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Album

09 décembre 2014 - U-Zine

Star One

Victims of the Modern Age

LabelInside Out Music
styleProg' Lucassen
formatAlbum
paysPays-Bas
sortienovembre 2010
La note de
U-Zine
8.5/10


U-Zine

U-zine.org, webzine musical metal actif entre 2004 et 2015. Fermé en 2015 suite à sa fusion avec 2Guys1TV, ses articles (chroniques, live-report, interview, dossiers, ...) sont désormais disponibles directement sur Horns Up via ce compte !

L’âge des temps modernes…de la perfection industrielle, des technologies propres à soumettre son prochain. L’humanité décline inéluctable à travers un combat quotidien dont elle semble ignorer, ou tenter d’oublier, qu’elle connaitra un destin funeste.
Dans un monde dont nous ne sommes plus maitres, certains penseurs se seront évertués à pérenniser une parole vaine et sans auditeur…qu’il fallait arrêter quand il était encore temps…que les machines étaient là…que le Jugement dernier évoquer dans les films les plus mythiques de science fiction était probablement plus proche et réaliste que ce qu’on avait pu initialement le penser. Simplement comprendre qu’au fond, nous étions les victimes de l’âge moderne…

Point de départ du second disque d’Arjen Lucassen sous le patronyme de Star One, faisant suite au projet (one shot ?) Guilt Machine ayant permis au compositeur prodigue de se laisser aller dans des contrées beaucoup plus rock et éthérées, non loin des héros de son enfance, Pink Floyd en tête.
Volontairement plus belliqueux et direct que Guilt Machine et surtout Ayreon, dont le très progressif "01011001" avait quelque peu désarçonné les fans, Star One dévoile la face la plus sombre du compositeur. Moins mélancolique que les dernières créations du néerlandais, le concept se rapproche néanmoins du dernier Ayreon de part son ambiance apocalyptique de fin du monde. Néanmoins, Arjen a tenu à moins s’envoler dans des parties ambiantes et à créer un monstre sonore fondamentalement plus massif, à la masse corporelle luisante et puissante, et à la force de frappe sans commune mesure avec ce qu’il avait proposé depuis des années (depuis "Flight of the Migrator" pour être précis).

Outre son objet magnifique et son artwork des plus ambitieux, Star One propose, sans réellement surprendre, une pléiade d’invités, dont Russel Allen (qui chante plus dans Avantasia, Star One, Jorn…que dans Symphony X depuis quelques temps…), Floor Jansen (ex-After Forever, Revamp), Dan Swano (Edge of Sanity), Ed Warby (Gorefest) ou encore Joost van den Broek (ex-After Forever).
Si l’album se veut plus simple et moins atmosphérique qu’Ayreon, les sonorités de claviers si propres à Arjen sont toujours présentes, à l’instar de ses placements vocaux toujours aussi originaux et lyriques.

"Earth That Was" surprend par exemple tant le riff d’intro est épais et lourd, avant qu’une nappe de claviers cybernétiques et modernes (à l’image de la technologie critiquée dans les textes) ne viennent établir une atmosphère plus mystérieuse, que Russel et Damian Wilson développent formidablement bien avec leurs timbres entre puissance et sensualité. Très loin d’un prog mécanique et technique, l’émotion joue une fois encore une place prépondérante dans la trame musicale, quelle que soit sa forme (ces claviers qui font vous sentir dans le cyberespace en quelques secondes). Le morceau éponyme, cosmique mais d’une puissance écrasante, laisse exploser toute la densité sonore de cette production signée Lucassen des plus monstrueuses. Les claviers enveloppent l’espace, les lignes de basses sont incroyables d’épaisseur, les guitares lourdes, simples et sombres alors que le chant, sans être prépondérant, est mis en valeur. Très épique, Dan Swano se veut impérial aux côté d’un Damian moins populaire (Threshold) mais faisant très fortement impression (avec Floor sur les chœurs du refrain). Que dire de cette infime phrase « Violence makes Violence » répétée et répétée mécaniquement avant que Dan ne la hurle avec une rage démentielle et jouissive (les poils s’hérissant sur la peau...) ? Si ce n’est qu’Arjen, sans pourtant complètement innover (impossible de se tromper sur le compositeur de l’œuvre), nous emporte avec lui…

Entre un "Digital Rain" très heavy (et les soli de Joost pleuvant comme une nuée d’étoiles) ou un "It's Alive She's Alive We're Alive" beaucoup plus old school, Lucassen fait le tour de ses capacités et touche sa cible dans une efficacité retrouvée (les morceaux allant tous entre 5 et 9 minutes), surement liée à sa situation personnelle plus stable. "Human See Human Do" quand à lui, trace le sillon d’une mélodie très 70e splendide, puis d’un speed à la ligne de basse proprement terrifiante, chanté par quatre vocalistes inspirés et concernés. Floor et Dan, plus discrets, se taillent la part du lion dans cette composition bénéficiant d’une montée de claviers à l’intensité incroyable sur le pont, surmontée des vocaux death abyssaux de Swano pour le passage le plus sombre de l’album. Quand à l’impérial "24 Hours", du haut de ses sept minutes, il tient d’hors et déjà sa place aux panthéons des compositions les plus magnifiques d’Arjen. Atmosphérique et sentencieuse, elle explose sur un refrain d’une émotion incroyable, d’une tension complète (« You have 24 Hours, To change the Course of History, Just 24 Hours »). Damian s’y montre bouleversant, contrebalançant avec la puissance de Russel sur le refrain.

Tout est fini ici ("It’s All End Here"). Ainsi ce conclut cette nouvelle création, sur la plus longue composition de neuf minutes qui, comme à l’habitude de l’hollandais, laisse exploser les lignes vocales dans des canons d’une beauté ahurissante.

Ainsi tout se termine…le voyage, néanmoins bien plus proche de la terre et de sa violence que des vestiges spatiaux de l’univers, prend fin.
Sans être foncièrement différents des œuvres qui firent sa notoriété, Arjen Lucassen trouve un second souffle dans une expression plus agressive et volontairement épurée de tous le superflu qui la rendait parfois redondante. Unique et sur une planète dont lui-seul semble connaître les tenants et aboutissants, il reste fidèle à lui-même et reste dans une optique que ceux qui ne comprennent pas ne comprendront toujours pas…il reste intègre…et quelque part, reflète rien qu’en ça une personnalité artistique rare et précieuse.

« La simplicité est l’habit de la perfection »
[Wladimir Wolf-Gozin]

1. Down the Rabbit Hole
2. Digital Rain
3. Earth that Was
4. Victim of the Modern Age
5. Human See, Human Do
6. 24 Hours
7. Cassandra Complex
8. It’s Alive, She’s Alive, We’re Alive
9. It All Ends Here

Bonustracks(Limited Edition)
10. As the Crow Dies
11. Two Plus Two Equals Five
12. Lastday
13. Closer to the Stars
14. Knife Edge
15. The Making of Victims of the Modern Age (Video)