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lundi 15 juin 2015

Temples Festival - Jour 2

Motion - Bristol

Sleap

Live reporter et chroniqueur occasionnel dans divers genres (principalement extrême).

JOUR 2

 

Après une nuit assez courte (merci à la discothèque deux étages en dessous de ma chambre d'hôtel, avec les grosses basses qui font vibrer le plumard), je me fais péter le bide au KFC du coin avant d'aller camper aux barrières de la seconde salle pour le premier groupe qui m'intéresse aujourd'hui, et pas des moindres...

Impetuous Ritual

14h pétantes, les australiens entrent en scène uniquement vêtus de pagnes noirs et barbouillés de faux sang. Avec leurs longues chevelures hirsutes ils ont vraiment l'air d'hommes des cavernes, cela fait assez bizarre quand on ne s'y attend pas, surtout pour un groupe comme Impetuous Ritual. Heureusement, la musique nous fait vite passer outre l'aspect visuel, et ce dès le premier morceau. Bénéficiant (heureusement) d'un son impeccable, l'atmosphère suffocante des compos du groupe est parfaitement restituée. La densité de la musique d'Impetuous Ritual est déjà importante en studio, mais en live c'est encore plus impressionnant. Un véritable mur de son ! La courte demi-heure ne nous permet d'entendre qu'une petite partie du répertoire des australiens, notamment en ce qui concerne le premier album (qui a ma préférence). Mais je distingue tout de même le redoutable ...Despondent Anachronism (un des titres les plus violents du groupe) ainsi que le titre d'ouverture Elegy qui vient ''aérer'' ce flot de lourdeur oppressant et quasi-ininterrompu. Pas de Ceremonial Disembowelment, dommage. Pour le reste ce sont pour la plupart des morceaux du bon Unholy Congregation... et notamment une partie de la riche pièce finale Blight, parfait pour clôturer le show.
Bien que ce ne soit peut-être pas le groupe idéal pour commencer ma journée, je dois dire que le show d'Impetuous Ritual m'a carrément convaincu. Moi qui était assez sceptique à l'idée d'entendre une musique aussi dense en live, force est de constater que celle-ci est même encore plus puissante dans ces conditions ! On se revoit dans deux jours !

Celeste

Bien que je ne sois pas fan de Celeste en studio, j'avais déjà eu l'occasion de voir les Lyonnais en concert un peu plus tôt dans l'année et, ma foi, ça avait été une agréable surprise. Leurs prestations live sont en effet assez réputées (fumée dense et absence totale de lumière à part les stroboscopes et les lampes frontales rouges des musiciens). Malheureusement, aujourd'hui le groupe joue sur la Main Stage en plein jour et, qui plus est, ils ont manifestement oublié les stroboscopes à l'aéroport. Et pour m'immerger totalement dans le concert, les frontales et la fumée ne suffisent malheureusement pas, malgré le son pourtant excellent. Je finis donc par sortir au bout de quelques minutes. Mais d'après les différents retours et le nombre de personnes présentes dans cette grande salle, les français ont l'air d'avoir fait mouche cet après-midi. Pour ma part, j'attendrai une autre occasion.

Grave Miasma

Ce départ prématuré me permet donc d'avoir accès au premier rang pour revoir les anglais de Grave Miasma. Après de longues balances sur du Judas Priest, le quatuor débarque maculé de sang, dispose deux récipients (contenant des bâtons d'encens) de part et d'autre de la scène et entame Eschatos puis This Tomb is my Altar. Là encore, je ne sais pourquoi mais je ne rentre pas plus que ça dans le show des anglais. Une petite demi-heure de concert (avec 20 minutes de retard), peu de fumée, forte lumière du jour, setlist moins à mon goût... D'autre part, la puissance vocale du chanteur me paraît beaucoup moins impressionnante que la fois précédente, bien que le frontman reste tout aussi féroce derrière son micro. Bon, ça reste du Grave Miasma donc cela passe toujours plutôt bien, mais je suis tout de même moins emballé que la dernière fois. Je quitte la seconde salle après Odoratus Sepulcrorum car, avec le retard, la fin du show risque d'empiéter sur le suivant (que je tiens à voir en entier)...

Halshug

Et les danois ont déjà commencé leur set lorsque je déboule dans la troisième salle. Cette dernière est (mal)heureusement peu remplie et j'arrive donc à me frayer un chemin jusqu'aux premiers rangs. Le son est assez bon mais je constate une absence totale de delay au niveau du chant. Fort dommage compte tenu de la singularité des vocaux de Jakob Johnsen en studio. Celui-ci utilise donc un scream assez raw et éraillé qui, sans avoir le charme des cris réverbérés sur disque, fait tout de même le job. Pour ceux qui ne connaitraient pas le trio de Copenhague, Halshug évolue dans un Crust Punk old school ultra énervé et vient tout juste de sortir son premier full-length Blodets Bånd chez Southern Lord (eh oui, encore eux), accessoirement un de mes groupes préférés de cette scène danoise avec Nuclear Death Terror. La quasi-totalité de l'album est exécutée aujourd'hui à vitesse grand V (et ce n'est pas peu dire, certains morceaux sont presque joués 2 fois plus vite !) comme l'énorme Knal et son skank beat ravageur. Niveau présence scénique, le guitariste Mathias semble quelque peu en retrait par rapport au couple rythmique, qui dégage une énergie impressionnante. J'ai beau être à fond durant tout le show, c'est le calme plat autour de moi (à part heureusement quelques bonnes personnes aux patchs Mob 47 ou Discharge qui ne cessent de bouger dans tous les sens). Les danois terminent leur set sur les deux derniers titres de leur EP Dödskontrol pour mon plus grand plaisir. Et alors qu'il reste pourtant 10 bonnes minutes de jeu sur le planning, un lancé de basse par terre, une photo du public et un timide remerciement, terminé. Un show passé en un éclair, à l'image de la musique du groupe !

Bölzer

Aaaah Bölzer... Le groupe qui, après un seul EP, était déjà booké dans tous les festivals de musique extrême du monde, à tel point que son absence sur une affiche devient quasiment une exclusivité à l'heure actuelle ! Malheureusement, le Temples n'aura pas ce privilège en 2015...
Bon, blague à part, ça doit déjà être la 4ème ou 5ème fois que je vois Bölzer en même pas un an, mais j'avoue que, si les conditions s'y prêtent, c'est toujours un plaisir. Cette fois-ci, hum... Mi-figue mi-raisin dirons-nous. L'atmosphère crée par ces deux seuls musiciens est toujours aussi prenante en live, l'effet de surprise en moins. Même si je ne le distingue toujours pas sur scène, j'headbang toujours autant sur les rythmiques véloces de Fabian Wyrsch (notamment les skanks beats de Soul Eclipse ou les terribles passages D-beat de Coronal Mass Ejaculation... UGH !). Okoi Jones assure le show comme à son habitude, mais souffrira néanmoins d'un problème d'ampli en plein milieu du concert, ce qui aura pour effet de faire pas mal retomber l'ambiance. De plus, le nouveau morceau joué ce soir me paraît moins prenant que les autres, du moins en live. Et même si la doublette finale Zeus / Entranced... me redonne le sourire, le concert ne me laisse pas la meilleure des impressions. Je ne sais pas, surement la lassitude qui s'installe petit à petit. Je confirmerai (ou infirmerai) ça la prochaine fois que je verrai les Suisses, ça ne devrait pas trop tarder...

Portal

Voici enfin l'une des principales raisons (si ce n'est la principale) qui m'ont fait venir à Bristol cette année. Le plus gros OVNI de la scène Death Metal mondiale, j'ai nommé Portal. Voilà plus de quatre ans que j'attends de vivre un rituel live du combo de Brisbane, et après avoir campé plus d'une heure dans la seconde salle (maintenant complètement blindée), l'heure est enfin venue.
Le quintette australien arrive vêtu de tissu et cuir noir déchiré ainsi que de cagoules (non percées) sur la tête. Plus de cordes autour du cou, dommage. Plus d'horloge sur la tête non plus en ce qui concerne le chanteur The Curator. Celui-ci est à présent vêtu d'une ample robe noire (ou djellaba satanique pour paraphraser un ami) ainsi que d'une coiffe médiévale horrifique dont le voile noir au niveau du visage laisse transparaitre un masque monstrueux. En plus de la fumée et du subtil jeu de lumière, l'atmosphère est déjà parfaitement adaptée.
Le groupe commence très fort en nous assenant d'entrée les 3 titres les plus brutaux de la setlist (Swarth, Kilter et Vessel of Balon), le temps pour nous de constater que la section rythmique (qui n'est assurée par nuls autres que les deux gratteux d'Impetuous Ritual, ces mecs sont inhumains...) est tout aussi impressionnante en live (raaah le jeu de ride sur Omnipotent Crawling Chaos, et les roulements frénétiques de Glumurphonel... Terrible) ! Mais la performance la plus renversante est assurément celle de la paire de guitaristes, et notamment Chris, dont les mouvements sur son manche 8 cordes sont absolument effrayants. Les accords tous aussi monstrueusement techniques les uns que les autres, sont enchainés de manière si irrégulière que cela paraît presque aléatoire. La schizophrénie rythmique couplée aux nombreux riffs torturés et autres dissonances forme un chaos ambiant qui me transcende totalement. Tout ceci est renforcé par l'aspect visuel terrifiant des membres du groupe ainsi que l'absence de communication avec le public. The Curator, en véritable maitre de cérémonie, accompagne les riffs flegmatiques de ses comparses avec une gestuelle aussi lente qu'étrange. Le seul gros point faible de ce concert est malheureusement sa voix, beaucoup trop en retrait par rapport au reste. On peine souvent à distinguer les vocaux démoniaques du chanteur à travers le grondement monolithique des autres instruments. Fort dommage, notamment sur le splendide final de mon morceau préféré Werships joué en clôture (d'ordinaire je préfère la version de The Sweyy mais je dois avouer que la lenteur et l'intensité progressive de la version de Swarth marche beaucoup mieux en live). Mais malgré ce manque de son au niveau de la voix, le show n'en demeure pas moins extraordinaire. Je savais que Portal en concert serait l'une des expériences live les plus incroyables de ma vie, j'en ai ce soir la confirmation. Déjà hâte de les revoir le lundi suivant à Paris !

Pig Destroyer

Journée très intense puisque, à peine remis de mes émotions, je dois à présent foncer vers la Main Stage pour assister à une des autres exclusivités de ce festival : le second set de Pig Destroyer. Après leur premier concert ''classique'' d'hier soir, les américains vont aujourd'hui nous interpréter pour la toute première fois en live l'album Natasha dans son intégralité, le tout accompagné d'un clip vidéo réalisé spécialement pour l'occasion.
Les lumières s'éteignent progressivement et on aperçoit le visage d'une jeune fille sur le grand écran où foisonnent une multitude de formes hétéroclites et colorées, en plus d'un grain qui donne un aspect usé à la pellicule. Blake Harisson derrière sa console paraît cette fois-ci beaucoup plus calme et concentré (mais enchaine toujours autant les bières). Les différents éléments électroniques installent progressivement une ambiance pesante et obsédante alors que le chanteur récite, d'une voix claire et fébrile, un poème empreint de mélancolie. La rythmique très marquée de la batterie, accompagnée d'un long larsen de guitare, vient tout à coup installer une tension supplémentaire. Petit à petit, les différents instruments se greffent sur ce pattern (vraiment intéressant rythmiquement) pour faire évoluer le tout vers des sphères Sludge Doom. Et le motif se répète encore et encore jusqu'à devenir totalement hypnotique. Adam Jarvis s'est totalement réapproprié le jeu de Brian Harvey, y compris pour cette longue pièce musicale, je suis totalement happé par son jeu tout en lourdeur (quelle frappe là encore) ! Alors que le film en arrière-plan continue d'intriguer l'assemblée, les parties électroniques ambiantes refont surface, avant que les passages Sludge ne reprennent de plus belle avec cette fois-ci des screams torturés et puissants qui collent parfaitement à l'atmosphère développée par le groupe. Les guitares se font plus lourdes et la rythmique plus complexe, tout en conservant la structure du motif initial. Un crescendo dense et écrasant qui se termine en fed out sur de nouvelles parties ambiantes voire Noise, laissant une bonne partie de l'audience dans un état second. Une nouvelle expérience totalement inédite qui confirme que Pig Destroyer est décidément un groupe à part dans la scène extrême actuelle. Un show tout aussi intense que celui de la veille, bien que totalement différent. Chapeau !

Triptykon

Bien que la musique de Triptykon soit également assez lourde et pesante, c'est tout de même pour moi le petit moment défouloir de cette soirée. En effet, bien que j'apprécie le nouveau virage musical entrepris par Tom Warrior depuis Monotheist, je demeure avant-tout un fan inconditionnel de la première période de Celtic Frost. Et, à ma grande surprise, je retrouve d'entrée mon état habituel puisque retentissent dès le début du show les premières notes de Procreation of the Wicked. Le culte morceau des Suisses est par contre interprété à la sauce Triptykon, beaucoup plus lent et lourd que l'original, mais ça a son petit effet. Après un Goetia magistral, repris par toute la salle, Tom Warrior salue le public et se permet un petit coup de gueule à propos d'un problème de guitare. Mais on n'y voit que du feu, le son est globalement assez clair, du moins au milieu de la salle, où je suis placé. Je me surprends d'ailleurs à déclencher un pit pour la première fois de ma vie sur le morceau suivant (le tube Circle of the Tyrants) qui passe bien trop vite. Je connais beaucoup moins les morceaux de Melana Chasmata mais ils ont l'air de bien fonctionner en live. Warrior a la capacité de fédérer le public grâce à des riffs lourd et mémorables couplés à un chant scandé des plus efficaces. Pour ma part j'exulte sur The Usurper (que je n'avais encore jamais entendu en live) et surtout le classique Messiah, seul morceau de Hellhammer joué ces derniers temps, qui n'a cependant pas autant d'impact que la première fois où je l'ai entendu en live. Je quitte d'ailleurs la salle après ce dernier pour aller me placer à la Main Stage pour le dernier concert. Mais malgré tout, c'est encore une fois un très bon show de Triptykon, j'espère juste que la setlist changera un peu sur toutes les fois où je vais les revoir cet été.

Sunn O)))

Après une journée des plus éprouvantes, et ce sans avoir mangé, j'en viens à me demander si je vais pouvoir tenir tout le show de Sunn (qui est pourtant l'un des événements que j'attends le plus du week-end). Le légendaire duo de Drone joue ce soir pendant 2 heures, sur la Main Stage du festival (avec le cadre et le public adapté), les conditions parfaites pour assister à l'une de leurs cérémonies. Et bien que j'arrive plus de 20 minutes à l'avance, la grande salle est déjà quasiment pleine pour accueillir le duo de Seattle. Pleine de monde, mais également pleine de fumée, on ne voit même plus le plafond et on distingue à peine l'immense mur d'amplis sur scène.
Alors que leur troisième comparse est déjà installé aux consoles dans le fond, Stephen O'Malley et Greg Anderson arrivent lentement de chaque coté de la scène vêtus de leur célèbre bure puis font une révérence au public avant de saisir leurs instruments. Le show est d'autant plus exclusif que les musiciens commencent le set par une reprise de Burning Witch (l'ancien groupe de O'Malley) encore plus lente et lourde que l'originale. Et dès les premières notes, je constate enfin l'intensité que dégage la musique de Sunn en live. Mon corps est littéralement pénétré par les puissantes vibrations issues de l'arsenal acoustique du groupe. C'est avec une performance comme celle là qu'on constate qu'il y a une véritable dimension physique dans la musique.
Le classique Aghartha est l'occasion de voir enfin Attila arriver sur scène, vêtu d'une longue toge noire qui lui enveloppe également le visage et la tête. Moi qui, d'ordinaire, ne suis pas fan de ses vocaux, je dois dire qu'ils collent parfaitement bien à un groupe comme Sunn. Son jeu de scène lent et très chorégraphié est également fort bien adapté au coté torturé de son chant, et contribue grandement au climat si particulier du show. Le jeu de lumière, quant à lui, reste assez lent et toujours dans les tons blancs. Et la dense fumée qui englobe la totalité de la salle vient donner corps à cette lumière toujours très diffuse, créant ainsi une ambiance éthérée presque surréaliste.
Je passe presque la moitié du concert les bras au ciel, comme beaucoup d'autres personnes de la salle d'ailleurs. On ressent vraiment la musique dans chaque parcelle de notre corps (certains amis me diront le lendemain qu'on sentait les vibrations au sol jusqu'à plus de 100 mètres de la salle de concert) ! Après un long passage instrumental, Attila revient pour un morceau de Black One. Celui-ci, en plus de sa toge initiale, est à présent recouvert de plusieurs éclats de miroir sur la quasi-totalité du corps (en plus d'une sorte de couronne faite de longues piques constituées du même matériau). Les lumières convergent maintenant vers lui et se reflètent ainsi dans tous les éclats de miroir, qui eux-mêmes renvoient la lumière partout dans la salle à travers la fumée. Tout simplement magnifique ! Aux allures de boule à facettes vivante, Attlia continue sa chorégraphie très lente en plus de pousser des cris cette fois-ci très perçants (qui ne manquent pas de faire sursauter les quelques personnes somnolantes) ! Bien que la salle se soit légèrement vidée depuis le début du show, je ne vois finalement pas le temps passer. Les américains finissent cependant le set au bout d'une heure quarante, contrairement aux deux heures prévues, mais c'est tout de même une sacrée performance de leur part.
Qu'on aime ou qu'on déteste Sunn, un rituel comme celui-ci est une expérience qui prend aux tripes (au sens propre, pour certaines personnes de la salle d'ailleurs) et qui marque de toute façon les esprits (et le corps) ! Je suis bien content de l'avoir enfin vécu, surtout dans un cadre aussi adapté.

Voilà pour cette seconde journée, riche en émotions. Je ne sens plus mes jambes, il pleut, j'ai faim, l'hôtel est loin, mais je viens de vivre une des journées de festival les plus intenses de ma jeune vie.  

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