Chronique Retour

Album

07 février 2020 - Raton

Envy

The Fallen Crimson

LabelPelagic Records
styleScreamo / Post-rock
formatAlbum
paysJapon
sortiefévrier 2020
La note de
Raton
7/10


Raton

Amateur de post-musique, de larsens et de gelée de groseilles.

[Un lien d'écoute est disponible en fin de chronique. Je vous invite à lancer la musique pendant votre lecture, l'immersion ne pourra en être que meilleure.]

Etant pourtant très amateur de screamo (un genre très peu chroniqué par ici et il serait intéressant de voir si vous aimeriez qu’on en parle un peu plus), je n’ai jamais accordé à Envy une attention démesurée.

J’ai même parfois du mal à comprendre pourquoi les Japonais traînent une telle réputation de groupe déchirant qui arrache des larmes à quiconque prend le temps de les écouter avec suffisamment d’attention. Probablement car le groupe reconnecte avec la vraie racine de l’emo. Car si aujourd’hui « emo » évoque surtout des coiffures hirsutes et des attitudes edgy, il ne faut pas oublier qu’à l’origine c’est l’abréviation de « emotive hardcore ».

Et par son mélange entre post-rock fragile et screamo abrasif et urgent, Envy touche une corde sensible. Celle de la vraie douleur, qui s’exprime autant dans la douceur des arpèges que dans le hurlement écorché.

Il faut bien reconnaître que parmi les groupes qui ont procédé au mélange du post-rock au screamo, nul ne l’a fait avec la démarche d’Envy. City of Caterpillar abordait l’exercice avec une forme de lassitude, une désillusion d’adolescent clairvoyant ; Suffocate for Fuck Sake préférait utiliser le post-rock de façon étouffante dans un élan de furie désespéré ; Heaven in Her Arms avec plus de fracas et d’efficacité ; Viva Belgrado avec un romantisme plus introspectif, etc.

Alors que chez Envy il y a une fatalité désarçonnante. La résignation face à l’immensément grand et à l’infiniment mortel confère à la musique d’Envy un aspect suspendu dans le temps. Les Japonais arrêtent le temps pour mieux pleurer la vitesse de son cours. À ce titre, il n’y a pas vraiment de morceaux, de séquences, mais plutôt une œuvre dense telle une marée ; avec ses déferlements de rage, ses reflux en spoken word et son écume tranquille constituée d’arpèges scintillants.

C’est pourquoi, 5 ans après le dernier album et alors que ce « The Fallen Crimson » propose le premier album de la nouvelle ère du groupe – à la fin de 2015, deux membres ont quitté le groupe qui s’est donc mis en hiatus et lorsque le projet fut réinitié, trois nouveaux musiciens ont rejoint le line-up –, j’accorde enfin à Envy l’intérêt qu’ils méritent. Le leader du groupe assure la stabilité de cette nouvelle formation et confie qu’il a utilisé ce vent pour composer une musique instinctive et authentique : « Nous n’avons que faire du genre de musique que nous composons ou si elle va vendre, nous avons juste fait ce qui nous semble juste ».

Je ne saurais vous dire ce que « The Fallen Crimson » propose par rapport aux précédents efforts du groupe. Peu importe si celui-ci est « plus X que le précédent » ou « moins Y qu’à leurs débuts ». Il s’agit simplement pour moi d’une nouvelle pierre sur le chemin de la mélancolie que Envy, tel un Petit Poucet de la musique, sème inlassablement sur son passage ; un témoignage de la beauté qui fane, de la mort qui soulage, des cieux impassibles et de la terre qui craquèle.

Tracklist :

1. Statement of Freedom (3:49)
2. Swaying Leaves and Scattering Breath (4:14)
3. A Faint New World (5:29)
4. Rhythm (6:22)
5. Marginalized Thread (3:35)
6. HIKARI (5:36)
7. Eternal Memories and Reincarnation (3:10)
8. Fingerprint Mark (3:06)
9. Dawn and Gaze (6:45)
10. Memories and the Limit (5:09)
11. A Step in the Morning Glow (7:14)

Les autres chroniques