Interviews Retour
vendredi 11 mars 2016

Ralf Scheepers - Primal Fear

Ralf Scheepers

Paul

Primal Fear était de passage à Paris (au Divan du Monde) le 10 février dernier dans le cadre de sa tournée « Ruling Europe 2016 » visant à promouvoir son nouvel album « Rulebreaker », aux côtés des vieux loubards de Brainstorm et des jeunes survoltés de Striker.
L'occasion de rencontrer Ralf Scheepers, l'extraordinaire chanteur de la formation allemande.

(N'hésitez pas à lire en préambule ma chronique de l'album « Rulebreaker » à cette adresse : http://www.hornsup.fr/a-13443/chronique/primal-fear-rulebreaker )


* Salut Ralf ! C'est comment d'être de retour à Paris ? Et comment la tournée se passe-t-elle ?

R.S. : Tout s'est très bien passé jusqu'à présent. C'est toujours agréable de revenir à Paris, d'être au centre de l'Europe, en quelque sorte. C'est une ville magnifique.

* Parlons un peu de votre nouvel album, « Rulebreaker ». De quelle manière s'intègre-t-il à la discographie de Primal Fear ? Et le voyez-vous comme un pas en avant pour le groupe ?

Absolument, c'est ce qu'il représente à nos yeux, et je pense qu'il trouve facilement sa place dans la continuité. Si tu penses au chemin que nous avons parcouru depuis notre premier album, avec toutes ces orchestrations de cordes qui en jettent etc. - et que nous avons par ailleurs encore utilisées sur le nouvel album, comme sur le long morceau « We Walk Without Fear » -... Sincèrement, après « Delivering the Black » (le précédent album, sorti en 2014, ndt), il nous semblait difficile de nous surpasser à nouveau. Et pourtant, nous avons réussi à le faire. Nous sommes tous très satisfaits de « Rulebreaker » et du fait que nous continuions à progresser ensemble.

* Pour ma part, cela faisait longtemps que je n'avais pas entendu un morceau aussi puissant que « Constant Heart ». Si vous ne deviez garder qu'un seul morceau extrait de « Rulebreaker », lequel choisiriez-vous et pour quelle(s) raison(s) ?

Ce n'est pas la première fois que l'on me pose cette question. C'est difficile d'y répondre, de devoir choisir entre ses enfants. J'adore « We Walk Without Fear », parce qu'il permet à l'auditeur de se poser et de se détendre... Malgré sa longueur (près de 11 minutes, ndt), il ne devient jamais ennuyeux. Il peint un tableau avec des sons. Mais j'aime aussi « In Metal We Trust », « Angels of Mercy », « The End is Near »...

* Et la liste continue... Ok, à partir de maintenant, mes questions vont se faire plus personnelles.
Dans quelles circonstances avez-vous découvert votre voix « Metal » et votre capacité à hurler ? Pouvez-vous nous parler de vos jeunes années en tant que chanteur et de la façon dont vous êtes arrivé au Metal ?

C'était au début des années 80. Je devais avoir une quinzaine d'années et je jouais de la guitare. À la radio, j'entendais des groupes comme The Sweet, Led Zeppelin, Black Sabbath... Je chantais par-dessus et je trouvais que cela sonnait pas mal, même si je ne pouvais m'empêcher de penser que ce n'était pas assez bien. C'est alors que j'ai commencé à jouer dans des groupes au lycée, dans lesquels j'étais à la foisguitariste etchanteur. Je me suis vite rendu compte que je n'étais pas fait pour ça, et j'ai décidé de me consacrer au chant. Lorsque sont arrivés Saxon, Accept, Judas Priest, Scorpions, etc. et que pour la première fois j'ai entendu les notes suraiguës de Rob Halford, j'ai essayé de l'imiter et j'ai découvert que je pouvais les atteindre. Je me suis mis à courir les rues d'Esslingen en hurlant « The Green Manalishi ». Les gens me disaient : « Qu'est-ce que c'est que ce bruit ? Ferme-la ». Mais mes amis m'assuraient que c'était super, et ils m'ont donné l'envie de rejoindre d'autres groupes. À Stuttgart, j'ai commencé à chanter pour Tyran' Pace. En 1983, pour la première fois de ma vie, j'enregistrais un album. J'avais alors dix-huit ans.

* Et c'est à ce moment-là que vous avez décidé de devenir chanteur professionnel ?

Pas vraiment. J'avais encore mes études à côté, j'apprenais l'électronique. Pendant longtemps, j'ai dû continué à alterner avec mon travail, cela n'a jamais été facile de vivre de la musique ; et ça ne l'est toujours pas aujourd'hui...

* Je trouve votre performance sur « Rulebreaker » exceptionnelle. Vous donnez l'impression de perfectionner votre technique d'album en album, des notes les plus graves aux notes les plus aiguës. Vous considérez-vous toujours comme un apprenant (même si je sais que vous enseignez également...) et comment parvenez-vous à améliorer votre voix encore et encore ?

Merci pour ce compliment. Je travaille beaucoup. J'ai 51 ans et je dois passer du temps à me chauffer la voix. Comme tu l'as dit, je suis professeur de chant, et il arrive que je fasse aussi les exercices que je donne à mes élèves. Je n'arrête jamais de découvrir de nouveaux effets avec ma voix. Avant tout, je fais ce que j'aime et j'essaie de faire en sorte que ma voix colle à la musique le plus justement possible. Un morceau comme « The End Is Near », par exemple, est rempli d'effets agressifs. J'aime prendre du temps pour expérimenter de nouvelles choses avec ma voix quand j'enregistre dans mon home studio.

* Par exemple, le fait que vous ne hurliez pas une seule fois sur le morceau fleuve « We Walk Without Fear » montre que vous savez aussi jouer sur la corde de l'émotion. Je suppose que c'est plus difficile pour vous que de simplement retourner la tête de l'auditeur avec votre voix. Est-ce que la transmission de l'émission à travers votre performance chantée est un point sur lequel vous travaillez en particulier ?

En effet. Les paroles portent un message qu'en tant que chanteur tu as pour tâche de délivrer. Tu dois toi-même comprendre ce que tu chantes. En studio, tu dois bien te mettre en tête l'histoire derrière les paroles avant de passer à l'action, en créant une atmosphère adéquate. Tu as parfaitement raison, il est plus difficile de faire passer ces émotions que de juste envoyer la sauce.

* Comme vous l'avez dit auparavant, vous avez bien entendu été influencé par des légendes du Metal comme Rob Halford. Mais avez-vous également été au départ influencé par d'autres genres musicaux, comme l'opéra par exemple ?

J'ai toujours aimé l'opéra. Cela ne m'a pas « influencé » à proprement parler, mais j'aime la puissance de ces voix. Et la technique parfaite des chanteurs, qui ont reçu une éducation musicale impressionnante. Ils m'ont toujours fasciné. Et, à part ça, tout ce qui était de la musique avec une mélodie et un rythme dans les années 80 m'a marqué d'une certaine manière. Des artistes Pop, par exemple : (The) Sweet, Phil Collins, U2...

* En parlant d'opéra... Les chanteurs d'opéra sont constamment dans l'angoisse de tomber malade avant une représentation. Vous faites de l'exercice et êtes en très bonne forme physique, donc j'imagine que vous êtes parvenu à trouver un équilibre à ce niveau-là...

À vrai dire, ce n'est pas facile. En tournée, je ne peux pas faire d'exercice car je dois garder toute mon énergie pour les concerts. En ce moment, trois membres de l'équipe ont la grippe, alors que nous n'en sommes qu'au cinquième concert de la série de 120 qui nous attend cette année... Et je sens que je suis en train de tomber malade. Il suffit que quelqu'un ait la grippe dans le bus et je suis sûr de l'attraper, je ne peux pas y échapper. Un chanteur met beaucoup sa gorge à contribution, ce qui la rend plus vulnérable. Il faut en prendre grand soin.

* Vous avez diversifié vos activités en participant à différents projets, comme « Rock Meets Classic ». Est-il prévu que vous continuiez à travailler pour des projets « non Metal » à l'avenir ?

Ne jamais dire jamais, mais rien de tel n'est prévu à ce jour. Je peux prendre part à des sessions studio si les gens me le demandent, je peux chanter sur commande. Cela fait également partie de mes activités. Mais étant donné que je vais passer beaucoup de temps sur la route cette année, je ne pense pas trop avoir l'occasion de le faire dans les mois à venir.

* Et qu'en est-il de votre projet solo, Scheepers ? J'ai beaucoup aimé votre premier album. Comptez-vous en sortir un second par la suite ?

À nouveau, rien n'est prévu pour l'instant. J'écris, je rassemble des choses... Que j'utilise parfois avec Primal Fear d'ailleurs. Ne jamais dire jamais, mais je manque de temps.

* Après toutes ces années, comment considérez-vous votre carrière ? De laquelle de vos réussites êtes-vous le plus fier ?

De toutes les étapes que j'ai franchies. D'abord avec Tyran' Pace, puis Gamma Ray, avec qui j'ai beaucoup avancé professionnellement parlant, autour du monde... Je suis fier de ces années et de ce que j'ai réussi à faire, même si les ventes n'ont pas toujours été excellentes. Mais je ne suis pas en position de me plaindre, car la situation de Primal Fear est très bonne. Nous sommes heureux de pouvoir encore faire le tour du monde : cette année, nous allons traverser l'Europe, l'Amérique du Nord, puis du Sud, l'Australie pour la toute première fois, le Japon. Tous les groupes n'ont pas la chance de pouvoir en dire autant.

* Enfin, quels sont vos souhaits pour Primal Fear à l'avenir ?

Garder ce rythme de travail. C'est super de faire de la musique que les gens aiment, et que nous sommes les premiers à aimer avant même que nous ne la rendions publique. « Rulebreaker » est un album très bien produit et nous voulons rester à ce niveau de qualité. C'est notre grand objectif : continuer à faire ce que nous faisons actuellement.


Merci à vous. Je vous laisse les derniers mots, à l'intention des lecteurs de Horns Up !

Comme je dis toujours : gardez le Metal en vie en achetant les albums ! Nous espérons vous rencontrer bientôt au long du chemin.