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lundi 22 janvier 2018

Arch Enemy + Wintersun @ Toulouse

Le Bikini - Toulouse

Shawn

Anciennement responsable du webzine U-zine.org. Actuellement chroniqueur éclectique et live reporter basé à Toulouse.

Quelques jours après l’ouverture des hostilités par SPM Prod et leur date rassemblant SepticFlesh et Inquisition, place à la première date de l’année organisée par le Bikini. Un très beau plateau aux teintes death mélo rassemblant pas moins de quatre formations, d’horizons géographiques et musicaux bien différents. Et une telle profusion de formations n’est pas sans conséquence : l’ouverture des portes est indiquée pour 17h30. Si cette ouverture bien précoce est chose courante sur Paris, en province, un tel horaire en ferait bouillir de colère certains concierges palois. Bref, entrons directement dans le vif du sujet, place à la musique.

JINJER

Shawn : Le premier groupe du plateau n’est autre que Jinjer. La présence ici de la formation ukrainienne n’est pas en soi une surprise puisqu’elle avait déjà tourné en septembre dernier avec Arch Enemy sur leur tournée en Europe de l’Est. Le quatuor avait par ailleurs déjà fait un petit tour dans le coin en participant en mai dernier au RockMetalCamp, à côté de Limoges. Retour en France, toujours dans le cadre de la promo de leur album King Of Everything (sorti chez NapalmRecords, le label autrichien qui plus que jamais a eu le nez creux).

Et sur scène, on peut dire que Jinjer sait y faire. En effet, oscillant musicalement entre groove, nu metal, metalcore et djent, la formation sait piocher ici et là pour proposer sa propre mixture. Menée de main de maitre par Tatiana Shmailyuk, la formation aura frappé fort. En effet, loin des premières parties insipides, les Ukrainiens se montrent particulièrement actifs, arpentant la scène de gauche à droite, occupant l’espace, et renvoyant au public une fougue et une furie clairement communicative. Le set est soigné, tant musicalement que scéniquement (mention spéciale au light show, particulièrement leché de leur light-tech dédié).

Fort de cette communication, c’est surtout leur frontwoman qui restera dans les esprits. En effet, Tatiana Shmailyuk, au-delà de son dynamisme sur scène nous offre là un large panel de ses capacités vocales, passant avec aisance de chant clair (notamment sur la power-ballade Pisces) à voix gutturale. Coté public, la réponse est évidente et ne se fait pas prier : du premier au dernier titre, le pit est en mouvement. En bref, un groupe qui a assurément une laaaaaarge marge de progression mais nul doute qu’il faudra compter sur cette formation dans les années à venir.

Setlist Jinjer : 
Words of Wisdom
Sit Stay Roll Over
I Speak Astronomy
Just Another
Pisces
Who is Gonna Be the One

TRIBULATION

Florent : J'ai mis longtemps à rentrer dans la musique de Tribulation, les mélodies sombres, teintées de metal extrême mais très personnelles du combo suédois me passant vraiment à côté. Récemment toutefois, le franc est tombé avec une réécoute de l'album Children Of The Night et j'étais plutôt curieux de découvrir ça sur scène au sein d'une affiche aussi ... euh. Improbable ? On va dire ça.  
Improbable, c'est aussi comme ça qu'on peut décrire la prestation scénique du groupe. A mi-chemin entre ambiances occultes proches du black metal et côté shock rock second degré et androgyne avec l'attitude bien particulière du guitariste Jonathan Hultén, plutôt efféminé ("c'est gracieux", comme dirait Shawn) dans ses mouvements - bref, le décalage avec Jinjer est total.

On ne peut pas dire que le public accroche, et pourtant on est loin d'assister à un concert manqué. Après un départ en douceur sur le nouveau titre Lady Death, c'est même un peu la fête aux tubes de Children Of The Night Melancholia, le merveilleux The Motherhood of God et son furieux côté The Cure (réflexion que je me ferai à plusieurs moments du set, notamment sur l'excellent nouveau morceau Nightbound), le tube Strange Gateways Beckon qui attire (enfin) les clameurs du public. Et au beau milieu de tout ça, cet extrait très progressif de Formulas of Death, un Suspiria de Profundis impressionnant. Tribulation a sa personnalité, bien à part, qui permet au final de les intégrer à bien des affiches (et nul doute que pas mal de curieux ont été réécouter par après) ... mais pas certain tout de même qu'ils sont à leur place entre Jinjer, Wintersun et Arch Enemy. Dommage.

Setlist Tribulation :
Lady Death
Melancholia
The Motherhood of God
Suspiria de profundis
Nightbound
Strange Gateways Beckon
The Lament

WINTERSUN

Florent : C'est assez drôle : Wintersun, comme Tribulation, ça m'est longtemps passé au-dessus. Il a fallu 2017 et leur campagne assez grotesque de crowdfunding pour leur dernier album pour que j'y jette vraiment une oreille, ce qui m'a fait regretter que l'album en question, The Forest Seasons, en prenne autant pour son grade pour des raisons non-musicales. S'il ne s'agit pas d'un chef d'oeuvre, ce n'est certainement pas un navet pour autant et il prend même toute sa dimension sur scène. Du moins ici, dans un Bikini que je découvre et dont le son est vraiment à tomber ! 

Rien à voir, donc, avec le naufrage que j'ai pu vous raconter après le Brutal Assault. Sur une plus petite scène, avec ces lights et malgré un gugusse caméraman qui passe TOUT (!) le concert à tourner autour du groupe, on passe réellement un bon moment. Jari prend moins de place que dans mes souvenirs, laissant les hallucinants solis de guitare se tailler la part du roi et, surtout, ne faisant pas la moindre fausse note sur le plan vocal. Particulièrement sur le poignant Loneliness, ballade issue de The Forest Seasons et qui me prend aux tripes à chaque écoute. Un vrai bon concert. 

Shawn : Ahh Wintersun ! Ce groupe a lui tout seul a été l’un des sujets les plus commentés de 2017. En effet, après de longues années d’attente, Wintersun annonce l’an dernier l’enregistrement d’un nouvel album, et ouvre un financement participatif sur IndieGoGo. C’est ici que le scandale est parti car le groupe ne propose qu’une unique contrepartie : 50€ pour une version dématérialisée de l’album. Car si, lorsque l’on est fan, on ne compte pas, 50 boules pour quelques MP3 (même en très haute qualité) et quelques fioritures bonus, ça fait quand même sévèrement cher. Et pourtant, le groupe aura rassemblé pas moins de 464.000€, soit 285% de l’objectif initial. Les mauvaises langues parleront de l’installation d’un sauna dans le studio d’enregistrement, les autres salueront la bonne réussite de la démarche. Qu’importe, Wintersun sort en juillet son 3ème album, The Forest Seasons, qu’il défend ce soir.

Ce soir, un technicien entre sur scène et en préambule annonce que le bassiste de la formation est actuellement hospitalisé et qu’il sera absent lors du concert. Et tant qu’à être sur le line-up, notons la présence derrière les fûts de Rolf Pilve (actuel batteur de Stratovarius) en remplacement de KaiHahto, absent de la tournée. C’est donc avec un line-up bien particulier que le concert se déroule, mais ce fait ne semble pas arrêter la bonne humeur du frontman Jari Mäenpää, qui, non content de se produire pour la première fois à Toulouse, en fait surtout des caisses sur scène, jouant avec le public ou ses musiciens.

Coté setlist, on aura hautement apprécié Winter Madness et son incroyable solo semblant ne jamais se terminer, ou les deux titres particulièrement épiques du nouvel album (Spring & Winter) qui passent brillamment l’épreuve du live. Dans le pit, l’ambiance est bouillante, oscillant entre pogo et wall of death. On aura vu également un paquito d’une bonne partie de l’audience, et de quelques slammeurs intrépides.

Setlist Wintersun :
Awaken From The Dark Slumber (Spring)
Winter Madness
Sons of Winter and Stars
Loneliness (Winter)
Battle Against Time
Time

ARCH ENEMY

Shawn : Voilà maintenant 23 ans que Arch Enemy se produit aux quatre coins du monde. 23 années qui n’ont pas été de tout repos, le line-up ayant changé à de nombreuses reprises. Il faut avouer que Michael Amott, dernier membre fondateur encore dans le groupe a vu défiler du beau monde. La dernière étape de cette évolution remonte à 2014 lors de l’intégration de Jeff Loomis (ancien guitariste chanteur de Nevermore), mais surtout le changement de frontwoman, lorsqu’Angela Gossow a laissé le micro à Alissa White-Gluz, après 14 ans de bons et loyaux services. Bien entendu, beaucoup avaient douté du bien-fondé de ce changement, mais après 4 années avec Alissa derrière le micro, force est de constater que cette évolution a eu du bon.

Et ce soir, alors que le groupe tourne pour soutenir leur 11ème et dernier album, Will to Power, c’est cette même Alissa que l’on retrouve, mais cette fois-ci sous le coup des symptômes d’une grippe. Pas évident de s’imaginer assurer un live entier, en conservant intacte l’intensité originale, le tout en étant souffrant. Qu’importe, ce fait a été relégué au rang de détail par la vocaliste qui n’aura rien laissé paraitre, excepté sa voix particulièrement enrouée, seulement audible lors des échanges avec le public entre les titres (et en français, s’il vous plait !).

Si coté setlist on déplorera certaines disparitions (Dead Eyes See No Future, bordel …), on notera la mise en avant des albums War Eternal et Will to Power, totalisant à deux deux 9 morceaux, soit la moitié des titres joués ce soir. Si certaines compo sont notablement dispensables (Blood In The Water par exemple), d’autres, élevés au rang d’incontournable font toujours leur effet sur scène (We Will Rise, My Apocalypse). L’occasion, sur les titres plus anciens de constater qu’Alissa a su s’approprier le répertoire d’Angela.

Le groupe profitera d’une très favorable mise en scène entre les décors, un réglage sonore très avantageux ainsi qu’un sérieux light-show. Une configuration optimale que permet souvent le Bikini et qui est ici exploitée à très bon escient. Nul besoin de dire que côté public, l’ambiance est évidement chaleureuse, le public mangeant totalement dans la main du groupe, et répondant de fait à toutes les sollicitations. En bref, même si le groupe peut sembler manquer de spontanéité (on se sera même demandé longuement si Jeff Loomis ne se fait pas clairement chier par moments), il offrira ce soir un set carré et une prestation léchée au millimètre. Propre.

Setlist Arch Enemy :
The World Is Yours
Ravenous
Stolen Life
The Race
War Eternal
My Apocalypse
Blood in the Water
You Will Know My Name
Bloodstained Cross
The Eagle Flies Alone
As the Pages Burn
Intermezzo Liberté
Dead Bury Their Dead
We Will Rise
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Avalanche
Snow Bound
Nemesis
Fields of Desolation (Outro instrumental)

 

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