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15 trésors cachés... du Black Metal finlandais

dimanche 22 juillet 2018
Team Horns Up

Compte groupé de la Team Horns Up, pour les écrits en commun.

Nostalmaniac:  Alors que dans les 90's, la scène Black Metal norvégienne a indéniablement faconné l'art noir aux yeux du monde avec des albums devenus des classiques, l'esprit et l'aura sombre des débuts d'Emperor, Mayhem, Satyricon et Immortal ont trouvé écho en Finlande avec une scène devenue incontournable en quelques décennies. Comme leurs aînés, c'est avec une odeur de soufre que sont imposés dans le paysage Black Metal actuel des noms comme Satanic Warmaster, Horna, Baptism, Behexen ou encore Sargeist. Une scène fascinante qui regorge aussi de nombreux trésors cachés que nous voulions mettre à l'honneur à travers une sélection, évidemment très subjective.

 

Traleuh

1. THY SERPENT  Forest of Witchery | Spinefarm Records

Si les formations cultes de la scène finlandaise du milieu des années 90 ne brillaient pas forcément par leur aspect mélodique prononcé (BeheritArchgoatImpaled Nazarene...), c'est une toute autre paire de manches pour le groupe qui nous intéresse ici. Car oui, Thy Serpent peut être considéré comme un des grands de l'époque, notamment pour son premier disque, Forest of Witchery. Album culte pour certains, mais globalement assez méconnu du grand public, ce disque cristallise pourtant une certaine idée de la scène finlandaise : envolées lyriques imparables, ambiance naturaliste et champêtre, quasi-fongique, pas si éloignée d'un Shape of Despair période Shades of... ou  d'un Kvist, le groupe avait tout pour devenir un véritable fer de lance de cette effervescente scène finlandaise, mais tombera peu à peu dans l'oubli, la faute peut-être à des successeurs moins marquants. Forest of Witchery, lui, reste en tout cas parfaitement incontournable.

 

 

2. WYRD Huldrafolk | Millenium Metal Music

Et on poursuit la liste avec Wyrd, formation finlandaise que j'aime à penser comme être le fils spirituel de Thy Serpent, du moins pour la première partie de leur carrière. Et c'est plus particulièrement ici Huldrafolk, leur second jet, qui va nous intéresser. Après un premier album, Heathen, constitué d'un seul seul morceau d'une heure, dont l'ambition dépassait malheureusement les moyens, Wyrd revient dès l'année suivante sur un format plus classique, avec tout de même des morceaux dépassant aisément les dix minutes. Ces deux pièces, Ashes of Men and Oak Pine et Misanthrope's Masterplan constituent selon moi l'intérêt principal du disque, qualifié à l'époque de « Black dronisant », terme particulièrement usité en ce début de millénaire que l'on retrouvera notamment avec Drudkh, bien que Wyrd semble plus dépeindre une nature sylvestre et embruinée qu'une langoureuse forêt automnale propre aux Pays de l'Est. Le reste n'est évidemment pas à jeter, je pense notamment à la pièce Aijeke, aux allures de cérémonie à la gloire de quelque dieu païen, à l'aspect folk plus prononcé. En bref, une formidable réussite en bien des points qu'il serait bien dommage d'éluder.

 

3. MOONSORROW Tämä ikuinen talvi | Meat Hook Productions

Pour être tout à fait honnête, j'ai longuement hésité à ajouter ce disque dans cette liste. Parce que Moonsorrow c'est du mastodonte. Du vrai de vrai. Le genre de groupe au sommet de la chaîne pagano-alimentaire, qui en synthétise admirablement une partie d'ailleurs. Le genre de groupe qui fait gronder ciel et fans à chaque sortie. Sauf que Moonsorrow, c'est un groupe comme n'importe lequel, au parcours classique, avec un début et (sûrement) une fin. Et ce début, on l'oublie souvent. Si Suden Uni, premier album officiel des Finlandais, bénéficie d'un statut tout à fait solide chez les fans, ce n'est vraiment pas le cas du disque qui nous intéresse actuellement. Car il est ici, le vrai point de départ de Moonsorrow, le premier album officieux. Celui qui pose les fondements terriblement solides et encore présents à l'heure actuelle du groupe. Plus Emperorisé certes, certainement moins folk dans l'âme, Tämä ikuinen talvi installe néanmoins les fondamentaux : des véritables épopées épiques, des claviers omniprésents, des mélodies entêtantes, et un sens de composition déjà hors-norme, qui ne fera que s'accroître au fil de sorties. Bref, un album à réhabiliter d'urgence, chez les fans comme chez les non-initiés.

 

 

4. KYPRIAN'S CIRCLE - Noitatulen vartija | Silverhorn Productions

On passe donc sans transition des grands noms de la scène à l'underground le plus total avec Noitatulen vartija, seul et unique EP de projet solo Kyprian's Circle. Enfin underground, pas réellement, car si le disque en question ne possède effectivement pas un réseau de fans conséquent, on peut toutefois noter la présence d'un véritable daron de la scène : en effet, ce bon vieux Lauri Pentilla, alias Werwolf, a.k.a le fondateur de Satanic Warmaster, ayant tout fraîchement atteint sa vingtaine, s'occupe ici des vocaux sur l'intégralité du disque ! Mais ce point même peut être considéré comme anecdotique, tant la véritable star est ici bien évidemment Kyprian, seul véritable membre à bord, qui nous gratifie ici de compositions terriblement inspirées et originales pour l'époque. Ambiance folkisante, passages acoustiques emprunts de mysticisme, compositions mid-tempo conquérantes, me faisant étrangement penser au prodigieux Antimateria, le tout enrobé d'une production raw mais tout à fait adéquate, ce seul et unique EP de Kyprian's Circle vaut clairement plusieurs écoutes attentives, malgré un amer regret de la non-pérennisation du projet par la suite.

 

 

5. LUNAR WOMB - The Sleeping Green | Tour de Garde

Et pour conclure ma partie, je me permets un petit écart puisqu'il s'agira ici d'un des très nombreux projets d'un des touche-à-tout les plus doués de la scène, le bien nommé Henri Sorvali. Car au milieu des années 90's, le bougre était du genre hyperactif : non-content d'avoir initié deux des projets les plus importants de la scène finlandaise de ces vingt dernières années (Moonsorrow et Finntroll, pour les deux du fond qui ne suivent pas), ce bon Sorvali aura enfanté un paquet d'autres formations plus intéressantes les unes que les autres, malheureusement mortes dans l’œuf. Et parmi celles ci, se trouve Lunar Womb, qui nous intéresse ici. Alors pourquoi parler d'écart ? Parce qu'avec The Sleeping Green on s'écarte du Black Metal pour s'intéresser à une de ses plus belles engeances, le Dungeon Synth. Mais loin de s'apparenter à la sobre noirceur d'un Mortiis, on nage ici en eaux bien plus folkisantes et forestières, finalement pas si éloignée de certains thèmes de Zelda ou de Secret of Mana, l'inspiration des bandes-originales de RPG étant déterminante chez la tête pensante de Moonsorrow, qui s'en réclama d'ailleurs plus d'une fois. The Sleeping Green est une véritable petite pièce d'histoire, témoignage d'un Sorvali à l'inspiration qui semblait sans bornes, et qui a d'ailleurs bénéficié d'un tout nouveau mastering en 2015, disponible sur la page bandcamp du quidam.

 

 

Nostalmaniac


6. BLOODHAMMER - Abbedissan saatanalliset houreet | Northern Heritage Records

Avec une pochette qui passe difficilement inaperçue, surtout pour le gamin curieux de 16/17 ans que j'étais, ce premier album du duo Bloodhammer sorti en 2003 via l'incontournable et toujours bien actif label Northern Heritage Records (Clandestine Blaze, Warloghe, etc) fait partie de mes premières découvertes marquantes du Black Metal finlandais, et même des années après en le réécoutant, j'y retrouve toujours cette ambiance malsaine et blasphématoire avec ce son raw, ces riffs thrashisants et sales souvent maladroits, mais totalement possédés. Avec des titres comme "Destruction", "Demonik Attakk" ou "Nail, Rape & Desecrate", pas de place pour la finesse, mais voilà surtout un véritable brûlot musical qui pue la perversion, la crasse et l'alcool au pays des mille lacs.
 


7. NOENUM - Black Esoteric Evangelium | Hammer of Hate Records

Paru en 2004, cet unique EP de Noenum aux influences largement burzumiennes tire son épingle du jeu avec les vocaux hallucinants du sieur Spell qui nous plonge dans ses tourments avec une ambiance parfaitement mélancolique, et même certains passages anxiogènes. Un véritable trésor d'art noir qui tient en haleine pendant ses 25 minutes et procure même des frissons notamment avec les derniers riffs de l'ultime "Cult of the Black Sun". Hormis un split en 2009 avec un des innombrables side projects de Shatraug (Horna), Vritra, ce Black Esoteric Evangelium paru à 666 exemplaires chez Hammer of Hate et jamais réédité n'a pas vraiment eu de suite ce qui ne manque pas à lui donner évidemment une aura bien particulière.
 

 

8. PREVALENT RESISTANCE - Dynamics of Creation | Nykta Records

Avec dans ses rangs Spellgoth (qui deviendra un peu plus connu en tant que vocaliste d'Horna à partir de 2009), Atvar (Circle of Ouroborus, Verivala) et Gorath Moonthorn (Alghazanth), Prevalent Resistance est peut-être l'un des secrets les mieux gardés du finnish black metal. Une discographie qui pour moi fait figure de sans-faute grâce à un équilibre entre noirceur et mélodies toujours maîtrisé. Difficile donc de choisir, mais symboliquement autant trancher en faveur du premier long format, Dynamics of Creation de 2005, et sa magnifique pochette. Pas de logo, juste une sombre forêt, des montagnes et des forces occultes et naturelles incontrôlables. La formation a toujours voulu rester discrète, mettant sa musique en avant plutôt que son lineup à travers des photos promos. "The Chosen Stone" est sans doutes une des plus belles compositions du groupe, elle arrive à construire dans mon imaginaire ces paysages de forêts, d'atmosphère glaciale et de pratiques magiques avec ce riffing intense sur lequel le temps n'a pas d'emprise. 
 

 

9. WARLOGHE - The First Possession | Drakkar Productions

Le Black Metal en Finlande est bien souvent une histoire de duo, et c'est le cas aussi pour Warloghe. Difficile également de trancher dans leur discographie, mais The First Possession (1999) en plein boom du Black sympho est peut-être l'album le plus singulier. Une production raw et inégale, mais un feeling sans concession, morbide et malsain qui transpire de chaque morceau. Qu'il soit sorti sur le label français Drakkar Productions n'est sans doute pas étranger aux influences très Légions Noires qu'on retrouve tout au long de l'album, mais il n'en demeure pas moins malfaisant et poisseux. Ce son de batterie trop fort et ce mauvais mixage ajoutent à l'ambiance et aux riffs qui lorgnent aussi souvent vers le côté lugubre des premiers Darkthrone. Peut-être pas un classique mais une oeuvre authentique.
 


 

10. CLANDESTINE BLAZE - Deliverers of Faith | Northern Heritage Records

Si Clandestine Blaze est un nom que tout amateur de Black Metal pas forcément érudit connaît, sa discographie reste peut-être encore trop méconnue et il me parait judicieux de ressortir le quatrième opus du projet de Mikko Aspa paru en 2004. À la fois glacial, tourmenté, sale et mélancolique, Deliverers of Faith est pour moi un monument de Black finlandais avec ses touches de dissonance, ses vocaux, mais surtout ces compositions qui deviennent au fil des écoutes obsédantes et  arrivent à envelopper dans une ambiance de noirceur absolue et de désolation pour qui fait l'effort de s'y plonger entièrement en écoutant et réécoutant. C'est aussi comme ça que j'imagine mon Black Metal, certainement pas un divertissement sans profondeur et propre qu'on juge à la première écoute ou à la qualité de sa prod'. Je ne sais plus qui disait "le Black Metal c'est un cancer qui baise avec mon âme"...
 


S.

 

11. PROFANE CONGREGATION - Apocalyptic Visions | Astral Temple

Alors, celui-ci mérite clairement d’être dans la liste des trésors cachés, d’une part car il n’est sorti qu’à 100 exemplaires en format cassette, mais surtout pour la musique qu’il renferme. Derrière Profane Congregation se cache une seule personne, répondant au pseudo de Sacrilege. Après plusieurs démos et split, l’individu sort Apocalyptic Visions en 2016. Diantre, quelle atmosphère tout au long de la demi-heure de violence auditive. Armé d’une production à la sonorité corrosive et à la lourdeur lorgnant sur les terres du Death, Sacrilege délivre son Black Metal blasphématoire et asphyxiant, avec des vocaux démentiels, dont le paroxysme est atteint sur le titre éponyme, valant à lui seul le détour. The Black Light est une ode aux émotions négatives, un hommage à la noirceur.
 

 

12. CORNIGR - Funereal Harvest | Terratur Possessions

Perttu Pakkanen, plus connu sous le pseudonyme de Vainaja, a joué dans d’illustres formations de Black finlandais, telles que HornaSargeist ou Vitsaus, à des postes divers. Mais son projet solo Cornigr est sans doute le meilleur, celui où il peut coucher en musique toute son inspiration, en totale liberté. Après un excellent Relics of Inner War paru en 2011, l’individu a sorti un EP quatre ans plus tard, qui est également son dernier avant de splitter : Funereal Harvest. Une trace fugace mais ô combien indélébile. Composé de seulement trois titres, cet opus est la définition même de ce qu’est et doit être le Black Metal : une musique émanant des abysses, oppressante, fantômatique, avec une odeur de soufre permanente. S’appuyant sur une production impeccable, à la sonorité grave et inquiétante, dans l’esprit d’un certain De Mysteriis Dom Sathanas, Cornigr démontre en moins d’une demi-heure que la flamme originelle est loin d’être éteinte.
 

 

13. VARGRAV - Netherstorm | Werewolf Records

Vargrav a été la sensation du début d’année au sein de la scène underground. Et pour cause, le one-man-band a démontré que l’esprit des années 90 était intact. Pour son premier album, le projet de V-Khaoz a ranimé la flamme d’antan en produisant un Black Metal cosmique et mélodique, directement influencé par l’âge d’or d’Emperor (In the Nightside Eclipse / Anthems to the Welkin at dusk), notamment grâce au clavier savamment utilisé. C’est aérien, mystérieux et hypnotique de la première à la dernière seconde ; à considérer déjà comme un classique du genre.
 

 

14. NATTFOG - Mustan Auringon Riitti Hammer of Hate Records

Un long voyage nocturne et forestier. Telles pourraient être les images, certes cliché, qui vous viendraient à l’esprit à l’écoute de ce Mustan Auringon Riitti. Pour son seul album studio, paru en 2012, Nattfog nous propose un Black Metal atmosphérique d’obédience burzumienne, à la production confinée et enveloppante, avec quelques riffs bien épiques et des mélodies répétitives. C’est typiquement le genre d’opus au gré duquel on se laisse transporter. D’ailleurs, le groupe va sortir cette année son nouvel EP, l’extrait sonne très Antimateria…de bon augure !
 

 

15. VITSAUS - Sielunmessu Hammer of Hate Records

Par sa grande proximité musicale avec les ténors du genre, que sont les SargeistSatanic Warmaster, Behexen et surtout HornaVitsaus s’inscrit dans la droite lignée de ce qu’on appelle le Finnish Black Metal, en terme de production et de ressenti à l’écoute. L’atmosphère est résolument hostile, le grain est corrosif et les compositions agressives, avec ce côté caverneux qui embarque l’auditeur dans une toute autre dimension. Ce Sielunmessu, sorti en 2010, avait eu son petit quart d’heure de gloire à l’époque, même si depuis il semble avoir été un peu oublié. Il était alors normal de lui rendre hommage ici.

 


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Pour les plus curieux et affamés, citons également les discographies de Circle of Ouroborus, Charnel Winds ou encore Enochian Crescent et Cosmic Church.