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jeudi 3 mars 2005

Mastodon

Bill Kelliher

U-Zine

U-zine.org, webzine musical metal actif entre 2004 et 2015. Fermé en 2015 suite à sa fusion avec 2Guys1TV, ses articles (chroniques, live-report, interview, dossiers, ...) sont désormais disponibles directement sur Horns Up via ce compte !

Après avoir ouvert pour Slipknot, Slayer et Machine Head, les Américains de Mastodon étaient de retour en France dans la salle intimiste de la Boule Noire.
C’est avec trois heures de retard qu’arrive le groupe à Paris suite aux intempéries climatiques, modifiant ainsi tout le planning des interviews. Initialement prévue avec le batteur Brann Dailor, c’est finalement le guitariste du groupe, Bill Kelliher qui a répondu aux questions d’U-zine.

U-zine : Tout d’abord, comment se passe la tournée ?
Bill Kelliher(guitare et chant) : Tout va pour le mieux ! On s’entend parfaitement avec les gars d’Extol et de Dozer et quasiment tous nos concerts furent complets, surtout lors de la tournée anglo-saxonne ! Les Allemands sont vraiment particuliers, quant aux concerts qu’on a donné en Espagne, que ce soit à Madrid ou Barcelone, c’était génial. Enfin, notre concert à Bruxelles, en Belgique d’hier soir fut incroyable… Mais qu’est-ce qu’il faisait froid !!! (rires)

Vous devez commencer à connaître l’Europe par cœur, car c’est la troisième fois que je vous vois en même pas un an !
Oui, on voyage énormément… (rires) Et on va revenir faire tous les festivals avec Iron Maiden avant de repartir chez nous tourner avec Black Sabbath et Iron Maiden pour l’Ozzfest.

Ce qui veut dire qu’on vous ferra en France cet été ?
Oui, on sera au Fury Fest et sur certaines dates en premières parties d’Iron Maiden.

Vous n’êtes pas frustré de jouer ce soir devant 300 personnes alors qu’en Octobre dernier vous avez joué devant plus de 10 000 personnes ?
Oui, ça fait une grande différence (rires). Mais qu’importe… Surtout qu’on n’a pas l’habitude de jouer devant 15 000 personnes, on fait plutôt des audiences de 300 personnes. Donc ça ne me gêne pas du tout de venir jouer ce soir devant ce public plus restreint.

Et tu préfères quelle type de salles ?
Les deux ! Quoique… Je préfère les concerts dans des plus petites salles, car c’est beaucoup plus intimiste. Tu peux descendre de la scène, venir parler aux gens, aller boire un coup au bar… Alors que devant 15 000 personnes, tu ne peux pas. Dès que tu montes sur scène, les gens hurlent, on dirait qu’ils vont avoir une attaque (rires).

Cette année, vous avez écumé l’Europe, les Etats-Unis et l’Asie… Qu’as-tu préféré ?
En fait, on est juste allé au Japon avec Converge et Isis, c’était vraiment génial ! D’ailleurs, j’ai vraiment adoré le Japon, et j’espère qu’on y retournera vite. J’en ai marre de tourner aux Etats-Unis, on y retrouve toujours les mêmes personnes, les mêmes habitudes… Je préfère donc découvrir de nouveaux endroits comme ce fut le cas pour le japon et j’en garde vraiment un excellent souvenir. Ils ont d’ailleurs une culture très différente de la notre.
J’aimerai bien aller en Australie, en Nouvelle-Zélande et en Amérique du Sud…

Vous avez été élu meilleur groupe de l’année par pas mal de magazines. Comment gérez-vous cette soudaine montée de popularité ?
C’est juste les dires de magazines… Les gens nous aiment beaucoup, ce qui est appréciable. Mais on ne se prend pas la tête avec ça, on veut juste continuer à faire ce qu’on sait faire, c’est-à-dire jouer de la musique. Mais c’est bon pour nous d’avoir des critiques positives… Mais quand tu vois que certains n’hésitent pas à nous qualifier de meilleur groupe de la planète, on ne peut qu’en rires (rires), il faut savoir rester objectif !

D’ailleurs, comment expliques-tu votre montée de popularité ?
On est continuellement en tournée, c’est la huitième fois qu’on vient en Europe en 3 ans et demi… On est déjà passé 5 ou 6 fois dans chaque état des Etats-Unis. Les gens sont forcés de nous connaître maintenant !
Et puis, on s’est donné beaucoup de mal pour en arriver là. Jouer tous les soirs, faire toutes les interviews qu’on peut, sortir des albums, filmer des vidéos… Ce n’est qu’une progression naturelle. On grandit petit à petit !

La diffusion de votre premier clip sur MTV fut il le déclic ?
Un peu, mais c’est principalement la tournée avec Slipknot qui fut déterminante pour nous. Car on a acquis bien plus de notoriété qu’avec notre clip sur MTV ! Par contre, March Of The Fire Ants est devenu notre tube et quelque soit l’endroit où on joue, il nous est réclamé !
Mais s’il ne faut retenir qu’un déclic, c’est notre tournée commune avec Slipknot & Slayer qui nous a fait connaître auprès de milliers de kids. Pendant, et après cette tournée, notre site a explosé sous le nombre de visites !!!

Parlons un peu plus du groupe maintenant, tu peux nous faire un bref rappel sur la création du groupe ?
Brann, le batteur, et moi jouons ensemble depuis 1994 dans un groupe qui s’appelait "Today Is The Day", et Troy et Brent jouaient également ensemble depuis un bon moment. Puis on est parti avec Brann à Atlanta car ma femme y vivait et une fois là-bas, on les a rencontrés.
Pendant deux semaines, on s’est entraînés à jouer tous ensemble et on a composé 10 morceaux. Et puis, grâce au van de notre de bassiste Troy, on est parti en tournée directement. Et depuis, on ne s’est jamais vraiment arrêté…

Et tu n’en as pas marre d’être toujours sur les routes, et lorsque vous n’y êtes pas, vous êtes en studio ?!
(rires) Oui, je commence à fatiguer. C’est beaucoup de travail de gérer une famille tout en tournant continuellement. Mais c’est ma vie, c’est ce que j’aime faire. J’ai choisi d’être musicien…
Heureusement, si on continue à avoir tant de succès, on n’aura plus besoin de tourner tous les mois non-stop, car certains jours, on aimerait vraiment freiner notre cadence !

Comment définis-tu le style de Mastodon car c’est un croisement entre du thrash, du heavy, du stoner voire même de la country…. ?
En fait, tu viens de le résumer (rires). C’est un peu de tout en faît car chacun à apporter quelques choses de différents du point de vue de nos influences. J’ai apporté du Metallica, Brann à apporter du Genesis, du Phil Collins…

Du Phil Collins ???
Oui, notre batteur adore ! Il a également apporter des touches de jazz, des influs AC/DC… On n’est donc tous arrivés avec nos styles et on ne sait pas dit Il faut que ça sonne metal ou autre chose. Si ça sonne bien, on l’enregistre, voilà tout !

D’ailleurs, comment se passe la composition des morceaux ?
Tout le monde apporte sa touche personnelle, ce n’est pas le fruit d’une unique personne. Ainsi, l’un de nous peut arriver en disant Voilà, j’ai composé la trame d’une nouvelle chanson et là, chacun y apporte un plus !
D’ailleurs, c’est marrant car Brann conserve toujours avec lui un microphone pour enregistrer dès qu’une mélodie lui vient à l’esprit.

Tu fais la même chose ?
Ca m’arrive. Je trouve que c’est une bonne idée. Car il arrive que tu sois au milieu de nulle part et qu’un riff te vienne à l’esprit, c’est frustrant de ne pas pouvoir l’enregistrer car tu l’oublis ensuite.

Leviathan est plus mélodique et heavy que Remission. Quelle en est la raison ?
On a eu plus de temps pour se focaliser (il se lève brutalement pour aller fermer la porte car les balances sont de plus en plus bruyantes)…
On a plus de temps en studio, ce qui nous a permis d’expérimenter de nouvelles choses comme des mélodies. Remission a été enregistré en dix jours comme je te l’ai dis… On voulait à l’époque déjà apporter plus de riffs mélodiques ou heavy, mais on n’avait pas eu le temps. Avec Leviathan, on a eu le temps de se focaliser sur les paroles, les effets vocaux, les parties de guitares, enfin tout… !

En parlant du chant, comment vous est venu l’idée d’être trois chanteurs ?
Certaines parties sont plus puissantes que d’autres, et un seul chanteur ne suffisait pas… Alors qu’avec trois, il y vraiment quelque chose qui se dégage.

Tu peux nous en dire plus sur le concept Moby Dick que vous développez sur Leviathan ?
Il y a certaines ressemblances entre la vie du capitaine Achab et ses hommes et la notre, en tant que groupe. En fait, il a tout sacrifié pour atteindre son but, que ce soit sa famille, ses amis… Puis saute dans son bateau après leur avoir dit au revoir, nous on saute dans notre van. Il affronte l’inconnu et part à la recherche de cette baleine blanche coûte que coûte. C’est un peu pareil pour nous en tant que groupe. On part sur la route à la conquête de quelque chose, mais pas d’une baleine blanche (rires)…. C’est une métaphore pour définir quelque chose comme le succès… Et puis, comme lui, on a toujours été fasciné par l’inconnu comme les profondeurs de la mer. Pourquoi les hommes partent-ils s’aventurer dans des mers houleuses et profondes avec de si frêles embarcations ? C’est totalement fou… Et ça nous a inspiré !

Sur Remission, il y a un morceau qui s’appelle Elephant Man, et sur Leviathan, Joseph Merrick. Pourquoi faites-vous une fixation sur cet homme ?
Brann est fasciné par Elephant Man que ce soit le film, le livre et tout ce qui va avec… L’étrange, la déformation…
Pour moi, c’est un homme qui est hideux, difforme et rejeté par les hommes. Or, il ne faut pas juger un livre par sa couverture, mais par son contenu… Il était brillant et surmonté sa difformité malgré le fait qu’il était considéré comme un animal de foire. Ce qui est frappant, c’est qu’il a su faire abstraction de toutes ces merdes… On a donc décidé de lui dédier un hymne.

Et à l’égal du capitaine Ashab, on peut soutenir la comparaison entre Elephant Man et Mastodon ?
J’en sais rien (rires). Je pense… Il ne faut pas nous juger avant d’avoir écouter ce qu’on fait (rires).

Vous parlez continuellement de personnes ou d’animaux hors normes, penses-tu que Mastodon soit un groupe hors norme ?
On est juste des amis des animaux et surtout des créatures mystiques dans le style du centaure, mi-homme / mi-cheval, les dinosaures ou le monstre du Loch Ness ou encore le Yéti. On trouve ça cool et intéressant. Déjà quand j’étais petit j’aimais l’inconnu et tout ce qui était mystérieux comme les dinosaures. Ah le Tyrannosaure ou le Brontosaure… (l’air songeur et souriant)

Vu votre rythme, un nouvel album est-il en cours ?
On n’a pas vraiment commencé à bosser dessus, mais il nous arrive de trouver plusieurs riffs pendant nos sound checks qu’on garde en mémoire. Cependant, on n’a pas le temps d’écrire quoi que ce soit en tournée, mais on s’y attardera dès qu’on sera de retour chez nous afin de mettre en commun nos idées.
Pour l’instant, on se focalise encore sur Leviathan et sur toute la promotion qui va avec, donc les tournées comme l’Ozzfest ou les festivals Européenns.

Vous rééditez continuellement vos albums avec un DVD en bonus. Pourquoi ne pas sortir carrément un DVD ?
(rires) On le ferra par le futur, mais on n’a pas encore de choses à mettre dessus pour le moment. D’ailleurs, ce qu’ils rééditent ne me plait pas du tout du fait de la faible qualité du DVD additionnel.
On voudrait sortir un DVD qui retrace notre vie sur les routes, en backstages, en répètitions. On ferra ça sûrement l’année prochaine, puisqu’on devrait emmagasiner pas mal d’images pendant notre tournée des festivals estivales.

Sachant que vous jouissez d’une grande popularité, souhaitez-vous signer chez un plus gros label ?
On doit encore enregistrer un album pour Relapse. Mais c’est vrai qu’on a parlé avec de plus gros labels, et on changera sûrement quand on pourra. Mais actuellement, on est toujours en négociation.

Et avec quels labels ?
On n’est sûr de rien pour le moment, donc je préfère ne rien dire. Mais, ils sont tous très gros !

Tu veux rajouter quelque chose ?
A bientôt sur les routes (rires) !

Merci à Bill pour sa gentillesse ainsi qu'à Paul et Yvonne.