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jeudi 12 juin 2025

Ultime espoir du heavy français, Animalize ? Entretien fleuve avec Niels !

Niels

Malice

L'autre belge de la rédac'. Passé par Spirit of Metal et Shoot Me Again.

"Ultime espoir de l'avenir, Verminateur"... Si vous avez écouté l'incroyable deuxième album d'Animalize, il y a de fortes chances pour que ce refrain, ou l'un des neuf autres en réalité, vous colle à la peau. Les Lyonnais ont sorti une compilation de tubes totalement folle, qu'on ne peut que vous enjoindre de toute urgence à aller découvrir si ce n'est pas encore fait. De notre côté, on ne pouvait pas faire sans en parler avec Niels, sympathique tête pensante d'Animalize, pour une bonne heure d'interview !  

Hello Niels. Verminateur est sorti ce 23 mai et je vais commencer par te féliciter : depuis la sortie, chaque jour, j'ai deux ou trois refrains différents en tête. C'est beaucoup plus « catchy » : est-ce que c'est quelque chose qui est voulu, conscient ?

Oui, oui, carrément. Quand tu composes, tu le ressens vraiment, tu te dis : « Mais c'est pas possible, les gens vont l'avoir en tête », car même nous, en composant, ça nous restait. Tu te dis qu'il y a quand même des chances pour que ce soit aussi le cas du public. C'est assez viscéral. Sur l'album précédent, c'était moins l'intention. Verminateur est aussi bien plus dans le ressenti, il y a des émotions plus profondes. L'idée, c'était de se faire confiance et de penser au naturel plutôt qu'à la technique.

Quand on va ainsi chercher le refrain qui accroche, est-ce qu'il y a une peur d'en faire un peu trop ? Même si quand on en fait autant dans ses visuels et que le nom du groupe est tiré d'un album de Kiss, difficile de parler d'en faire « trop »...

Alors, attention ! Animalize n'est pas tiré de l'album de Kiss du même nom (rires). Quand j'ai trouvé le nom en 2013-2014, je jouais énormément à Mortal Kombat sur PS1 et l'une des « Fatalities » s'appelait « Animality ». Désolé pour les fans de Kiss ! Mais donc, la peur d'en faire trop... Je pense justement qu'on n'en fait jamais trop. Dans le heavy, on se doit d'être catchy, donc limite « pop » au niveau des refrains, mais on se doit aussi en même temps d'être virtuose, avec des prouesses vocales ou guitaristiques... Le style demande certains clichés typiques de l'époque. Alors, c'est quoi « en faire trop » ? Là, en studio, on ne s'est pas privés pour mettre du synthé, des doublages de voix, plutôt que de rester sur le fantasme de la démo crado avec plein de réverb'... Le heavy a besoin de se renouveler et d'avancer, tout en restant fidèle au style. On a mis les moyens pour la production, pour un groupe « émergent » dit old school.

Par rapport au premier album, qui était un peu plus « speed », un peu plus à la Enforcer, on sent que tu changes de références, d'influences assumées...

Mon problème sur Meat We're Made Of, c'est que j'ai voulu aller trop vite. J'ai voulu surfer sur le succès du premier EP, qui avait vraiment bien marché, et gardé un côté spontané... Du coup, j'ai laissé passer plein de trucs au niveau de la composition et de l'enregistrement. J'ai retenu la leçon et ruminé ça pendant trois ans, ce qui donne Verminateur aujourd'hui, pour lequel je n'ai quasiment aucun regret. Le pourcentage de satisfaction est de quasiment 100 % compte tenu des moyens qu'on a.

Tu parles à la première personne : est-ce que c'est assez clair que c'est toi qui te charge de la majeure partie des choses dans le groupe, du coup ?

Ouais, je fais absolument tout. On a essayé de le cacher mais dans les crédits à la fin des clips ou sur l'album, il est toujours écrit « Musique et paroles composées par Niels Bang », donc à un moment, les gens comprennent.

Niels Bang qui est donc ton vrai nom, et pas un pseudonyme !

Absolument, c'est mon vrai nom. Tout le monde me dit que c'est le nom parfait pour faire du heavy metal. « T'as un nom de rock star » (rires) ! On verra (rires).

Revenons sur Meat We're Made Of : à l'époque, on était sur du « fifty-cinquante », avec du chant en français et en anglais. C'est un choix surprenant, qui peut perdre le public sur les intentions ou l'identité du groupe, non ?

Il y a certainement un peu de ça. Je pense que je n'étais pas assez mûr pour bien m'exprimer en anglais. Verminateur m'a permis d'être en paix avec mes émotions et mieux les retranscrire. Aujourd'hui, si on refait un album 50-50, ce sera un autre challenge. On tenait à sortir un album à 100 % en français, pour « l'honneur » du heavy français (sourire), mais refaire des titres en anglais, c'est totalement possible. C'est deux vibes totalement différentes, alors pourquoi s'en passer ?

Vous avez eu l'occasion de jouer à l'étranger, notamment en Allemagne. Est-ce que tu sens une connexion différente, déjà de la part de ton public français à tes titres en français, et ensuite vis-à-vis du public étranger qui ne comprend pas le français ?

À l'étranger, ils adorent aussi les morceaux en français, mais c'est du 50-50, ils adorent autant les titres en anglais comme « Pigs from Outer Space » ou « Eternal Second ». En France, on sent quand même que le français a une place à part. Je dois aussi dire que les morceaux en français sonnaient directement plus « honnêtes » : c'est bien plus facile d'exprimer des émotions dans sa langue natale qu'en anglais... C'est même pas tant l'écriture que l'interprétation de chaque mot. Sur « Au Jugement de Soi », je dis à un moment « tu persistes et faiblis », et le producteur me dit d'harmoniser « faiblis » vers le bas plutôt que vers le haut car ça colle mieux à l'intention du mot... Elle est là, la grosse subtilité, alors qu'en anglais, tu as bien plus de distance à ce niveau et tu ne prends pas de temps à réfléchir à l'interprétation de presque chaque mot.

C'est aussi se mettre à nu devant ton public car tu sais que les Français vont prêter attention aux textes...

Complètement, c'est très difficile de se mettre « à nu » comme ça et c'est pour ça que beaucoup préfèrent l'anglais. C'est la langue internationale, et en plus, tu te dis que si tu n'écris pas trop bien, c'est pas si grave (rires). Je trouve que la langue française est plus riche, plus compliquée, il faut quand même avoir un certain vocabulaire et trouver non seulement des rimes mais aussi une symétrie dans la construction de tes phrases...

D'autant qu'il y a quand même un décalage entre l'image que le groupe peut renvoyer, assez second degré, très fun sur scène, avec des pochettes assez kitsch, et tes textes qui sont ici assez personnels, loin d'être des vannes.

C'est pas la première fois qu'on nous fait la remarque. Ce n'est pas forcément intentionnel, mais disons qu'en live, on est quand même là pour se marrer. Je n'ai pas super envie de faire des speechs en disant que « le prochain morceau parle des gens qui meurent et qui nous manquent »... On est là pour prendre du plaisir et c'est une musique énergique, pas pour regarder ses chaussures. Mais c'est aussi très important d'écrire des choses profondes, parce que si tu n'écris que des morceaux pour faire la teuf, comment est-ce que tu vas toucher celui qui écoute ta musique tout seul chez lui ? Il faut qu'il puisse se rattacher à une émotion que tu vas partager avec lui. Si tu n'écris que sur du « sex, drugs & rock'n roll », bon, c'est marrant, mais il faut aussi autre chose. On aime aussi jouer sur ce contraste : Animalize, c'est premier ou second degré ? Hé bien, ça peut être les deux. On est ni un groupe humoristique, ni un groupe qui fait la gueule quand il signe du merch' (rires). Il faut une part de sérieux, mais on a envie de faire la teuf en live. Le contraste est important.

J'ai déjà entendu dire que pour des francophones, le heavy en français sonnait un peu trop « générique de mangas ». C'est une comparaison qui tient la route, pour toi ? Voire une influence ?

(il hésite) Le truc, c'est que ces génériques ont été faits dans les années 80. Et la mode à l'époque, c'était le heavy metal ; ensuite, pour l'exploitation française, ils ont écrit des textes en français. Donc qu'est-ce que ça donne ? Du heavy metal en français (rires). C'est en quelque sorte lié, mais je ne peux pas dire que ce soit une influence, même si j'aime bien certains de ces génériques. Si ça rappelle ça aux gens, c'est bon signe, car ça veut dire qu'on retranscrit une certaine vibe qui me paraît cohérente avec notre musique.

Et est-ce que tu parviens à te sentir touché par une musique dont tu ne comprends pas un mot ? En japonais, en russe, n'importe quelle langue que tu ne parles pas du tout.

Oh oui, totalement. Même en anglais, au final, j'ai été au Muskelrock ce week-end et je ne connaissais pas chaque parole d'Ambush ou d'Enforcer. Mais tu te fais happer par le truc, et tu passes un bon moment sans te focaliser sur les paroles au-delà du refrain de temps à autre...

Mais ça, c'est en live. Et sur album ?

Je crois que c'est le même ressenti. Je mets du temps avant d'aller voir les lyrics des morceaux ; je vais écouter un morceau plein de fois et quand j'en ai marre de chanter du yaourt, je vais lire le texte. Ce qui compte, c'est l'intention que met le chanteur, pas nécessairement son texte. Quand on sent qu'il y croit, quand il ressent ce qu'il fait... Il suffit de voir les Allemands essayer de chanter Sortilège : ils ne comprennent pas un mot mais l'interprétation de Zouille est tellement forte qu'ils y croient !

Et votre label, Dying Victims, où vous êtes depuis le premier album donc, un album 100 % en français ne leur posait pas problème ?

Non, on n'a ressenti aucune réticence. Il faut se rendre compte que depuis la première vague de heavy français, tout le monde cite les ADX, Sortilège, même Satan Jokers. Je dis toujours que loin derrière l'anglais, dans le heavy, la deuxième langue est le français. Plus que le japonais, pour moi. La plupart des groupes de heavy japonais chantent au moins partiellement en anglais. En Allemagne, il n'y a presque aucun groupe qui chante en allemand. Finalement, en termes de reconnaissance, le français est bon deuxième, je crois.

On peut aussi dire qu'il y a de sacrés « lyricistes » en France – c'est un point fort. Les textes de Sortilège, ADX, et plus récemment Tentation ou Herzel, sont très bien écrits la plupart du temps. De ton côté, tu as une formation en poésie ou en écriture ?

Non, pas du tout. J'aime bien utiliser la métaphore, j'aime les rimes symétriques. Mais comme je le disais, le plus important dans tout ça, c'est de croire en ce que tu chantes. Ils peuvent écrire ce qu'ils veulent, tant que l'intention y est... L'un des meilleurs exemples, c'est Patrice, le chanteur de Tentation. Faut dire ce qui est : ce n'est pas le meilleur chanteur de la scène, mais il croit tellement en ses textes que les gens sont touchés. Ça m'a beaucoup inspiré. Lui et le chanteur de Herzel ont cette façon de vivre leurs textes, de crever l'écran : c'est ce qui fait que ces groupes marchent !

Ça fait un peu penser à Jean-Jacques Goldman, qui à l'époque tentait aussi des notes très hautes, parfois pas très justes... mais ça n'est pas ce qui compte.

Oui, sur ses premiers albums, tu sens qu'il voulait faire du hard rock, il monte vachement haut (rires). Pourquoi aller aussi haut (rires) ? Mais je suis totalement d'accord, il pense tous ses textes et c'est ça qui fait que ça marche.

La chanson française, d'ailleurs, c'est une influence, tu en écoutes ? Il y a notamment cet « easter egg » sur « Reviens-moi », où vous reprenez la mélodie de « L'Été indien » (rires).

Oui, c'est le clin d'œil pour nos fans français (rires). Je ne pense pas que la chanson française soit une influence consciente, mais à partir du moment où en effet, j'en écoute et que je chante en français sur Verminateur, l'influence est là d'une façon ou d'une autre. Disons que j'ai mis plus l'accent sur les textes et la mélodie du chant, et les morceaux sont globalement plus lents. Ça laisse plus de place pour exprimer les émotions que si tu chantes sur des morceaux à du 200 BPM. Après, il y a des groupes que j'écoute, comme La Femme, L'Impératrice, dont certains textes me touchent vraiment. Beaucoup de Gold, de JJ Goldman, un peu de Francis Cabrel sans être vraiment fan. J'aime aussi beaucoup Jeanne Mas (rires) ! Tout ça m'influence certainement mais c'est quand j'écoute du heavy metal que je « prends des notes » mentales de manière consciente.

La transition est toute trouvée. Sur « Envahisseurs », j'ai eu l'impression d'un riffing plus sombre, plus occulte, qui m'a rappelé un peu du King Diamond...

Je ne dirais pas ça, non, même si bien sûr, il y a toujours par-ci par-là ces influences classiques... Mais sur ce titre, l'influence n°1, c'est Malédiction, le groupe de heavy français du début des années 2000. De manière générale, l'album est un hommage à ADX, Vulcain, Venin, Warning...

Côté textes, le heavy français a aussi une tendance à parler d'Histoire, comme ADX ou Hürlement, de traditions comme Herzel, de mythologie comme Sortilège... ce n'est pas le cas d'Animalize.

Très bonne remarque ! J'adore en écouter, je suis à fond quand j'entends un titre comme « La chute des titans » de Tentation ou « Le dernier des 12 travaux d'Hercule » de Sortilège... mais je suis incapable d'écrire sur ce genre de trucs. Je n'ai pas cette fibre, j'ai besoin d'écrire des trucs plus personnels. J'ai besoin de « cracher » des sentiments. La plupart des morceaux écrits sur Verminateur l'ont été parce que je n'allais pas bien. Il y a un côté cathartique pour moi. Même sur des titres d'apparence plus superficiels comme « Armées de la nuit » ou « Verminateur » ont été faits avec une émotion assez profonde derrière.

Je suis peut-être à côté, mais j'avais même la sensation qu'un titre comme « Envahisseurs » évoquait le racisme de manière détournée...

(il éclate de rire) Ah putain, c'est fou parce que notre nouveau batteur m'a dit la même chose. « Ah bon ?! Tu penses vraiment ça ? ». Absolument pas, du tout. L'histoire d'« Envahisseurs », c'est que j'étais dans une période où je n'allais pas vraiment bien. Et je suis parti de l'idée que cette déprime, c'était une entité, de petits êtres à l'intérieur de moi qui me la procuraient. C'est une pure fiction évidemment, inspirée aussi de films comme The Thing dont je suis très fan. Mais le racisme, non, du tout. Je n'ai pas besoin d'écrire là-dessus.

Je t'ai entendu dire chez Heavy Ma Vie que deux de tes albums préférés, ce sont les deux premiers Trust. Mais l'écriture engagée n'est pas pour toi, donc ?

Non, pareil, je ne ressens pas le besoin d'écrire là-dessus. Peut-être un jour. Je n'y crois pas assez, ça sonnerait malhonnête. Pourtant, Trust, c'est mon groupe préféré. J'ai toujours été très touché par l'interprétation de Bernie : pourquoi il gueule comme ça (rires) ? Il crache sa haine, sa volonté de changer le monde, et ça me touche. Un artiste doit imposer sa vision, à son échelle, et y faire adhérer les gens. Il faut imposer quelque chose, sinon, en tant qu'artiste, tu n'amènes rien. C'est bien beau d'amener de la technique : oui, tu fais de la scène, tu chantes haut, tu fais des solos... mais il faut plus que ça, les gens ont besoin de plus dans ta musique. Ils veulent voir des gens qui pensent ce qu'ils chantent et jouent, et moi en tout cas, quand je suis fan d'un artiste, j'ai besoin de ressentir ça.

Vous avez été un peu « adoubés » dans la scène heavy en étant invités à vous produire au Keep It True Rising l'année passée. Je dis adoubé car on sait qu'Oliver Weinsheimer, l'organisateur, n'invite que des groupes qu'il apprécie... Raconte-nous ça !

C'était quelque chose, oui. On a eu la pression car en gros, à Vauréal, en janvier 2024, on faisait la première partie de Sortilège, et une demi-heure avant, Olivier Spitzer, le guitariste de Sortilège, nous annonce que Oliver du KIT est dans la salle. Grosse panique (rires) ! « Pourquoi tu nous dis ça maintenant, on est pas prêts (rires) ! ».  Au final, on a très peu discuté sur le coup, il était assez impassible. Puis, le lundi d'après, on reçoit un mail nous suggérant de faire le « warm-up » du KIT Rising. Coup de chance, le premier groupe du vendredi a annulé et on a été « upgradés » pour jouer au « vrai » festival et même pas juste au « warm-up ».

Ce qui m'a marqué là-bas, c'est le fait que même pour les premiers groupes, il y a déjà du monde. Ce sont des passionnés, ils savent pourquoi ils sont là...

Je ne savais pas du tout à quoi m'attendre, n'ayant jamais été au Keep It True, et quand je vois les vidéos de notre concert, en effet, tout le monde est là ou presque. T'as l'impression que c'est salle pleine dès midi.

Cela dit, le KIT, qu'on adore évidemment, c'est un magnifique festival... mais ce concept, est-ce qu'il ne risque pas d'atteindre ses limites un jour ? On sent que les reformations « one-off » sont parfois compliquées, que la NWOTHM tourne un peu en boucle parfois... Le revival et le old-school à tout prix a ses limites, selon toi ?

Je crois que ça y est, ces limites sont atteintes maintenant, depuis un ou deux ans. La vague est terminée. C'est pas une mauvaise chose, parce qu'il faut que l'effet de mode du revival se termine pour qu'il ne reste que ceux qui méritent de rester. Tout le monde se dira : « Merde, on est en fin de vague, qu'est-ce qu'on va faire pour passer la tête hors de l'eau ? ». Quels risques prendre ? Faire de meilleurs lives, tenter plus... Oser sortir du traditionnel pur jus pour être « old-school » – on n'est plus en 2008 à l'époque du premier Enforcer. Maintenant, il faudra trouver autre chose. Ça ne veut pas dire ne plus faire de heavy mais il faut trouver des subtilités pour éviter que ça sonne comme du réchauffé.

De manière générale, d'ici dix ou quinze ans, les légendes à la Iron Maiden ou Judas Priest auront raccroché. Selon toi, le heavy en tant que genre de référence, ce sera fini après ça ?

Ceux qui sont en première ligne, c'est Enforcer, mais même en étant n°1 de l'underground heavy, ils ont atteint leurs limites. C'est toujours bien, mais il y a un décalage entre ce qu'ils proposent et ce que leur public attend... Sur Nostalgia (2023) et Zenith (2019), ils ont tenté des trucs plus FM et hard rock que leur public n'a pas trop apprécié. Moi, j'ai adoré, mais pas vraiment les fans old school, et ça n'a pas non plus touché un public plus mainstream, donc ils se retrouvent un peu le cul entre deux chaises. Il faut trancher, sinon tu restes dans l'underground, quoi.

Mais en termes de têtes d'affiche de festival... à part Ghost, qui vient quand même globalement de la scène heavy et a pris un virage très AOR/FM sur ses deux derniers albums. Je ne sais pas si ça te parle.

Ghost, le peu que j'ai entendu, j'aime bien. Ça me saoûle assez vite sur un album mais je trouve ça bien. Sinon, dans un délire différent, il y a un groupe que j'adore, c'est Beast In Black. Ce n'est pas du heavy old school, mais pour moi, ça reste proche du power-heavy... Mais récemment, ils ont vraiment mis l'accent sur les claviers.

Leurs derniers morceaux, c'est carrément de l'eurodance, on dirait du Cascada !

Pour moi, c'est du génie ! Mais ils doivent éviter de s'enfermer là-dedans. Idéalement, il faudrait qu'ils gardent le côté plus « riffu » de From Hell with Love. En tout cas, ils grimpent sur les affiches, on verra jusqu'où ça ira...

Et justement, en parlant de grimper sur les affiches, c'est quoi l'objectif d'Animalize ? On sait que tout groupe espère grandir, mais est-ce que tu te fixes des objectifs pour le futur ?

Carrément, oui. Y'avait ce doute-là avant Verminateur : « bon, peut-être que l'underground, c'est pas si mal, peut-être qu'on ne sera jamais bien placés sur les fests mainstream, mais c'est déjà bien, la scène underground c'est sympa »... Puis, quand je vois ce qu'est Verminateur, quand je vois le résultat du clip de « Damnée », je me dis que ce serait du gâchis de ne pas essayer de faire plus. Ce n'est pas tellement un objectif qu'une envie de progresser. L'objectif ne sera jamais atteint car c'est toujours de faire mieux. C'est quand tu stagnes, que tu sois tout en haut ou tout en bas, que ça ne va pas bien. Je sais que ce n'est pas possible, qu'à un moment la source se tarit, mais ce sera toujours l'ambition. J'aimerais bien qu'à terme, on signe sur un plus gros label, pour avoir plus de moyens. À la base, on est des prolos, pas des « fils à papa » blindés de thune : l'album, il a coûté 8 000 euros et c'est le maximum qu'on pouvait faire. Mais par rapport au premier album, c'est un autre monde...

Je trouve que le step-up est vraiment impressionnant. Comme je le disais en entame, depuis sa sortie, j'ai plusieurs refrains en tête par jour, c'est incroyable d'efficacité.

Merci beaucoup, ça me fait plaisir. Mais j'ai une question pour toi, alors : c'est quoi, tes morceaux préférés, et pourquoi ?

J'aime beaucoup « Au Jugement de soi » et « Bons Baisers d'outre-tombe ».

Ah ouais ? Ah, ça me fait plaisir parce que « Bons Baisers d'outre-tombe » est vraiment l'OVNI de l'album, avec le chant plus bas, les synthés assez kitsch... C'était un peu une expérimentation, donc ça me fait plaisir d'avoir ce genre de retours.

Pour conclure, rester dans la durée, ça implique de s'imaginer dans vingt ou trente ans... Est-ce qu'il y a des chanteurs dont tu te dis « waw, à leur âge, j'aimerais encore avoir une voix pareille » ?

Je vais encore le citer mais le premier qui me vient en tête, évidemment, c'est Zouille de Sortilège. Mais il mène la vie qui y correspond : il mange sain, il ne boit pas trop, il fait du sport... Résultat, à 67 ans, il met la pâtée à tout le monde. C'est différent d'ADX par exemple, où on entend quand même que ça a bien fait la fête (rires). Personnellement, j'ai pris des cours de chant récemment pour la première fois en bien douze ans, car il fallait assumer en live ce que je fais en studio. Et c'est le jour et la nuit après seulement six ou sept cours. Et là tu te dis « mais quel con j'ai été » ! À vouloir faire le rocker autodidacte... Bon, j'avoue que si je devais complètement arrêter la picole et la fête, ça me ferait chier (rires). Mais j'ai 31 ans, il serait temps que je me calme. L'objectif, c'est de bien chanter pour environ les dix prochaines années. Après, on verra (rires). Quand j'aurai assez de royalties pour ne plus jamais devoir travailler...

Et à court terme, Animalize n'a pas encore annoncé beaucoup de dates de concerts. Quel est le programme ?

Il y aura une « vraie » tournée européenne sur dix-huit jours, dont on a pour l'instant la première et la dernière date. On commence au « warm-up » du Hell Over Hammaburg (Hambourg) début mars... et la dernière date sera au Heavy Metal Thunder, en Tchéquie. Et donc entre ces deux dates, il y en aura d'autres à annoncer. Pour cette année, il y aura peu de dates, même si on va certainement faire une « release party » au Rock'N Eat et deux dates en Espagne, qui n'ont pas encore été annoncées.

Merci pour cette longue interview, Niels ! On félicitera ceux de nos lecteurs qui ont été jusqu'au bout (rires). À bientôt !