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vendredi 9 février 2018

Carnage Fest 2 Bis

Le Cirque Electrique - Paris

Prout

Chroniqueur musiques du monde. Parfois Brutal Death / Black / Grind mais rien au dessous de 300BPM sinon c'est trop mou et je m'endors.

Les 26, 27 et 28 janvier dernier, Paris avait le plaisir d’accueillir une nouvelle édition du Carnage Fest, avec encore plus de jours, encore plus de groupes et encore plus de folie. Revenons sur ce festival Death Grind qui a carbonisé le Cirque Electrique… et mon foie.

Vendredi 26 Janvier

La soirée commence par Grind-O-Matic, groupe parisien de Grind Progressif, si vous m’en pardonnez l’expression. Ca peut faire grincer des dents comme appellation, mais je suis obligé de m’y soumettre ; Grind-O-Matic, c’est des changements de tempo continuels, des passages intelligents que je comprends pas trop trop, c’est dissonant voyez-vous ; avec pratiquement une petite touche des débuts de Dillinger. Le public est encore peu présent, et du coup assez frileux, d’autant plus qu’on se les ait bien gelées dehors en attendant que le merdier commence. Mais le Cirque Electrique sert de l’Orval, alors je ne vais pas faire prier. Du coup on se réchauffe, on s’enjaille doucement et vous attendrez la chronique du nouvel opus de Grind-O-Matic pour une étude plus approfondie de leur zic.

On enchaine avec le second groupe du festival, BOOM, groupe de Fastcore limite crusty de Toulouse avec une meuf au chant. Tant dans Lycanthropy ou Monsieur Po je kiffe à mort, tant là je reste sur ma faim. Le chant féminin (quoi le hûrlage plutôt) s’adéquate pourtant bien avec tout ce qui est crust, fastcore, powerviolence, mais le manque de coffre pêche un peu sur ce coup-là. Elle est aidée de tout le groupe donc osef, et puis l’énergie et la hargne sont là, et le public commence à prendre la gnak. Pourtant elle ne plafonne qu’à 6.2 la bière d’Orval, petites natures…

« On n’était pas beaucoup, mais on a bien rigolé » - c’est ce qu’on aurait pu entendre dire à la sortie du pit de Cop Porn, groupe de Grindcore, et second représentant de la scène toulousaine ce soir-là. On attaque déjà dans le merdier qui me parle plus ; c’est pas très intelligent, t’as une touche bien rock’n’roll, parfois ça blaste tu sais pas trop pourquoi, mais t’es toujours d’accord, et l’ambiance bon enfant se fait bien sentir, même si j’en veux à celui qui a renversé mon Orval (mais je crois que c’était moi-même en fait). En tout cas, c’est revendicateur de valeurs qui me sont chères et dont le simple nom du groupe résume très bien l’idée.

Warfuck arrive et c’est LA BRANLEE. Comme toujours en fait. Warfuck ça défonce sa race, ça blaste non stop, c’est très la violence pour jeune cadre dynamique. Simple duo lyonnais, le mot efficacité a été inventé pour eux. Que ce soit sur scène ou sur album, jamais l’auditeur s’en remet. Ce combo Powerviolence / Grindcore est juste une tuerie sans nom, qui va vite, très vite, mais avec une maitrise du sujet hors-pair ; et ce n’est pas ce soir-là qu’ils ont démenti la légende qu’ils sont en train de créer. Y’a des moments ça va très vite, tu te dis que c’est pas possible d’aller encore plus vite, bah si, les gars le font, c’est juste jouissif ! Je crois que c’est sur ce groupe qu’on a eu notre premier homme tout nu du festoche, mais je ne suis pas sûr, l’Orval m’avait déjà bien attaquée.

Mulk viendra clore la soirée de son Cybergrind Breackcore dégueulasse. Alors là on dérive carrément vers l’inhumain (ceci dit Warfuck était en train de nous y amener), avec Mr Mulk, ou devrais-je dire Mr Muscle, qui agit seul sur ses pédales d’effets noisy, dégobillant ce qu’il peut dans son micro. C’est dégueulasse, ça va ultra vite, c’est brutal à en faire chialer Mortician, c’est déconstruit à foutre la honte à Igorrr, mais y’a quand même des moments techno dansant (faut pas déconner). On a eu le droit à un show ultra gay ce soir-là avec ce Mulk au corps torse-nu luisant et si rassurant et son plus grand fan, complètement à poil, lui badigeonnant les talons d’Achille de sa semence linguale. Mulk : la décadence.

Fin de la première soirée dans un état d’ébriété confirmé, je ne sais encore comment j’ai réussi à retrouver ma chambre d’hôtel non étoilé en plein milieu de ce sympathique quartier de marcheuses qu’est Belleville.

Samedi 27 janvier

Ce n’est pas sans peine, grâce à une gueule de bois notable (merci l’Orval), que je retrouve les planches du Cirque Electrique pour cette seconde journée de festival, qui s’avère encore une fois pleine de belles promesses intelligentes.

Cette nouvelle réjouissance commence par Pendrak, dont les têtes ne me sont pas inconnues. Grindcore parisien, bien Crust, pas content, Pendrak a la lourde tâche d’ouvrir le bal pour cette seconde soirée de festivités qui restera mémorable. En effet, ce soir c’est la grosse soirée, ce soir y’a THE tête d’affiche, Extreme Noise Terror, alors ce soir dès l’ouverture, y’a déjà du monde. Pour un groupe d’ouverture, et à quoi ? 19h30 à tout casser ?! Ca fait plaisir ! Bon revenons à Pendrak. Pour une première mise en bouche, obligé d’admettre que ça tabasse pas mal, on sent bien la haine et la violence, pas mal de blast, mais quand même pas mal de passages plus groovy voire planants, sans que ce soit à outrance non plus pour ce dernier point (ouf !). Bonne presta, bonne crassouille, la cérémonie commence bien !

Les orléanais de Boris Viande enchaînent et on continue sensiblement dans la même veine, Grindcore / Crust, avec 'vla la Violence, avec un grand V. Le chant type Gronibard là que je ne sais jamais comment l’appeler autrement que « clair gogole » est un peu léger sur cette presta, j’avais un meilleur souvenir. Sinon c’est rigolo de voir le guitariste assis quand il joue, tu ne sais pas si c’est un gros feignant ou s’il a un problème et que du coup tu peux pas faire de blague dessus. Toujours est-il que le public est chaud bouillant bordel, et y’a vla le monde, à la limite d’avoir du mal à atteindre la scène sans renverser ton Orval, j’aurais pas cru putain ! Bref au programme, du blast, des sauts partout, des yells, de la bêtise, des gens qui font déjà n’importe-quoi, ok, je ne me suis pas trompé d’adresse !

Pulmonary Fibrosis arrive et c’est la tuerie ! Voila. C’est tout. A plus tard. Non plus sérieusement les gars à l’origine du Loches en Grind nous ont encore bourré la gueule de leur pot-pourri musical si délicat. Pot-pourri pourquoi ? Parce-que Pulmo c’est pas vraiment du Grindcore, c’est pas vraiment du Goregrind, c’est pas vraiment du Brutal Death, c’est pas vraiment du Slam. C’est un peu tout ça mélangé et ça passe crème. Le public est déchainé, et les deux chanteurs cartonnent à rentrer dans le lard de tout le monde. Sur scène, ça blaste et ça groove ; dans le public, ça tartine et ça danse, c’est la fête à la violence. C’est un chant pitché dégueulasse, quand c’est pas juste le public qui l’est, c’est de la brutalité sans finesse, quand c’est pas le public qui l’est… euh… on passe un bon moment quoi.

S’en suit Tina Turner Fraiseur, la nouvelle révélation Powerviolence nantaise. Avec sa brutalité sans espace, son côté D-Beat, son chant hurlé sans concession, Tina Turner Fraiseur met tout le monde d’accord sur le reste de la soirée : mandales dans la gueule pour tous ! C’est cassage de gueule en bonne et due forme, pas de pitié pour les croissants. 'Chuis déjà complètement sourd, et sans doute complètement saoul aussi, et je ne comprends plus trop ce qui m’arrive ; mais en tout cas dans le même mood que lorsque je les avais vus à l’Obscene Extreme : transporté. C’est vraiment la claque à chaque fois !

On finit le massacre sur Extreme Noise Terror, les anglais étant de la partie pour une date unique en France. D’ailleurs on l’a sentie la date unique, le Cirque Electrique était plein à craquer - j’ai ouïe dire 350 pélos, même si j’ai du mal à croire qu’on pouvait tous les tasser là-dedans – toujours est-il que si tu as commandé ton Orval au mauvais moment comme moi, c’est mort de chez mort pour te rapprocher, faudra attendre qu’un circle pit vienne démembrer l’assemblée pour essayer de la remonter à la nage vers le devant de la scène. Ca y est, je ne compte plus le nombre de potes qui s’ouvrent quelque chose et pissent le sang, l’ambiance est à son paroxysme, les anglais massacrent tout le monde avec leur Punk Grindcore limite Deathgrind par moment. Ca respire le old-school type Napalm Death / Discharge sous amphétamines, ce qui plait forcément aux plus vieux d’entre nous, avec toujours ce son très raw, qu’ils n’auront jamais abandonné pendant leurs 32 ans de carrière. Et ils sont toujours là les gars ! Toujours prêts à botter des culs, et ils ne nous ont pas épargné les salauds !

Je crois que j’ai mal partout et que j’ai encore fait que des conneries avec mes amis, il est temps de retrouver son quartier de joie pour ressusciter et tenir le dernier jour.

Dimanche 28 janvier

Déjà que l’entrée n’était pas chère – 10 euros le premier jour, 15 euros le second, là on a carrément le droit à une ristourne pour les warrior qui ont fait les trois jours avec un tarif réduit à 5 balles pour cette dernière journée. C’est ouf ! C’est super cool et suffisamment rare qu’une orga puisse faire ça pour qu’on puisse le noter.

J’avoue que je n’avais vraiment pas la motiv’ de me lever – grosse journée le lundi, plus de thune, aucune force, mais pourquoi je me fais violence en fait ?

Bah je me fais violence avant tout pour Deadmen que je n’avais jamais vu, avec Damien d’Inhumate en guitariste frontman. Deadmen, je ne connaissais pas du tout et j’avoue que la surprise a été de taille. Alors que je m’attendais à un truc de Grindcore bien saillant, je suis tombé nez à nez avec un groupe de Postcore / Sludge, dans la veine totale de Neurosis. Je ne savais pas qu’ils faisaient ce genre de musique sur Nancy, je croyais qu’il n’y avait que des trucs de décérébrés ultraviolents. Ca joue bien, c’est carré, c’est propre. Ca change de ce qui s’est passé ce week-end. Néanmoins c’est vraiment pas ma cam’ sur le coup, mais je suis obligé d’admettre que les zicos donnaient vraiment l’impression de se produire sur scène avec leurs tripes, et même si c’est pas forcément joli à entendre (pour moi), c’est joli à regarder !

Le tempo remonte brutalement avec les parisiens de Balance of Terror, le seul groupe de Brutal Death qu’on aura de tout le week-end. C’est assez technique par moment, très lourd et foncièrement construit. Le chanteur a un super bon coffre, j’aime moins ses passages yellsés mais quand il part dans le guttural lissé, c’est vraiment sympa, un peu dans la veine de Sven d’Aborted. Le groupe joue bien, rien à dire. Toujours est-il qu’on est dans du très très classique là, vraiment aucune surprise à la clé. Ca aurait été la claque y’a 15 ans, maintenant j’avoue que je m’ennuie un peu. J’aurais dû me mettre à picoler un peu plus tôt pour me foutre dans l’ambiance, là j’ai trop l’impression de voir un énième groupe de BDM, sympa, sans contrefaçon, mais sans surprise.

Ca fait bien longtemps que je n’avais plus vu Trepan’Dead ! Du coup ça fait vraiment plaisir de revoir les copains et de remarquer que eux non plus, ne vieillissent pas. Alors là, on repart directement dans les clous du festoche, avec un groupe de Grindcore de Valenciennes (oui oui, ils ont ça aussi). C’est brutal, y’a pratiquement que du blast partout, mais avec quand même quelques touches de puka puka pour faire danser les grindeux du dimanche. Les deux chants se répondent sans cesse, ce qui donne une putain de patate à l’impression générale du show, y’a pas de temps mort, le public plus disparate qu’hier n’en est pas pour autant timide et joue le jeu de la teuf de fin de week-end. Ca slam dans tous les sens, ça se brutalise les esgourdes sans protection, encore mieux qu’un SIDA bien attrapé volontairement.

Arrivent leurs bro d’Unsu, histoire de rester dans la même artère Deathgrind. Que dire des karatékas d’Unsu sérieux ? Que ça tabasse à tous les niveaux, autant techniquement qu’au niveau du tempo, que ça lorgne du côté des morceaux les plus brutaux de Nasum (avec un petit ton de voix parfois similaire de la grande époque), que t’as de la touche Rotten Sound par-dessus et que du coup ça flirte bon avec le Grindcore suédois ? Ouais, on pourrait dire ça, carrément même ! T’as même des passages plus Hardcore, une légère brise, voire plus rock’n’roll groovy, mais là faut tomber sur le bon moment, pas être en train de te faire écraser par un slammeur de 110 kilos, même s’il est très sympa au demeurant. Bref, la branlée, comme d’hab.

On termine le festival pas les Chiens d’un peu partout en France (Stras', Nancy, Bordeaux) et leur Powerviolence / Grindcore pas piqué des hannetons. Si je dis encore une fois que c’est très très la violence, avec aucune finesse et du blast partout, je vais encore me faire engueuler ? Parce-que je ne saurais pas trop quoi vous dire d’autre tellement Chiens, bah ça reste Chiens, de la haine, de la violence, du chaos. Ca pue la crasse, ça pue la drogue, ça pue le SIDA, tout ce qu’on aime. Pas besoin d’épiloguer 100 ans, de toutes façons vous avez bien compris toute la dimension du festival.

D’ailleurs ce festival parlons-en pour conclure ! C’était putain de rafraichissant ! Trouver une affiche de qualité pour que dalle, faire trois jours de pure fiesta avec ses copains, ça n’a juste pas de prix. Cette putain de liberté qu’on avait dans le Cirque Electrique et cet Orval toujours fidèle au poste (qu’on a quand même fini par dégommer le dimanche), mon heure de retard au taf le lundi matin parce-que je m’étais trop mis caisse un dimanche, le vomi dans les toilettes du bureau à la pause-café, tout était parfait dans ce putain de week-end. Je remercie vraiment trop Adeline, Baf, Yoann, Manu (pour ses photos aussi) et tous les autres qui ont participé à ce grand carnage, et je m’incline devant le Cirque Electrique, qui a accepté d’être le lieu de toutes les immondices. A l’année prochaine !!!

PS : L’Orval est une bière belge à fermentation combinée, avec une levure d’origine contrôlée et une levure sauvage, puis refermentation en bouteille et donc à maturation longue, ce qui lui confère son goût unique et parfait alliant de manière équilibrée, rondeur, amertume et notes acidulées. Une des rares vraies trappistes belges. C’est la seule bière qui s’accorde au masculin, en effet on dit un Orval et s’accorde au pluriel ; on dit des Orvaux (sujet à controverse).