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Album

02 mai 2020 - Dolorès

Fluisteraars

Bloem

LabelEisenwald
styleBlack Metal Atmosphérique
formatAlbum
paysPays-Bas
sortiefévrier 2020
La note de
Dolorès
8.5/10


Dolorès

Non.

En 2018, les Pays-Bas ont su proposer un split qui aura fait un peu de bruit dans la sphère Black Metal : De Oord. Je découvrais alors aussi bien Turia que Fluisteraars, deux groupes assez différents et actifs de cette scène néerlandaise, mais également deux coups de cœur. Début 2020, l'un comme l'autre proposaient un nouvel album, signé chez le fameux label Eisenwald reconnu pour ses choix qualitatifs. Si Turia proposait alors une approche plus rentre-dedans, Bloem ouvrait déjà une porte sur le printemps en février dernier.

La pochette aux coquelicots aura fait parler d'elle, puisque Fluisteraars y dévoile une facette encore plus lumineuse qu'auparavant. Le titre « Oeverloos », paru sur le split avec Turia cité précédemment, s'attardait déjà sur une ambiance plus mélancolique, portée par un chant clair dans la veine d'Urfaust et une dynamique mid-tempo. De quoi trancher avec les premiers opus du groupe, dont on remarque que la discographie évolue au fil des années vers des morceaux plus lisses, plus lumineux, à la production bien plus sophistiquée, légère et agréable. Bloem va jusqu'au bout, cette fois-ci, en mélangeant avec maîtrise et poésie les deux facettes du groupe tout en leur donnant du sens.

Le titre introductif « Tere Muur » a un petit quelque chose d'apocalyptique, qui me rappelle l'excellent album de Solar Temple paru fin 2018, et cela n'a rien d'étonnant avec un membre en commun. Toutefois, la progression dans la suite de l'album laisse plus de place aux vastes plaines, aux étendues d'herbe et de fleurs sauvages aussi colorées que ternies par une sensation de fatalité, de voyage nostalgique et pluvieux. Un ralentissement nécessaire et naturel, dans un souci d'utilisation de la musique comme vecteur narratif. Pour exemple, des passages plus psychédéliques, menés par des hurlements étranges et des mélodies improbables s'installent sur « Nasleep » avant de retomber sur la boucle incessante du morceau, synonyme de spirale infernale, puis de s'éteindre en laissant une partie introspective et sereine s'étirer sur la fin du morceau.

Dans ces instants, les ambiances sont portées par des mélodies simplissimes qui semblent presque lointaines à la guitare, ou par des parties de basse fortement valorisées. Ces passages plutôt lents et berçants empruntent d'ailleurs bien plus au Post-Rock qu'au Black Metal et on y retrouve parfois le fameux chant clair, des chœurs, des mélodies discrètes aux cuivres ou des orchestrations qui coupent tous les ponts avec les stéréotypes du genre musical (« Eeuwige Ram », « Vlek », « Maanruïne »).

En cela, les choix réalisés dans la progression des titres ainsi que les influences extérieures qui les alimentent fonctionnent très bien et rendent l'écoute bien plus animée et intrigante que leurs précédents opus. Ce vent de fraîcheur, qui se ressent tant dans l'expérimentation musicale que dans l'esthétique apposée sur ce dernier album, fait un bien fou dans une scène qui se veut habituellement toujours plus noire et violente.

L'idée-même derrière l'album est plutôt inédite pour un album de Black Metal (coquelicots parsemant l'artwork et « bloem » signifiant « fleur »), avec pour volonté d'amener, par chaque titre, un extrait de mythologie où la fleur est au centre de l'histoire. Elle est également le symbole d'une beauté tranquille mais menaçante, dont on anticipe l'aspect fané puis la décomposition qui marquent les étapes d'un cycle, d'un rythme naturel, omniprésent et inarrêtable. La question du rythme et le découpage des pistes semblent être au cœur de ce nouvel album, qui propose finalement une nouvelle formule. Là où les précédents proposaient peu de titres, s'étirant sur plus de dix minutes, ici ils sont au nombre de cinq et d'une durée plus réduite. Cela crée un opus finalement plus concis avec moins de 35 minutes d'écoute mais aussi plus explosif. De quoi terminer l'écoute en souhaitant simplement une continuité assumée dans cette direction à fleur de peau pour la suite du projet.


1. Tere Muur
2. Nasleep
3. Eeuwige Ram
4. Vlek
5. Maanruïne

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