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mercredi 30 octobre 2019

Saor @ Backstage

Backstage - Paris

Gazag

 

 

Une signature chez Season of Mist, un dernier album Forgotten Paths au dessus de Guardians, et voilà Saor en headline à Paris. Le projet musical d’Andy Marshall est à présent en passe de devenir un pilier de solidité. C'est que les Ecossais deviennent familiers. Le Cernunnos était époustouflant, et le Hellfest convaincant, même si à Clisson le contexte était moins tourné vers l'introspection. Surtout, il s'agissait de festivals. Pour cette troisième entrevue, les conditions sont différentes : une salle de concert, synonyme de qualité de jeu supérieure.

Cette enceinte, l’antichambre de tous les dangers : le Backstage. Une salle à même d'offrir des concerts intenses et intimistes avec sa petite scène trop choupi ; comme capable de balancer des bouillies sonores, avec à gauche le poteau de la défaite, et à droite… un mur. Sans compter la salle principale, deux fois plus grande et qu’il faut traverser pour aller et venir - ambiance Top 50 des années 90 - qui peut rapidement gâcher la fête quand les portes entre les deux espaces s'ouvrent et se ferment selon l'humeur.

La première partie vient de débuter : les Suisses de Cân Bardd, mais les forces sont préservées pour après. Arrivés, Andy est déjà sur ses balances, alors que le pot à flûtes visé sur le pied de micro est absent. Hummm, ça sent bon les samples, et bye bye l’immersion. Andy sort de scène. A sa suite vient le batteur, Bryan, triturant son instrument, puis revêtant un béret avec de faux cheveux marrons intégrés du plus bel effet. Avec le casque sur les oreilles en dessous, il est facile de l’imaginer avoir une seconde vie comme DJ bavarois. C'est d'ailleurs lui qui se lève et chauffe la foule, avant de commander avec autorité aux autres musiciens d'entrer en scène.

Le grand boom d'ouverture est un gros échec. Le son n’est pas du tout puissant, le violon inaudible, la voix est censurée une fois sur deux, la basse est omniprésente, la purge n'est pas loin. Ce premier morceau, Forgotten Paths, est livré en pâture à l'ingé son. Un sacrifice pour essuyer les plâtres. Heureusement que les compos de Saor sont longues et permettent de vivre une fin de morceau bien meilleure. Au final, même s’il reste des approximations, maintenant le son est tout à fait praticable, et au bon volume qui plus est, donc bien joué la technique ; c’était pas gagné.

Andy se courbe fort sur sa basse, le batteur est invisible, caché par des lights médiocres. Les gratteux s'appliquent. Le violoniste pour sa part semble complètement habité dans cette première partie de set, meublant ses propres moments de silence par tantôt des headbangs vénère genre crossfit, tantôt des appels à la fosse qui répond direct. Le public est présent : peuplé, mais pas compact. La caopeira, non, mais le haka maori, avec de l’inspiration, y’a moyen. Contrairement aux deux premiers albums qui passent mieux sur CD, ce Forgotten Paths se déflore en live et fait fondre les épaisses barrières de glace.

Le groupe trinque avec les premiers rangs, puis vient un Carved in Stone qu’on attendait pas et qui reste affûté. Le Backstage vient d’atteindre sa température de fusion, qu’il ne quittera plus jamais. Pas de mouvement de foule, de frénésie : on sait se tenir et recevoir. Le public est d’avantage pris, envoûté, et à fond derrière les Ecossais. Même si certains Hé, Hé, Hé - le poing tendu en l’air - ont tendance à casser l’immersion, la ferveur et la complicité augmentent. La conséquence de cette fraternité, c’est Andy et Lambert - le violoniste - qui descendent tous deux de la scène pour jouer dans la foule. En face à face, entourés de spectateurs à présent fanatiques, ils sont à fond de cale. La scène se passe lors de Tears of a Nation, jouée en rappel. Rappel complètement téléphoné qui n’a surpris personne.

Avant cette dernière piste fédératrice, il faut tout de même noter la pierre angulaire, Aura, qui n’en finira pas de bouleverser à chaque fois que Saor joue ce morceau. Egalement, Monard est jouée. Cette nouvelle piste, tout comme Forgotten Paths, se bonifie en live, ce qui invite à reconsidérer l’album. Le seul grand absent de la soirée est Neige, attendu avec bon espoir sur Forgotten Paths, de la même manière que le gars était avec Vampilia cet été. He’s too busy, précisera Andy.

Cinq pistes, et le concert est terminé. Puis tout va très vite. La scène se fait démonter illico presto, le merch est proche de refuser des clients quand il est sommé de plier bagage. Sur le trottoir du Moulin Rouge, stupéfaction, alors que les roadies sont en speed, à ranger les cartons de fringues, les amplis et tout le tremblement. La transition vénère, mais heureusement, il n’est que 22h00. Saor est un pilier à présent, et même s’il manque à chaque fois plein d’instruments sur scène (la foire aux samples) la magie fonctionne toujours. Les voyages restent, à coup sûr, bel et bien réels.

Forgotten Paths
Carved in Stone
Monadh
Aura
Tears of a Nation