Articles Retour

Somewhere Inside the Bowels of Endlessness - A Retrospective of Finnish Death Metal (Part. 3)

mardi 17 novembre 2015
Sleap

Live reporter et chroniqueur occasionnel dans divers genres (principalement extrême).

Pour ceux qui ne les auraient pas encore parcourues, voici les liens de la partie 1 et la partie 2 de cette rétrospective !

Somewhere Inside the Bowels of Endlessness...

 

Cette courte troisième partie sera consacrée aux quelques groupes qui sortent du lot dans cette scène finlandaise, et qui ne peuvent donc pas entrer dans les deux premières catégories développées en parties 1 et 2. Mais, comme l'indique le titre, c'est surtout l'occasion de parler d'un des groupes de Death les plus connus et les plus particuliers de Finlande (et accessoirement mon groupe finlandais préféré)...

Demilich

N'importe quel passionné de Death des années 90 a forcément déjà entendu parler de Demilich. Ce groupe si particulier se forme à Kuopio en 1990 et enregistre dans un premier temps une demo tape d'un seul titre de 12 minutes (constitué de plusieurs morceaux). Malgré la piètre qualité de cet enregistrement ''rehearsal'', on distingue déjà toutes les caractéristiques de Demilich : une structure très alambiquée, un riffing maladif et des leads complètement tordus qui troublent mais obnubilent l'auditeur, une diversité de rythmes et de riffs assez folle, et des vocaux parmi les plus singuliers de toute l'histoire du Death Metal. Les racines sont évidemment FinnDeath (avec cette atmosphère sombre et cryptique ainsi que ces leads lancinants si particuliers), mais on distingue aussi certains éléments qui rappellent les ''grands'' tels que Carcass lors de certains passages aux relents Grind dégoulinants ou encore Morbid Angel comme lors du riff d'intro à la Immortal Rites (à 4:30) qui sera repris 15 ans plus tard pour l'enregistrement bonus Emptiness of Vanishing.

Mais c'est avec ses trois demo tapes suivantes que Demilich développe sa ''patte'' et commence à attirer l'attention. Ainsi, le groupe entre en studio fin '92 pour ré-enregistrer tous ces morceaux en vue d'un futur album. Et celui-ci paraît début '93 chez Necropolis Records (dans le même temps qu'Angelcunt de Archgoat). Portant le curieux nom de Nespithe, ce premier full-length de Demilich fait l'effet d'une bombe dans le paysage Death Metal finlandais. Les compositions sont extrêmement techniques pour l'époque et le son est presque aussi grave et gras que celui de Mortician. Pour couronner le tout, les vocaux d'Antti Boman prennent ici toute leur ampleur : un gargarisme si gras et infra-basse qu'il paraît presque extraterrestre (et tout ça sans effets vocaux !). Les 11 morceaux de l'album (aux titres tout aussi étranges que les compositions elles-mêmes) sont incroyablement bien travaillés. Le nombre de passages aux feeling / vitesse / atmosphère différents au sein de chaque titre est tout simplement affolant. Les leads de guitare, en plus de garder ce coté lancinant typiquement finlandais, sont totalement schizophréniques. Ils prennent la forme de rengaines rampantes sur When the Sun..., d'ondulations sentencieuses sur Within the Chamber... ou encore d'envolées distordues sur The Cry. Il en est de même pour la rythmique de Mikko Virnes, tantôt agressive et bestiale, tantôt plus subtile et aérienne, ponctuée de ralentissements, ponts et breaks tous plus techniques et alambiqués les uns que les autres. Et je ne parle même pas du riffing atonal de la paire Boman / Hytönen. Pour finir, la production de l'ingénieur Tuomo Valtonen rend le tout à la fois crade et parfaitement clair.

Quelques précisions sur l'algorithme sorti de l'esprit torturé d'Antti Boman pour les titres Nespithe et Erecshyrinol. Il s'agit en fait d'un système de syllabes de trois lettres décalées dans un ordre précis. « Ne-spi-the » est donc un anagramme de « the-spi-ne » (The Spine) et « Ere-csh-yri-nol » de « no-l-yri-cs-h-ere » (No Lyrics Here). Par ailleurs, le groupe ne cache pas ses influences Carcass autant musicales que thématiques, comme dans le break de fin de Inherited Bowel Levitation (dont le titre est un clin d'œil évident à Crepitating Bowel Erosion des Anglais). J'aurais encore des tas de choses à dire sur Demilich mais la plupart ont déjà été évoquées par mes collègues Rone (ici) et Caacrinolas (ici).

Alors que le Death Metal peine à se renouveler en cette année 1993, le quatuor de Kuopio parvient à pondre un album qui ne rentre dans absolument aucune catégorie. Souvent imité, jamais égalé, ce Nespithe constitue l'une des réalisations les plus uniques et atemporelles de toute l'histoire du Death Metal. Très avant-gardiste pour l'époque, Demilich fait le choix de splitter en 1995 sans rien produire d'autre, rendant encore plus culte son unique full-length. Véritable monument de la scène Death finlandaise (et de la scène Death en général), ce Nespithe mérite à lui-seul cette troisième partie d'article.

 

Il reste cependant quelques groupes assez inclassables dans cette scène finlandaise des 90s. En voici quelques uns, toujours dans un registre technique :

  • Mortal Agony :Mortal Agony se forme assez tardivement dans le paysage FinnDeath (1993) et n'enregistre qu'une seule demo tape en 1994 : The Cradle. Malgré le caractère assez anecdotique de cette sortie, elle renferme tout de même une qualité de composition certaine durant ces quelques 18 minutes. Le Death Metal de Mortal Agony est très véloce et surtout très technique pour l'époque et le pays. On est loin des plans hallucinants de Demilich, mais les structures sont tout de même bien travaillées et le rythme très soutenu (Infestated by Obliteration par exemple). Et l'enregistrement n'est effectué par nul autre que Sami Jämsén (ayant justement produit deux demos de Demilich). Mention spéciale au très bon mixage de la basse ! Mortal Agony se sépare néanmoins quelques temps plus tard, nous laissant cette unique demo qui dévoilait pourtant un potentiel certain...

  • Rectum : Mesdames et messieurs, voici le groupe le plus vendeur de l'histoire ! Originaires de Oulu, les quatre musiciens de Rectum déploient un savoir-faire impressionnant dès leur première demo de 1992. Le groupe pratique en effet un Tech Death old school dans la droite lignée des Floridiens de Nocturnus. Et je ne plaisante pas, tout chez ce quatuor rappelle le groupe de Mike Browning. Des enchevêtrements de riffs techniques au débit vocal très saccadé, en passant par le mixage et l'ambiance développée... Impossible de ne pas penser à The Key en entendant un titre comme Last Movie. Enregistrée aux Tico Tico Studios, cette demo Enforced Prick possède un son tout aussi clair et puissant que certains full-lengths de l'époque. Et au vu de la qualité indéniable de ce premier enregistrement, on en vient à se demander comment le groupe a pu autant prendre sa carrière à la légère. Un artwork pauvre et cartoonesque, des thèmes humoristiques et un nom digne d'un groupe de PornGrind tchèque (Rectum, sérieusement)... Bref, une imagerie et une attitude totalement à l'opposée de la musique pratiquée. C'est surement la raison pour laquelle le groupe splitte après cette unique demo. Rectum représente, selon moi, l'un des plus gros gâchis que la Finlande ait connu... Quel potentiel !

Voilà pour les quelques groupes plus techniques qui aient émergé en terres finlandaises durant le début des années 90. Mais ce n'est évidemment pas exhaustif, libre à vous d'aller en dépoussiérer d'autres par vous-même.

 

La Finlande compte encore beaucoup d'autres branches d'extrême que je n'aborderai pas ici par souci de cohérence. Je vous invite cependant à découvrir la scène Death Black, et notamment des groupes comme Belial ou Mythos (tout aussi importants !). Cet article est déjà bien assez long donc je ne peux évidemment pas tout passer en revue.

J'espère néanmoins avoir éclairé certains d'entre vous sur cette scène finlandaise, l'un des foyers Death Metal les plus intéressants du genre. Tout aussi variée musicalement que sa voisine suédoise, la scène extrême finlandaise regorge de formations dignes d'intérêt !

Merci à Martin de Black Death Nostalgia et Max de Heavy Thrash Nostalmania pour les images d'archives, ainsi qu'à Fabien de Spirit of Metal pour les détails historiques.

 

J'invite donc maintenant les plus courageux d'entre vous à lire mon live report du Finnish Death Metal Maniacs ci-dessous. Comme vous pouvez le constater, cette première édition était l'un des événements les plus incontournables de l'année pour tout amateur de Death finlandais (cliquer sur l'affiche) :

 

 

Voici également l'interview des organisateurs pour ceux qui désirent en apprendre un peu plus sur le festival, mais également sur la scène finlandaise en général !

Interview ici