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Album

19 avril 2024 - S.A.D.E

Nitritono

Cecità

LabelMy Kingdom Music
stylePost Metal
formatAlbum
paysItalie
sortieavril 2024
La note de
S.A.D.E
7.5/10


S.A.D.E

Chroniqueur doom, black, postcore, stoner, death, indus, expérimental et avant-garde. Podcast : Apocalypse

Venu de la province de Cuneo, dans le Piémont italien, Nitritono est passé sous mes radars avec ses premiers albums : sortis en indépendant, ils étaient restés sur la face cachée de l'Internet, dans les confins de Bandcamp. Heureusement, My Kingdom Music a eu la bonne idée de promouvoir Cecità, le petit dernier, et m'a permis la découverte de l'approche singulière qu'a le duo du post-metal.

Revendiquant des accointances avec Neurosis, Cult Of Luna ou encore Zu ou les Melvins, Nitritono avait des arguments pour attirer l'attention. Et dès l'entrée de « A Denti Stretti pt.1 », qui ouvre l'album, l'attention est plus qu'attirée, elle est captée. On commence in media res : sans avertissement, le duo colle un premier coup de boule avec un riff vaste et puissant agrémenté d'un chant où sourd une colère grondante. Alors que le duo n'est composé que d'un gutariste chanteur (Siro Giri) et d'un batteur (Luca Lavernicocca), le son est étonnament riche et complet : même lorsque la guitare se fait plus légère il y a de la profondeur dans le mix, il n'y a pas cette sensation de vide que procurent parfois les passages un peu facile (en arpège notamment) dans les registres post- mal maitrisés. Nitritono utilise énormement d'effet sur la six cordes lorsqu'elle ne riffe pas en format massif, permettant ainsi la construction d'atmosphères prenantes, parfois mystérieuses, qui dans tous les cas donnent le sentiment d'être plongé dans un monde plein de textures. Parce que si la première attaque est, on l'a vu, frontale, les Italiens déploient des plages beaucoup plus contemplatives, avec une batterie utilisée sur un registre plus tribal (« A Denti Stretti pt.3 ») où les toms sont dominants.

Autre particularité à laquelle on ne s'attend pas en lançant l'album la première fois : la rareté du chant. Les morceaux instrumentaux sont majoritaires et la voix ne vient ponctuer que certains moments bien choisis, laissant le soin aux instruments de nous faire découvrir le sinueux trajet qu'on nous propose. Parce que, là encore, a contrario de ce que laisse penser ce début sans détour, Nitritono n'hésite pas à se laisser aller à l'expérimentation bizarroïde, en témoigne « 25 Aprile 1945 » et son cortège de bruits étranges à la guitare. Surprenante, cette rareté du chant a un inconvénient : l'impression d'avoir un album un peu bancal dans sa construction. Les titres du milieu de l'album, tout qualitatifs soient-ils, s'oublient un peu vite entre les deux grandes séquences où le chant nous guide (la triplette de début « A Denti Stretti » et le titre final « Non È Questa La Vita Che Sognavo Da Bambina »). L'impression d'avoir manqué un partie de l'écoute lorsque le chant revient est frustrante, d'autant plus que la qualité était au rendez-vous. L'aspect plus expérimental du milieu de l'album renforce encore cette impression, la plupart des riffs immédiats et remuants étant aux extrémités.  

Alternant entre lumineux et chappe brumeuse, expérimentation et rentre-dedans, Nitritono s'est créé des contraintes difficiles à tenir mais y parvient globalement très bien. Avec leur capacité à créer un son complexe avec peu d'instruments, leur talent pour les riffs qu'on se prend un plein dans le sternum et un plaisir palpable à tenter des choses (quitte à perdre un peu l'auditeur), les Italiens proposent une musique qui peut rassasier les amateurs des groupes dont ils se renvendiquent.

Tracklist :
1. A Denti Stretti pt.1
2. A Denti Stretti pt.1
3. A Denti Stretti pt.1 
4. 25 Aprile 1945
5. Evviva Piazzalle Loreto
6. Nodus Tollens
7. Morte
8. Cecità
9. Non È Questa La Vita Che Sognavo Da Bambina