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Album

19 avril 2019 - ZSK

Nonsense

Away From Black Days

LabelAutoproduction
styleMath-Metal
formatEP
paysFrance
sortiefévrier 2019
La note de
ZSK
7.5/10


ZSK

"On est tous le boomer de quelqu'un d'autre."

Textures a splitté en mai 2017. Ce qui a laissé un grand vide pour son créneau particulier, celui du Metal moderne progressif polyrythmique - je n’emploie pas le mot « Djent » car pour moi il ne sied pas particulièrement au défunt groupe néerlandais, plus proche du vieux Meshuggah (celui de Destroy Erase Improve notamment) que du plus moderne, avec d’autres influences ; et je lui préfère donc le terme de « Math-Metal ». Un vide qui aurait pu être comblé par un groupe français comme Hord, qui après des débuts « Cyber » avait signé un formidable duo d’albums - The Waste Land (2010) et The Book Of Eliot (2013) - dans la lignée de ce que Textures produisait depuis Drawing Circles (2006). Seulement… Hord a aussi splitté, et ce même avant que Textures ne cesse ses activités, soit en décembre 2014. Textures a donc stoppé ses productions après Phenotype en 2016, envoyant à la trappe l’album acoustique Genotype qui était pourtant déjà prévu. Et depuis, Textures comme Hord se cherchent un successeur, tout du moins quelqu’un qui aurait suffisamment de filiation musicale et de savoir-faire pour assurer l’hommage au « Math-Metal » des bataves et des français. Eh bien… ce potentiel successeur pourrait bien à nouveau se situer en France, du côté de Lyon plus précisément. Nonsense s’est formé en 2010 alors que Hord partait chasser sur les terres Texturiennes avec The Waste Land. Et c’est très peu de temps après la sortie de Phenotype de Textures que Nonsense se présentera au grand jour avec son premier EP, On Earth. Inutile le préciser davantage, Nonsense se situe donc dans la stricte lignée musicale de Textures et Hord. Soit un Metal moderne polyrythmique et progressif, entre compos syncopées et envolées mélodiques, entre chant gueulé et chant clair. Jochem Jacobs, l’ex-tête pensante de Textures, avait même assuré le mastering de ce premier EP, après avoir assuré la production complète de… The Waste Land de Hord. Autant dire que la boucle est déjà bouclée depuis belle lurette, et que dans la triade du Math-Metal Textures/Hord/Nonsense, ce sont ces derniers qui sont maintenant sur le devant de la scène… car seuls survivants.

3 ans tout presque tout pile plus tard, Nonsense va nous montrer comment il progresse et nous dire si oui, il prétend à reprendre le trône laissé vacant par Hord, et viser celui laissé par Textures, pour rester modeste pour le moment. Alors qu’on pouvait espérer un premier full-length, il faudra être patient. Nonsense se contente pour l’instant d’un second EP, Away From Black Days, notamment financé par crowdfunding et cette fois-ci entièrement produit à la maison. On Earth avait déjà montré les capacités du quintette en termes de Math-Metal Texturien, certes tout ceci était très influencé et typique mais la qualité de composition et d’exécution est au rendez-vous. En 3 ans, pas grand-chose n’a bougé, mis à part le poste de batteur. Et musicalement, on va bien vite se retrouver en terrain connu pour ces 5 nouveaux morceaux, que ça soit sur le fond ou la forme. Le son est toujours très « Jochem Jacobsien » même si le néerlandais n’est pas de la partie, et l’ensemble ressemble toujours comme deux gouttes d’eau au Hord des deux derniers albums, jusque dans le chant d’Olivier évoquant à chaque moment les vocalises d’Hadrien et Jonathan en leur temps. Nonsense est résolument le nouveau Hord, celui de The Waste Land car The Book Of Eliot avait pris une direction plus aérienne. Ceci dit… le court "Coma" d’entrée est tout de même un chouïa plus atmosphérique que les morceaux de On Earth, même si les riffs syncopés sont déjà présents en force. On entendra que du chant clair sur cette « intro », montrant déjà les progrès d’Olivier dans le domaine, et on sent que le groupe élargit quelque peu ses influences avec ce départ qui évoque pas mal un TesseracT - qui était aussi une influence notable de Hord, tiens tiens. Mais Away From Black Days va vite repartir dans le pur registre groovy et complexe hérité de Textures, avec un "The Urge" très incisif et dynamique. Nonsense est inspiré et est déjà en franche réussite, accrochant facilement son auditoire avec ce Math-Metal bien senti, technique mais aussi mélodique quand c’est nécessaire, avec du chant clair convaincant et des solos bien amenés. Tout est réuni pour que cet EP confirme les bonnes dispositions que le groupe avait sur On Earth.

Nonsense enchaîne alors sur un "Black Days" délicieusement syncopé et remuant, avec encore une fois de très bonnes structures quand il s’agit d’amener du raffinement avec du chant clair et des leads maîtrisés. "Innate" lui emboîte le pas avec un étalage de compos techniques sur base de riffs syncopés classiques mais diablement efficaces, avec encore une fois de splendides leads très typés Metal prog moderne - on est même pas loin d’un Stealing Axion. Un morceau de plus de 7 minutes qui aurait pu être sur le papier particulièrement progressif mais après 4 minutes trente il laisse place à une partie ambiante un peu longuette, ce qui est curieux et fait hélas un peu cassure. Le Math-Metal des français reprend de toute manière bien vite le dessus pour un "Redeeming Light" de clôture, une clôture classique pour le genre mais Nonsense y applique une dernière fois toute sa maîtrise actuelle, avec des riffs syncopés virevoltants toujours agrémentés de belles compos mélodiques et de chant clair appréciable. Et la cerise sur le gâteau, c’est qu’un guest vient assurer le solo, guest qui n’est d’autre que… Joe Tal de Textures. Oui, on boucle à nouveau la boucle, si tant est qu’il fallait la reboucler et confirmer que Nonsense revendique haut et fort l’héritage de Textures. Il faudra tout de même encore attendre car le groupe doit grossir et déjà passer l’étape du premier full-length, ce qui n’est pas si facile. Mais avec deux EPs, Nonsense confirme déjà qu’avant celui de Textures, il a déjà facilement atteint le niveau que Hord avait à l’époque de The Waste Land, et c’est déjà un excellent constat. Après, Away From Black Days n’est pas encore un énorme pas en avant vis-à-vis de On Earth, mais le groupe confirme déjà ses capacités. Certes, il lui faudra peut-être trouver un peu plus de personnalité car ce qu’il propose pour le moment est 100% typé Hord et Textures, et Away From Black Days manque peut-être d’un peu de variété. Mais il y a tout ce qu’il faut pour faire du « Math-Metal » de qualité et cet EP est assurément un bon petit modèle du genre. Presque indispensable pour ceux qui regrettent les splits de Hord et Textures donc, qui doivent suivre de près le groupe de la région lyonnaise si ce n’est déjà fait. En attendant le futur pour que, je l’espère, on aille au-delà des considérations de succession à Hord voire Textures pour pouvoir vraiment parler du style Nonsense.

 

Tracklist de Away From Black Days :

1. Coma (2:23)
2. The Urge (4:44)
3. Black Days (5:14)
4. Innate (7:31)
5. Redeeming Light (5:56)