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Album

09 décembre 2014 - U-Zine

Sonata Arctica

Stones Grow her Name

LabelNuclear Blast
styleMetal Mélodique
formatAlbum
paysFinlande
sortiemai 2012
La note de
U-Zine
7.5/10


U-Zine

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Il arriva le jour où il fallut redescendre…

L’enfance loin derrière, l’adolescence passé, la maturité de l’âge adulte avait ouvert un nombre incalculables de portes toutes plus resplendissantes et scintillantes les unes que les autres. Le temps des rêves, merveilleux, succéda à des jours plus sombres mais tout autant magistraux et enchanteurs, rejetant sans même se retourner les carcans caricaturaux exigeants à cette entité d’utiliser des formules stéréotypées.

Comment aller plus haut ? La réponse prendra peut-être une nouvelle forme…nommée "Stones Grow Her Name".
Attendu désormais de façon bien différente qu’à la sortie de "Reckoning Night", Sonata Arctica, qui a brillé dans l’expérimentation et le ralentissement effectif de son tempo, n’est désormais plus un groupe traditionnel de power metal. Ambitieux et en marge des autres groupes, les finlandais sont sur le point d’écrire une page fondamentale de leur histoire.

La découverte de l’artwork et de la tracklist insinua un retour aux sources manifeste, entre une pochette évoquant "The Boy who Wanted to Be a Real Puppet" mais aussi les parties II et III de "Wildfire", autant de compositions apparaissant sur le "Reckoning Night" initiateur d’un certain changement. Le speed allait-il être de retour pour délaisser la facette progressive de la sonate arctique ?
Le début de l’album avec "Only the Broken Hearts (Make you Beautiful)" n’appuie pas cette thèse puisque le groupe s’y montre comme nous l’avions laissé, centré autour des mélodies vocales de Tony Kakko, chantant dans son registre plus grave et ponctuant les lignes vocales d’une multitudes de nappes, de chœurs ou d’intervention. Les claviers sont forcément mis en valeur, au détriment d’une guitare d’Elias Viljanen réduite à sa plus simple expression, hormis sur un court mais superbe solo dans son style, proche de ce que "Deathaura" nous avait montré. Courte, la composition se termine pourtant sur un festival vocal, à la richesse incroyable et à l’onirisme superbe, cela étant dû en grande partie aux envolées uniques de son leader.

Mais "Shitload of Money" fait germer les graines du doute. Très épuré, le riff se veut plus hard et dur, tandis que les claviers s’effacent quelque peu pour laisser encore plus de place au chant. Des couplets très mélodiques servent de tremplin à un refrain amené par les cris devenus une marque de fabrique du groupe. Néanmoins, un certain manque d’impact du refrain, difficilement mémorisable de prime abord, laisse l’auditeur perplexe. Difficile de savoir où le groupe va…notamment lorsqu’une trompette, dans un instant fugace de légère folie, intervient comme dans une fanfare. Elias s’y montre d’ailleurs très à l’aise puisqu’il délivre un solo remarquable de technique et de dextérité, laissant à Henrik la fin de l’exercice mais dans une tonalité peu adaptée à son style.

Le doute…
Une chose est certaine, les premières écoutes sont autant décevantes qu’incompréhensibles. Difficile de savoir exactement ce que Tony Kakko, compositeur intégral, a réellement voulu dire avec "Stones Grow Her Name". Difficile d’entrer complètement dans un disque clairement inférieur, du moins aux premières écoutes, à ses deux prédécesseurs. Certes, Sonata Arctica expérimente mais il se montre tatillon, parfois maladroit et manque bien souvent de la maitrise et de la grâce qu’il l’avait accompagné précédemment. La connexion se fait rapidement avec l’évolution actuelle d’Edguy, ayant lui aussi peu à peu baisser le tempo pour arriver dans une expression plus épurée, simple mais à la recherche constante de nouveaux sons, Tony et Tobias Sammet ayant finalement une personnalité très proche. "Stones Grow Her Name" sera-t-il le "Tinnitus Sanctus" des finlandais, synonyme d’un certain désamour malgré une qualité intrinsèque toujours remarquable, mais moins impressionnante qu’avant ?

"Somewhere Close to You" démontre que Sonata reste en recherche d’innovations puisque ce riff simple mais puissant et cru, servant de support à une composition une nouvelle fois délaissée des claviers enchanteurs (même s’ils restent très audibles, mais en retrait). Le refrain est magnifiquement interprété, Tony y est rugueux et agressif, la rythmique imperturbable et rauque. Le pont surprend et impressionne grâce à des sons qu’Henrik sort de son clavier proprement impressionnants et massifs. Cela forme un contraste des plus intéressants et beaux avec le single "I have the Right", où on retrouve le Sonata d’"Unia", celui étant féérique et rêveur, léger et onirique. Le refrain ne quitte plus la tête de celui qui l’écoute et les claviers forment l’épine dorsale de la composition, à la manière d’un "Paid in Full". Fragile et impérial au micro, Tony prouve qu’il fait sans contexte partie des meilleurs chanteurs de sa génération, capable de délivrer et faire passer un flot d’émotions à fleur de peau. "The Day" reste dans une optique similaire, dans la continuité mais avec une surprise cette fois inexistante, malgré une ligne de claviers sublime et un pont uniquement vocal absolument incroyable de beauté sur lequel la guitare acoustique prend le relai pour un merveilleux moment d’émotions.

A l’instar de "Fly with the Black Swan", "Cinderblox" se place en péripétie perturbante expérimentant des instruments aussi exotiques que le banjo jouant une rythmique country totalement délurée. Tony interprète excellemment le cowboy barjo et semble prêt à monter un cheval en plein far west. Paradoxalement, c’est ici qu’on trouvera l’un des soli les plus heavy et techniques de l’album, Elias s’en donnant à cœur joie.
Les deux "Wildfire" ferment le bal avec chacun sept et huit minutes au compteur, et une ambition largement revue à la hausse. Bien plus agressifs et grandiloquents, les deux morceaux affichent des velléités toutes différentes. "Wildfire II : One with the Mountain", d’une introduction saltimbanque place un riff agressif suivi par la caisse claire de Tommy Portimo. Les influences sont multiples, Tony alterne son chant et module sa voix de façon impressionnante, bien qu’on reste déçu de l’utilisation maladroite de certaines nappes de claviers, complètement kitsch. Néanmoins, la composition se veut très progressive et changeante, d’atmosphères mélancoliques à des contrées plus belliqueuses et guerrières, bien que ces dernières soient plus clairsemées. Sa suite continue dans une ambiance plus speed mélodique comme nous ne l’avions pas entendu depuis un paquet de temps chez les finlandais. D’un beat légèrement cybernétique déboule une rythmique foudroyante qui évolue sur huit minutes, alternant le calme avec la tempête. Tony subjugue encore et toujours grâce à son aisance peu commune dans tous les registres, portant et animant de toute sa personnalité la composition et l’album en général. Le plaisir de retrouver une rythmique réellement rapide et énergique, sur des plans vocaux formidables (parfois proche de Queen ou Blind Guardian) et des chœurs en tous genres font de cet ultime morceau le meilleur, le plus surprenant et inattendu, nous balandant tout au long de son déroulement, sans savoir de quoi sera faite la seconde suivante.

Une sensation mitigée que ces deux "Wildfire" ne pourra cependant pas complètement ôtée. La poésie et l’alchimie sensationnelle de "The Days of Grays" n’a pas été réitérée ("Alone in Heaven" sentait énormément le remplissage tout de même). On ne remettra en aucun cas la qualité de composition, d’interprétation et sonore de cet album, mais simplement un ton général parfois plus banal, abandonné du génie des deux dernières œuvres finlandaises. Ce dernier n’y apparait que sporadiquement, à des endroits précis, sans être constant. Parfois maladroit, mais toujours convainquant, frisant le génie mais ne s’en abreuvant pas, "Stones Grow Her Name" reste en deçà de ce que l’on pouvait attendre.
Peut-être la prochaine fois…

1. Only the Broken Hearts (Make You Beautiful)
2. Shitload of Money
3. Losing My Insanity
4. Somewhere Close to You
5. I Have A Right
6. Alone in Heaven
7. The Day
8. Cinderblox
9. Don't Be Mean
10. Wildfire II
11. Wildfire III

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