Chronique Retour

Album

22 janvier 2018 - ZSK

Threat Signal

Disconnect

LabelAgonia Records
styleMetal
formatAlbum
paysCanada
sortienovembre 2017
La note de
ZSK
8/10


ZSK

"On est tous le boomer de quelqu'un d'autre."

2017, c’est vraiment l’année du « ça faisait bien longtemps qu’ils n’avaient pas sorti d’album ». Et dans cette grande famille, je demande le groupe Threat Signal, dont le dernier méfait remonte à 2011. Et il était attendu, le retour du Next Big Thing canadien, l’ex-coqueluche des médias Metal qui hélas s’est fait un peu oublier en 6 ans d’absence. Entre temps, c’est surtout le chanteur Jon Howard qui est resté relativement actif et pour cela il s’est un peu baladé aux 4 coins du monde. Au Québec pour deux albums avec le groupe de Metalcore I Legion, en Grèce pour le plutôt bon album The Skyline Fission (2014) du groupe Djent/Groove SlavEATgod, et même en France avec le groupe de Metal alternatif Vise Versa, avec Eddy de T.A.N.K. (groupe où Jon a également joué les guests) et Franky de Dagoba… il était aussi attendu du côté de la Suisse pour participer au projet Obsydians fondé par les ex-Sybreed mais nous n’avons pas de news de ce côté pour le moment. Bref, il était temps que Jon revienne dans Threat Signal pour donner une suite digne de ce nom à la carrière prometteuse de la formation canadienne. Qui a accueilli un nouveau guitariste rythmique en 2015, aux côtés du talentueux Travis Montgomery qui accompagne d’ailleurs désormais Jeff Loomis en Live. Il était donc temps que Threat Signal donne une suite à Threat Signal, son excellent album éponyme sorti il y a 6 ans où le groupe affirmait sa personnalité tout en prenant un virage encore plus moderne et groovy. Un pas en avant par rapport à ses deux premiers albums, Under Reprisal (2006) et Vigilance (2009), plutôt bonnards et gorgés de tubes mais assez linéaires et avec des influences trop palpables, sorte de Fear Factory avec quelques incursions de Thrash/Death mélodique. Curieusement, Threat Signal débarque chez Agonia Records plus habitué à signer du Metal bien noir et cradingue, pour un Disconnect annoncé depuis un moment et qui aurait pu devenir très vite une énième arlésienne. Mais début novembre 2017, l’attente était enfin terminée pour les fans et voilà un album de plus attendu depuis des années qui est à retirer de la liste.

Et en 6 ans, on peut se dire que Threat Signal a eu le temps d’évoluer. Pourtant le temps ne semble pas avoir vraiment eu d’emprise sur lui, surtout au niveau sonore où le groupe opte toujours pour une production un peu plus organique et abrasive que la moyenne des groupes de Metal moderne. Côté fond, Threat Signal digère de mieux en mieux ses influences et si l’on peut encore déceler quelques évidences ici et là (du Mnemic pour le riffing syncopé au début de "Nostalgia", du Sybreed sur "Aura" où un schéma rythmique ressemble à s’y méprendre à un passage de "Bioactive"), il semble avoir définitivement trouvé son style et s’éloigne assez de Fear Factory. Un style qui n’est d’ailleurs pas réellement facile à classifier, toujours avec ses bouts de Groove, de Thrash, de Mélodeath, de Metalcore, et généralement de Metal moderne. D’ailleurs je trouve toujours qu’il y a bien plus « moderne » que Threat Signal sur le marché, ce qui me donne envie de considérer la formation canadienne comme faisant du « Metal », tout simplement. Et enfin, par rapport à Threat Signal, Disconnect s’avère bien plus mélodique que groovy, Jon Howard multipliant les passages en chant clair. Threat Signal est donc encore plus accrocheur, mais Disconnect est un album particulièrement travaillé, alignant d’ailleurs une durée conséquente (55 minutes) avec 4 morceaux dépassant 6 minutes. Le single d’ouverture "Elimination Process" résume d’ailleurs bien le Threat Signal v.2017 : emphase mélodique assez présente et ce dès le début très doux et aéré, riffs inspirés et dynamiques qui décoiffent, couplets bien durs, solos de rigueur toujours maîtrisés, et refrain entraînant où Jon Howard livre une performance en chant clair tout à fait remarquable, le bougre ayant sacrément progressé avec le temps. D’ailleurs Threat Signal se permet de balancer une véritable pépite d’entrée et un sacré tube, qui se place directement parmi les meilleurs morceaux de la formation. Et cela annonce un Disconnect franchement réussi.

Threat Signal a donc mis les formes pour nous livrer un album tubesque mais aussi très travaillé, ne se contentant pas d’aligner des singles aux structures simples mais bien un ensemble plutôt complet et parfaitement équilibré, sans linéarité et avec des morceaux aux identités fortes. "Nostalgia" (qui avait été initialement dévoilé en mai 2014) riffe sec avec des compos parmi les plus efficaces du disque, mais s’offre aussi un refrain tapi de mélodies ainsi qu’un final assez aérien et épique. "Walking Alone" est aussi au format hit, mais particulièrement mélodique avec un Jon Howard qui ne fait d’ailleurs quasiment que du chant clair, tandis que les gratteux fournissent des compos formidables. "Exit the Matrix" prend ensuite le contrepied en se posant comme le morceau le plus incisif de l’album, rappelant certaines pistes de Threat Signal, avec un Jon Howard qui s’égosille sérieusement sur les couplets même si le refrain proposé demeure mélodique à souhait (en plus d’un break fort chôli). "Falling Apart" lui emboîte le pas avec encore une fois des riffs très groovy qui sont contrebalancés par un refrain et des passages clairs assez doux. Threat Signal est en forme et nous livre un Metal mélodique « avec un plus » grâce au talent des musiciens, et tout ceci aboutit sur "Aura" qui est assurément le morceau le plus complet et abouti de Disconnect, ses riffs bien remuants nous amenant à un refrain assez exceptionnel, qui démontre toute la capacité qu’a Jon Howard à véhiculer des émotions. Et pas seulement, les breaks et autres solos amènent aussi leur lot d’émotions, et que dire du final très atmosphérique et enlevé… qui est d’ailleurs prolongé par "Betrayal", morceau entièrement acoustique qui n’est ni une ballade ni un interlude, n’est peut-être pas indispensable mais entérine le fait que Disconnect est aussi un album à ambiances, et pas seulement du Metal moderne/mélodique qui pulse.

Du coup Disconnect se termine par trois autres morceaux très travaillés, qui représentent tout de même 23 minutes du disque… les « tubes » sont passés et "Aura" a vraiment créé une cassure, finalement salutaire car Threat Signal aurait pu livrer un album redondant. "To Thine Own Self Be True" est assez classique dans ses structures mais le groupe amène un peu de singularité avec notamment des mélodies originales pour le refrain et les solos, mais aussi un riffing plus complexe et technique, nous donnant au final un morceau assez excellent. "Dimensions" est peut-être un peu poussif et longuet mais là aussi le groupe est inspiré au niveau des rythmiques et mélodies, Threat Signal profite de cette fin d’album pour lâcher des compos moins directes et plus fignolées. Enfin "Terminal Madness" clôt Disconnect avec un dernier déluge de compos inspirées, tout le Threat Signal actuel est là-dedans, le plus rythmé, le plus lourd, le plus mélodique, le plus aéré, et toutes les qualités des musiciens et du chanteur sont encore mises en évidence. Tout ceci nous donne donc au bout l’album le plus abouti de Threat Signal, qui a bien profité de ses 6 années de dormance pour aller bien plus loin que ses 3 premiers albums, en procédant à quelques rééquilibrages pour se trouver un second souffle et affiner son identité, autour des mélodies et du chant clair mais aussi des riffs bien cossus. L’album le plus abouti des canadiens donc, le meilleur album, c’est quelque chose que je laisse à la discrétion de chacun, peut-être que certains regretteront l’enchaînement de tubes de Under Reprisal et Vigilance où l’aspect 100% groovy de Threat Signal. Mais Disconnect est une franche réussite pour ce que le groupe a essayé de créer, validant bien son évolution, et lui donnant un visage plus raffiné, plus équilibré, d’aucuns le trouveront trop gnan-gnan et pas assez rentre-dedans mais la qualité et le talent sont au rendez-vous. Ayant réellement découvert Threat Signal en octobre 2013 lors de leur passage à Metz, j’attendais pas mal de ce 4ème album qui s’est fait désirer, et même si de nombreuses écoutes ont été nécessaires, même si quelque part j’aurai aussi préféré un peu moins de mélodies/chants clairs et plus de groove, Disconnect n’en est pas moins excellent.

 

Tracklist de Disconnect :

1. Elimination Process (4:20)
2. Nostalgia (5:09)
3. Walking Alone (4:12)
4. Exit the Matrix (4:21)
5. Falling Apart (3:54)
6. Aura (7:26)
7. Betrayal (3:27)
8. To Thine Own Self Be True (6:19)
9. Dimensions (6:19)
10. Terminal Madness (10:01)

 

Les autres chroniques