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10 groupes à ne pas rater à l'Outbreak 2023

dimanche 11 juin 2023
Team Horns Up

Compte groupé de la Team Horns Up, pour les écrits en commun.

C’est devenu l’un des plus gros festivals européens de hardcore et, depuis l’édition exceptionnelle de 2022, un petit rendez-vous des porteurs de casquettes de la team Horns Up. On s'était d'ailleurs demandé, juste après notre retour au pays, quelle affiche pourrait surpasser une telle sélection (Turnstile, FiddleheadKnocked LooseDrain)...

Réponse : l'orga a clairement choisi d'abandonner la surenchère (pour l'instant) et de faire un pas de côté : le virage hip-hop est flagrant (Death Grips, Denzel Curry), ajoutons à ça d’autres grands noms du hardcore moderne (Trapped Under Ice, Code Orange), et quelques légendes qu’on ne ratera pour rien au monde. On vous a préparé une petite sélection des artistes qu'on y attend le plus : il y a du culte comme du confidentiel, et beaucoup d'attentes de la part des quatre larrons qui iront vider leur compte en banque dans les Midlands fin juin.

 

Bane | Fury | Armand Hammer | Militarie Gun | High Vis | Trapped Under Ice | Death Grips | Machine Girl | Buggin | Speedway

                                           

Bane
Hardcore mélodique - États-Unis
Vendredi

Pingouin : C'est LE groupe que l'Outbreak ne pouvait pas rater cette année, et qu'on ne pourra pas manquer une fois sur place. L'annonce cet hiver d'une brève reformation des légendes du Massachusetts pour une série de concerts aux États-Unis a fait frétiller toute la scène, à commencer par votre serviteur, lorsque l'un de ses acolytes prophétisait la présence du groupe culte à Manchester. C'est en pariant sur cette éventualité que j'ai pris ma place, et bingo : on ira brailler « Calling Hours », « Some Came Running » et « Can We Start Again » à s'en faire péter les poumons dès le vendredi soir.

Neuf ans après leur dernier et impeccable album Don't Wait Up, sept ans après leur séparation, et deux ans après la mort, des suites d'une longue maladie, de leur ancien bassiste Brendan "Stu" Maguire, Bane jouera à Manchester ce qui risque bien d'être leur ultime concert en Europe. A ne rater sous aucun prétexte : les connaisseur-euses savent à quoi s'attendre, les autres n'ont qu'à se laisser convaincre par l'un des tous meilleurs groupes de hardcore mélodique du monde, pionniers du metalcore moderne et fiers héritiers de l'esprit straight-edge de Minor Threat.

 

Death Grips
Hip Hop expérimental / Electropunk - États-Unis
Dimanche

Mess : Au risque de voir les plus nerveux du moshpit se mettre à bailler face au courageux buffet d'experimental hip hop proposé par l'Outbreak - comme Armand HammerMIKEEarl Sweatshirt ou Lord Apex -, que ces derniers se rassurent : Death Grips sera là pour écrabouiller leur mécontentement et le transformer en plus belle surprise (entendez branlée) du festival. Comment saisir la réputation de Death Grips ? La réponse est simple : si tout le monde (fans comme professionnels) avoue qu'il y a eu un avant et un après Death Grips comme il y a eu un avant et un après RadioheadMy Bloody Valentine ou Pink Floyd, alors vous savez déjà que votre nom est inscrit en lettres d'or dans les livres d'histoire avec un nom qui sera impossible à omettre dans les conversations musicales, et ce, pour les décennies à venir. La radicalité electropunk / rap du projet Death Grips, sa communication atypique, son statut déjà légendaire sur internet, cette machine à memes, ses accointances avec Robert Pattinson, ses clips vides de sens, ses apparitions sporadiques sur scène et son énergie cathartique en live sont seulement 35% des raisons de ne pas rater l'apocalypse où les bars de MC Ride claqueront autant que la patate qui t'arrivera dans le groin sans prévenir dès le premier sub-bass. Vous êtes prévenus. Pas de quartier sur ce coup-là.

 

Buggin
Punk hardcore - États-Unis
Dimanche

Raton : Alors pourtant que Buggin joue dans une cour qui pourrait séduire un public large et varié, on n'entend pas encore assez parler du groupe de Chicago. Mené par la chanteuse Bryanna Bennett, le groupe déploie un hardcore furieux mais groovy, doté d'une grande sensibilité juvénile et d'influences notables de la scène de Baltimore (TurnstileTrapped Under IceEnd It). Morceaux expéditifs, riffs révoltés et amour du two-step et de lignes de basse copieuses, la recette de Buggin les porte parmi les plus avides représentants du hardcore moderne et revendicatif.

Proche de Soul Glo et Zulu (on pouvait entendre la voix de Bryanna à la fin de « We're More Than This » sur le dernier album et sur « Watching From the Sideline », le premier EP) notamment, Buggin porte nécessairement un propos sur la place des personnes afro-descendantes dans la scène hardcore. Cette conscience s'articule avec des paroles fortes sur la fétichisation, le machisme ambiant et la culture américaine libérale dans son ensemble. L'avantage de leur courte discographie est que vous ne passerez pas longtemps à réviser leur passage. Conseils choisis : le puissant EP Buggin Out, leur premier album Concrete Cowboys et en bonus leur excellente reprise de « Gratitude » des Beastie Boy.

 

Armand Hammer
(Abstract) Hip Hop - États-Unis
Samedi

Hugo : Lors de l’édition 2022 du festival, on voyait déjà apparaître la volonté des organisateurs de diversifier la programmation. Côté rap, Injury Reserve était le seul groupe à l’affiche cette année-là, ce qui pouvait paraître un poil hors-sujet (même si le groupe gravite autour des scènes extrêmes, aux cotés d’artistes comme Clipping et Backxwash). À titre personnel, je m’attendais à ce que la programmation de 2023 soit orientée davantage vers le screamo, ou a minima des groupes d’inspiration hardcore lorgnant vers des styles périphériques type alternative rock pour qualifier ça grossièrement.

Au final, et c’est une belle surprise me concernant, le rap (américain principalement - ce qui représente la majorité de mes écoutes quotidiennes) est au coeur de la progra. Outre la tête d’affiche du dimanche Denzel Curry, de nombreux membres de la “scène” abstract hip hop sont présents, avec en tête Earl Sweatshirt, l’un des représentants les plus connus du style aussi célèbre pour avoir été membre du collectif Odd Future (aux côtés de Tyler, The Creator ou encore Frank Ocean pour ne citer que les plus connus, ayant tous pris des trajectoires assez différentes - c’est d’ailleurs la force de ce collectif). D’autres styles sont également représentés, avec Lil Ugly Mane, connu initialement (comme Denzel Curry) pour produire une musique très inspirée du rap de Memphis du milieu des 90s, mais dont les deux derniers disques vont vers des terrains slacker-rock/neo-psychedelia [MAJ 05/06 : après plusieurs messages inquiétants postés sur les réseaux sociaux, il est probable que LUM ne soit pas finalement pas présent cette année - on lui souhaite en tout cas bon rétablissement].

Initialement, le style abstract se définit surtout par les thématiques abordées dans les paroles et l’écriture/la structure des morceaux. La majorité des artistes qui émergent aujourd’hui sont surtout inspirés de MF Doom/Madvillain, et de Earl Sweatshirt (tiens donc) surtout lorsqu’on pense à des rappeurs de New-York comme MIKE et Wiki (également à l’affiche). Un autre groupe important est également programmé : Armand Hammer, duo composé de billy woods et Elucid, tous deux également de NYC. Si la discographie du groupe est intéressante, je recommande de jeter une oreille en priorité aux albums solo de billy woods, globalement tous (très) bons et encore davantage depuis la sortie de “Hiding Places” avec le producteur Kenny Segal en 2019. Le dernier album en date du MC, “Maps” (toujours avec Kenny Segal), est l’un des meilleurs disques du premier semestre 2023, et quelques-uns de ses titres seront probablement interprétés lors du concert (les shows d’Armand Hammer mettent en effet autant la lumière sur les discographies des deux MCs que celle du groupe lui-même).

On reparle de tout ça, avec peut-être davantage de contextualisation encore, lors du live-report !

 

Trapped Under Ice
Punk hardcore - États-Unis
Dimanche

Mess : La quintessence de la bagarre, ni plus ni moins. Nom de code ? TUI aka Trapped Under Ice. Présentable ? Pas vraiment. Historique et incontournable ? Évidemment. Rappel des méfaits ? Destruction totale de la scène américaine pendant un paquet d'années. Par paquets, c'est la quantité de dents, côtes et paumettes que le leader Justice Tripp a laissé brisées sur la route des concerts avec le plus vicieux des groupes de hardcore punk de sa génération. Voir Trapped Under Ice en live, c'est accepter volontairement de déchirer son assurance pour en faire des confettis. C'est accepter que même si Justice Tripp s'est rangé depuis bien longtemps avec les gentils Angel Du$t pour réfléchir désormais sur sa vie antérieure de soldat de la scène avec philosophie, il n'est jamais trop tard pour revenir mettres quelques mandales bien senties dans les carotides de ceux qui voudraient toucher du doigt la fureur d'un groupe admirable et impitoyable. Les apparitions du groupe se comptant sur les doigts d'une main ces dernières années, vous savez désormais quoi faire dimanche 25 juin.

 

Militarie Gun
Punk hardcore / Rock indé - États-Unis
Vendredi

Pingouin : Eux étaient déjà là l'année dernière, c'est vrai. Avec un rendez-vous le dimanche en fin d'après-midi, que j'ai bien sûr raté, en train de me faire recoudre l'arcade après avoir caressé d'un peu trop près l'épaule d'un mec qui voulait sauter en parachute depuis la main stage. Aux dires des copains, le set de Militarie Gun était moyen, surtout parce que l'année dernière le son de la scène 2 était vraiment pas ouf. Mais cette année plus d'excuses : déjà le Bowlers c'est terminé, là ça joue au Depot Mayfield, à l'autre bout de la ville, et en plus Militarie Gun est programmé sur la main stage.

A quoi s'attendre alors ? Tout simplement à la release-party du premier album d'un des groupes les plus prometteurs de la scène. Leurs premiers EPs et singles font montre d'une maturité prodigieuse pour un jeune groupe, la présence de Ian Shelton (Regional Justice Center) et de Nick Cogan (Drug Church) n'y étant pas étrangère. Les premiers singles dévoilés pour « Life Under The Gun » présagent d'un nouveau palier franchi dans la carrière de Militarie Gun. Et on sera bien sûr aux premières loges pour s'en rendre compte.

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High Vis
Punk hardcore / Post-punk - Angleterre
Vendredi

Mess : Certains crieront au réchauffé puisque High Vis s'est déjà produit lors de l'édition 2022 de l'Outbreak mais ce serait : de 1. oublier la réaction gigantesque et méritée du public lors de ce concert et de 2. mettre de côté le fait que les anglais ont sorti depuis l'album Blending, cocktail post punk parfaitement explosif mixant la fougue d'une jeunesse anglaise désemparée et l'héritage sonore catchy de mastodontes comme Stone RosesOasisJoy Division ou Gang Of Four. Un héritage où, rappelons-le, la guitare bardée d'effets reste reine. Un paquet d'excellentes raisons de les convier à nouveau pour cette édition, sur la scène principale cette fois-ci, histoire de faire également résonner la gouaille nerveuse et les lyrics presque-taillées-pour-les-stades de Grahama Sayle et nous rappeler que s'il y a bien souvent l'ennui, il y a aussi de l'espoir. Même en Angleterre.

 

Speedway
Hardcore (mélodique) - Suède
Samedi

Raton : Speedway fait partie de la dernière tournée d'ajout au line-up de l'Outbreak et c'était impossible que je ne vous en touche pas quelques mots. Très peu de groupes peuvent se targuer de signer chez Revelation Records après un seul et unique EP. C'est le cas des Suédois qui ont fait un carton plein critique avec leur EP éponyme, ne dépassant même pas les 10 minutes.

Figure ascendante de la jeune scène européenne, Speedway produit un hardcore à mi-chemin entre l'urgence du youth crew et le côté fédérateur du hardcore mélodique du milieu des années 2000. Le groupe était déjà passé par Paris, à l'occasion du Break Down the Walls 2022 dont il avait livré la meilleure prestation avec une implication bouillante. Pour vous donner une petite idée de la formidable tempête qui viendra s'abattre sur Manchester à la fin du mois, vous pouvez écouter l'EP live que le groupe a révélé en début d'année. En tout cas, on invite les fans de VerseOne Step Closer ou Mil-Spec à bien se placer devant la deuxième scène samedi.

 

Fury
Punk hardcore - États-Unis
Samedi

Pingouin : Jolie surprise à l'affiche pour les fans de hardcore à la vigueur bien punk à l'ancienne. Le groupe califorien formé en 2014 a séduit une partie de la scène avec son hardcore franc du collier, mariné dans les années 90, sauce Minor ThreatGorilla Biscuits et « Age of Quarrel ». L'argument le plus convaincant pour programmer Fury à l'Outbreak date de 2016, et c'est « Paramount », leur premier album sorti chez Run For Cover Records. Un condensé de riffs tous plus efficaces les uns que les autres et de mosh parts très inspirées, ce qui était bien moins le cas sur « Failed Entertainment », son successeur qui date déjà de 2019. Fury y explorait des ambiances plus indé, moins rentre-dedans, avec toujours de l'efficacité. Un peu de ces deux albums dans la setlist, ce serait un excellent compromis pour que tout le monde passe un bon moment devant Fury, les adeptes comme les profanes.

 

Machine Girl
Digital hardcore - États-Unis

Samedi

Raton : Parmi les grands noms du hardcore à bourre-pifs et les références du hip-hop américain, quelques surprises, dont le duo américain Machine Girl. Oubliez les riffs saturés, les breakdowns et les chants écorchés mais maintenez le même niveau de frénésie et d'agressivité dans un environnement électronique. Le projet a beaucoup mué depuis sa création en 2012 mais a toujours gardé un pied dans le revival de la scène breakbeat hardcore des années 90 (dont The Prodigy a été le plus éminent représentant avec son premier album) et un autre pied dans la culture punk hardcore. 

Machine Girl a vraiment connu un tournant vers le punk avec son album de 2017, ...Because I'm Young Arrogant and Hate Everything You Stand For, puis confirmé jusqu'à leur dernier album en date, U-Void Synthesizer. Ce dernier, chroniqué dans le troisième épisode de Raton et la Bagarre, contient même des propositions cybergrind (« Fully in It »). Sans pour autant utiliser des ressorts classiques du punk hardcore, la passion pour la dissonance et la brutalité est identique (« Batsu Forever »). Evidemment comparé avec Atari Teenage Riot dans l'appropriation d'un hardcore digital, Machine Girl est bien plus que ça et décline une agressivité variée, parfois industrielle (si vous aimez Street Sects), extrêmement bien produite et dont la richesse pourra bien convaincre la foule mancunienne.