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Album

02 septembre 2019 - ZSK

October Tide

In Splendor Below

LabelAgonia Records
styleDoom/Death Metal mélodique
formatAlbum
paysSuède
sortiemai 2019
La note de
ZSK
8.5/10


ZSK

"On est tous le boomer de quelqu'un d'autre."

October Tide, Novembers Doom, Décembre Noir… Le Doom/Death le plus mélancolique aime bien rendre hommage à l’automne, la période de l’année la plus sombre et la moins joyeuse, idéal pour une musique un brin dépressive mais non moins raffinée. Personne dans le genre ne semble s’être malgré tout penché sur le mois de septembre, peut-être parce qu’avec le réchauffement climatique, septembre rime souvent avec été indien… Quoiqu’on peut trouver trace d’un groupe suédois du nom de September qui a existé au début des années 90, ayant notamment compté dans ses rangs des membres de Crypt Of Kerberos, dont l’illustre Peter Bjärgö d’Arcana. Arrêtons-nous alors au mois d’octobre avec October Tide, qui a déjà eu droit de cité sur Horns Up avec la chronique de son précédent opus, Winged Waltz (2016). Aussi je ne vais pas refaire l’historique complet de ce groupe s’articulant autour de Fredrik Norrman (ex-Katatonia) qui a connu deux périodes, une à la fin des années 90 (avec notablement Jonas Renske au chant) et une autre depuis 2009, où le groupe connaît depuis 10 ans des line-ups à géométrie variable, qui a notamment vu passer des musiciens d’In Mourning, groupe assez proche musicalement et humainement et qui en sus crèche sur le même label depuis 3 ans. D’ailleurs cette année, October Tide a devancé In Mourning avec In Splendor Below, son 6ème album. Le line-up avait bougé en marge de la sortie de Winged Waltz, on retrouve donc désormais Johan Jönsegård (Letters From The Colony, Volturyon en Live) à la basse et Jonas Sköld (Letters From The Colony, TheNightTimeProject) à la batterie. Mattias Norrman, « frère de », passe ainsi à la guitare (bien qu’il fut bassiste chez Katatonia et occupe encore ce poste au sein de TheNightTimeProject), et l’on retrouve toujours Alexander Högbom (Demonical, ex-Centinex) au chant pour la troisième fois depuis Tunnel Of No Light (2013). Ça bouge donc toujours du côté d’October Tide, mais pas trop tout de même, pour un groupe qui semble avoir trouvé son rythme (un disque tous les 3 ans) et son style dès A Thin Shell (2010) et s’y tient. Si son rattachement à Katatonia attire toujours les regards sur lui, October Tide reste peut-être en apparence un banal groupe de Doom/Death mélodique typiquement scandinave, mais la formation fait toujours le taf et n’a rien à se reprocher depuis sa reformation, sans pondre de chef d’œuvre pour autant. In Splendor Below va-t-il changer la donne ?

Avec le recul, Winged Waltz était tout de même un album assez linéaire, même s’il pouvait aisément se déguster d’un bloc. A Thin Shell et Tunnel Of No Light eux étaient plus directs, proposant quelques tubes potentiels comme "The Custodian of Science" ou "Caught in Silence". Donc je vous le donne en mille, In Splendor Below va sortir de la légère torpeur de Winged Waltz pour refaire à nouveau quelque chose de plus accrocheur et tubesque, si tant est que le genre peut se révéler tubesque. Quitte à faire deux concessions. La première, et ce malgré ce nouveau logo un brin « old-school », devenir encore plus moderne, notamment sur le son, s’éloignant bien d’un quelconque Doom/Death trop typé 90’s et très sec et abrasif. La seconde, perdre un peu de son identité propre pour se rapprocher sensiblement d’un In Mourning période Monolith, d’ailleurs sur ce nouvel album le chant d’Alexander Högbom rappelle encore plus celui de Tobias Netzell (qui pour rappel avait tenu le micro sur A Thin Shell), avec plus de voix criées qu’à l’accoutumée. Le October Tide très désenchanté de Winged Waltz va donc laisser place à un groupe qui capitalise sur ce qu’il avait fait de mieux sur A Thin Shell et Tunnel Of No Light. Et la recette va fonctionner du tonnerre. Car le groupe n’avait jamais été aussi inspiré depuis sa reformation, et après des albums plus sympathiques qu’autre chose, In Splendor Below va passer à un certain niveau d’excellence. Que ce soit dans l’aspect rythmique très moderne et efficace ou la composante mélodique très léchée et enivrante, multipliant les leads de toute beauté, nous ramenant aux plus belles heures de Slumber voire même des vieux Katatonia mais le tout franchement remis au goût du jour. Pas de révolution dans le genre ni une quelconque véritable originalité, mais du Doom/Death mélodique de haute volée, porté par un Alexander Högbom au sommet de sa forme avec des growls rauques bien gras mais, quelque part, très émotionnels. Un parfait album du genre de 44 minutes, voilà ce qu’il faut attendre de In Splendor Below, qui consacre October Tide comme un modèle de Doom/Death mélodique, un genre où il n’y a pas eu beaucoup de chefs-d’œuvre récemment à moins de chercher chez les rejetons de Jari Lindholm (Cold Insight en tête). October Tide, après bien des années d’activité cumulées, relève ce défi, et se révèle enfin.

Si A Thin Shell et Tunnel Of No Light avaient 2-3 hits à proposer à eux deux, In Splendor Below va lui mettre le paquet. Et ce dès les deux premiers singles, le très classique mais incisif et accrocheur "I, the Polluter" d’entrée, avec un Alexander Högbom qui se lâche déjà ; et le cossu "Ögonblick av Nåd" intégralement chanté en suédois pour la touche d’originalité, et excellement bien composé avec déjà quelques moments de grâce. Mais ce n’est encore rien à côté des deux sensations de In Splendor Below que sont "Stars Starve Me", splendide pièce de Doom/Death mélodique aux magnifiques mélodies et aux irrésistibles passages rythmiques et vocaux, s’offrant même des moments véritablement fédérateurs ; et "Guide My Pulse", véritable tube du genre où à peu près tout est parfait et October Tide semble au top de son inspiration, mélodies, rythmiques, lignes vocales (quel refrain, et même le pont !), tout y est. Ça fait déjà pas mal mais ça ne fait que la moitié de In Splendor Below, qui surpasse cependant déjà les 3 opus précédents… Et le reste en vaut largement la peine, dans un registre moins immédiat et plus soutenu. "We Died in October" est un peu plus sombre et dépouillé, dans la lignée de Winged Waltz, mais demeure néanmoins très prenant (avec à la clé des growls bien profonds). "Our Famine" est peut-être plus classique, mais toujours aussi plaisant grâce à l’inspiration du groupe. "Seconds" nous abreuve de mélodies bien désenchantées, toujours à la frontière subtile entre ténèbres et lumière avec ici l’appui de rythmiques plus lourdes. Et enfin "Envy the Moon" clôture In Splendor Below avec une bonne petite tuerie de Doom/Death mélodique, ou encore une fois tout ce qui fait le charme du genre s’y retrouve avec classe et application. Bref, ce 6ème album d’October Tide, leur 4ème album sous leur forme des années 2000, est assez irréprochable. Encore une fois, il n’y a pas vraiment d’originalité à signaler par rapport au style pratiqué, ni prise de risque quelconque, mais c’est finalement le seul reproche qu’on peut faire à cet album. C’est ni plus ni moins que l’apogée du groupe, 10 ans après sa reformation et en considérant ainsi sa forme actuelle, plus moderne que les deux tout premiers albums. Un album totalement excellent pour qui aime les rythmiques appuyées Doom/Death, les leads et mélodies mélancoliques de partout, et les gros growls rauques qui vont toujours aussi bien de pair. Un chef d’œuvre du Doom/Death mélodique scandinave, seul le temps nous le dira à vrai dire, mais pour les années 2010 en particulier, c’est un sacré morceau. Et aussi une belle surprise car on n’attendait peut-être pas le groupe à ce niveau, Winged Waltz apparaissant d’ailleurs désormais bien fade, et In Splendor Below lui aura droit de cité dans les bilans de fin d’année. Un must du genre « automnal », tout simplement… Là-dessous, dans les profondeurs, il y a de la splendeur.

 

Tracklist de In Splendor Below :

1. I, the Polluter (4:49)
2. We Died in October (4:58)
3. Ögonblick av Nåd (4:44)
4. Stars Starve Me (6:09)
5. Our Famine (4:47)
6. Guide My Pulse (5:04)
7. Seconds (6:57)
8. Envy the Moon (6:23)

 

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