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mercredi 20 septembre 2023

Pyrenean Warriors Open Air 2023

Open Air - Torreilles

Sleap

Live reporter et chroniqueur occasionnel dans divers genres (principalement extrême).

Sleap : Depuis sa création en 2015 dans la commune de Torreilles, le Pyrenean Warriors Open Air s’est petit à petit imposé comme un rendez-vous immanquable de la période de rentrée. Avec des affiches toujours très pointues en termes de heavy metal et assimilés, le festival catalan est aujourd’hui un haut lieu de pèlerinage pour tout fan de metal traditionnel qui se respecte. Il n’y a qu’à voir la population présente : les locaux et autres gens du Sud de la France ne constituent qu’une petite partie du public total. De la Bretagne au Grand Est en passant par l’Ile-de-France, le Nord ou la région Rhône-Alpes, tous les coins sont représentés. Et en plus du large public espagnol, de nombreux étrangers font également le déplacement depuis toute l’Europe et au-delà !


Photos par SimWill66

J’arrive pour ma part dans le courant de l’après-midi vers la fin du concert de Sin Starlett (avec son frontman en cosplay d’Obélix) et en profite pour refaire le tour du propriétaire. Bien que je connaisse déjà le festival par cœur, je prends toujours plaisir à m’y balader et surtout à retrouver les dizaines et dizaines de copains présents.

Le lieu reste le même : un camping ombragé dans une petite pinède à proximité de la charmante chapelle de Juhègues – que l’on peut d’ailleurs visiter – et un site qui, contrairement à beaucoup d’autres festivals, est vraiment « à taille humaine ». Pas plus de mille personnes en tout : une jauge parfaite pour un cadre qui l’est tout autant. La seule et unique scène sur laquelle vont s’enchaîner les concerts arbore toujours la fameuse banderole « Shark Stage » avec le logo de Manilla Road. Niveau consos la bière coule évidemment à flots et les différents foodtrucks (pizza, crêpes, burgers, etc) sont toujours bien achalandés. Enfin, côté stands, les meilleures distros de France et de Navarre sont toujours présentes, voyez plutôt :

Avant d’entrer dans le vif du sujet je mentionne tout de même un dernier point : la très bonne gestion des imprévus par l’équipe du festival. En effet, comme on me le fera remarquer, une forte impulsion électrique au niveau d’un des groupes électrogènes va partiellement – si ce n’est totalement – vider les consoles son et lumières en fin de matinée. Je salue donc la réactivité et le professionnalisme de l’orga’ qui aura su régler ce problème majeur à quelques heures du début des concerts. Même si certaines prestations seront inévitablement entachées, la majeure partie de la journée se déroule malgré tout sans accroc. Chapeau bas la team !


 

Tower

Parmi les jeunes groupes de cette programmation 2023, Tower est incontestablement celui que tout le monde attend. Fort de deux albums très remarqués dans la scène heavy metal actuelle, le combo new-yorkais se produit aujourd’hui devant un public acquis à sa cause. Des compos à la fois riches et efficaces, un bassiste au style vestimentaire et capillaire imbattable, mais surtout un chant absolument stellaire. La frontwoman Sarabeth Linden est tout aussi impressionnante en live qu’en studio, l’effet de surprise en moins. Je n’ai tout simplement pas entendu d’aussi bonne vocaliste heavy depuis les temps de Chastain ou Hellion. Remarquable ! Et pour mon plus grand plaisir, c’est le dernier album en date Shock the System qui est le plus représenté aujourd’hui. Les nombreux screams ultra aigus sont repris en chœur (et en archi-faux) par une partie du public, notamment sur l’énorme « Blood Moon » en fin de set, un très grand moment.
 

Glacier

J’avais eu la chance d’assister à la pré-reformation de Glacier (sous le nom de Devil in Disguise) au vingtième anniversaire du Keep it True en 2017 et je me rappelle avoir été agréablement surpris par les vocaux de Michael Podrybau. Malgré sa soixantaine, il monte encore dans les aigus sans presque aucune fausse note, et ce show au Pyrenean Warriors 2023 ne fera pas exception. Seulement voilà, le groupe s’étant officiellement reformé depuis, un nouvel album (véritable premier album) est donc sorti. Et bien qu’il ne soit pas aussi décevant que prévu, ce n’est clairement pas pour ça que nous venons assister à un show de Glacier. Comme le reste du line up n’est constitué que de « petits nouveaux » arrivés post-reformation, on a plutôt l’impression d’entendre un nouveau groupe dans lequel chanterait Michael Podrybau. Et mis à part « Ready for Battle » et « Devil in Disguise », aucun titre iconique des 80s ne sera interprété aujourd’hui. Pas de « Speak no Evil » et surtout pas de « Vendetta » ?! Incompréhensible. Ajoutons quelques grésillements et gros larsens au niveau des retours et cela nous donne un show malheureusement assez décevant. Je préfère rester sur ma première impression de 2017.
 

Muro

Et comme un malheur n’arrive jamais seul, les problèmes de son – fatalement prévisibles en raison du souci évoqué en intro – vont se perpétuer pendant tout le set de Muro. Bien que ce ne soit pas le groupe le plus attendu, j’étais pourtant intimement convaincu que ça allait être l’une des grandes prestations du festival. La quantité de fans espagnols présents mais aussi la masse de festivaliers en t-shirts Muro depuis le début de la journée me faisaient présager un show extrêmement fédérateur et une belle claque en perspective. J’imagine donc toute la frustration qu’a pu ressentir le groupe mais aussi l’orga’ et les fans venus en nombre.

Le chant inaudible, puis la guitare, puis diverses interruptions et autres pèches sonores, on en aura vu de toutes les couleurs. Quelques titres échappent heureusement à ces conditions, notamment lorsque le guitariste va interpréter la totalité d’un morceau sous la tonnelle de la régie ou encore lors du fédérateur « Mirada Asesina » en fin de set. Malgré la frustration, la chanteuse Rocksa garde le sourire tout du long et blague avec de nombreux fans pour passer le temps – certains lui lancent même leur t-shirt ou leur battle jacket qu’elle enfile pendant le show. On se dira que ce n’est que partie remise…
 

High Spirits

Je confesse ne jamais avoir accroché à High Spirits. À part quelques riffs un peu plus pêchus comme sur « Going Up », je ne suis pas client de ce « heavy de l’amitié ». Un chant aigu mais toujours modéré, de la mélodie ensoleillée tout en gammes majeures et des textes ultra positifs à base de « je vous aime mes amis, merci la vie, les oiseaux chantent… » vous voyez le tableau. En revanche, je suis admiratif de la cohérence globale de la bande à Chris Black. Le nom du groupe (très « uplifting ») et des titres d’album comme Motivator qui annoncent d’emblée la couleur (chaleureuse) ; la dégaine des musiciens (tous en jeans blancs et t-shirts noirs unis, cheveux courts) ; leur attitude (sourire jusqu’aux oreilles, déplacements constants sur scène et nombreux signes de tête et pointages du doigt en direction des fans complices), bref pas de tromperie sur la marchandise.

Et je dois dire qu’avec ce public de fans absolus, l’ambiance finit par me plaire. Dès l’arrivée du groupe sur scène, le chanteur balance un caractéristique « Hi, my name is Chris and these are my friends » avant que les premières notes ne résonnent. Tout comme pour Tower, c’est le bassiste qui vole la vedette. Un genre de sosie de Sting mâchant du chewing-gum avec les lunettes de Polnareff, incroyable ! Il finira d’ailleurs le set en slammant dans le public telle la rockstar qu’il est. Dans la fosse c’est la liesse générale. Les tubes de l’amitié s’enchaînent : « Flying High », « Thank you for being my friend » et bien sûr « High Spirits » repris par la foule lors d’un passage a capella. J’ai vraiment l’impression d’être dans un générique d’anime japonais. De plus, le concert a lieu pile pendant le coucher du soleil, ce qui rend cette ambiance encore plus estivale. Même si je n’accroche toujours pas musicalement, je suis finalement séduit par la prestation des Américains. Un beau moment de franche camaraderie !
 

Raven

Voici venu le moment d’incertitude. En effet, c’est une véritable institution qui foule ce soir les planches de la Shark Stage : Raven, l’un des titans de la NWOBHM formé en 1974 ! Mais 50 ans plus tard, le groupe vaut-il encore quelque chose sur scène ? Grande question… Niveau son, aucun souci particulier – il faut dire qu’avec les murs d’amplis et la masse de matériel qu’installent leurs roadies, ce serait un comble. Les deux frères Gallagher accompagnés d’un jeune batteur investissent donc la scène en formation power trio et attaquent sur « Take Control ». Un très bon point : malgré la quinzaine d’albums qui jalonnent la discographie, la setlist sera quasi exclusivement centrée sur la première moitié des 80s. Ça fait du bien de voir un groupe qui sait ce qu’attend son public.

Je reste malgré tout assez circonspect pendant une bonne partie du show. Même si John Gallagher ne cesse d’arpenter la scène (l’avantage du micro-tête, à défaut d’être esthétique) et déploie une énergie impressionnante pour son âge, ses vocaux sont en revanche totalement à la ramasse. Certaines montées dans les aigus sont même pénibles à entendre. On a aussi droit à pas mal de pains niveau guitare ce qui rend le tout peu immersif. Même si je suis content d’entendre des classiques d’All for One comme « Mind over Metal », je ne passe pas un moment si mémorable. Heureusement, le public de la fosse a l’air d’apprécier comme il se doit. Les trois musiciens sont très communicatifs et incitent souvent le public à chanter ou à participer à coup de « hey hey hey ». Ils proposent même un medley d’UFO, AC/DC et autres grands classiques en fin de set. Une bonne énergie mais un concert peu convaincant me concernant.
 

Riot V

Après l’incertitude, la certitude. Ceux qui ont déjà pu voir Riot sur scène ces dernières années savent à quoi s’attendre. Non seulement le groupe, comme Raven ci-dessus, sait ce que veulent les fans (setlist majoritairement centrée sur les 80s), mais les musiciens assurent comme il se doit. Certes, il n’y a plus aucun membre d’origine depuis la mort de Mark Reale, mais je préfère cent fois un bon concert sans membre originel qu’un concert en demi-teinte avec de vieux musiciens qui ont largement passé leur heure de gloire (coucou Raven). Et la prestation de ce soir va une nouvelle fois prouver cet état de fait.

Comme pour ma première fois en 2014, le groupe va jouer plus d’une heure et demie ! Le quintet new-yorkais entame son set sur « Fight or Fall » et déclenche le plus gros karaoké du festival. Tous les refrains sont scandés par la majorité du public. Les différentes ambiances sont fort bien dosées avec une alternance des titres hard/heavy classiques et des brûlots power speed ultra véloces. Mais mon moment favori reste l’arrivée de la power ballad « Bloodstreets » sur laquelle tout le monde s’égosille. Le frontman Todd Michael Hall a toujours l’air d’avoir vingt ans (alors qu’il en a 54) avec sa chevelure soyeuse et sa musculature de Manowarrior – il finira d’ailleurs par tomber la chemise lors du rappel pour le plus grand plaisir de certain(e)s fans. Mais au-delà de son chant absolument impeccable (les aigus sont identique à la période Thundersteel), c’est surtout le batteur qui m’impressionne le plus. La batterie n’est pourtant pas l’instrument qui vient en premier en tête lorsqu’on parle de Riot, mais cela me marque vraiment lors du show de ce soir. La puissance et la vélocité rythmique que déploie Frank Gilchriest derrière les fûts est tout simplement hallucinante. Le bougre transpire comme un bœuf et n’en finit pas de martyriser son kit, y compris lors des morceaux moins rapides. Un véritable char d’assaut !

Mais cette énergie débordante sur scène se retrouve aussi dans la fosse. Et à ce titre, je me dois de mentionner le public espagnol. Composant une bonne partie des premiers rangs, les nombreux fans hispaniques sont absolument intenables. Ils connaissent toutes les paroles par cœur, y compris celles des albums récents, et leur enthousiasme n’a absolument aucune limite. Même entre chaque morceau, ils continuent d’exulter et de manifester leur joie (l’alcool aidant bien entendu). J’ai rarement observé une telle ferveur, surtout pendant près de deux heures. Même si le public reste globalement fort réceptif, les fans espagnols ont totalement « carry le game » comme on dit. Lors de « Swords & Tequila » en fin de set, le bassiste – et à présent leader – Don van Stavern leur fait même tourner la bouteille en question avant de la reprendre pour en finir le contenu.

Histoire de chipoter comme à mon habitude, je trouve qu’il y a parfois quelques longueurs, notamment en milieu de set lors de titres moins iconiques. Et côté son, on déplorera des guitares légèrement étouffées dans le mix ainsi qu’un peu de feedback mais rien de bien grave. L’ambiance reste chaleureuse du début à la fin et on a même droit à un featuring de (presque) toute l’équipe du festival lors du rappel sur « Sign of the Crimson Storm ». Je n’ai qu’une seule chose à dire : Shine On !

 

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L’équipe du Pyrenean Warriors et leur guerriers de bénévoles (baptisés les « benevils ») auront surmonté bien des obstacles en cette édition 2023, mais on n’y aura presque vu que du feu ! Un travail acharné en coulisse couplé à une bonne humeur générale et le tour est joué. Mis à part le léger retard dans le running order dû aux quelques problèmes de son évoqués plus tôt, rien ne sera venu entacher ce magnifique samedi au cœur des Pyrénées Orientales. C’est bien simple je n’ai vu que des sourires tout au long de cette journée. Et ils étaient tous aussi brillants que le soleil auquel on a eu droit – ce qui n’est pas chose aisée. Un grand bravo mais surtout un grand merci à toute l’équipe du festival et comme d’habitude : à l’année prochaine !

Merci à SimWill66 pour les photos, retrouvez toutes les autres sur sa page facebook ici