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Album

09 décembre 2014 - U-Zine

Peste Noire

La Sanie des siècles - Panégyrique de la dégénérescence

LabelDe Profundis
styleBlack Metal
formatAlbum
paysFrance
sortieaoût 2006
La note de
U-Zine
10/10


U-Zine

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Après avoir pondu deux démos depuis 2001 et un split remarqué avec les excellents Sombre Chemin, Peste Noire laissait déjà augurer le meilleur, notamment à l’écoute de Macabre transcendance, établissant déjà le potentiel créatif du groupe avignonnais.

Affilié à tort ou à raison à l’étiquette décidément fourre-tout de NSBM, Peste Noire tiens plus ce libellé de sa volonté manifeste d’entretenir un visuel et une musique sulfureuse que de son idéologie à proprement parler, les illustrations collant parfaitement à l’insalubrité de la musique ici proposée.

Outre ces considérations politiques qui laisseront encore et toujours un débat grand ouvert, la musique de Peste Noire était donc, nous l’évoquions plus haut, de grande qualité, suffisamment pour donner lieu à un véritable album longue durée, La Sanie des Siècles – Panégyrique de la dégénérescence.

Peu identifiable à la base, l’humus dans lequel se repaît Peste Noire pourrait être qualifié de Black metal traditionnel en ce qu’il hérite des codes musicaux inhérents au genre, tout en apportant un volonté bien assise d’en dépasser les frontières, d’apporter du sang neuf, d’offrir une vision nouvelle de l’Art Noir.
Macabre Transcendance (dont deux titres - Le Mort Joyeux et Spleen furent réenregistrés sur La Sanie...) permettait au groupe de poser les bases qui seront reprises et exacerbées dans ce full-lenght, dans son acception la plus remarquable : celle de la recherche de musicalité dans l’exposition d’une haine viscérale, d’une passion qui semble animer chaque secondes constituant La Sanie des Siècles.

Dans un univers textuel Baudelairien, dont la verve n’a jamais semblé aussi pertinente et intense que passée au rouleau compresseur «Peste Noire », l’album évolue dans un monde où la souillure côtoie le beau matérialisée par l’érudition rafraîchissante de Famine, faisant honneur à la langue française, s’appropriant des textes que l’ont croyait enterrés depuis des siècles, et livrant une interprétation extrêmement personnelle.
Ténébreuse et intense, passionnée et sulfureuse, la musique poisseuse et ô combien malsaine de cet excellent premier album puise son inspiration dans un univers médiéval bien éloigné de toutes festivités, proposant plutôt son aspect putride, famélique, ravagé et glauque, où les passages acoustiques semblent surgir d’une ruelle sombre et humide.

Au-delà de la certaine vélocité globale, c’est aussi la profonde et réussie recherche de musicalité qui frappe, marquant une architecture de composition infaillible, où des solis (autant salués que conspués) poignants de sincérité viennent seconder un sens rythmique varié et pertinent en ce qu’il sait s’adapter parfaitement au propos tenus à un instant T par le tenancier des lieux, qui alterne entre vocaux caverneux se muant en des déchirements quasi hystériques, accentuant là encore l’émotion véhiculée par la teneur morbide des textes.

C’est donc bel et bien à une sortie majeure du Black metal Français, clairement à vocation internationale dont nous parlons ici, là où la maîtrise de la technique se plie au service de l’intensité sonore, étendue morbide de Haine pure, où Peste Noire chasse en parfait maître de son univers, portant les coups de massues là où la plaie est encore béante. L’extraordinaire conclusion Des médecins malades et des Saints séquestrés pourrait ainsi être cité en exemple pour résumer la puissance de l’objet.

En décalage avec la production plus rêche des démos précédentes, la clarté sonore trouvée ici n’entrave en rien l’atmosphère peu avenante assénée par Peste Noire sur ce La Sanie des Siècles, Panégyrique de la dégénérescence. Elle la rend au contraire plus pernicieuse et suffocante, moins explicite.

Le choix de production, audacieux et pertinent, l’instrumentation au cordeau d’une catharsis de son auteur, transmise sans aucune concession à l’auditeur lacéré par ces attaques frontales, cette alchimie parfaite entre dépravation, décadence, musique et lyrisme hissent clairement, pour l’époque et encore aujourd’hui Peste Noire et cette Sanie des Siècles, en incontestable fleuron de l’Empire Black metal Hexagonal.

A posséder et dévorer sans commune mesure, absolument culte dans l’univers du Black metal, en dépit d’une suite laissant aux camés du combo pestiféré une légère amertume dans le fond du gosier.

1. Nous Sommes Fanés
2. Le Mort Joyeux
3. Laus Tibi Domine
4. Spleen
5. Phalènes Et Pestilence - Salvatrice Averse
6. Retour De Flamme (Hooligan Black Metal)
7. Dueil Angoisseus (Christine De Pisan, 1362-1431)
8. Des Médecins Malades Et Des Saints Séquestrés