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Album

19 juillet 2025 - Raton

Slaughter to Prevail

Grizzly

LabelSumerian Records
styleNu-deathcore
formatAlbum
paysRussie / USA
sortiejuillet 2025
La note de
Raton
3/10


Raton

Amateur de post-musique, de breakdowns et de gelée de groseilles.

Slaughter to Prevail a acquis une telle renommée sur les réseaux sociaux qu’il est désormais largement considéré comme un des piliers de la scène deathcore actuelle. Raconter l’histoire du groupe paraît même comme une redite, mais laissez-moi quand même essayer. Le groupe se forme en 2014, alors qu’Alex Terrible commence à réunir de nombreux abonnés sur YouTube avec ses covers faisant la démonstration de son chant guttural particulièrement grave. Il est alors repéré par le guitariste d’Acrania, le Britannique Jack Simmons, qui lui propose une collaboration. Cette collaboration devient vite un groupe avec le renfort des musiciens du groupe d’Alex Terrible de l’époque, We Are Obscurity. Après un premier EP en 2015 lorgnant très fort sur le slam death, Slaughter to Prevail sort son premier album Misery Sermon en 2017. Un disque que j’avais trouvé assez caricatural, reposant surtout sur les gimmicks de son chanteur et faisant l’impasse sur la créativité instrumentale.

Puis en 2021 sort Kostolom, surtout porté par ses singles « Demolisher » et « Baba Yaga », et tout commence à partir à vau-l’eau avec une direction nu-metal souvent embarrassante. Qu’on ne s’y trompe pas, je pense que Alex Terrible est un bon chanteur de deathcore. Comme tout le monde, j’ai été soufflé à la sortie de « Demolisher », mais sa technique ne se fait au service de quasiment rien d’intéressant, voire sert un certain mauvais goût. En 2022, le groupe condamne l’invasion russe de l’Ukraine et quitte rapidement le pays pour s’installer en Floride, au départ pour une durée temporaire. Les singles pleuvent et annoncent un troisième album ambitieux : Grizzly

Une fois ce troisième LP dans les oreilles, quelles conclusions tirer ? La première est que le groupe poursuit sa lancée avec un deathcore mâtiné de nu-metal, voire d’un groove metal pompier et balourd. Des titres comme « Banditos » ou « Lift That Shit » viennent apporter les touches nu-metal avec des scratchs, des petits riffs dissonants ou un chant syncopé. Tandis que les apports groove viennent surtout sur les refrains, notamment des singles « Russian Grizzly in America » et « 1984 ». Avec leurs refrains qui se veulent hymnes, les harmoniques artificielles et la rythmique stompy, on est parfois même pas loin de Five Finger Death Punch.

Plus généralement, il y a une grosse sensation de redite et d’inspirations flagrantes sur Grizzly. La première à mon sens est l’ombre de Rammstein, omniprésente avec le violon piqué de « Mein Herz Brennt » sur « Behelit », la guitare faussement acoustique de « Los » sur « Koschei » ou la même sensibilité martiale / indus-light sur « Rodina » ou l’horrible « Babayka ». On a aussi évidemment une pâle copie des instrumentations orchestrales de Lorna Shore, sur « Banditos » notamment ; ou encore sur l’atroce « Imdead » où le minable edgelord Radke fait son Manson de Wish avec une espèce de ritournelle inquiétante ratée. Impossible de ne pas mentionner également « Song 3 », le feat avec Babymetal où on ne reconnaît pas vraiment StP et où Babymetal est tiré vers le bas par une instru metal libre de droits, impersonnelle et indigne d’intérêt. Ça compte jusqu’à trois en japonais et en russe et ça suffit pour faire un morceau apparemment.

C’est surtout un disque composé autour d’Alex Terrible, les instrus étant juste là pour complimenter son chant et son attitude scénique. Sauf que j’ai du mal à apprécier tout un album composé pour satisfaire l’égo d’un type qui multiplie les sorties homophobes et transphobes, les postures virilistes à grande défense des valeurs familiales traditionnelles, ne voit aucun problème à fréquenter et soutenir les plus grands clowns réactionnaires de la scène (Ronnie Radke ou CJ McMahon), sans même mentionner son passé avec les néo-nazis.

Honnêtement je n’arrive pas à voir quel est l’intérêt de Slaughter to Prevail en dehors du chant guttural d’Alex Terrible. Et même sur ce point, Grizzly est perclus de gimmicks encombrants et ennuyeux comme le grognement d’ours de Terrible, placé régulièrement pour faire peur, mais qui gêne plus qu’il n’effraie. Le mixage de la batterie fait aussi lever les yeux au ciel avec la caisse claire exagérément tendue, surtout sur les breaks (n’est pas Volcano qui veut). Le groupe saupoudre aussi des éléments rappelant leur pays d’origine comme des chants orthodoxes mal exécutés sur « Babayka » ou du chant blanc slave sur « Rodina », sans jamais que ça apporte quoique ce soit.

Au milieu de cette surenchère souvent navrante, il faut bien reconnaître que des morceaux se laissent écouter, que ce soit « Koschei » ou « Viking », mais ça ne suffit pas à passer au-dessus du festival de gimmicks et de catchlines gênantes d’Alex Terrible. Ce dernier affirme pourtant que le groupe « a mis tellement d’effort dedans [et] passé beaucoup de temps sur chaque détail, en versant leur âme dans chacun des morceaux ». Marketing tu ne m’auras pas, cet album est raté.

 

Tracklist :

1. Banditos (4:52)
2. Russian Grizzly in America (4:14)
3. Imdead (feat. Ronnie Radke) (3:50)
4. Babayka (3:58)
5. Viking (4:31)
6. Koschei (3:05)
7. Song 3 (feat. BABYMETAL) (3:34)
8. Lift That Shit (3:06)
9. Behelit (4:09)
10. Rodina (4:31)
11. Conflict (2:22)
12. Kid of Darkness (4:23)
13. 1984 (3:34)