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jeudi 11 décembre 2014

Craving + Staircase Paradox

Le Coffre à Bières - Châteaudun

U-Zine

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Pas grand-chose à dire finalement. Du metal, du vrai, du qui transpire de la moustache qui déboule à Châteaudun, patelin malhabilement situé dans le peu accueillant département du 28 (représente), ça nous a surpris.

Effectivement, dans une bourgade qui excède péniblement les 15 000 âmes intra-muros, autant dire que le metal s’est vite, pour ne pas dire presque toujours, retrouvé persona non grata. Et pourtant, au-delà des apparences, et étrangement, un public amateur de cette scène existe bel et bien dans la ville et ses abords, très demandeur de concerts de proximité sans être nécessairement être contraint de quitter la ville et monter sur la capitale pour se repaître de sons amplifiés, qu’il s’agisse de pointures ou non.
La venue au Coffre à Bières de Necroblaspheme (excusez du peu) il y a 3 semaines de cela, avait, au-delà de la circonspection satisfaite de votre serviteur, presque brassé les foules, toutes proportions gardées, entendons nous bien.

Le Coffre à Bières nous avait habitués à une approche plutôt frileuse mais salutaire de musiques amplifiées, se limitant au maximum au hard-rock. Ayant trouvé une audience plus que satisfaisante à l’occasion de cette date, Dominique, tenancier des lieux a accepté de retenter l’expérience et de produire, sous l’impulsion de Blytch Prod, deux groupes à l’union improbable. Staircase Paradox et Craving. Deux groupes qui n’avaient à cette occasion rien d’autre en commun que le matériel prévu pour la soirée.

Le premier, qui entamera les hostilités ce soir là est originaire de Grenoble, actuellement basé sur la grande couronne parigotte. Je ne m’attarderais volontairement pas sur Staircase Paradox qui, sans remettre en cause la propreté de l’exécution d’un set qui rappellerait un certain Coldplay qui aurait vaguement lorgné sur les atouts d’un Radiohead, m’a laissé de marbre. Non qu’il s’agisse d’un quelconque sectarisme quant à la pop, simplement, celle pratiquée par la formation m’a paru manquer de relief pour attirer mes faveurs, mais nul doute que Staircase Paradox trouvera son public, la conviction elle, est bien là, le professionnalisme, indiscutable.

Doucereuse mise en bouche donc, introduisant ainsi Craving, dont nous avions déjà évoqué les charmes nuancés dans nos colonnes. Et autant le dire tout de go, la saveur de Craving révèle ses nuances en live.

Le Coffre à Bières, ce n’est pas l’ambiance chaleureuse d’un bar un samedi soir, c’est un hangar transformé en paradis du Sacro-saint Houblon, aux néons projetant un éclairage froid, le cadre n’est pas immersif pour le spectateur, l’acoustique, forcément imparfaite pour l’auditeur, comme pour le groupe.
Mais manifestement Craving s’en tamponne le coquillard et fonce tête baissée dans son set, en vue de convaincre les sceptiques sur le départ, qui, récompense ultime, sont restés, et témoigner de ce dont le groupe est capable.

Si Fucked Up Beyond Repair nous avait laissé dubitatifs, trop/pas assez metalcore, le cul entre deux chaises mais avec ses sursauts de génie, Craving a donné une belle leçon a quiconque prétendrait avoir vu suffisamment de concert metal pour être blasé, et j’en fais partie. Le quintet Chartrain a joué fort. Il a joué vite. Il a joué bien.
Quand bien même leur style d’origine ne me correspondrait pas, la bonne humeur et l’intensité des compos, en dépit de l’endroit, auront largement converti l’audience en emporté les plus sceptiques d’entre nous.

Il s’est dégagé une énergie folle de ce set, une énergie sincère, une énergie vraie.

Bien entendu me direz-vous, il s’agissait d’un bar paumé là où personne ne va. Alors non ce n’était pas hype, non ce n’était pas calibré, c’était en roue libre, un vrai concert bien metal, avec la disto, des larsens et de la sueur qui vont bien, enrobé de la propreté d’un groupe qui a les dents qui rayent le plancher.
Le statisme des musiciens, très (trop ?) concentrés sur leurs instruments, à l’affût du moindre pain que seule l’inexpérience touchante de la scène, aussi modeste soit-elle, peut provoquer, a été largement contrebalancé par l’incroyable frontman qu’est Raph. Frontman en devenir.

S’il semblait s’essouffler sur l’EP, si l’on pouvait reprocher son omniprésence sur Fucked Up Beyond Repair, voilà un homme qui deviendra sans aucun doute un frontman de première ligne tant son énergie, son agressivité décomplexée, sa voix qu’il a appris à maîtriser ont fait mouche. Hallucinant, véhément, voilà qui caractériserait bien le bougre, porté par ses musiciens qui développent leur art au cordeau. Pour un si jeune groupe c’est et restera assez rare.

Craving, en plus de jouer l’intégralité de son EP, a su proposer de nouveaux morceaux, plus instruits, largement départis de leurs influences originelles. Un travail énorme a été fait sur la composition des titres, et leur dévoilement à ravi bien des esgourdes. Manifestement plus autonome, Craving peut d’ores et déjà espérer une carrière placée sous le signe du succès. S’il parvient à convertir cette énergie en d’originale compositions.

Une bien belle soirée.