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Album

09 décembre 2014 - U-Zine

Gorod

Process Of A New Decline

LabelListenable Records / Willowtip Records
styleDeath technique
formatAlbum
paysFrance
sortiejuin 2009
La note de
U-Zine
8/10


U-Zine

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Il a fallu plus de dix ans et la sortie de deux albums d’un très haut niveau pour en arriver là où en est Gorod à present : un groupe reconnu en son pays pour être une des meilleures formations de death metal, si ce n’est la seule en France à proposer une recette à la fois aussi technique et groovy. Et ce « Process Of A New Decline » est l’album qui doit permettre aux Bordelais de passer un cap : premier album distribué par un gros label français (Listenable Records), premier disque également à susciter une vraie attente chez une partie des metalleux français. L’album à ne pas louper, pour enfin avoir la reconnaissance méritée, pour enfoncer le clou.

Pour ce faire, les Gorod ont gardé les mêmes dispositions que pour « Leading Vision », à savoir un album enregistré et mixé par Mathieu Pascal (également l’un des guitaristes du groupe) au Bud Records Studio, et masterisé par Scott Hull au Visceral Sound Studio. Même répartition des tâches également au sein du groupe : Mathieu s’est une fois de plus chargé de composer l’album et de créer l’artwork évoquant comme d’habitude un univers de science-fiction ; Guillaume (chant) et Ben (basse) écrivant les lyrics. On repart donc sur les bases bien solides du précédent album, d’autant qu’au premier abord, la recette musicale n’a pas changé d’un poil.
Pas de fioritures ! Dès les premières notes, on se prend dans la tronche une déferlante technique, et quelques instants suffisent pour comprendre à qui on a affaire. « Disavow Your God » reprend ce que Gorod sait faire de mieux, impossible de ne pas reconnaître la patte des Bordelais ! Et accessoirement, débute l’album à toute berzingue, genre « coucou, t’as 3 secondes pour préparer ta nuque, on va pas t’attendre ! ». On peut aisément imaginer les doigts de la talentueuse paire de guitaristes défiler à vitesse grand V sur leur manche, idem pour Ben le bassiste toujours aussi bon. Petit changement de line-up à signaler derrière les fûts, puisque Sandrine a quitté le groupe laissant la place à Samuel Santiago (Ex-Zubrowska). Et ce dernier assure bien comme il faut, s’adaptant parfaitement à la musique de Gorod !

Les premiers morceaux défilent à toute vitesse, et les passages cultes s’enchaînent également : le break lent et mélodique en double tapping (un classique chez Gorod) sur « Disavow Your God », autre break jazzy au groove imparable sur « Programmers Of Decline », ou encore le refrain aux riffs épiques du plus brutal « Gilded Cage »… Difficile de dénombrer ces moments de pure satisfaction à l’écoute de « Process Of A New Decline », tellement ils sont nombreux ! Les changements de rythme sont toujours bien amenés, et on sent qu’un cap a été passé par le groupe dans l’écriture des morceaux. Ces derniers semblent moins éparpillés, de manière à ce qu’on reconnaisse des mélodies fortes, des « refrains » qui viennent au rappel plusieurs fois dans un même morceau. On sentait déjà cette progression sur « Leading Vision » d’ailleurs, sauf que pour ce troisième opus les zicos ont également passé un nouveau cap techniquement parlant (ceux qui ont écouté les albums précédents risquent de hurler « quoi ?? c’est possible ça ?? ») !

De ce fait, le parti-pris de cet album est de laisser plus de place à la technicité, rapprochant Gorod du phénomène allemand Obscura (la comparaison est d’autant plus facile que « Cosmogenesis » est sorti quelques mois auparavant) voire Cynic, puisque sans pour autant empiéter sur les platebandes du groupe Américain, « Process Of A New Decline » se veut un poil moins efficace que ses prédécesseurs, pour ajouter un côté légèrement progressif à la musique du groupe. Ce choix, si je le regrette un peu, permet aux Bordelais de renouveler de fort belle manière leur musique par divers samples (dont parfois des chœurs féminins, l’ajout de quelques lignes de voix claire ou robotisée (ça reste marginal comme sur « The Path » ou « Watershed »), et de beaucoup de passages plus mélancoliques, plus doux, permettant à la basse de se montrer plus encore qu’à l’accoutumée.

Par exemple, le début de « Watershed » me fait penser un peu à « Mineral » d’Atheist. Le parallèle à faire entre les deux groupes est intéressant d’ailleurs, car s’ils n’officient pas exactement dans le même style (c’est pas la même époque non plus, et Gorod reste toujours plus rentre-dedans que les Floridiens), on peut dire que « Neurotripsicks » et « Leading Vision » sont les « Piece Of Time » et « Unquestionable Question » de Gorod (toutes proportions gardées bien sûr). « Process Of A New Decline » étant son « Elements » dans le sens où il évolue vers un chemin un poil plus technique et mélodique au détriment de l’efficacité, sans pour autant être moins bon que ses prédécesseurs.
Rassurez-vous cependant, les Bordelais n’ont pas laissé leur groove à la maison ! J’ai parlé de « Programmers Of Decline » en début de chronique, mais un morceau comme « Splinters Of Life » est également là pour nous le rappeler ! Après de nombreuses écoutes, je trouve néanmoins ce troisième album un peu lassant, du fait de la surenchère au niveau technique. C’est d’autant plus dommage que sur les deux premiers albums, l’équilibre était parfait !

Ce petit virement n’est pas la seule chose que j’ai à reprocher à ce skeud. Si la production est nickel concernant les guitares et la basse qu’on entend parfaitement, elle l’est en revanche moins pour la batterie, qui sonne trop synthétique. Honnêtement, c’est dérangeant uniquement si on écoute l’album via des écouteurs, mais ça fait tiquer sur certains passages groovy. Là où ça m’embête un peu plus, c’est concernant la voix de Guillaume. Si on écoute l’album à part, on peut juste dire qu’elle manque un peu de relief, hormis les passages où elle est doublée, voire lorsque le vocaliste use de ses vocaux les plus gutturaux (le début de « Gilded Cage »). Mais il suffit de réécouter un morceau de « Neurotripsicks » (voire même « Leading Vision », mais c’est moins choquant) après ce disque pour constater la différence, ce côté un peu crade, « brute épaisse » dans la voix que j’aimais tant dans le premier opus de Gorod a été fortement atténué (certains qui n’aimaient pas diront que c’est une qualité, certes) !

Cela dit, ces petits changements n’empêchent pas de prendre son pied à l’écoute de ce cru 2009 qui devrait confirmer Gorod comme le principal atout d’une scène qui n’a que trop peu de représentants en France. Autant être clair : « Process Of A New Decline » n’a pas la fluidité de ses aînés. Aucune de ses compositions n’a le putain de groove d’un « Smoked Skull », « Beware Of Tramps » voire même « Here Die Your Gods ». Mais renouveler l’exploit de proposer un troisième album aussi parfait était impossible, et le groupe Bordelais a trouvé le moyen de renouveler sa recette tout en pondant un album d’une qualité rare. Rien que pour ça, chapeau messieurs.


1. Disavow Your God
2. Programmers of Decline
3. Diverted Logic
4. Rebirth of Senses
5. The Path
6. Splinters of Life
7. Guilty of Dispersal
8. Gilded Cage
9. A Common Hope
10. Watershed
11. Almighty Murderer

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