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vendredi 3 novembre 2017

Svart Crown - GroFest 2017

Jean-Baptiste Le Bail

Rodolphe

Ancien de Spirit Of Metal. Passionné de Grunge, de Post-Grunge et de Metal Alternatif.

Programmé parmi les têtes d'affiche de la seconde soirée du GroFest 2017 le 7 octobre dernier, Jean-Baptiste Le Bail, le chanteur-guitariste du groupe de death-black Svart Crown m'a accordé cette interview, portant sur Abreaction, leur quatrième album, sorti sous le label Century Media Records. 

Rodolphe : Récemment, vous avez tourné au Danemark aux côtés de groupes tels que Belphegor, Enthroned et NervoChaos. Quel accueil avez-vous reçu ?

JB : C'était la troisième fois qu'on y allait. A chaque fois, c'était à Copenhague. Il y a une semaine, on a joué dans un petit club. Et le dernier accueil qu'on a reçu était très bon. 

Après l'année 2011 très chargée en événements où vous avez participé au Hellfest et assuré la première partie de SepticFlesh à Lyon, 2017 semble être un excellent crû entre le Sylak, le Brutal Assault en République-Tchèque, les treize dates avec Marduk avec lequel vous avez eu la chance de rejouer ou encore la tournée Européenne avec Rotting Christ. 

JB : Disons que c'est l'année où l'on sort notre quatrième album donc forcément, on a une activité un peu plus chargée. Si je peux la comparer aux années précédentes, je dirais qu'en terme de concerts, c'est bien rempli. Moins en quantité, mais davantage en qualité. Avant que ne sorte Abreaction, on a eu la chance de partir en tournée aux Etats-Unis avec Marduk et Incantation. On est restés quinze jours là-bas. Ensuite, on a fait pas mal de concerts avec Benighted en France. Fin juin, on est partis avec Rotting Christ. Et on revient de quatre ou cinq jours passés aux côtés de Belphegor. Ce qui est très bénéfique pour nous et permet au groupe d'avoir une large exposition.

L'année dernière, Rotting Christ a sorti un très bel album qui s'appelle Rituals. Ce qu'il a de si particulier, c'est qu'il contient une reprise du poème Les Litanies de Satan de Charles Baudelaire. Ça ne vous donne pas envie de vous essayer au Français avec Svart Crown ?

JB : Pas pour l'instant (rires) ! J'ai vu que Rotting Christ aime bien diversifier sa musique en intégrant des langues étrangères. En toute honnêteté, ça ne m'est pas encore venu à l'esprit. Mais sur notre dernier album, on a un passage très court qui est en Français. Il ne faut jamais dire jamais... On verra par la suite !

Je ne m'en suis pas rendu compte en écoutant l'album. De quel morceau s'agit-il ?

JB : Upon This Intimate Madness, le quatrième morceau. Après, faut vraiment tendre l'oreille car ça reste du growl.

C'est extrêmement rare de voir un album de death metal inspiré de la culture Africaine et du vaudou car les groupes de metal sont plus souvent attirés par la période de l'Antiquité Gréco-Romaine qui se prête davantage à une musique "épique" et grandiloquente. Pourquoi avoir choisi d'exploiter cette thématique ?

JB : C'est une inspiration qui est venue quasi-automatiquement. Au niveau de la réflexion qu'on a eu sur l'album, j'ai trouvé que dans les compositions, il y avait un côté à la fois très chaud et très solaire, même s'il y a une grande part de noirceur et de pessimisme dans notre musique. Je voulais quelque chose de très âpre, de très rugueux, avec une pochette dans des tons chauds. Au fur et à mesure, je me suis documenté et je suis tombé sur quelques livres qui faisaient référence à la culture Africaine. Certains de nos riffs sont très durs. Ils m'ont évoqué plein de choses sur ce que je vivais et sur ce que j'avais envie d'exprimer à ce moment-là. On ne peut pas tricher avec ces émotions. On est originaires du Sud de la France. On passe notre année sous le soleil. La neige, les sapins, les fjords, c'est pas vraiment notre truc. 

C'est un concept propre à cet album ou dans un futur proche, vous envisagez de le développer sur une autre production ?

JB : Honnêtement, je ne sais pas. Chaque album intègre une thématique différente. Sur Abreaction, on a eu la volonté d'aller un peu plus loin que ce que l'on avait pu faire sur Profane où l'on avait commencé à ouvrir certaines portes en apportant un côté ethnique et très ambient sur la fin de l'album, au niveau de la purge et des rîtes chamaniques. Et ça m'a donné plein d'idées, d'horizons. Je t'avoue que l'aspect tribal qu'on a développé sur ce disque me plaît beaucoup. L'intégration de percussions, de samples et de bruits un peu noisy m'intéresse. 

 

                                                 Crédit photo :  L'Atelier d'Hervé

                                                        (Offerte par l'AMPLI)

 

Je trouve que la manière que vous avez de travailler ce concept me rappelle certains albums de Nile, dans ce mélange d'une musique extrême et d'influences qui paraîssent très lointaines, autant d'un point de vue géographique que culturel. 

JB : Oui, effectivement. C'est vrai que ça peut s'en apparenter, notamment en ce qui concerne nos albums un peu plus vieux. Nile a toujours mixé son death metal avec des éléments inspirés de l'Egypte ancienne. Tu en parlais avant, et même Rottting Christ, sans que ce soit une influence pour nous même si j'aime beaucoup ce qu'ils font, sont parvenus à créer quelque chose d'unique. Mon but, même si c'est compliqué, est d'arriver à composer des morceaux qui aient de la personnalité. 

Il y a beaucoup de chants de gorge sur les onze morceaux d'Abreaction, notamment dans The Pact ou Khimba Rites - autre forme de chant guttural que l'on trouve en Haute-Asie et dans certains pays Africains. Je suppose que ça demande une technique vocale particulière ?

JB : Ce qu'il s'est passé au moment de composer les parties vocales, c'est que je ne me voyais pas du tout ne faire que du growl en fait. J'avais déjà expérimenté des chants de gorge un peu plus mélodiques sans pour autant qu'ils dénaturent la musique, et je me suis aperçu que dans cet album, j'ai enlevé certaines couches de guitares et privilégié le chant. C'était peut-être la première fois que je me suis autant éclaté à enregistrer les parties vocales. Au niveau du live, je maîtrise de plus en plus cette technique. Je pense que c'est intéressant parce que ça donne une autre profondeur à notre musique.

Justement, pensant que vous avez aviez invité un guest pour chanter ces parties-là, j'ai cherché son nom partout sur internet... 

JB : C'est vrai (rires)  ? On n'a jamais été très branché guests. Pour le coup, on a tout fait seuls !

Après deux albums sortis sous le même label Français spécialisé dans le metal extrême, vous venez de signer avec les Allemands de Century Media qui ont un catalogue beaucoup plus varié d'un point de vue des styles musicaux. Pour quelle raison ?

JB : Je pense que c'était une évolution logique par rapport à nos attentes et notre développement en tant que groupe. On a sorti deux supers albums avec Listenable Records qui nous a fait confiance. Mais après Profane, on a senti qu'on arrivait au bout d'un cycle. On ne se retrouvait plus dans cette ligne directrice, même si le label-manager Laurent reste un énorme fan de death metal. Et forcément, à force de tourner régulièrement et de faire des dates, on a eu plusieurs propositions. Quand on a un label comme Century Media qui s'intéresse à nous... il y a des offres que parfois, on ne peut pas refuser. Et ils ont une vraie connaissance du metal extrême.

 

 

Parmi les commentaires YouTube d'Orgasmic Spiritual Ecstasy, de nombreux internautes comparent votre musique à celle de Behemoth... Qu'en pensez-vous ?

JB : J'ai l'impression que depuis qu'on a créé le groupe en 2004, on ne fait que nous parler de Behemoth. On a une étiquette death-black et comme cette référence s'est étendue au metal extrême et non plus seulement à notre style en particulier, c'est normal. Il y a des ressemblances, des gimmicks. C'est un des groupes qui m'a fait apprécier le metal extrême. Mais j'ai toujours trouvé qu'à partir de notre deuxième album Witnessing the Fall, la comparaison devenait un peu redondante et facile. A la limite, qu'on nous compare à des groupes comme Immolation me convient davantage.

J'ai trouvé qu'Nganda - le dernier titre de l'album, portait le même nom qu'un village du Sénégal et du Cameroun. 

JB : Ça, je ne savais pas (rires)  !

Et ce qui m'a étonné dans ce morceau, c'est la place laissée au solo. Parce que c'est assez surprenant de l'entendre aussi distinctement, qu'il soit aussi mélodique...

JB : (rires). Parfois, il y a des choses qui ne peuvent pas s'expliquer. Je ne suis pas un guitariste soliste. J'ai appris sur le tas. J'aime bien ça mais ce n'est pas quelque chose qui m'est naturel. Par contre, quand j'ai eu le solo en tête accompagné de la mélodie sur ce passage-là, on a un peu échangé avec Kévin qui est beaucoup plus porté sur ça, et c'est vrai que lorsqu'on a écouté l'album, il m'a fait remarqué qu'il n'y avait pas de solos sur le disque. Sur ce morceau, il y en a deux...

C'est donc une expérience qui pourrait refaire surface sur vos prochains albums ?

JB : Oui, bien sûr. Tout dépend de l'esthétique des morceaux. Il y a énormément de guitares d'arrangements dans ce que l'on fait donc elles sont en général très simples, mais elles ajoutent une deuxième voire une troisième harmonie. Sur Profane, il y avait beaucoup de parties réalisées avec trois guitares différentes. A reproduire en live, c'était impossible. 

C'était la dernière question. Merci JB ! 

JB : Merci à toi. C'était très cool. De bonnes questions. C'est bien d'avoir creusé ce que l'on fait et d'avoir effectué des recherches.