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Album

09 décembre 2014 - U-Zine

Agnosys

Alterations

LabelGreat Dane Records
styleBlack/death thrash metal acoustico-atmosphérique m
formatAlbum
paysFrance
sortieavril 2011
La note de
U-Zine
5.5/10


U-Zine

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Agnosys à l'issu de dix ans d'existence, vient de sortir "Alterations", son premier album. Au boulot!

On est d'emblée titillé par la versatilité du groupe, sans doute son caractère dominant. L’éventail des influences est large, ça passe du death au thrash au black à l’acoustique à l’atmosphérique à… On pourrait continuer avec des qualificatifs plus tordus encore, mais autant s’arrêter là. L’intention de mélanger les styles est présente, mais quelque chose dans la recette empêche les ingrédients de se confondre. Il y a de la recherche, c’est indéniable. Mesures composées, travail sur les dissonances, les harmonies… Mais bien souvent, on voit les bonnes idées filer au moment où elles pointent le bout de leur nez - je pense entres autres au morceau « Le lac » et son passage typé black, et c’est bien dommage ! Les Parisiens revendiquent également l’influence d’Opeth, les champions poids lourds des morceaux à tiroir. On sent dans « Towards a Crimson Gorged Progeny » (qui jouit pourtant d’une bonne intro) cette volonté de perdre l’auditeur à travers une musique qui se meut sans cesse, mais c’est malheureusement un peu maladroit (cf. l’audacieux combo blast/guitare acoustique vers le milieu du morceau), et le groupe donne l’impression de ne pas maîtriser son propos. N’est pas Opeth qui veut ! Différemment, « The Ghost Within » parvient plus facilement à trouver son chemin - celui du death-metal en l’occurrence, et est à mon goût plus facile à écouter, tout en gardant une certaine liberté dans sa trame.

Côté exécution, mention spéciale au batteur qui, malgré une production pas très valorisante, arrive malgré tout à impressionner grâce à sa précision et sa dextérité. On n’en dira pas autant des guitares ; les soli ne sont pas inspirés et pas très bien exécutés non plus. La basse, quand elle ne joue pas ne pas en arpèges, est noyée dans le mix ! Le chant est assez bon (le dernier chanteur en date vient de se faire remplacer par le chanteur d’Horresco Referens), varié mais même remarque à la production du studio Hybreed : ça manque de patate ! S’il n’est pas essentiel d’avoir un son à toute épreuve, il s’agit malgré tout d’embellir l’objet musical et ici, le maquillage, de près, ne trompe pas.
De près, car en effet, dans l’ensemble, ce n’est pas si mauvais que ça. On ne parle quand même pas du groupe de première zone qui se paye son premier studio à 100 euros la semaine : Andrew. G, le responsable du studio, a également produit Eibon, Glorior Belli, Seventh Nemesis, etc. A la comparaison, difficile de ne pas constater l’écart de qualité sonore ; Agnosys aurait-il souffert de la négligence de son studio ?

Au niveau des paroles, on en sait peu, les textes étant introuvables sur le net. Sur internet, une interview (Les acteurs de l’ombre, 2005) éclaire sur quelques points :

"(…) Il s’agit [des] thèmes [suivants] : questionnement sur le sens de l’existence, remise en question des repères moraux établis, doute profond, etc. En fait, s’il devait y avoir un lien entre ces thèmes et le changement de nom (à l’origine le groupe s’appelait Amalek, NDLR), je dirais qu’ils correspondent en quelque sorte à la démarche que nous essayons de suivre depuis que le groupe a son identité propre. Depuis le début le but est de faire la symbiose de tout ce qui peut nous intéresser dans les divers styles de Metal, et même ailleurs, de faire quelque chose qui ne soit pas enfermé dans un modèle existant."

La démarche d’Agnosys est donc purement musicale. Si on devait entreprendre des recherches étymologiques et faire la relation entre le nom du groupe et le titre de son album (« Alterations »), on peut alors dire que les cinq musiciens, par un truchement linguistique futé, ont trouvé un prétexte pour sortir des cadres conventionnels du metal, établit une justification de leur propre démarche pour ainsi faire leur musique à leur façon, sans barrières. C’est une forme de prétention, pas inutile, mais risquée. Car sans frontières, sans codification du langage, nous sommes perdus. S’il est en effet courageux d’oser la création musicale, il n’est pas non plus inutile de suivre certaines conventions de composition, jusqu’à trouver la recette qui fonctionne.

On peut dorénavant retirer deux axes de critique. D’un côté, on a affaire à un groupe scrupuleux, désireux de bien faire et d’offrir une musique riche et tentaculaire mais qui, selon moi, n’y arrive pas encore. De l’autre, dans la forme, on regrette la production cul-entre-deux-chaises, suffisamment bonne pour trouver un label, pas suffisante pour séduire l’amateur tatillon que je suis. Mais ce n’est pas tant ça que l’impression qu’on a d’entendre une musique ambitieuse, qui mérite autant plus de travail de fond que d’efforts pour trouver une production qui l’honore.

1. From the Heights, from the Depths
2. Towards a Crimson Gorged Progeny
3. Inborn Defects
4. Sons of the Void
5. Banished
6. Le Lac
7. The Ghost Within
8. Τάνταλος