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Album

09 décembre 2014 - U-Zine

Gorod

Neurotripsicks

LabelDeadun Records / Willowtip Records
styleDeath technique
formatAlbum
paysFrance
sortiejanvier 2004
La note de
U-Zine
9/10


U-Zine

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Si le talent des Gorod explosa à la tronche de tous les metalleux de France en 2007 avec l’arrivée de « Leading Vision » dans l’hexagone, ça faisait déjà un moment que d’autres avaient su apprécier à sa juste valeur le death technique des Bordelais. Les autres, c’est les Ricains via le label Willowtip Records sur lequel les frenchies ont été obligé de s’exiler puisque dans notre beau pays, personne n’avait été convaincu. Le label de Necrophagist est le premier à avoir craqué sur Gorod, qui avait tout d’abord sorti ce premier opus en 2004 sous le nom de groupe « Gorgasm » chez Deadsun Records, avant un changement de patronyme nécessaire, un groupe de brutos américains officiant déjà sous ce nom.
Et que dire à part que Willowtip a eu un sacré flair de dégoter une telle merveille ! Pour un premier album, « Neurotripsicks » est réellement impressionnant à bien des niveaux, et nous montre un groupe qui a d’ores et déjà trouvé sa patte, et qui a tout compris à la musique. Bon en même temps, 7 années s’étaient déjà écoulées entre la création du groupe et la sortie de ce premier essai, ce qui laissait le temps de mûrir aux zicos, mais même en sachant cela, la qualité de cet album force le respect. Rappelons vite faire le style de Gorod, pour les quelques-uns qui ne connaîtraient pas encore : il s’agit de death s’appuyant sur une technicité effarante. On pense bien sûr à Necrophagist (ce n’est pas un hasard s’ils étaient sur le même label), Coroner, Atheist, bref l’influence de toute cette scène technique est bien présente dans la musique des Bordelais.

On peut d’ailleurs louer les qualités des zicos du groupe, qui ont tous sans exception un niveau ahurissant. Il suffit d’écouter les nombreux passages en tapping (dès l’introduction de «Gutting Job »), les envolées mélodiques (qui prennent parfois même un accent oriental, comme sur «Beware of Tramps ») et autres surprises que nous réserve l’album pour être complètement baba devant le niveau des guitaristes, Matthieu et Arnaud. Et que dire de Ben, le bassiste, qui dispose d’un niveau technique rare dans le metal (rappelant au passage les plus grands moments d’Atheist), suivant les envolées « guitaristiques » de ses congénères par des lignes de basse tout aussi intéressantes. Je pourrai citer « Rusted Nail Attacks », mais en fait il suffit d’écouter un seul morceau de l’album, peu importe lequel, pour s’en convaincre. On dénombre ainsi certains « gimmicks » qui seront régulièrement repris dans l’album (et dans les suivants) et qui deviendront des signes de reconnaissance de la musique de Gorod, comme les parties de double tapping ou encore le fait que les deux guitares jouent la même chose, mais l’une un ton en-dessous de l’autre. Rapidement au fil de l’écoute, on constate que les Gorod ont leur truc à eux, qui fait la différence et qui à l’instar des groupes précités, permet de reconnaître une compo du groupe en à peine quelques secondes !

Ce petit truc en plus, c’est cette volonté permanente de rechercher LA rythmique qui brisera un maximum de nuques. Car si j’ai parlé d’influences Coroner et Atheist concernant les envolées techniques, la comparaison s’arrête là puisqu’à la technicité, Gorod ajoute un élément essentiel à sa musique : du groove ! La section rythmique Sandrine (batterie)/ Ben (basse) démontre une belle efficacité pour faire headbanguer tout metalhead normalement constitué ! « Neurotripsicks » impose une rythmique qui groove en permanence, et ça ne sert à rien de dénombrer tous les passages « brise-nuque » parsemés au sein de l’album, il y en a trop ! Le final de « Gutting Job » ou d’« Earth Pus » font partie de ces moments sur lesquels le remuage de tignasse devient irrésistible, et sur « Pig’s Bloated Face » ou « Beware Of Tramps » c’est le popotin que vous aurez envie de remuer ! Cette facette groovy complète parfaitement le côté technique cité plus haut, lui évitant ainsi de prendre une importance qui rendrait « Neurotripsicks » totalement indigeste.

Car oui, rassurez-vous, détracteurs de la branlette de manche inutile… oui, il y a bien branlette avec cet album, mais malgré la richesse technique jamais je n’ai eu l’impression d’un groupe se regardant jouer, jamais je n’ai eu de sensation de remplissage, de démonstration inutile… Tout simplement parce que chaque ligne de basse ou de guitare est présente non pour bluffer l’auditeur, genre « regardez comme je joue bien » (Dream Theater copyright), mais pour le faire bouger !
A ce titre, le groupe dispose déjà d’une maturité de composition fort étonnante. Les changements de rythme sont extrêmement nombreux et pourtant on a rarement une impression de cassure, car les transitions sont, pour la plupart, parfaites. Joli travail de la batteuse Sandrine, qui en plus de groover un max elle aussi (désolé si le mot revient souvent avec Gorod !) assure à chaque changement de rythme ainsi que dans les transitions. « Smoked Skulls » est à ce titre mon morceau préféré de l’album (et du groupe tout court) car tous les ingrédients y sont présents, savamment mixés… et à partir de 1 :35 ça s’emballe complètement, multipliant les changements de rythme jusqu’à ralentir le tempo pour un final qui est pour moi l’un des moments marquants de l’album. Je suis pas croyant pour un sou, mais j’irai bien brûler un cierge pour qu’ils rejouent un jour ce titre en live, tiens !

J’ai entendu quelques critiques sur le net à l’époque à propos de Guillaume, le hurleur de service chez Gorod. Soit disant que son timbre, ultra guttural qui n’aurait pas dépareillé dans un groupe de brutal death pur et dur, n’était pas adapté à la musique du groupe. Personnellement, je trouve que ses vocaux étaient une force pour les Bordelais, tout simplement parce qu’il appuie le côté le plus brutal et groovy du groupe. Ce côté brute épaisse contrebalance le côté technique en l’empêchant de devenir trop lourd, d’autant plus que le Guillaume a du coffre (sur la 6e piste à 3 :35 les « Pig’s Bloated Face !! » répétés ; ou encore le cri final de « Beware Of Tramps ») !
Au-delà de ce côté brutal, « Neurotripsicks » possède une ambiance générale qui m’évoque assez la science-fiction. L’introduction de l’album et le début de « Gutting Job » le confirment avec ce tapping « inquiétant » qui évoque Cephalic Carnage, tout comme l’outro de « Harmony In Torture » où l’on entend des bruits de machines. Un côté mécanique qu’on retrouve très fortement dans le dernier morceau, « presque » instrumental, qui montre un Gorod plus évolutif mais aussi plus lourd et massif et clôt l’album de fort belle manière.

A l’album réédité chez Willowtip Records sont ajoutés deux morceaux en bonus de l’époque Gorgasm : « Gorod » qui montre une facette étonnante du groupe, avec un chant moins guttural, parfois même criard, et un riff sur les couplets limite thrash ! Si ce premier morceau montre un groupe qui se cherche encore, « Submission Transfer » lui se rapproche déjà plus du Gorod actuel, et aurait très bien eu sa place sur le skeud ! Sans atteindre la qualité générale de l’album, c’est une bonne idée d’avoir rajouté ces deux pistes très intéressantes.

Après cette longue chronique, vous devez vous douter que j’ai été conquis par ce premier essai du combo Bordelais. Si « Leading Vision » est une petite perle, « Neurotripsicks » pose les bases de l’identité de Gorod et se révèle d’une qualité exceptionnelle, tout en étant un poil plus brutal que ses successeurs. Si vous ne l’avez pas déjà écouté et que vous n’êtes pas insensible à la musique des Bordelais, il n’y a pas hésitation à avoir. Pour ma part, il restera encore longtemps parmi mes albums de chevet !


1. Intro
2. Gutting Job
3. Smoked Skulls
4. Hunt to the Weaks
5. Beware of Tramps
6. Pig's Bloated Face
7. Rusted Nails Attack
8. Harmony in Torture
9. Earth Pus
10. Neuronal Disorder State
11. Gorod (Bonus track)
12. Submission Transfer (Bonus track)

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