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Album

09 décembre 2014 - U-Zine

Nightrage

Insidious

LabelLifeforce Records
styleDeath Mélodique
formatAlbum
paysGrèce / Suède
sortieseptembre 2011
La note de
U-Zine
6.5/10


U-Zine

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On ne peut pas dire que Nightrage est eu une enfance radieuse dans la classe métallique suédoise, comparé à ses nombreux petits camarades. Pourtant tout aussi travailleur, les natifs de Göteborg ont longtemps été les voisins de classe d’In Flames, Dark Tranquillity, At the Gates ou encore Soilwork sans pourtant parvenir à décrocher les notes de ses camarades.
Pourquoi ? Un peu de malchance, un certain penchant de cancre l’obligeant à constamment se restructurer et perdre parfois en cohésion de line up, malgré le passage de musiciens clairement exceptionnels (Gus G, Tomas Lindberg, Fotis Bernardo). Ensuite, on notera parfois un manque d’identité parfois handicapant, le laissant dans le sillage de ses ainés sans réellement s’en extraire et marquer des points supplémentaires vis-à-vis des pavés dans la mare que composait ses néanmoins amis suédois. Les expériences de labels ne furent pas forcément heureuses et on ne peut pas dire que, en tant que tuteurs, ces derniers firent tout leur possible pour amener le groupe au niveau supérieur.

Pourtant, le précédent disque avait, semble-t-il, bénéficier d’une promotion plus importante qu’à l’accoutumé avec un très bon partenariat avec Lifeforce Records, un nouveau line up sans « guest star » instable et une volonté de revenir au plus efficace des death mélodique, comme au temps du terrassant et très violent "Descent into Chaos".
A la vue de ce nouvel album, visiblement conceptuel, nommé "Insidious" et marquant pas moins de quinze pistes au compteur, les suédois arborent clairement qu’ils se sont montrés à la hauteur de leurs ambitions. La liste d’invité est elle aussi longue comme le bras, avec particulièrement la présence d’un Gus G connaisseur de la maison, ayant ramené par la même occasion son chanteur dans Firewind (Apollo Papathanasio), décidément partout en ce moment. A cela s’ajoute un ancien membre, à savoir Tomas Lindberg et pour finir Tom Englund (Evergrey) et John K. Autant dire qu’il y a sacrément de monde pour mettre l’eau à la bouche de la principauté death mélodique…

"Insidious" explose donc dans la veine du précédent méfait, à savoir un death mélodique bien plus abrasif et brut que la moyenne, tout en gardant énormément de mélodies dans les soli, en conférant son agressivité grâce à des riffs intraitables et rapides, ainsi que le chant si caractéristique d’Antony Hämäläinen, qui n’est parfois pas sans rappeler le vocaliste d’Exhumation.
Solide, puissant, techniquement parfait, produit d’une main de maitre au Fredman une fois de plus (made in Göteborg) et composé pour détruire les futurs planches de concert, "Insidious", sans distiller de réelles et jouissives surprises, mérite d’offrir un plaisir se perdant dans les derniers productions des groupes qui, furent un temps, étaient encore des modèles du genre. "Delirium of the Fallen" débute donc les hostilités dans un mix très (trop ?) suédois, avec un vocaliste possédé et arraché, et surtout ces riffs puissants très souvent joué de façon lead mélodique, instaurant une mélodie contrebalançant par une rythmique basse/batterie beaucoup moins subtile. Le refrain est excellent et le pont concocté par Apollo est une petite mine d’or de mélancolie dans ce paysage ouvertement véhément. Il s’accompagne d’une partie acoustique magique qui s’enchaine rapidement avec un soli très fluide lorgnant parfois, comme souvent dans le disque, vers les paysages démonstratifs (sans que cela soit péjoratif ici) des guitars hero.

"Insidious" (le morceau) s’enchaine et entraine l’auditeur dans un océan de brutalité bien plus tourmenté et violent, rapide et sans compromis. La double pédale est de mise, tandis qu’Antony déchaine son courroux à travers un mur sonore grave fondé par des cordes vocales visiblement en acier. Le pont se veut presque thrash dans son riff, plus direct que jamais, presque à la Sepultura old school, de plus accompagné par Tomas au chant. "Wrapped In Deceitful Dreams", plus mid tempo, forme avec les deux morceaux précédents les trois facettes principales du disque, avec à chaque fois un invité différent venant inondé de son aura la musique. Ici, Tom Englund livre un moment inoubliable du disque pour une composition pourtant moins inoubliable, mais magnifié par l’interprétation d’un break d’une beauté proche du sublime, suivi par un soli d’une technicité affolante signé Gus G. "Solar Corona" marquera le retour pour terminer le disque des mêmes invités, mais cette fois en délaissant le côté death mélodique et se concentrant uniquement autour d’eux (on croirait même qu’il a été composé par Gus). Une ballade mélancolique froide et belle, au début acoustique pour ensuite partir dans des envolées guitaristiques folles et pleines d’émotions, teintée de grandiloquence lorsque de discrets claviers viennent faire leur tardive apparition sur l’album.

On regrettera parfois une certaine baisse d’intensité, sur l’ensemble du disque, dans les riffs et les rythmiques, se reposant parfois un peu trop sur les vocaux destructeurs de son vocaliste. Un titre comme "This World Is Coming To An End" par exemple, ne brille en aucun cas par son originalité et peine presque à être efficace tant on se retrouve avec du déjà entendu, une sorte de recyclage metallique de ce qui fut un détonateur mondiale voilà encore dix ans mais paraissant presque désuet en 2011. Cette fois-ci, Apollo, bien que chantant une ligne vocale admirablement belle, ne sauve et porte pas le morceau comme il l’avait si bien fait pour "Delirium of the Fallen".
La seconde partie de l’album, à l’image de ce morceau, peine donc véritablement à retrouver la fougue, la créativité et l’énergie de la première partie de l’album pour convaincre complètement dans son intégralité. "Hush of Night" ou "Poisoned Pawn" sont directement concernés par l’arrivée d’une forme de mollesse et de facilité dans la composition, à l’inverse du féroce "Poignant Memories" au riff d’intro supersonique et écrasant au possible, venant réveiller un auditeur qui commençait à se sentir léser. Si le déroulement et la structure reste très traditionnelle, on retrouve une fluidité (notamment dans le jeu de batterie) qui manque en partie cruellement à cette fin d’album (si l’on écarte la sublime "Solar Corona" évoquée précédemment).

Trop linéaire sur ses douze morceaux (et trois intermèdes), Nightrage ne parvient qu’à convaincre à moitié, partagé entre des morceaux jubilatoires et d’autres complètement anecdotiques. En paraissant s’enfermer dans une facilité parfois désarmante propre au death mélodique actuel, Nightrage marque certes des points, mais ne sera pas demain le nouveau maitre d’un genre cruellement en berne depuis quelques années. Trop traditionnel, trop facile, trop sclérosé, le style ne parvient plus à émerveiller comme jadis…et dans toute sa splendeur, "Insidious" en est un rude constat…

1. So Far Away (intro)
2. Delirium of the Fallen (ft. Apollo Papathanasio)
3. Insidious (ft. Tomas Lindberg)
4. Wrapped in Deceitful Dreams (ft. Gus G. and Tom S. Englund)
5. Hate Turns Black
6. Sham Piety (ft. Tomas Lindberg)
7. Cloaked in Wolf Skin
8. This World Is Coming to an End (ft. Tomas Lindberg and Apollo Papathanasio)
9. Utmost Ends of Pain
10. Poignant Memories
11. Hush of Night
12. Poisoned Pawn
13. Solar Eclipse (Prelude) (ft. John K)
14. Solar Corona (ft. Gus G. and Tom S. Englund)
15. Emblem of Light (Outro) (ft. John K)

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