Alexi est aussi décevant au niveau vocal et ne cherche plus la profondeur qu’il avait dans le temps mais se contente de brailler le plus vite possible en suivant le rythme effréné de sa guitare. Justement ses riffs sont du même acabit : pas inspirés, sans panaches, prévisibles et pas accrocheurs malgré quelques mélodies sympas sans plus sur « Lobodomy ».


Assurément, le plus mauvais album du Hate Crew depuis le début de leur carrière dans lequel rien ne marque l’auditeur (le refrain de « Roadkill Morning » est le seul à rester en tête) à part cette bonne production qui en met plein la vue.
Le groupe s’auto-parodie tout au long des trente six minutes que compte Blooddrunk et devrait réfléchir sagement à s’arrêter ou à se remettre en question une bonne fois pour toute plutôt que de continuer à sortir des albums aussi anecdotiques que celui-ci.

Note : 4.5 / 10

Orion.

Chronique de Skeletons in the closet

Sortie fin septembre 2009, Skeletons in the Closet est une compilation regroupant toutes les reprises du groupe. Certaines étant connues de longue date comme « Oops I dit it again », le groupe a néanmoins gratifié ses fans de 17 chansons. Les albums de reprises sont plutôt rares sur le marché. Généralement on retrouve toujours une ou deux covers en « bonus track » à la fin des albums, mais l’entreprise des finnois est tout de même assez originale. Originale certes, mais pas surprenante. Il suffit de suivre l’histoire du groupe pour comprendre à quel point les influences sont diverses et à quel point reprendre de bons vieux hits semblent être une de leur spécialité.

La plupart des chansons sont des reprises des groupes majeurs de la scène metal des années 70 et 80 comme Scorpions, Anthrax, Slayer ou King Diamond. Si les bonnes vieilles reprises comme « Oops I dit it again » (Britney Spears), « Helion » (W.A.S.P) ou « Bed of Nails » (Alice Cooper) sont toujours plaisantes à écouter, force est de constater qu’il n’en va pas de même pour la plupart des nouvelles reprises. « War Inside My head », reprise de Suicidal Tendencies n’est pas un modèle du genre, malgré son côté heavy indéniable. Une reprise qui n’apporte rien de nouveau n’a pas tellement de sens. Seule la fraiche et drôle « Lookin out’ my back door » qui ouvre cet album est une réelle et bonne surprise.

Une majeure partie de l’album reste tout de même très faible. Sans à dire que les choix de chansons sont éclectiques, Alexi Laiho a tout de même choisi des chansons intéressantes mais les reprises sont souvent des échecs. La reprise de « Aces High » d’Iron Maiden par exemple a un côté groove certain qui l’emporte sur la mélodie et la puissance de la chanson. Les reprises de « Somebody put something into my drink » et « Hell is for Children » sont d’une mollesse incroyable, bien que l’idée d’une reprise fut brillante. L’opus de Bodom est d’un niveau très hétérogène. On bascule du génial au médiocre entre deux titres.

Cet album permet en outre d’apprécier les variations de chant dont Laiho peut faire preuve par rapport à Children of Bodom. Il donne une énergie certaine à des chansons originales qui en manquent parfois elles-mêmes. Néanmoins, on constate aussi à quel point il est incapable de chanter juste et de suivre des notes.

Côté instruments, quelques passages au clavier ont été rajoutés comme sur « War Inside my head » et quelques soli, si simple à reconnaître ont été ajoutés et donnent une puissance certaine aux reprises comme sur « Rebel yell ».

Comme on pouvait s’en douter, avec de tels acolytes alcooliques, quelques pointes d’humour ont été insérées. Dans la chanson « Waiting » enregistrée par King diamond, Alexi Laiho fait une petite imitation de King Diamond plutôt réussie ! Inutile de présenter par ailleurs la reprise de Britney Spears qui a déjà fait le tour d’internet…

Après avoir écouté toutes ces reprises, on constate tout de même que le groupe donne un sacré coup de jeune à ces musiques. Cela sonne définitivement 80s mais avec ce son si moderne et un Alexi laiho plus punchy que jamais. En ce qui concerne l’artwork, il est plutôt réussi et fait de cet album un must-have pour les fans du groupe. Dans la pochette de l’album, le groupe a poussé le vice a faire des photos de groupes déguisés en ceux qu’ils couvrent, et notamment une photo de Laiho orné du maquillage d’Alice Cooper !
Pour résumer, c’est un album frais, plaisant à écouter dans la globalité et qui, sans être exceptionnel, a surtout le mérite de nous faire replonger dans certains classiques !

A ne pas rater « No Commands », « Bed of nails » et « Hellion ».

Note : 6,5/10

III.Conclusion

Si Bodom a connu un succès si rapide, c’est qu’il est le fruit d’un cocktail détonnant. Mené par Alexi Laiho, souvent qualifié de « guitar héro » pour ses qualités « guitaristiques » (désolé du néologisme), le groupe a toujours proposé une musique innovante qui mêle à la perfection mélodies et influences black. S’il divise aujourd’hui, c’est surtout par le désamour pour l’engouement populaire et de part l’évolution du groupe qui le coupe de ses premiers fans.

Lorsqu’un sujet a été créé sur le forum officiel du groupe concernant le nouvel album pour lequel le groupe va entrer en studio cet été, un finlandais a écrit « OLD BODOM -VS- NEW BODOM TOPIC #382475252 ». Et c’est là en effet la source de toutes les discussions actuelles autour du groupe. Comme on l’a vu par le biais de ces chroniques la musique de Children of Bodom a largement évoluée au fil des années. En se modernisant, la musique des finlandais est devenue bien plus thrash, bien plus puissante et à vrai dire bien plus commune. Ce qui faisait Children of Bodom lors des premiers albums a petit à petit disparu.

Certaines chansons de Blooddrunk me font parfois penser à du Lamb of God avec quelques soli, on est loin de ce metal froid, sec et si inspiré des premiers jours. L’évolution de la musique qui s’est accompagnée d’un rajeunissement massif des fans a aboutit à ce désenchantement envers le groupe de bon nombre de fans. Après avoir entendu « Alexi Laiho c’est le meilleur guitariste du Monde, il a inventé des accords » au Hellfest en 2007, je me rappelle d’une gamine de 16 ans, appareillée, qui avait ramené un dictionnaire français-finlandais afin (je la cite) d’ « envoyer un papier sur scène pour Alexi lui disant « fais-moi l’amour » » lors du concert du groupe en février 2009 à Paris. Appelons cela… l’effet Slipknot.

Cependant, les chroniques de ce dossier se veulent objectives. Si les notes des albums récents du groupe sont basses ce n’est en aucun cas pour sanctionner une quelconque évolution qui ferait frémir de vieux amateurs bornés, mais il s’agit de constater de façon bien plus objective que le groupe cède à la facilité et produit une musique qui perd en originalité. D’autres groupes ont, à mon sens, réussi à évoluer (Je pense notamment à In Flames – bien que le sujet fasse débat lui aussi).

Néanmoins, ce groupe qui a apporté un vent d’air frais dans un genre parfois redondant reste une valeur sure en concert et demeure un des modèles du genre. Si les commentaires sont acerbes, les yeux pétillent toujours à l’idée de les voir en concert.
Récemment, Henkka Blacksmith a annoncé sur le site du groupe que le groupe allait entrer en studio durant l’été pour un album prévu courant 2011. Après une longue tournée à travers l’Europe, puis les Etats Unis et enfin l’Asie, le groupe va enfin pouvoir se reposer et se remettre à composer de quoi nous faire vibrer. On peut toujours espérer, non ?

Merci à tous pour votre lecture.

Michaël.