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Album

26 janvier 2018 - S.A.D.E

Faal

Desolate Grief

LabelVàn Records
styleFuneral Doom / Post Rock
formatAlbum
paysPays-Bas
sortiejanvier 2018
La note de
S.A.D.E
8/10


S.A.D.E

Chroniqueur doom, black, postcore, stoner, death, indus, expérimental et avant-garde. Podcast : Apocalypse

Formé en 2005, Faal nous vient des Pays-Bas. Avec déjà deux albums au compteur, tout deux sortis chez Vàn Records, Faal atteint le fameux palier de la confirmation, le fameux troisième album qui signe souvent soit l'enlisement dans la redite, soit la perpétuation des acquis au service d'une composition plus riche. Or, depuis 2011 et la sortie de The Clouds Are Burning, le line-up du sextet a subi une purge drastique : du line-up originel, ne subsiste plus que Pascal Vervest (guitare). C'est donc avec du sang neuf que Desolate Grief, une fois de plus sorti chez Vàn Records, a été composé. Et là encore, c'est quitte ou double : soit l'essence du groupe s'étiole, soit elle survit malgré les changements de personnel.

Pour situer Faal dans la grande carte du Metal, il faut chercher dans le territoire du Doom, et plus précisement vers le Funeral Doom. Mais pas tout à fait 100% Funeral Doom non plus, puisque Faal travaille également avec des atmosphères Black Metal et même un peu de Post-Rock disséminé çà et là. Une musique lente donc, mais également riche. Parce que le point faible de pas mal de formations de Funeral Doom est de ne lâcher que des gros accords bien sombres toutes les dix secondes pour un résultat profondément ennuyeux. Mais pas de ça ici. Desolate Grief, comme ses prédécesseurs, est sans arrêt captivant. Passée l'intro un peu convenue au piano, Faal vous plonge dans un univers noir et opaque d'où émerge, parfois, quelques lueurs rassurantes. Côté noirceur, vous allez être servi : la lenteur cathartique des morceaux offre de larges espaces de souffrance où le chant, tantôt pur growl Death bien caverneux (on peut penser à Ahab), tantôt lorgnant plus vers du coassement Black, vous offre tout son désespoir et son amertume. Côté instrumentation, sans être axé de manière trop poussive sur la mélodie, Faal développe quelques superbes plages contemplatives (le long passage central de Grief, le final de The Horizon) avec des guitares lead lancinantes qui sont capables de vous coller le petit frisson qui va bien.

Autre point fort de la composition : les claviers. Qu'il soit travaillé en nappes ou qu'il soit mis en place de manière plus rythmée, le synthé apporte à chaque intervention un petit surplus d'intensité émotive, donnant à Desolate Grief une véritable palette d'affects sur toute sa durée. Rien qu'au sein d'un même morceau, les mouvements d'humeur sont extrêmement nombreux et parfaitement agencés. Prenons Evoking Emotions (rien que le titre vous donne à voir de quoi il s'agit) : une intro paisible, presque apaisante, toute en arpèges, qui déboule sur un riff morbide et étouffant avant de s'alléger sans que l'on comprenne vraiment comment. Arrive ensuite un passage plus lumineux où les guitares semblent moins telluriques et où le clavier vient ajouter une petite couche de nappes qui réhausse le tout, avant que la mélancolie ne revienne vous prendre avec une mélodie toute simple mais splendide. Tout est parfaitement construit, tout s'articule à merveille, et neuf minutes plus tard, sur une outro fragile au clavier, on réalise qu'on a traversé une mer de sentiments sans même s'en rendre compte.

Et c'est globalement tout l'album qui vous balade entre colère lourde et tristesse subtile. Il faut dire qu'en s'attaquant au thème du deuil, Faal s'est en quelque sorte imposé ce travail sur le rendu émotif de leur musique. Et la variété de leur style, l'apport d'éléments Black Metal ou Post-Rock évoqués plus haut, leur permet d'insuffler toutes les nuances pour coller au mieux à cette exploration d'un processus émotionnel aussi complexe qu'inévitable. L'accélération du tempo sur No Silence et ce jeu de guitare plus typé Black donne un réel coup de nerf et transcrit finement cet sorte de colère impuissante face à la perte. Quand aux éléments Post-Rock, moins clairement situables mais très présents, ils offrent évidemment un outil pour exprimer la douleur sans fard, mais avec sensibilité et justesse.

De ce Desolate Grief, on peut retenir deux choses : Faal passe avec brio le cap du troisième album ; le changement de line-up n'a pas eu raison de la créativité des Bataves. On peut également retenir que ce nouvel effort est brillament composé, qu'il bénéficie d'une production précise, et qu'il se pourrait bien que Faal devienne l'un des grands du Funeral Doom des prochaines années.

Tracklist de Desolate Grief :
01.Intro
02.Grief
03.No Silence
04.Evoking Emotions
05.The Horizon