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jeudi 16 avril 2015

Paupiettes

Eddie Coutigros, Mark Dorue, Saucimon & Vicporc

Romain

Drogué alcoolique aimant les amplis qui vomissent des basses bien grasses.

Paupiettes, groupe nantais à la portée désormais nationale, luttant chaque jour dans une lutte sans merci. Une lutte ayant pour principal objectif la défense d’une tranche de la population opprimée : celle qui en 2015 résiste au fléau bobo-hipster qu’est le véganisme.

Mais qui sont réellement Paupiettes ? D’où viennent-ils ? A quoi aspirent-ils en tant qu’individus ? Après une unique entrevue donnée à une radio associative nantaise, voici, la première réelle interview de Paupiettes. Et pour cette occasion coïncidant avec la sortie de leur tout nouvel EP Qui Sème le Gras Récolte la Paupiette, le groupe est presque au complet, seul Alex McDo n’ayant malheureusement pu répondre présent.

NB : Le chroniqueur ayant réalisé cette interview n’est aucunement responsable des propos tenus ci-dessous par les membres du groupe. Si plainte il devait y avoir, merci de vous adresser directement au groupe Paupiettes via leur page Facebook. De plus, la vulgarité de certains propos est à prendre en compte par le lecteur ; la discrétion du lecteur est donc avisée.

 

Pouvez-vous nous décrire un peu l’histoire de Paupiettes, le commencement ?

Saucimon : C’était à une soirée chez moi, dans mon salon, on était tous complètement bourrés et défoncés, dans des états seconds voire troisièmes, et on est partis du constat que tous ces connards de gens qui écoutent du grind ils mangent aussi pas de viande, ce qu’on trouve vachement triste. Donc on s’est dit « Pourquoi on ferait pas un groupe comme ça, pour les faire chier ? Anti-vegan mais du grindcore ». Et puis après un mois ou deux où on a oublié l’idée parce qu’on n’était pas très très bien, j’suis allé voir Thomas sur Facebook un soir où je me faisais chier et je lui ai dit « Eh le groupe dont on a parlé, Paupiettes, ça te dirait de le monter vraiment ? ». Il m’a fait ouais, on a écrit une dizaine de textes et puis voilà, c’est comme ça que ça a commencé. On a appelé les copains on a fait « Venez on va faire un groupe de merde ! » et puis bah ça marche.
Mark Dorue : Surtout ce qui est bien c’est qu’on a écrit une dizaine de textes mais on fait quand même des morceaux sans paroles.
Saucimon : C’est clair, on en a utilisé que 2 ou 3.

Donc dès le début il était vraiment clair de prôner haut et fort votre amour de la matière grasse ?

Saucimon : Oui oui, c’était bien le but.
Mark Dorue : C’était LE concept premier. On a vu les grindeux, c’étaient des straight edge hippies dégueulasses, alors on va faire le contraire pour les emmerder et c’est tout. Et si c’est mauvais à côté, et bah tant mieux parce qu’il manquerait plus qu’un groupe qui s’appelle Paupiettes, qui ait des pochettes faites sur Paint avec le titre en Comic Sans MS soit un groupe de qualité.

D’ailleurs pourquoi les Paupiettes en particulier ? Pourquoi pas les Travers de Porc ou autre chose ?

Mark Dorue : On était bourrés alors on s’en souvient plus.
Saucimon : Il y a dû avoir un débat d’environ 3 à 5 minutes où on a tous proposé des noms et on s’est tous accordés sur Paupiettes.
Eddie Coutigros : Et puis Paupiettes au niveau marketing ça reste dans la tête, c’est très court, c’est concis, y a tout ce qu’il faut.
Vicporc : Et c’est quand même vachement bon.

Pourquoi avoir associé cette lutte à la musique metal et au grindcore en particulier ?

Saucimon : C’était vraiment pour faire chier les grindeux. Bon on n’a pas vraiment fait du grind jusqu’ici mais à la base c’est ce qu’on voulait faire : du vrai grind pour les emmerder. Bon, on a abandonné l’idée de faire du grind parce que c’est chiant.
Vicporc : On a essayé de faire du grind mais au moment de composer les morceaux, personne n’en écoutait et personne n’aimait ça.
Eddie Coutigros : C’est vrai qu’on écoutait pas du tout du grind, alors y a du stoner, y a du death, y a du doom, y a même du pseudo-thrash, y a du hardcore… Tout sauf du grind !
Vicporc : Moi j’ai commencé à écouter du grind donc ça va ressembler un peu plus à… Enfin ça va moins ressembler à quelque chose du coup mais ça va être cool.

On remarque que vous n’hésitez pas à aller puiser dans des influences autres que le grindcore dans la scène metal. Quelle est la démarche, toucher un plus vaste public ?

Mark Dorue : C’est juste parce qu’on déteste tout le monde, alors on se fout de la gueule de tout le monde.
Vicporc : Et c’est aussi parce qu’on a plein plein d’idées et qu’on n’a pas envie de se limiter parce que ça nous fait chier et que c’est dur de se limiter.
Mark Dorue : Putain mais t’arrêtes de faire semblant d’être un artiste ?
Saucimon : Nan mais il faut que la musique elle vienne du cœur tu vois, il faut pas qu’elle soit produite pour l’argent.
Eddie Coutigros : Les morceaux à la base sont trouvés via les jeux de mots. Donc Sandwich au Jambong c’est rigolo parce que ça parle de viande mais "jambong" ça parle forcément de doom, donc forcément on fait un morceau de doom.
Saucimon : Donc on s’est dit qu’on allait faire un morceau à la Electric Wizard avec un mec qui se plaint et voilà.
Eddie Coutigros :Sodomie 21 et bah tu vois bien les coreux, et bah ça nous a fait penser tout de suite à ça.
Mark Dorue : 21, trisomie, crabcore…
Vicporc : C’est vrai qu’on aime bien les jeux de mots.

Pourquoi Les Contes d’Emile et Une Louis alors ? C’est quelle musique qui vous fait penser à ça ?

Vicporc : En fait à la base j’avais le jeu de mots en tête et je cherchais un riff pour ça et Alex m’a dit vu que Les Contes d’Emile et Une Louis c’est un truc d’Arabes, donc j’ai essayé de faire une musique d’Arabes et ça a sonné comme du black metal.
Eddie Coutigros : En fait il a fait du black metal avec un mode de musique orientale, c’est des modes lydiens c’est ça ?
Vicporc : J’en ai aucune idée et je m’en fous.
Eddie Coutigros : On parle trop de musique et c’est pas bon là !
Vicporc : On m’avait proposé « Tintin Emile Louis » aussi.

A l’heure où la communauté metal, et en particulier les fans de grindcore, se remplit petit à petit de végétariens, végétaliens et autres vegans, pensez-vous que votre message peut enfin faire évoluer les mentalités devenant de plus en plus archaïques ?

Saucimon : J’espère pas.
Eddie Coutigros : Je sais pas si on fait avancer le débat, en tout cas je sais qu’on le fait pas reculer non plus.
Vicporc : Y a un truc qui est quand même assez intéressant c’est qu’on a beaucoup de vegans dans notre public. Enfin si on peut appeler ça un public…
Eddie Coutigros : Ça fait même plus marrer les vegans que les non vegans…
Vicporc : Les non vegans qui disent que les vegans ont raison mais qui sont trop flemmards pour devenir vegans.
Eddie Coutigros : Ça me rappelle un sketch de Patrick Timsit qui s’en était pris aux trisomiques et les handicapés rigolaient parce qu’ils étaient contents qu’on les mette à la même échelle que les gens « normaux ». Et tous les autres à côté, les valides, ils étaient en train de se plaindre.
Vicporc : J’adore ton analogie entre les handicapés et les vegans !
Mark Dorue : Dans tous les cas pour revenir à ta question, je pense que s’il arrive une seule fois qu’un vegan se mette à remanger de la viande à cause de nous, on fait un album sur lui.
Vicporc : Un album, pas un EP !
Saucimon : Il faut savoir aussi qu’il y a des vegans qui bouffent nos saucisses, mais ça compte pas du tout comme de la vraie viande.
Mark Dorue : D’ailleurs on va être sur le split d’un vegan, y a un vegan qui nous a fait jouer.

Parlez-nous un peu de votre amour de la viande, quand avez-vous compris que la défense des carnivores était un combat ne devant pas être négligé ?

Saucimon : A peu près au même moment où on s’est rendus compte que le féminisme c’était de la merde.
Eddie Coutigros : C’est exactement ça, la preuve les féministes ont fait annuler un groupe de punk nantais qui s’appelle Viol.

[Ils parlent du groupe Viol, d’éventuels splits avec ce groupe et de punk, etc…]

Mark Dorue : On devait parler de notre amour de la viande je vous rappelle.
Eddie Coutigros : Moi perso la viande j’en mange de moins en moins parce que j’ai de moins en moins d’argent !
Vicporc : Bizarrement moi en plus je suis pas un gros mangeur de viande. Les vegans me font chier, clairement, mais on va dire qu’en dehors de Paupiettes, le régime vegan n’est pas forcément à proscrire.
Mark Dorue : Moi c’est pareil, depuis Paupiettes, plus ça va plus j’échange avec des vegans et plus je me documente sur eux et plus je les comprends, mais ils me cassent quand même les couilles et je le serai pas tout de suite pour des raisons personnelles.
Saucimon : Moi depuis que j’habite à Berlin je mange encore plus de viande qu’avant ! Déjà y a du bacon, ce qu’on a pas en France, donc déjà rien que pour ça je peux pas être vegan…

Vous me parliez de Viol, vous n’avez-vous pas peur des représailles de certains vegans, voire même de la censure ?

Saucimon : En même temps les vegans ils sont tout fins donc qu’est-ce que tu veux qu’ils nous fassent ? Ils sont plein de carences…
Vicporc : Nan mais si y en a un qui nous prend au sérieux c’est que son problème c’est pire que d’être vegan !
Saucimon : C’est pas d’être vegan son problème, c’est juste qu’il est con, comme tous les lecteurs de VS-Webzine en fait.
Vicporc : Le groupe s’appelle PAUPIETTES quand même.
Mark Dorue : Le mec qui se sent outré par « Sandwich au Jambong » c’est vraiment un… Bon ok…
Eddie Coutigros : Et si on nous interdit l’accès aux salles, on s’en bat les couilles.
Vicporc : De toute façon ça fait marrer les vegans, donc on va pas être censurés par les vegans.
Saucimon : Et puis nous à la base on voulait pas jouer en live.
Vicporc : C’est vrai qu’on fait pas beaucoup de concerts.
Mark Dorue : En plus la viande c’est légal à ce que je sache.

J’ai d’ailleurs vu qu’on pouvait voir un live de vous sur votre chaîne YouTube, dont il me semble que vous n’êtes pas très satisfaits.

Eddie Coutigros : C’est le plus mauvais des live qu’on ait fait, parce qu’il y en a quand même qui sont moins mauvais.
Mark Dorue : Honnêtement j’ai jamais vu un concert pire que mon propre concert.

Finalement Paupiettes, c’est un manifeste de la liberté d’expression ou un véritable engagement ?

Vicporc : Mais RIEN !
Eddie Coutigros : En fait Paupiettes c’est le lieu de déchargement ultime de tout le monde, on crache notre haine sur Paupiettes… Enfin c’est Paupiettes qui crache sa haine sur le monde en fait.
Vicporc : Tu vois des fois t’as mal au ventre et bah tu vas chier, et bah Paupiettes c’est pareil. C’est exactement pareil.
Mark Dorue : Paupiettes c’est notre groupe poubelle où on décharge toutes nos merdes mais qui marche mieux que nos vrais groupes. Ce qui est assez frustrant en un sens.

Ça vous fait pas chier de voir que dans le metal, ou même dans le reste de la musique en général, que la merde marche mieux que ce qui se fait de bien ?

Vicporc : Une fois que t’en es conscient…
Saucimon : C’est un peu désespérant pour la race humaine mais bon après…
Eddie Coutigros : En fait je pense que ça marche jusqu’à un certain degré, comme Ultra Vomit qui est un peu la référence dans le « metal connerie ». Si t’as un projet de devenir professionnel avec ton groupe et de vraiment faire quelque chose d’intéressant, les conneries ça marche mais arrivé à un stade t’iras pas au-dessus. Tu peux pas évoluer vraiment à un rang de professionnel avec des conneries, surtout dans le metal aujourd’hui où c’est vachement dur d’en vivre.
Vicporc : Déjà tu peux pas passer à l’international en faisant des jeux de mots en français.
Eddie Coutigros : Et puis ça fait marrer les copains mais tu vas pas vraiment exploser et faire un truc intéressant sur le long terme.
Vicporc : Ça atteint très très vite un petit succès de niche, parce que ça tourne super vite entre les potes dans un cercle assez fermé, donc ça va être connu très très rapidement au sein d’une petite scène mais après ça va pas forcément évoluer.
Mark Dorue : Y a pas d’ambition à avoir.
Eddie Coutigros : C’est pas le but !
Mark Dorue : Si on commence à gagner de l’argent avec Paupiettes ça devient scandaleux, désolé…
Vicporc : Mais on a gagné de l’argent avec Paupiettes !
Mark Dorue : Oui super, on l’a dépensé au McDo…
Vicporc : Oui mais on a quand même gagné de l’argent !

Un avis plus global sur les vegans ? Qu’est-ce qu’ils vous inspirent réellement ?

Vicporc : J’aime bien troller les vegans mais c’est surtout pour leur casser les couilles, ils sont tellement emmerdants…
Saucimon : Ils seraient moins chiants, on les ferait pas chier autant, c’est de bonne guerre.
Mark Dorue : Le problème c’est qu’ils sont prétentieux à en crever avec ça.
Eddie Coutigros : J’ai l’impression que c’est devenu un signe de revendication et d’intégrité. Mais par contre dans le fond je trouve leur démarche intéressante et pas forcément à blâmer, c’est juste la façon de te la présenter, t’as envie de les envoyer se faire enculer. Ils sont là à te prendre pour un con. Les mecs sont là à chaque fois en train de te rappeler « Ouais t’es en train de tuer des animaux ! »
Mark Dorue : En fait j’les compare juste aux témoins de Jéhovah mais en remplaçant Jésus par du tofu.
Vicporc : Le problème c’est le même partout, c’est les extrémistes qui font chier.
Mark Dorue : C’est comme les Femen, c’est Al-Qaïda de l’égalité des droits, c’est tout…

Bon, et bien finissons par une question originale : le mot de la fin ?

Vicporc : [growl]
Saucimon : [growl]
Mark Dorue : [growl]
Eddie Coutigros : Un maxi best of frites Coca steuplé !

Propos recueillis sur Skype le 1er avril 2015 entre Paris, Nantes et Berlin.