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Album

09 décembre 2014 - U-Zine

Nevermore

The Obsidian Conspiracy

LabelCentury Media
stylePower Thrash moderne
formatAlbum
paysUSA
sortiemai 2010
La note de
U-Zine
8/10


U-Zine

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La création d’un mythe, naissance d’une vision d’un absolu musical, symbole d’une foule d’idolâtrie, de convoitises et de tentation. La perfection était presque ici. Elle est née, présente, maintenant connue et respectée…
…il faut aujourd’hui donner suite.

Dans le cas d’un artiste, succédé à son œuvre majeure prend toujours la forme d’un pari risqué, parfois suicidaire, tant l’attente est grande et la marge de manœuvre étriquée. Bon nombre sont s’y cassés les dents…et perdu une partie de leur aura…l’heure de Nevermore serait-elle arrivée ?
Prolonger le plaisir après un chef d’œuvre tel que "This Godless Endeavor" aura tout de l’exploit. Non pas que les opus précédents étaient mauvais, très loin de là (on se souvient d’un "Dead Heart in a Dead World" devenu presque culte dans le monde du thrash mélodique), mais "This Godless Endeavor" faisait partie de ces albums rares où chaque riff, chaque mélodie, chaque ligne de chant ou solo paraissaient au bon endroit au bon moment, sans que l’on ne puisse jamais se dire que tel morceau aurait été mieux ainsi ou ainsi. Il était une jouissance continuelle qui dura plus de cinq ans, le temps aux principaux cerveaux de Nevermore, Jeff Loomis et Warrel Dane, de se ressourcer et de proposer leurs albums solo respectifs.

Cinq ans plus tard, presque mois pour mois, "The Obsidian Conspiracy" s’apprête à fouler les sombres rangées des disquaires. Une nouvelle fois esthétiquement magnifique, que ce soit la pochette toujours aussi sombre et mystérieuse ou un digipack merveilleux, Nevermore continu sur la même lignée graphiquement parlant. Néanmoins, on ne pourra pas dire qu’il en est de même musicalement…

Plus sombre mais moins psychédélique, disposant d’une accroche mélodique bien moins travaillée mais d’un aspect largement plus cru (à l’instar de "Enemies of Reality"), "The Obsidian Conspiracy" choque de prime pour son manque d’accroche certain et sa linéarité qui semble cruellement sentir le manque d’inspiration. Une nouvelle fois, il faudra de nombreuses écoutes avant de comprendre…même si le chef d’œuvre attendu n’est clairement pas…

Très varié, peut-être trop dispersé justement, l’album alterne de très grands moments d’adrénaline ("The Termination Proclamation", "And The Maiden Spoke", "The Obsidian Conspicary") avec des mid tempo ravageurs et jouissifs ("Your Poison Throne", "Emptiness Unobstructed") mais se perd un peu parfois dans un pilotage automatique désagréable ("Without Morals").
Un titre comme "Your Poison Throne", complètement taillé pour le live, développe une atmosphère martiale assez rare chez les américains (ce « Rise Rise Rise ! » jouissif amené à détruire les festivals du monde entier) et surtout continu de prouver que Warrel est définitivement un chanteur exceptionnel, livrant une ligne vocale étrange, tordue, malsaine mais pourtant tellement belle lorsque l’entame mélodique du refrain s’envole. On ressent également une énorme aigreur dans le texte, un cynisme présent, presque désabusé d’un monde définitivement pourri et sans avenir, ressenti dans le côté lancinant de la rythmique. S’ouvrant de nulle part, le solo déboule comme un guitar hero et impressionne, sans réellement subjuguer…(peut-être nous habituons-nous…).

Dans sa parfaite antinomie, Nevermore a composé avec "Emptiness Unobstructed" un tube en puissance d’une luminosité très rare pour eux. Ce refrain entêtant, très assimilable et ce riff dépouillé, en fond un support improbable pour les inconnu du groupe, sans pour autant sacrifier la qualité intrinsèque. C’est plutôt l’ombre du disque solo de Warrel qui plane ici, mélancolique mais beau, accessible sans être simpliste (ce refrain…). Pour souligner encore un peu plus son homogénéité, "The Termination Proclamation", qui ouvre le disque, se révèle être le titre le plus court de la discographie de Nevermore (intermèdes exceptés), très direct et thrash, à la complexité typique des gars de Seattle, et surtout au retour plus psychédélique des lignes de chant. Le marteau-pillon Loomis-Williams fait des merveilles tandis qu’un refrain malsain, noir et dérangeant se pose sur un fond d’arpèges diaboliques et lancinants. Warrel se montre impérial et génial, proprement unique dans son interprétation, possédé avant que Jeff ne livre un solo absolument merveilleux, inattendu, très technique (tapping) nous faisant littéralement décoller sur orbite.

Mais dans ce cas, en quoi est-il si différent de "This Godless Endeavor" ? Simplement que pour un autre "And The Maiden Spoke" très original, entre atmosphère et agressivité (l’un des riffs les plus monstrueux du disque ainsi qu’une véritable machine de guerre livrée par Van Williams), il faudra compter sur un "Without Morals" pas mauvais mais n’apportant rien au style si particulier de Nevermore, paraissant même un peu désuet. Pour un "The Blue Marble And The New Soul" s’inscrivant comme la première réelle ballade acoustique du groupe, sensible, malsaine mais tellement belle (toujours Warrel…quel chanteur exceptionnel), nous aurons un "The Day You Built The Wall" poussif et syncopé, qui malgré une ligne vocale mécanique très intéressante et une basse très en avant, manque d’un petit quelque chose.

Le tout se terminera sur l’un des morceaux les plus violents jamais composé par le groupe, comme une ultime démonstration de leur talent, où le groupe lâche tout ce qu’il a pour hurler sa rage. Assemblement vertigineux de riff d’exception, d’une double pédale écrasante, de parties de chants asymétriques, de parties brises-nuques proprement jouissives (le pré-refrain), de soli à pleurer et d’une dernière note incroyablement massive et pessimiste, Nevermore fini avec ce titre éponyme de la meilleure des façons son septième album.

"The Obsidian Conspiracy", s’il ne détrônera pas son maitre précédent, reste une valeur sure et l’expression d’un groupe frappé par le talent qui n’aura jamais réellement déçu de sa carrière, malgré quelques titres, comme ici, inégaux. Et si Andy Sneap n’est cette fois pas de l’aventure, Peter Witchers (ex-Soilwork), comme pour "Praises to the War Machine", a concocté un son lourd et très gras, moins tranchant mais s’acclimatant parfaitement à l’ambiance du disque. Alors certes, nous ne pourrons pas dire ici « ils l’ont fait », mais simplement avouer que Nevermore est une nouvelle fois bien au dessus du lot. Largement au dessus…

1. The Termination Proclamation
2. Your Poison Throne
3. Moonrise (Through Mirrors of Death)
4. And the Maiden Spoke
5. Emptiness Unobstructed
6. The Blue Marble and the New Soul
7. Without Morals
8. The Day You Built the Wall
9. She Comes in Colors
10. The Obsidian Conspiracy

Bonustracks
11. Crystal Ship (The Doors Cover)
12. Transmission (The Tea Party Cover)

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