Live reports Retour
vendredi 13 mai 2016

Anthems of Steel Festival II

Salle Emeraude - Bressuire

Nostalmaniac

Le Max de l'ombre. 29 ans. Rédacteur en chef de Horns Up (2015-2020) / Fondateur de Heavy / Thrash Nostalmania (2013)

Vendredi 6 mai. Après 700 kilomètres, un train en retard et deux plans Blabacar à l’arrache, me voilà arrivé à Bressuire, commune des Deux-Sèvres, bastion de l’association Anthems of Steel qui y organise la deuxième édition de son festival. Il suffit de se rendre derrière l’Eglise pour découvrir la salle Emeraude d’une capacité de 200 personnes. Le temps de poser mes affaires et ma tente que je trimballe depuis 8h du matin, je fais déjà de nouvelles connaissances et je croise également les bons vivants italiens de Violentor qui joueront le lendemain : “Aujourd’hui, on boit. Demain, on joue”. Le décor est planté !



Pour se mettre en jambe, ce soir c’est le warm-up avec au programme The Last Tomb, Manzer et Mobütu.

Manzer

Je l’avoue honteusement, je n’avais jamais vu Manzer avant ce soir, et ce n’est pas faute d’avoir accroché dès leur première démo “Pictavian Bastards” parue en 2010. Fondé en 2008, le trio poitevin n’a jamais retourné son drapeau à lion rouge et continue avec force et intégrité à propager son Heavy Metal (au sens 1981 du terme bien sûr). On peut valider aussi Black Metal à l'ancienne. Pour ceux qui auraient envie de mal comprendre, l’intégrité ce n’est pas de rester dans son trou et de s’y complaire. C’est un état d’esprit qui leur a permis de nouer des liens forts sur les autres continents et de jouer en Inde, en Malaisie, en Thailande, au Népal ou encore en Israël sans le soutien d’un gros label ou d’une grosse structure. Crowfund… quoi ? Juste de la persévérance, de la volonté et une poignée d’acharnés et de pasionnés traversés par ce même état d’esprit. Voilà qui force le respect, non ? Si la sueur des passionnés est leur essence, ça tombe bien. Nous sommes nombreux à vouloir faire un don ce soir. Shaxul, derrière sa batterie comme derrière un char d’assaut, lance les hostilités épaulés sur la ligne de front par Fëarann (basse/vocaux) et Hylde (guitare - également organisateur du festival). On retrouve de nombreuses compositions du dernier album (“Torment of the Strix", "Veisalgia Damnation" ou encore un implacable "Hard Metal Jackhammer") mais aussi du premier « Light of the Wreckers » (2013) (le vicieux et speedo-motörheadien “Terroir Squad” et le fédérateur “Manzer”). Assez intense, le set est maitrisé de bout en bout. Hylde glisse quelque soli bien sentis. Je retiendrai particulièrement l’excellente reprise du “Darkness & Evil” des Japonais de Sabbat et ce “Pictavian Bastards” (issu de leur première démo) absolument dantesque qui mettra littéralement l’audience à genoux. Manzer a donné dans ses terres une véritable leçon de Heavy Metal et mérite plus que jamais respect et reconnaissance.

Mobütu

Hormis leur très bon visuel “Axl Rose is Dead”, je ne connaissais pas vraiment le dernier trio de la soirée nommé Mobütu et originaire de Vendée. Je suis assez vite rentré dans leur rock’n’roll “alcoolisé et crasseux” mais pas moins énergique. Matürin (basse/chant) sait comment s’y prendre pour remuer la foule. Les morceaux sont catchy (“Go gogo go hail et rock n’ roll”, “Let them die” même si plus menaçant) et s’enchaînent assez bien. Très à l'aise, le bassiste/chanteur propose au public de monter sur scène “en faisant attention aux micros et aux pédales d’effets”. Il ne faut pas deux secondes à un gars du public (qui sera surnommé pour le reste de la soirée “Crocodile Dundee”) pour faire tomber le pied du micro et se ramasser par terre. Plus rock n’roll tu meurs et Mobütu enchaîne avec une énergie intacte du début à la fin. Un bon set qui clôture à merveille cette première soirée avant de retourner au camping pour un after improvisé.

The Grief

Quelle mauvaise nouvelle que l’annulation des Tarbais de Iron Slaught à quelques jours du festival. Je me réjouissais tellement de pouvoir les voir surtout que leur premier album a réussi à mettre la barre très haut et que les échos de leurs performances live sont très encourageants. Tant pis, ce sera partie remise... Du coup, les Équatoriens de The Grief (qui accompagnent Vulcano et Warfect sur leur tournée européenne mais n'étaient pas prévue au planning du jour) ont la lourde tâche d’assurer le remplacement. Fondé en 2005, le quatuor de Quito - inconnu au bataillon - a déjà sorti deux albums en autoproduction mais n’a rien à défendre de nouveau (leur dernier album date de 2013). Bon, si l’étiquette “Grief Metal” de leur page Facebook ne m’a rien appris sur le style du groupe, je suis plus que pessimiste à leur entrée sur scène devant un public très clairsemé (il est 14h, il fait beau dehors). Pessimisme qui se confirme dès le premier morceau. Une sorte de Black/Death … ni Black ni Death. C’est bizarre, et j’ai même l’impression qu’ils jouent désaccordés. Les titres sont mous, les riffs insipides, le chant est juste insupportable et si on ajoute à ça l’attitude coreuse du bassiste… c’est un calvaire. Oui, je suis très dur,  mais je m’imaginais me défouler sur “High Grade Metal” , pas sur ... “Songs to Suicide”. Un calvaire heureusement de courte durée. Bravo quand même à eux de s’embarquer dans une telle tournée et de prendre le rôle ingrat d’ouvreurs (d’autres y sont passés) mais musicalement et scéniquement c’est bien trop léger pour me convaincre.

Electric Shock

Je m’en étais voulu d’avoir raté Electric Shock en Belgique en octobre 2015. Un groupe que t’as pas forcément envie de voir, un metal market à l’extérieur, une bière ramenée par un pote et c’est le drame. Pas question que ça arrive cette fois, je suis bien placé à l’avant pour découvrir en live la bande à l’imposant Antoine “Alkoholik Desekrator”. Le public est nombreux à répondre à l’appel du hard. Les Grenoblois débutent avec “Judas Children”, un de leurs premiers morceaux au feeling totalement Hard’n’Heavy et joué avec une énergie incroyable. Leur leitmotiv “Hard rock à mort” prend tout son sens sur scène. Ensuite, le début incendiaire de “Dressed to Kill” ne laisse aucun répit. Ce dernier figure sur leur premier véritable EP “Burnout” qui sort justement le jour du fest et sera joué en intégralité. La reprise très pêchue du "Bite the Bullet" des Suédois de Bullet totalement en phase avec le style du groupe réussit à mettre en valeur les qualités vocales indéniables du frontman de deux mètres. Un chant aigu mais viril (hashtag no Olaf). Parmi les nouveaux morceaux joués, j'apprécie particulièrement le très accrocheur “Scream my name” pour son côté AOR dans le refrain, ses paroles crues (the way she touches me stimulates my body - she needs my bite - i want her in my bed tonight) mais aussi son solo rempli de feelings. Nous avons droit aussi à une reprise explosive de Rose Tatoo avec le titre "Nice Boys" et son inévitable refrain ("nice boys don't play rock 'n' roll") scandé à tue-tête par le public. Le dosage de Heavy et de Hard Rock est parfait "Heavy Metal Resistance" sonne comme un hymne galvanisant réservé aux défenseurs du Heavy Metal traditionnel. Ils sont nombreux dans la salle où la température a bien monté. On sent que ce n'est pas de la comédie et que ces gars-là vivent et transpirent pour le Heavy et son héritage. C'est donc très peu surprenant de les retrouver de plus en plus souvent aux quatre coins de la France avec les meilleurs représentants du Heavy à la française. Le set se termine avec le fédérateur "Drowned in the Bar". Je suis totalement conquis et le public l'est aussi...

Zoldier Noiz

Après le Hard’n’Heavy burné de Electric Shock, on passe au Thrash crasseux et punkoïde des Montpelliérains de Zoldier Noiz. Encore un très bon choix des organisateurs car même si le trio n’a pas de nouvel album à défendre, leurs deux premiers efforts ont de quoi assurer une setlist aux petits oignons. Dès les premiers morceaux, ça tabasse dans tous les sens. La batteuse, Reptiliza (Reptilicus), qui occupe le poste depuis l’année dernière est une véritable pile électrique et cogne ses fûts avec une vélocité non feinte. C’est un véritable déferlement de violence à laquelle on assiste. Zoldier Noiz tient brillamment son rang de valeur sûre du Thrash tricolore avec des compos pourtant simples mais tellement efficaces (“Schizoïd Reject”, “Grave Crawler”, “Dread Relieves”, etc). Le public ne s’y trompe pas et headbangue à l’unisson. Énergique et humble. le vocaliste/guitariste Tankvinss introduit le coup de grâce avec la reprise du “The Truth” de DeathStrike/Master. Une véritable baffe donnée avec conviction à l'image de leur excellent set. Je ne leur souhaite que de stabiliser leur lineup et balancer un troisième skeud au plus vite pour confirmer tout le bien que j'en pense déjà.

Difficile de voir tous les groupes dans un festival et je dois malheureusement faire l'impasse sur les talentueux Elvenstorm pour aller me restaurer au stand 100% végé placé devant la salle. Son succès faisant, il fallait être patient. Même si je ne suis pas du tout végétarien, je salue l'initiative et le cuistot pour la qualité des burger proposés. 

Hexecutor

Les plus fidèles d’entre vous savent que Hexecutor est un combo qui fait l’unanimité dans notre rédaction, au point de les avoir invités pour notre premier anniversaire en janvier dernier. On les remercie encore d’avoir rendu hommage à notre côté parfois chaotique. C’était pas obligatoire, mais merci. Bref, j’étais donc très emballé de les revoir surtout après l’annonce de leur premier long format à paraître prochainement chez Armée de la Mort Records (label de Shaxul/Manzer) et la sortie récente de leur split avec … Manzer. Le Poitou leur va si bien! Comme d’habitude “armés et dangereux”, le quatuor rennais semble de plus en plus rodé à la scène et emballe le public dès les premières notes. Sans être une seconde neuneu ou bas du front, leur Thrash incisif dévaste tout sur son passage avec quelques passages plus mélodiques et pesants qui ajoutent de la profondeur à leurs compos. Les titres de leur premier EP « Hangmen of Roazhon » (2014) sont taillés pour le live avec les cris déchirés de Jey Deflagratör (vocaux/guitare). Une véritable puissance et une ambiance puant le vice et la fornication s'y dégage. Du côté des nouveaux morceaux, je retiendrai le terrible  "Hardrockers City", dédié ce soir aux gars d’Electric Shock, Très démonstratif, le guitariste Joey Demönömaniac n'hésite pas à menacer le public et se mettre à terre pour un soli diabolique.
Seul regret, ne pas avoir entendu "La Sorcière du Marais" joué à Perpignan début avril (maudit Sleap!). 
Plus que jamais, Hexecutor est une valeur montante du Thrash français qui ne devrait pas avoir de mal à se faire connaître hors de ses frontières.

Warfect

Après avoir accompagné en tournée les regrettés Nunslaughter il y a deux ans, le trio suédois formé par Fredrik Wester (ex-Lord Belial) est de retour. D’abord avec un nouvel et troisième album, « Scavengers », sorti chez Cyclone Empire et une tournée en compagnie des Brésiliens de Vulcano. La première étape française a donc lieu ce soir. Je n’ai jamais vraiment creusé leur discographie, si ce n’est quelques titres du nouvel album et j’avais surtout lu de très bons échos par rapport au prédécesseur « Exoneration Denied » (2013). Un Thrash efficace que j’imagine faire le ménage ce soir. Et bien .. non. Leur Thrash - résolument old school - est rudimentaire, linéaire et je trouve vite le temps trèèèèèèèèès long. Un peu le comble pour du Thrash, non ? J’ai même l’impression de trop d’autosatisfaction sur des riffs et des breaks entendus mille fois. Certes, n’est pas Vektor qui veut et ce n’est sans doute pas leur envie de sonner comme les Américains mais leur prestation assez statique et leur communication très limitée avec le public (“Ceci est un morceau idéal pour le headbanging”, sérieux ?) n’aide en rien. Alors oui, il y a quelques soubresauts (les morceaux “Exoneration Denied” et “Drone Wars”) mais tout retombe trop vite et l’assistance semble peu réactif. Bref, un feu de paille à oublier au plus vite.

Violentor

Après cette malheureuse purge qui m’a quelque peu refroidi, je m’attendais de la part des sympathiques Italiens de Violentor présents depuis la veille de remettre les pendules à l'heure. Ce trio formé en Toscane a sorti trois album depuis sa formation en 2009 et jouit d’une bonne réputation dans l’UG italien, à l’instar de Baphomet’s Blood et Children of Technology. Ils semblent ravis de pouvoir monter enfin sur scène et dès le premier morceau, c’est le CARNAGE. On ressent l'influence majeure de Motörhead (pas besoin de faire de dessin avec la Rickenbacker du bassiste Riccardo/Rot) aussi bien musicalement que dans l'attitude mais on est très loin du pâle ersatz. Dans un déluge de riffs hyper speedés et de refrains enragés, la bonne humeur règne. Dog (vocaux/guitare) réclame du vin (et pas du Jack Daniel's pour le cliché !) et trinque avec le public hyper réceptif à leurs compos ravageuses. Iago Bruchi martyrise ses fûts pour notre plus grande joie et tout s’enchaîne à une vitesse folle. On retrouve de nombreux morceaux du dernier album « Maniacs » ("Schizophrenic Paranoid""Italian Bastards", "Maniacs", etc) et de plus anciens mais tout aussi redoutables comme “We Hate Hall” ou “Go to Hell” en apothéose finale. Certainement le set le plus intense du festival sur lequel je laisse mes dernières forces. PORCO DIO!

Vulcano

C’est vers minuit et demie que monte sur scène la tête d’affiche, les légendaires Brésiliens de Vulcano. Pionniers en Amérique du Sud du Metal extrême, aux côtés de Sarcófago et Sepultura, dès leur premier album, « Bloody Vengeance », paru en 1986 et dont ils fétent à travers cette tournée les trentes ans. Bien entendu, le lineup n’est plus du tout le même. Il ne reste plus que le guitariste Zhema Rodero. On retrouve néanmoins pour le côté historique le batteur Arthur Von Barbarian, qui figure sur le deuxième opus de la formation « Anthropophagy » (1987). Leurs derniers albums ne sont pas franchement mémorables mais ils restent fidèles à eux-mêmes.Une longévité qui suscite forcément le respect. Les nostalgiques (dont votre serviteur) sont heureux car le set commence par “Witches Sabbath” et “The Signals”, deux morceaux tirés de leur première démo « Devil on My Roof » (1984). Luiz Carlos Louzada assure le chant avec brio. On le sent complétement possédé et ça fait plaisir à voir. "The Evil Always Return", qui figure sur le split de 2006 avec les Suédois de Nifelheim, vicieux et démoniaque fait également son petit effet. Après je suis plus mitigé sur les morceaux post-2000’s ("Awash in Blood", "Gates of Iron", "Total Destruição", etc) mais la prestation est convaincante. Pour ma part, la fatigue se fait ressentir et je prends l’air avant de réattaquer la meilleure partie du live : « Bloody Vengeance » joué en intégralité. Même si je rate quelques titres, ça fait tellement plaisir d’entendre les primaires mais jouissifs “Holocaust” et autres “Death Metal". Le batteur aux cheveux blancs prononcés (mais seulement agé de... 47 ans , gloups) apporte beaucoup au show avec sa folie. On dirait un démon en cage tant il ne tient pas en place. Trente ans après, la vengeance sanglante est célébrée dignement. Loin d’être un vieux groupe usé qui surfe sur son nom, Vulcano a encore du sang frais dans ses vieilles veines et l’a prouvé ce soir.

Merci à Hylde et l’association Anthems of Steel, aux groupes, au public et aux nombreuses nouvelles connaissances que j’ai pu faire durant ce week-end mémorable. Longue vie à Anthems of Steel !