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mercredi 8 février 2023

Harakiri For The Sky + Schammasch + Groza @Paris

Backstage By The Mill - Paris

Circé

Nordiste du sud

La barre en terme de concerts black metal ayant déjà été placée très haut avec les incroyables sets de Kringa et Misthyrming en début d'année, je dois avouer que c'est avec un peu d'appréhension que je me faufile entre les clients du bar O'Sullivans pour atteindre la fameuse porte du backstage, cachée au fond de l'établissement. Bon, il faut aussi tout de même avouer que l'affiche de ce soir n'a pas grand chose à voir avec les deux groupes susnommés, outre leur regroupement sous une étiquette stylistique large et pluriforme. Garmonbozia nous offre un plateau qu'on attendait depuis environ trois ans, l'un des derniers report de report de la pandémie. Une première partie plus atmosphérique et occulte avec les Allemands de Groza et les Suisses de Schammasch nous menant vers une fin de soirée dédiée au post-black beaucoup plus direct et mélodique d'Harakiri For The Sky.

L'appréhension susmentionnée est soyons honnêtes, surtout dûe au fait qu'Harakiri For The Sky ne m'a pas saisi par les trippes ces dernières années comme cela pouvait être le cas avant. Rien du dernier album, Maere, sans me déplaire, ne m'a particulièrement marqué ; et l'idée de complètement réenregistrer leurs deux premiers albums me laisse assez indifférente. Alors je l'avoue, je suis un peu là ce soir avec un air de nostalgie, pour voir ce que HFTS vaut encore sur scène. Et pour Schammasch, également, que j'aime beaucoup en album mais qui s'avère toujours plus compliqué à aborder en live.

 

Groza

Groupe encore tout jeune puisque formé en 2016, c'est son second album, The Redemptive End, que Groza vient défendre en live. J'avoue ne jamais m'être trop penchée sur cette formation, m'étant arrêtée très vite à la conclusion qu'il ne s'agissait-là que d'une énième mauvaise copie de Mgla sans plue-value (à tel point que je les croyais venir de Pologne et non d'Allemagne). J'aborde donc leur set en touriste totale et sans en attendre grand chose.

L'emprunte Mgla est indéniable dès les premières notes et durant l'ensemble des morceaux, des patterns de batterie aux riffs, le tout appliqué ici de manière quasi-scolaire. Seulement, l'ambiance haineuse et nihiliste que l'on retrouve chez les Polonais est ici complètement diluée, et ce n'est au final pas un si grand mal, car cela se fait au profit de quelques ajouts plus personnels de la part du groupe. Des passages en clean plus doux et mélancoliques, des mélodies qui auraient d'ailleurs plus la place chez la tête d'affiche de la tournée, Harakiri For The Sky, que chez Mgla, et voilà qui remet en cause mon jugement initial et me tient au final intéressée pendant la majeure partie du concert. Sans dire que Groza propose véritablement quelque chose de marquant, il est agréable de constater que le groupe s'éloigne d'un hommage note pour note envers le groupe duquel ils ont tiré leur nom.

 

Schammasch

Plus de dix ans d'existence et cinq albums à son actif, Schammasch fait partie de ces groupes qui divisent s'il en est. Difficile d'approche il est vrai, avec un black/death des plus atmosphériques et opaques dont un album de plus d'1h30 ; il n'est pas rare d'entendre le qualificatif de “soporifique” à son encontre. Votre humble serviteur fait cependant partie des amateurs et amatrices des Suisses et de leurs longs morceaux hypnotiques et ritualistes. Je le suis encore plus de leur dernier album, Hearts Of No Light, qui malgré sa longueur propose au final une porte d'entrée beaucoup plus accessible vers leur univers et évolue vers des rythmiques presque entrainantes, de grosses influences goth sur les lignes de basse et de guitare comme sur le chant. Seulement, en live, c'est toujours un peu quitte ou double ; il faut forcément être dans d'excellentes conditions pour pleinement rentrer dans un set de Schammasch. Et ce soir, elles sont plus ou moins réunies : un bon son, une salle sombre et pas trop grande permettant une certaine intimité... Le seul bémol seront les lights pas toujours très adaptées ; mais je conçois que ce soit une question de sensibilité. Le groupe bénéficie en tout cas d'un bon temps de jeu leur permettant de mettre à l'honneur les morceaux de leur dernier album, qui passent haut la main l'épreuve du live. « Paradigm of Beauty » et son refrain au chant clair font presque office de tube, contrastant avec les longs riffs hypnotiques de morceaux tel que « Metanoia », qui apportent un côté très transe qui peut s'avérer difficile à maintenir sur une prestation d'une certaine longueur. Ce soir se classe en tout cas certainement parmi les meilleurs concerts que j'ai pu voir du groupe, même si l'expérience Schammasch est toujours plus complète seul.e avec un casque.

Setlist :
Winds that pierce the silence
Ego Sum Omega
Golden Light
Rays like Razors
A Paradigm of beauty
Quadmon's Heir
Metanoia
Chimerical Hope

 

Harakiri for the sky

Le caractère « sold out » de la soirée prend toute sa signification alors qu'on approche de la tête d'affiche et qu'il devient difficile de se déplacer dans la salle. Harakiri s'est depuis les années construit une solide fanbase, arrivant à toucher autant les blackeux ouverts au post- qu'un auditorat metal plus large grâce à une musique largement mélodique, catchy et accessible. On ne peut pas non plus reprocher au groupe de faire partie de ceux qui stagnent ; après des débuts fortement inspirés par les scènes emo et post-hardcore, on a vu au fil des albums un effacement de ces influences pour une musique toujours plus post-black et, surtout, toujours plus chiadée, quitte à perdre le côté brut qui faisait contraste au début. Une volonté qui s'est d'ailleurs d'autant plus affirmée avec le réenregistrement des deux premiers albums l'année dernière, où ce qui se fait ressentir est une volonté de réinterpréter ces morceaux des débuts du groupe dans son style actuel. C'est aussi globalement ce qui se dégage en live : « Dancing on debris », « Homecoming: Denied! » et tous les anciens morceaux sont interprétés sous leur mouture 2022. Et contrairement à ce que j'aurais pu penser, cela ne m'a pas tant dérangé que cela ; le chant, plus volatile en live que sur album, permet notamment de trouver un juste milieu entre l'authenticité des textes, les émotions et le travail polissé de la musique elle même. La setlist d'ailleurs est relativement équilibrée et arrive à balayer tous les albums du groupe malgré une prédominance, forcément, du dernier (Maere, le dernier « original », non les réenregistrements). J.J au chant est toujours dans son monde, jouant avec le fil de son micro, se baladant sur scène perdu dans ses textes et son univers, mais l'implication du reste des membres du groupe permet une bonne interaction avec le public. Après un mini rappel, le groupe termine sur « Fire, Walk With Me » et, j'en avais bien peur, une reprise de « Song To Say Goodbye » de Placebo que J.J termine d'ailleurs au milieu du public, face à la scène.

Je peux donc rentrer chez moi rassurée que, si Harakiri For The Sky ne me touche plus autant qu'avant sur album, leurs lives sont toujours aussi réussis.

Setlist :
Sing For The Damage We've Done
Funeral Dreams
And Oceans Between Us
Jhator
Dancing On Debris
Homecoming : Denied!
I, Pallbearer
Fire Walk With Me
Song To Say Goodbye

Merci à Garmonbozia pour l'accréditation et bravo pour cette belle date remplie !