Chronique Retour

Album

14 février 2020 - Mess

King Gizzard & The Lizard Wizard

Infest The Rats' Nest

LabelFlightless Records
styleThrash Metal / Stoner
formatAlbum
paysAustralie
sortieaoût 2019
La note de
Mess
9/10


Mess

T'façon, je préfère Aphex Twin.

Depuis leurs débuts en 2010 et une discographie bien garnie de 15 albums studio explorant en profondeur la musique psychédélique et le garage rock, King Gizzard And Lizard Wizard s’est imposé comme l’un des groupes les plus talentueux et applaudis de sa génération quand il s’agit de jouer « le rock ». Chaque nouvelle sortie du groupe est attendue par les fans comme une nouvelle chance de voir le roi gésier explorer l’impensable. Et cela devait bien finir par arriver, King Gizzard n’a pas résisté à la tentation de fouler les terres de la musique metal afin d’ajouter une corde hautement qualitative à son arc déjà bien équipé.

Et même si les australiens, avec ce Infest The Rat’s Nest, font toujours aussi bien sonner le garage (qu’il bichonne depuis ses premières productions), ce nouvel effort délaisse, pour la première fois, les influences traditionnelles du groupe comme Ty Segall ou Thee Oh Sees pour se jeter dans les bras du metal sans aucune honte et avec une large dose de fun decomplexé.

Et quand on aurait pu croire que le groupe, plus proche de la mouvance rock, allait se vautrer en proposant un simulacre de musique metal réalisé à la va-vite pour un public ciblé, King Gizzard nous (sur)prend par les sentiments en s’inspirant (sans prendre de risques mais avec talent) de l’incontournable référence du thrash metal : Slayer.

Et pas n’importe quelle période de Slayer, s’il vous plaît.

A l’écoute des très énervés « Planet B » et « Organ Farmer », on comprend vite que le groupe a écouté en long et en large le mythique Show No Mercy des Américains (probablement le premier album le plus abouti et acclamé de toute l’histoire du thrash) pour en extraire la moelle précieuse de ce qui a fait le succès de Slayer.

Tout y est. Les blast neu-neu mais jouissif, un shredding qui ne tourne pas à l’individualité agaçante, des riffs légendaires à la pelle (qui rentreront dans votre crâne pour ne plus en sortir), une basse rebondissante mais crédible dans le rendu final. King Gizzard se paye même le luxe de saupoudrer le tout d’une pointe de maléfice, histoire de bien montrer qu’ils ne sont certainement pas là par simple opportunisme. Infest The Rats’ Nest réussit sa mission de respecter et honorer l’esprit de révolte du metal en étant intègre.

Une révolte sonore certes, mais une révolte également dans le propos car Infest The Rats’ Nest suit une construction lyrique réfléchie. Chaque chanson dépeint un univers post-apocalyptique qui verrait les riches s’exiler de la planète Terre, laissant derrière eux un monde écologiquement et humainement voué à son extinction. Un discours pas forcément loin de la réalité que le leader-chanteur-guitariste-multi-fonctions Stu Mackenzie nous écrase sur la tête en allant chercher une voix tout droit issue du fin fond de ses entrailles. Une voix profonde comme sur le titre « Self Immolate » qui, pourtant, plaquée sur l’usine à riff que représente ce petit bijou de 35 minutes, transforme l’album en un enchaînement de tubes presque taillés pour les stades.

Le roi gésier n’a néanmoins pas totalement exclu le rock de son répertoire malgré ce virage métallique. Entre le tubesque et groovy « Mars For The Rich » ou le massif  « Superbug », les Australiens font clairement du pied aux meilleures compositions d’Uncle Acid And The Deadbeats pour le premier ou Electric Wizard pour le second, histoire de définitivement enfoncer le clou d’une assimilation réussie haut la main par le groupe.

King Gizzard signe donc, avec cette nouvelle galette, « l’album le plus metal produit par un groupe qui ne l’est pas » pour l’année 2019. Il s’attirera autant les faveurs des amateurs de thrash comme de stoner/doom car King Gizzard, avec son Infest The Rats’ Nest, pose un son qui transpire l’intérêt et le respect pour la musique extrême. Une lettre d’amour au thrash qui ne tourne pas au bête plagiat. Une lettre qui ne révolutionne en rien le style mais qui nous rappellera l’excitation des premières écoutes de tous les groupes cités pendant cette chronique, Slayer en tête de file.

 

Tracklist:

1. Planet B
2. Mars For The Rich
3. Organ Farmer
4. Superbug
5. Venusian 1
6. Perihelion
7. Venusian 2
8. Self Immolate
9. Hell