
"On est tous le boomer de quelqu'un d'autre."
Le contexte d’une sortie musicale est toujours important. Et ce même à l’échelle des mois d’une année, et donc des saisons. C’est sûr que la pluie et les 5°C d’un mois de novembre seront plus propices à écouter du doom-death bien tristounet, tandis qu’on ne va pas écouter de la musique qui fait encore plus suer quand on tape les 35°C début juillet. Alors je sais que beaucoup ne se posent pas la question et peuvent écouter le(s) même(s) styles toute l’année, mais quand même. Les dates de sortie et les divers délais après le passage en studio et au mixage peuvent dépendre de beaucoup de paramètres mais je pose déjà une question : quelle mouche a piqué Volumes pour choisir de sortir un album comme Mirror Touch au plein milieu du mois de décembre, quand on doit prendre rendez-vous pour remonter les pneus-neige plutôt que se demander si on doit rouler capote ouverte ? Bon, je veux bien admettre que dans l’hémisphère Sud, actuellement c’est l’été, d’accord. Mais comment apprécier un morceau comme « California » alors qu’on gratte le givre sur le pare-brise en moufles le matin ? Je vous pose la question. Et c’est même de la récidive vu que Happier? il y a quatre ans était sorti… en plein mois de novembre. Au moins, No Sleep (2014) et Different Animals (2017) étaient eux sortis respectivement en juin et juillet, saison plus propice à ce djent bien frais. Car oui, Volumes nous fait clairement une musique d’été, lui qui n’a cessé d’adoucir son djent/metalcore de base bien musclé mais qui s’est mis à faire de plus en plus de câlins. Dès No Sleep, avant d’atteindre un point de non-retour sur Different Animals puis, donc, de faire une légère machine arrière avec Happier?. Plus chill, plus pop, mais bien équilibré et maîtrisé, le djent coolos de Volumes finit par bien marcher. On est donc reparti pour un tour, mais encore un plein mois de décembre, histoire de nous faire languir sur la prochaine saison où l’on peut exhiber notre collection de maillots de foot.
Miracle : même si quatre ans se sont écoulés depuis Happier?, il n’y a eu aucun cataclysme de line-up chez Volumes. Michael Barr a juste perdu ses caractéristiques cheveux longs de metalleux, qui ne se retrouvent maintenant guère que chez le batteur Nick Ursich, mais qu’importe. Volumes n’a en revanche toujours pas… de guitariste, ce qui est quand même un cas quasiment unique dans le « metal » hormis les expérimentations à double basse style Necromantia, d’autant plus que dans le djent il y a généralement encore plus de cordes à toucher. Même ma promo ne mentionne pas de guitariste de session et donc seul Raad Soudani semble gratter quelque chose, au moins sa basse, comme depuis la formation de Volumes en 2009. On reprend donc les mêmes et on recommence, premier degré car la stabilité du quatuor assure aussi une stabilité musicale. Soit ce qu’on connaît chez Volumes depuis No Sleep, un djent/metalcore quand même bien poppy, multipliant les chants clairs à la fraîche. Avec une production qui s’améliore encore vu que Mirror Touch sera de loin leur album le mieux sonorisé de leur carrière, faisant bien ressortir les riffs de gratte, si il y a bien quelqu’un qui les joue. Quoique… Mirror Touch, avec sa pochette où l’on croirait apercevoir le logo des Illuminados de Resident Evil 4, démarre de façon très méchante. Avec un « Sidewinder » qui est juste une grosse mandale djent des familles, ultra lourde et sans compromis ; puis un délirant et efficace « Bottom Dollar » encore plus crunchy et dissonant qui se permet même des sonorités trap, expérimentation bien plus réussie que les écarts ratés de Different Animals. Donc Volumes redevient le groupe de tough guy ultime ? Non, il nous refait son gimmick de commencer son album par deux morceaux bien percutants sans chant clair avant d’embrayer sur un premier gros tube pop, et c’est ainsi que « Bad Habit » succède à « Erased » et « Bend », et Volumes reprend son chemin vers le potentiel haut du billboard comme si de rien n’était.
Et non, avec « Bad Habit » Volumes ne va pas chasser sur les terres de Ed Sheeran mais plutôt d’un Bad Omens, avec un djent/metalcore moderne tout de même très sucré, même si ce n’est pas surprenant de la part d’un groupe qui avait sorti ne serait-ce qu’un « Bend » auparavant. Mais Volumes est quand même inspiré et doué dans le domaine, il faut bien l’avouer, avec toujours une parfaite alchimie entre les chants de Myke Terry et Michael Barr, et les bougres ont même progressé au chant depuis quatre ans, ayant même la main moins lourde sur le vocoder. Mirror Touch ne sera donc pas avare en bonbons et va même aller encore plus loin que Happier? sur ce point, en restant à la limite du « too much » qui avait été allègrement franchie par Different Animals. « California » y va franco sur la coolitude entraînante, restant encore drivé par les riffs djent ; tandis que des « Adrenaline » ou « Worth It » eux penchent largement plus vers de la vraie pop ou au moins du metalcore très FM, sans atteindre les pistes pop/r’n’b de Bad Omens ni surtout les atermoiements du dernier et frauduleux album de Sleep Token. Volumes arrive donc à rester un groupe de djent/metalcore en toutes circonstances, même si certains morceaux de Mirror Touch pourraient passer sur RTL2 sans sourciller, et même en journée pas juste dans l’émission de Tonton Zégut. « Stitch » est à ce titre très équilibré et réussi, avec des riffs mordants et un panel de chants très maîtrisé et pertinent. « Dream » en serait même un modèle parfait de djent percutant marié à de la pop-metal très solaire. Un « S.O.A.P. » reste de toute façon aussi un bon modèle de djent lourd contrasté par des vocaux clairs planants, et Volumes n’oublie pas ses racines en bouclant la boucle de Mirror Touch avec « Suffer On », monstre de djent remuant dès les premiers riffs et où les zincs de Black Sheep Wall viennent gueuler un peu partout. Happier? était déjà très rafraîchissant, Mirror Touch capitalise bien dessus même s’il y a zéro nouveauté hormis un étonnant « Bottom Dollar » pas du tout représentatif du djent très popisant de cet album. Il faudra donc aimer le genre, parce que même pour un amateur de metalcore à la frontière du pur mainstream, ce n’est pas évident d’encaisser ne serait-ce qu’un « Worth It ». On appréciera les compos et les nouveaux tubes, pour un album plus condensé et homogène que Happier? mais qui ne le dépasse pas vraiment, et qui restera réservé aux derniers aficionados du djent le plus mélo et accessible. Mirror Touch est donc un peu l’album de l’été 2025 avec un gros retard, mais ma foi… on mettra le chauffage à fond et on s’imaginera rouler entre des palmiers au son de « California » jusqu’au nouvel an.
Tracklist de Mirror Touch :
1. Sidewinder (4:00)
2. Bottom Dollar (3:22)
3. Bad Habit (3:25)
4. California (3:44)
5. Adrenaline (3:35)
6. Stitch (3:29)
7. S.O.A.P. (3:26)
8. Dream (3:55)
9. Worth It (4:45)
10. Suffer On (5:29)

















