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Chasse le Dragon #6 : Animalize, Black Sword Thunder Attack, Elle Tea, Palantyr...

lundi 30 juin 2025
Team Horns Up

Compte groupé de la Team Horns Up, pour les écrits en commun.

Autant vous le confesser d'emblée : rarement rubrique aura été aussi difficile à remplir de sorties de qualité - et ce même si l'un de nos albums de l'année, à savoir celui d'Animalize, y figure. Manque de vraies locomotives, manque d'albums dont on se dit qu'on y reviendra d'ici à la fin de l'année - à l'exception de quelques-uns comme Animalize, bien sûr, mais aussi les excellents Black Storm Thunder Attack, Helms Deep ou Teaser Sweet.

Heureusement, l'expérience aidant, on commence à savoir de plus en plus vite identifier ces quelques perles rares, parfois même dès les premières notes, et on perd moins de temps à chasser le menu fretin qui pullule sur un NWOTHM Full Albums où... chaque groupe ci-dessous a vu son album être uploadé. N'empêche : vivement l'été, puis la rentrée, et leurs habituelles sorties phares, car le heavy sent un peu le renfermé en ce mois de juin. Que ça ne vous empêche pas de découvrir la sélection de la rédaction, garantie sans faute de goût !

Groupes évoqués : Animalize | Elle Tea | Black Sword Thunder Attack | Hyena | Helms Deep | Palantyr | Savage Master | Teaser Sweet 

 

Animalize – Verminateur
Heavy metal – France (Dying Victims Productions)

Pingouin : Place au deuxième album de l'un des secrets actuellement les mieux gardés du heavy français : le combo lyonnais Animalize a sorti le 23 mai dernier son 2e full-length, Verminateur, chez Dying Victims Productions.

Animalize pousse à fond les curseurs activés sur Meat We're Made Of (2022) : palanquée de riffs heavy oscillant entre les versants speed et power du genre, paroles intégralement en français, pleines d'introspection et clamées avec émotion et vigueur … un cap est passé, de façon bluffante. Les canuts avaient déjà démontré leur facilité à nous coller des refrains dans la tête (« Sous l'œil du charognard », « Samurai de l'Univers »), mais là le quatuor se dépasse tout simplement : « Cheval Astral » est d'ores et déjà gravée dans le disque dur de mon cerveau, de même que l'exceptionnelle « Envahisseurs ».

Le cerveau du groupe, Niels, nous confiait dans une interview fleuve avoir investi pas mal de temps, d'énergie et d'argent dans ce deuxième album … et ça se sent : la production impeccable, la pochette léchée, les clips authentiques et carrés (« Damnée »  et « Au jugement de soi »). 

Ce deuxième album est un succès sur tous les plans. Il me tarde désormais de revoir Animalize sur scène, rendez-vous a priori en 2026 pour ça !

 

Elle Tea – Into the Fall
Hard rock / heavy tout doux – Italie (Indépendant)

Dolorès : Dans la catégorie « petite douceur de début d'été », Elle Tea fait grandement plaisir. Je découvre le projet de Leonardo Trevisan avec cet EP Into the Fall, première partie des morceaux d'un futur album à paraître par la suite. Le multi-instrumentiste italien (également illustrateur, derrière les pochettes du projet) semble bien prolifique, puisqu'il a déjà sorti deux albums et un EP depuis 2023 ! Visiblement, la quantité n'altère pas la qualité puisque Into the Fall me donne clairement une envie boulimique de découvrir les sorties précédentes.

Il faut dire que le projet a quelque chose d'assez easy-listening avec son hard rock / heavy chill à la prod toute douce, aux accents folk et prog, qui plaira aux fans de Wytch Hazel par exemple. J'insiste sur les sonorités où absolument rien d'agressif ne ressort, que ce soit dans les riffs de guitare qui ne manquent pourtant pas de dynamisme ou du côté du chant très sensible et authentique qui m'a immédiatement conquise. Ce sont 20 minutes qui font l'effet d'un premier rayon de soleil qui chatouille le visage au petit matin. Une fois passée la surprise d'entendre presque les mêmes notes sur le titre introductif que sur les arpèges mémorables de « The Message [Tablet II] » du dernier album de Blood Incantation, rien ne ternit l'écoute et on y revient avec plaisir.

 

Black Sword Thunder Attack  – Black Sword Thunder Attack
Heavy épique à la Warlord – Grèce (No Remorse Records)

Malice : Soyez-en sûr : on tient ici l'un des albums de heavy qui fera le buzz cette année dans le milieu. Tout est réuni pour que ce premier album de Black Sword Thunder Attack se taille une place de choix dans les coeurs de tous les amoureux d'epic heavy metal – et bien évidemment, ça vient de Grèce (et de No Remorse Records). Les locaux suivent d'ailleurs peut-être BSTA depuis ses débuts sur démo en... 2002, mais ce n'est qu'en 2015 qu'un EP sort avec Meike au chant, qui reste présente sur ce premier opus éponyme.

Si vous aimez le heavy surproduit, par contre, passez votre chemin : ici, tout n'est que riffs, sans cesse, rehaussés de ces claviers oniriques à la Warlord – clairement, le regretté William J. Tsamis est l'influence principale de Black Sword Thunder Attack, qui installe des ambiances à couper au couteau malgré ce son si « lo-fi » (la belle ballade « On the Way of Acheron », les tubes « Evil Sorcery » et « Master of Hell »). On pense aussi, plus récemment, à Eternal Champion : comme Jason Tarpey, Meike n'est pas une vocaliste démonstrative, plutôt une incantatrice au service d'une musique inspirée de bout en bout. On a hâte de voir ça sur scène, car les attentes seront énormes !

 

Hyena – About Rock and Roll
Heavy metal – Pérou (Dying Victims Productions)

Malice : L'Amérique du Sud est assez douée pour balancer à intervalles réguliers une petite bombe de heavy souvent brute de décoffrage, loin des fioritures épiques des scènes grecque ou nord-américaine. Hyena nous vient du Pérou et n'a qu'un objectif : jouer vite et fort. Quitte à en faire un peu trop avec ce chant qui dépasse parfois les limites du bon goût (« Hail the Fire »), mais en tapant souvent dans le mille : c'est efficace et ça sait à quel public ça s'adresse (indice : le dernier titre de l'album s'appelle « Keep it True »...).

Mais ce qui laisse optimiste pour la suite, c'est que Hyena sait aussi composer de vrais très bons morceaux, comme « The Eternal Zero » aux riffs et au refrain plus mélodiques et Maideniens, ou le franchement excellent « Epitome of Evil », presque à tiroirs. En fait, amputé d'un ou deux titres plus banals, About Rock & Roll serait une petite bombe – et même comme ça, après 7 ans d'existence, Hyena réussit le cap de son premier album avec brio. Reste à raffiner tout ça.

 

Helms Deep – Chase The Dragon
Heavy/power metal – USA (Nameless Grave Records)

Malice : En 2023, Helms Deep surgissait un peu de nulle part et sortait un excellent premier album, Treacherous Ways, porté notamment par des refrains efficaces et surtout la basse galopante de son maître à penser : John Gallagher. LE John Gallagher de Raven, légende de la NWOBHM, qui accorde visiblement assez de temps à son side-project pour qu'un deuxième opus sorte déjà. Et là, quelle claque : Chase the Dragon surpasse Treacherous Ways de la tête, des épaules et probablement même d'une bonne poitrine.

Le songwriting, ici, est fantastique, épique mais direct (dans l'esprit d'un Satan), traversé d'influences diverses et variées qui font passer l'écoute à vitesse grand V sans jamais que la monotonie s'installe. L'arrivée du guitariste Ray DeTone, peut-être, est derrière cet énorme step-up : si la basse de Gallagher claque toujours autant, la guitare se taille une place de choix dans des compos alambiquées (le solo bluesy de « Craze of the Vampire », l'extraordinaire instrumental final « Shiva's Wrath »). Et puis il y a ce chanteur, qui brille ici bien plus que sur Treacherous Ways, alternant voix plus basse et agressive à des montées aiguës puissantes plutôt qu'en falsetto (à la manière d'un Matt Barlow) : écoutez « Black Sefirot », « Frozen Solid » ou « Flight of the Harpy » pour comprendre qu'on tient l'un des tous meilleurs vocalistes du genre. Helms Deep n'a pas encore prévu de live, mais si John Gallagher a bon goût, il lâchera Raven, qui ne va nulle part depuis longtemps, pour se concentrer sur ce qui peut devenir une valeur sûre...

 

Palantyr – The Ascent & The Hunger
Heavy épique – France (Jawbreaker Records)

Malice : Deuxième entrée française de cette Chasse au Dragon, dans un registre cette fois bien plus « traditionnel » que Animalize : Palantyr a sorti son premier E.P The Ascent & The Hunger via Jawbreaker Records, et le moins qu'on puisse dire est que c'est très prometteur. Le groupe a, il est vrai, existé pendant 10 ans sous le nom Destrukt mais, suite à l'arrivée de l'excellente Athéna au chant, a rapidement décidé de changer de D.A, et de style, pour le meilleur.

Un E.P composé en réalité de 3 titres déjà sortis en 2023 sous le nom The Ascent, et donc assorti de 3 nouveaux morceaux (dont une reprise) qui ne révolutionnent pas le style de Palantyr. Tout au plus remarquera-t-on l'accent placé sur ce style très épique déjà présent sur « The Son of the Mare » (toujours le moment fort de The Ascent & The Hunger), et que regretteront peut-être les fans du côté plus speed du groupe. Nul doute que les Lorrains sauront associer le meilleur des deux mondes sur un inévitable premier album ; en attendant, ils ont déjà les honneurs d'une programmation au Keep It True Rising V en octobre prochain, et c'est mérité !

 

Savage Master – Dark & Dangerous
Hard rock/Heavy metal– USA (Shadow Kingdom Records)

Malice : Certains groupes de heavy metal « à chanteuse » n'en font pas énormément, justement, concernant l'identité de leur chanteuse et refusent d'en faire une icône à la Doro (ou à la Castle Rat plus récemment). C'est le cas de plusieurs entrées de cette rubrique. Mais Savage Master ne s'embarrasse pas de complexes : Stacey Savage est la reine du groupe, sur la pochette comme sur scène où elle martyrise ses comparses en faisant hommage à son surnom.

Surtout, au-delà du gimmick, ce Dark & Dangerous confirme que Savage Master a une belle personnalité : c'est un peu moins agressif que pouvait l'être, par exemple, With Whips & Chains, ça s'aventure même dans des recoins plus glam et catchy (« Devil Rock »), voire carrément hard rock (« The Edge of Evil » et son côté Sumerlands qui ressemble presque à un hommage). Stacey maîtrise mieux que jamais sa belle voix chaude, sur laquelle un poil trop d'effets sont mis sur la longueur sans que ça gêne le plaisir d'écoute. Bref, un bon album de plus au compteur pour Savage Master qui devrait hanter les scènes de festivals spécialisés et sera à ne pas manquer.

 

Teaser Sweet – Night Stalker
Hard rock / Heavy metal – Suède (High Roller Records)

Matthias : Vraiment, je ne sais pas ce que bouffent les artistes en Suède, mais ce pays a une propension à rendre le kitsch digeste – et pas qu'au rayon metal – qui parvient toujours à me faire bouger. Pourtant je n'ai jamais accroché au hard rock, et encore moins à sa variante FM, habitué que je suis aux guitares saturées et aux voix qui grattent. Seulement voilà, parfois, sur un clic intempestif et sur une oreille un peu persévérante, on se rend compte qu'on a déterré la perle rare.

Il faut dire que Teaser Sweet bénéficie de la voix de Therese Damberg, charismatique et acidulée juste ce qu'il faut, qui justifie à elle seule de laisser l'album tourner. Or, si les premiers morceaux restent sympathiques, « Living in Sin » m'a pris par surprise pour le tube potentiel qu'il est, übercliché mais effectué à la perfection, avec montée aigüe – pile jusqu'où il faut – et guitare qui ronronne de rigueur. On y revient, juste pour reprendre le refrain. Night Stalker enchaîne avec « Blue Sky », ballade qui lorgne allègrement vers la folk à l'américaine, et qui le fait bien. Et puis paf, on lève le poing sur « Eat you Alive », deuxième tube de l'album, cette fois beaucoup plus heavy et plus riffu, avec un Marcus Damberg à la gratte qui s'amuse – oui, c'est le frère de Therese.

Nigt Stalker a pour qualité d'être un album court, qui ne s’embarrasse guère de fioritures pour enchaîner des morceaux toujours plus efficaces que le précédent. Teaser Sweet nous offre là un très chouette moment, peut-être pas le plus mémorable de cette sélection, mais qui s'écoute d'un bout à l'autre encore et encore, avec un plaisir renouvelé et certainement pas coupable.

 

 

Quelques compléments de dracologie :

  • Dans la lignée des nombreuses sorties à chant féminin de cette sélection, Lady Beast a sorti un album particulièrement classique, mais particulièrement efficace : c'est par ici.

  • Evidemment, il a fallu qu'à peu près au moment de boucler cette rubrique déjà fort tardive, l'un des meilleurs albums de heavy épique/epic doom de l'année sorte : ruez-vous sur l'extraordinaire Fer De Lance, Fires on the Mountainside. Un vrai voyage en musique, riche, varié et fascinant !

  • Ca rentre difficilement dans la sélection, mais l'album du duo Adrian Smith (Iron Maiden)/Ritchie Kotzen (The Winery Dogs, ex-Mr Big) est une pépite de blues rock aux accents quasi-Soundgardenesques par moments, qui ravira les fous de guitare parmi vous. Le single "Black Light" est à découvrir ici.

  • Pour les amateurs de heavy/doom bizarroïde, The Lord Weird Slough Fega sorti un EP, composé de chutes studio de l'album Traveler (2003).