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lundi 30 novembre 2015

Ghost + Dead Soul

Radiant Bellevue - Lyon

Di Sab

Ce mardi 24 novembre, les amateurs de musiques extrêmes de Lyon avaient l’embarras du choix. Nightbringer à l’Hôtel de la Musique, le Deathcrusher Tour (Carcass/Obituary/Napalm Death/Voivod) au Transbordeur, et puis Ghost, au Radiant. Je vais essayer d’écourter mes innombrables plaintes concernant le fait que le Deathcrusher Tour et Ghost jouent le même soir sur Lyon : Sérieusement, qu’il y ait de tels clashs au Hellfest, ok, passe encore, mais en province, un jour de semaine, ça fait vraiment mal au cœur. En tout cas, je renonce non sans peine au plus gros plateau Death Metal de l’année et me pointe en début de soirée au Radiant. La salle, rénovée en 2013 est très accueillante, un grand espace de restauration, un bar assez long où l’attente n’est pas indécente. En outre, le Radiant est divisé en deux espaces de concert, un club et la salle principale (où jouera Ghost ce soir). Pour ceux qui connaissent, cette SMAC rappelle en beaucoup d’aspects Le 106 de Rouen. Quant au public, il est assez hétéroclite. Bon, il y a une majorité de ce qu’on pourrait appeler le « metalleux Sonisphère » (le fameux combo T shirt Big Four/Veste Hellfest/bracelet pour la transpiration Iron Maiden semble être une sorte de dresscode ce soir) mais pas uniquement, preuve que Papa Emeritus a su prêcher la bonne parole en dehors de notre carcan (les nombreuses participations aux festivals proposant une affiche plus généraliste n’ont d’ailleurs pas du être étrangères à ce succès).

La soirée commence avec les Suédois de Dead Soul. Totalement inconnu au bataillon avant ce soir, ce trio, composé d’un chanteur et de deux guitaristes qui se chargent également d’envoyer des samples à tire-larigot, officie dans une sorte d’indus mâtiné de pop. Les samples instaurent une rythmique assez martiale pendant que les deux guitaristes tentent de créer une ambiance dystopique. Le tout nous rappelle cruellement que n’est pas Killing Joke qui veut. Quant aux passages les plus éthérés, ils évoquent Depeche Mode. Le chanteur, un cinquantenaire sapé en pseudo dandy vissé à son pied de micro, n’a pas une voix désagréable mais, encore une fois, la trop grande présence de samples est un réel problème pour le dynamisme du concert. Si le chanteur était seul, le public ne s’en rendrait pas compte. A noter également que les refrains sont chantés en chœur mais cela ne donne rien de fou. Le public semble d’ailleurs assez réservé et applaudit poliment à la fin de chaque morceau sans être pour autant en liesse. La demi-heure passa sans que ce soit une purge (on a connu des premières parties bien pires) mais sans non plus être captivante. Trop bien pour être risible, pas assez pour être intéressant.

Le changement de plateau est presque plus distrayant que la première partie, Ghost ayant le road crew le moins shlag de l’histoire du Rock n’roll. Ces cons font les soundchek en veste de costard/bottines et montent de manière totalement synchronisée les deux petites marches qui permettent d’accéder à la batterie et aux claviers avant d’enlever les bâches de manière über-théâtrale pendant que la sono passe le Misere mei, Deus d’Allegri. Poussif mais amusant.  

21h, dans une salle quasi complète, le thème d’Eyes Wide Shut retentit pour la énième dans la sono (je ne compte plus le nombre de groupes qui s’en servent comme thème d’introduction, arrêtez bordel), autour de moi, ça va sur Snapchat et ça commence à prendre des photos moches au portable alors que Ghost entre en scène sur Spirit (avec son intro plus Scooby Doo que nature).

Les conditions sont optimales, pour le groupe comme pour le public. Le son est parfait, excepté pendant Spirit (le seul titre un peu faiblard joué ce soir avec l’insupportable Ghuleh/Zombie Queen que tout le monde adule pour des raisons qui m’échappent) et le public mange littéralement dans la main de Papa Emeritus III, répondant au moindre de ses appels.

En ce qui concerne la setlist, il est difficile d’en parler. Elle est objectivement dantesque, le meilleur de Meliora est joué pour le plus grand plaisir de tous (ambiance festive sur Majesty tandis que He is fait déjà figure de tube) et chaque titre mérite sa place. Certains enchaînements font vraiment mal (He Is/Absolution, ou les 2 meilleurs titres de Meliora enchaînés sans aucune peine et la triplette gagnante From the Pinacle to the Pit/Ritual/Con Clavi Con Dio). Néanmoins, je regrette l’absence de Secular Haze (qui aurait remplacé avantageusement Per Aspera Ad Inferi) et le fait que seuls deux titres de l’excellent Opus Euponymous soient joués ce soir. En effet, je n’aurais pas craché sur un Stand By Him ou sur Satan Prayer et encore moins sur leur reprise d’Here Comes the Sun, mais ne soyons pas trop idéalistes, ils ne jouent plus cette dernière.

 Mais le réel point fort de ce show est incontestablement l’attitude du groupe et leur capacité à instaurer différentes ambiances. Commençons par l’attitude : au vu de la popularité toujours croissante de Ghost et du prix de leur merch je m’attendais à un show « à l’américaine » où rien n’aurait été laissé au hasard et où tout aurait été prévu. Je suis donc agréablement surpris de voir Papa Emeritus discuter avec des membres du public, répondre à ce qu’on lui dit, venir serrer des mains en fin de show, faire monter un roadie sur scène (pour qui c’est la dernière date avec Ghost, il part avec « un groupe de Crust Punk manger des légumes » selon Papa) et, bien sûr un bref sous-entendu à propos des attentats du 13 Novembre. On le sent content d’être ici, et le montrer est presque aussi important que de délivrer une bonne performance. En ce qui concerne les ambiances, le groupe arrive à en proposer plusieurs avec brio : l’encensoir de Papa Emeritus, la machine à fumée et les lights verdâtres sur Con Clavi Con Dio nous plongent dans une esthétique très Hammer, Jigolo Har Megiddo (« a song about populating ») est jouée en version acoustique, les 3 Nameless Ghouls jouant assises entourées de chandeliers pour un résultat réellement intimiste. Quant à Year Zero, elle est forcément grandiloquente alors que  l’apparition de nonnes distribuant des Osties sur la bien nommée Body and Blood  donne au show un côté « blasphème à la petite semaine » aussi nul que charmant.

« Ceux qui nous ont vu savent que nous finissons toujours nos sets par la même chanson. Certains trouvent ça prévisible voire ennuyeux, mais je vous invite à voir ça comme un orgasme. On sait que ça va arriver, c’est prévisible mais ça fait du bien non ? » Après avoir introduit MonstranceClock plus ou moins de cette manière et avoir fédéré le public avec son refrain si caractéristique, Ghost se retire. Le concert a duré plus d’une heure et demie.

Au sein d’une scène où l’intégrité est primordiale, où l’absence de compromis est un dogme et où le succès est vu avec beaucoup de méfiance, Ghost arrive avec ses refrains pops, ses participations à Rock en Seine et ses live sur Canal + et s’en branle totalement de l’avis que tu tapes fébrilement sur ton clavier. Les albums sont de qualité, les shows sont généreux. Ils ont du succès ? Tant mieux pour eux, ils le méritent.

Setlist: 
Spirit
From the Pinnacle to the Pit
Ritual
Con Clavi Con Dio
Per Aspera Ad Inferi
Majesty
Body and Blood
Devil Church
Circe 
Year Zero
He is
(précédé du sample de Spöksonat)
Absolution
Mummy Dust
Jigolo Har Mediggo
Ghuleh/Zombie Queen
If You Have Ghosts

Monstrance Clock

Merci à Ghost pour le concert, au Radiant pour l’accueil, et à Nous Production pour l’accréditation.