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Album

09 décembre 2014 - U-Zine

Xerath

I

LabelCandlelight Records
styleExtreme Symphonic Metal
formatAlbum
paysRoyaume-Uni
sortiemai 2009
La note de
U-Zine
8.5/10


U-Zine

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Un grand label ne fait pas forcément un bon travail.

C’est un peu près ce qui peut ressortir de l’écoute de ce premier opus des britanniques de Xerath. Un album inspiré, technique, talentueux et original perdu dans les méandres d’une méconnaissance totale, sortie dans l’indifférence la plus complète à l’aube de la période estivale 2009, et ce, sans la moindre couverture médiatique ou promotionnelle…sur Candlelight (Ihsahn, Insomniun, 1349)…et pourtant…

Non pas que ce premier opus répondant au nom évocateur de "I" soit un chef d’œuvre indispensable ou expérimental, mais il arbore des qualités indéniables et une volonté réelle de proposer quelque chose de différent, de se différencier de la masse et d’inclure de la nouveauté dans sa musique. Tentant de marier les genres, de fusionner ce que peu font encore et de rapprocher les antinomies, Xerath s’évertue de manière intense à livrer un métal extrême très cinématographique et à la production écrasante.
Il faut imaginer un Meshuggah quelque peu moins syncopé, saupoudré d’une production rappelant inévitablement Strapping Young Lad pour sa densité sonore et ses explosions constantes dans lesquelles on aurait immiscé des symphonies que ne renieraient ni Therion, ni Dimmu Borgir lors de sa période Death Cult Armageddon.

Très intense et court (à peine quarante minutes), Xerath créer un techno-thrash foudroyant, lourd et technique que l’on pourrait également rapprocher de Sadus (pour l’atmosphère) ou Melkong Delta (pour le mariage des symphonies) mais en incorporant une infime touche de personnalité qui, si elle n’est présente encore qu’en filigranes, est bel et bien présente. Arriver sur la scène avec un tel premier album est une chose rare, notamment en ce qui concerne la production à la puissance colossale. "Alterra" par exemple s’ouvre sur un hurlement du vocaliste Richard Thomson, dont l’organe vocale, souvent rauque et lourd, s’envole parfois dans des contrées plus criardes proche du black. Les deux guitaristes nappent le morceau de soli servant presque de rythmique et l’importance des orchestrations se fait prépondérante. Elle apporte une grandeur et une mélancolie à un métal suffocant et mécanique, créant un paradoxe saisissant entre la chaleur des symphonies et la froideur glaciale des guitares et du chant, schizophrénique et hurlé.

"Intrenity" ouvre l’album sur une atmosphère très dense et tournoyante, qu’un certain Danny Elfman ou Mustis (très inspiré par le compositeur) ne renieraient pas, preuve d’une très grande maturité de composition et de son, tant l’ensemble sonne imposant et massif. Les guitares, lourdes, se marient à la perfection aux orchestrations tandis que le chant se fait hurlé, syncopé, martial. La production multiplie les explosions, laissant l’auditeur en proie à une énorme puissance, à l’instar du travail sonore de Devin Townsend. On remarque que le groupe ne joue pas sur la vitesse, et privilégie la composition plus que la démonstration, malgré les descentes de tom foudroyantes de Michael Pitman derrière ses futs.

Une forte cohésion ressort de ce "I", sa courte durée ajoutant une intensité et écartant indéniablement le risque d’ennui. Même si la musique reste très épique, les morceaux ne dépassent jamais les cinq minutes, sans pour autant proposer de réelles structures ni refrains, Xerath allant là où son inspiration le mène, et s’écartant par le même biais, au fur et à mesure des écoutes, d’influences de prime abord évidentes et réussissant un mixage risqué d’éléments musicaux opposés.
"False History", à la longue ouverture symphonique ("Interlude"), montre probablement le vrai visage de ce que deviendra le futur du groupe anglais. Un monde musical lourd et inquiétant, presque dramatique, aux vocaux puissants mais souvent criards et angoissant, et aux riffs aliénants, répétitifs, scandés et lacérant. Si la basse se fait peu entendre dans le mix, les guitares ont été accordé très basses, renforçant la noirceur de l’ambiance, malgré la présence d’un solo lumineux et mélodique, avant un alourdissement général sur une double pédale écrasante. "Nocturnum" au contraire se veut moins lourde mais plus syncopée, alliant à la perfection un Meshuggah symphonique de grande classe, au chant enragé avant un break orchestral absolument sublime et planant.

Le plus long "Consequences", à l’impressionnante cavalcade symphonique, sombre et tragique (l’utilisation des violons et des altos est d’une intelligence rare dans le style, apportant une grande noirceur sans l’utilisation annexe de cuivres), semble conter une histoire malsaine et ambitieuse, tortueuse à souhait, d’où une certaine ambiance moyenâgeuse. Un contretemps magistral en plein milieu du morceau, amené par un riff en polyphonie et une narration ambitieuse, conclut l’un des meilleurs titres de l’album. Quand à la suite "Reform pt I" et "II", la première partie accueillera une tentative de chant clair qui se révèlera le seul réel point noir de cet opus (surtout en comparaison du chant extrême, maitrisé de bout en bout) car trop fragile et presque faux, complètement en décalage avec l’intensité de son registre brutal. Tout l’inverse de sa suite, intense et mécanique, résumant à presque elle-seule le genre pratiqué par les britanniques, au solo d’une limpidité magnifique, que l’on pourrait croire sortie d’un disque de Devin Townsend.

Sans encore révolutionner la musique, l’on peut réellement se demander les choix marketing des labels, laissant une telle signature dans l’ombre au profit d’artiste certes plus dans l’heure du temps mais également bien plus frileux créativement. Car Xerath réussit l’exploit de marier un bloc monolithique et étouffant à des symphonies sombres mais forcément vivante et révélatrices de sentiments humains (nous sommes loin de riff à la simple assisse mélodique, se cachant derrière les claviers comme le font moult groupes de sympho ou black mélodique). Il reste encore une personnalité à affirmer et laisser murir, mais avec un premier opus de ce calibre, force est d’admettre que les espoirs sont en droit d’être grands…et éclairer par la lumière des projecteurs.

1. Intrenity
2. Alterra
3. Nocturnum
4. Consequences
5. Interlude
6. False History
7. Abiogenesis
8. Reform (Part I)
9. Reform (PArt II)
10. Right to Exist

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