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mardi 27 mai 2025

Castle Rat @ Paris

La Boule Noire - Paris

Di Sab

S’il y a bien une chose sur laquelle nous nous accordons tous, c’est que Castle Rat ne laisse pas indifférent. Into the Realm a réellement fait figure de curiosité l’année passée et s’il n’a pas convaincu tout le monde, il a, au moins permis au groupe de profiter d’une exposition dont peu ont pu bénéficier aussi rapidement. Si le groupe divise tant, c’est à mon sens parce que les facteurs qui ont fait le succès de Castle Rat se voient comme le nez au milieu de la figure. Le chant féminin étant rare dans le heavy doom et le style connaissant une réelle passe à vide ces dernières années, chaque album solide peut prendre une forte ampleur au sein d’une scène franchement pas saturée. Et surtout, la forte dimension visuelle et narrative a fortement incité à la curiosité.

Vrai renouveau d’un style essoufflé ou fraude reposant, à l’instar de l’iconique crop-top en cotte de maille, sur la poitrine de Riley Pinkerton ?  À titre personnel, je trouve Into the Realm réellement convaincant et je ne suis manifestement pas le seul. La cagnotte pour financer le successeur a récolté 130 000 € pour un objectif initial de 15 000 €. Le groupe disposera d’un bon créneau au Hellfest dans quelques mois et est booké aux Desertfest pour sa première tournée européenne. C’est dans une Boule Noire complète que s’écriront donc ce soir les premières pages de l’histoire qui liera Castle Rat à la France.

Nous arrivons peu avant la tête d’affiche ce qui ne me laisse pas assez de temps pour rentrer totalement dans le set de Witchorious. Ayant été très agréablement surpris par un concert au Klub il y a quelques mois, cette fois-ci, cela prend un peu moins. Le groupe ne manque pas de bonnes idées, et la chanteuse / bassiste a une voix réellement en place, mais certains choix me laissent un peu perplexe. Rien de bien grave, le public semble d’ailleurs assez réceptif, mais en cherchant à se démarquer de la pléthore de « groupe de doom à chant féminin », le groupe tente beaucoup et certaines choses sont mieux réussies que d’autres. On sent quand même un vrai sérieux, beaucoup de travail et des bases suffisamment solides pour que le projet grandisse et murisse. C'est tout ce qu'on leur souhaite.

Castle Rat

La scène, encadrée par deux grosses torches dans lesquelles flamboient des flammes factices et des side drops, semble déjà trop petite pour l’arrivée de Castle Rat. La salle, prétendument pleine, laissait toutefois quelques espaces qui auraient pu permettre à quelques dizaines de personnes en plus d’assister au concert. Dommage pour ceux-ci, mais ce soir, on profite de ne pas finir étouffé dans un concert sold out. Je m’interrogeais sur le profil du public, et je suis assez surpris de son hétérogénéité. Beaucoup de millenials, ce qui est assez logique vu la dimension numérique du groupe, mais aussi beaucoup de personnes plus avancées dans la vie et qui ont sans doute été accrochées par l’esthétique très rétro. D’ailleurs, je repère plusieurs t-shirts de power metal, ce qui me laisse à penser que les New-Yorkais ont les moyens d’aller bien au-delà de leur base heavy-doom.

Into the Realm faisant un peu plus d’une demi-heure, il est fort logiquement exécuté en entier. L’aspect hyper narratif de l’album ne donne pas tellement de choix alternatifs, mais il est dommage d’avoir d’entrée deux des titres les plus efficaces du set, à savoir « Dagger Dagger » et « Feed the Dream ». Entre les morceaux, Riley Pinkerton, très investie dans son rôle de Rat Queen, nous donne quelques éléments de lore pour que l’on comprenne pourquoi une meuf à moitié nue, masquée et munie d’une faux en plastique se dandine sur scène. Pas sûr d’avoir compris ni besoin d’un justificatif mais derrière la reverb, le ton hyper enthousiaste et convaincu évoque les enfants et leurs « on disait que.. » qui a le mérite de faire sourire. La figurante revient d’ailleurs en fin de set pour un duel final où elle triomphe de la reine, sous les huées du public, avant que les cris de ce dernier ne ressuscitent la Rat Queen qui pourra triompher de son antagoniste en coulisse.   

Bien que pas fondamentalement technique, on peut noter une réelle qualité d’exécution. Les soli sont hyper bien retranscrits, les vocaux sonnent juste et les breaks, tout en majesté, prennent une réelle ampleur en live. Pour que Paris ne reste pas sur sa faim, le groupe propose trois extraits de son album à venir, sans les nommer. À première vue, les titres s’inscrivent dans la continuité du premier effort. Et même si le public est moins à fond que sur le reste du set, ces morceaux semblent plutôt bien écrits. À noter l’un d’entre eux qui possédait une petite dimension hard rock à la early Judas Priest auquel Castle Rat ne nous a pas encore habitués et qui semblait prometteur. Le seul bémol proviendrait du fait de les proposer en rappel, un moment qui est supposé être le climax du concert et qui s’est mû en session d’écoute attentive.

À l’instar de Ghost en 2010, le futur de Castle Rat s’annonce radieux. Un album solide, un successeur attendu, et le groupe prouve ce soir à la France qu’il ne tremble pas sur scène. À l’aise et avec déjà assez de décorum pour faire face à un public plus large, j’ai le sentiment que le groupe pourra être une belle découverte pour les curieux du Hellfest qui viendront pour les « costumes » et resteront pour la musique.  

 

***

Merci à Sanit Mils pour la confiance renouvelée et les soirées qualitatives, et à Notsovan pour les photos.