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Album

31 mars 2023 - ZSK

Neo Inferno 262

Pleonectic

LabelNecrocosm Productions
styleBlack indus
formatAlbum
paysFrance
sortiemars 2023
La note de
ZSK
8.5/10


ZSK

"On est tous le boomer de quelqu'un d'autre."

Genre qui a été créé et popularisé en Norvège par Mysticum - nom qui est ressorti ces derniers temps avec ses prestations Live remarquées, le genre black indus a eu un écho assez particulier en France où pas mal de formations ont suivi ce mouvement de niche et trituré le style. Blacklodge, Spektr, C.Y.T, NKVD, La Division Mentale, Stagnant Waters, Helel, Diapsiquir… sont autant de noms qui se sont fait remarquer au fil des années, dans un spectre assez large entre labels spécialisés et pur underground. Pourtant, il n’y a pas eu grand-chose à se mettre sous la dent ces dernières années dans le style et dans la « scène ». Pavillon Rouge a certes eu son moment de gloire, mais son style plus personnel s’est éloigné des traditions du genre. Même ailleurs, il est devenu difficile de trouver quelque chose de consistant en matière de black indus, on aurait envie de dire depuis qu’un des patrons du genre, Aborym, est passé à autre chose… et ce malgré le retour de Mysticum avec son très puriste Planet Satan en 2014. Pour avoir votre dose de black metal de l’espace dopé aux piquouzes, vénérant Baphomet et bastonnant avec des beats hardtek, il aura fallu s’armer de patience. Mais par surprise, la scène black indus tout du moins française va maintenant se réveiller. Avec un nom que l’on attendait pas ou plus, celui de Neo Inferno 262. Auteur jusque là d’un unique album, Hacking The Holy Code, remontant à 2008. Groupe à l’imagerie travaillée et aux membres cachés sous des pseudonymes de « ministères », Neo Inferno 262 aurait pu être un chef de file, mais il est reparti dans l’ombre aussi vite qu’il en était sorti, et son premier album était assez classique dans un style de black indus particulièrement agressif. Quinze ans plus tard, le mystérieux projet s’apprête donc à faire un retour retentissant, sous l’égide de son label d’époque Necrocosm et autour d’une tête pensante cette fois-ci révélée, celle d’A.K. de Merrimack, Vorkreist et Decline Of The I (et passé par Love Lies Bleeding, Malhkebre et The Order Of Apollyon entre autres). Pour un deuxième album, Pleonectic, qui sera plein de surprises.

Déjà, Pleonectic sera dédié à la grandeur et au culte d’un des sujets les plus bouillants du moment, l’IA. Qui sert surtout pour fournir une grande base de supports visuels, fixes comme animés. Mais quoi de plus logique pour un genre aussi futuriste et déshumanisé que le black indus ? Quand d’autres utilisent cet outil par opportunisme ou facilité, Neo Inferno 262 en ressort un concept pertinent. Qui va donc enrober une musique qui va aller explorer des pistes plus variées que celles de Hacking The Holy Code en son temps, temple d’un black indus souvent saturé et impitoyable. Le premier single assez dodu qu’était « Bleak Revolution » nous promettait alors le retour en grâce d’un genre presque oublié, avec quelques aspérités et surtout une grande inspiration. Le résultat final sera presque à la hauteur des grandes attentes mais Pleonectic sera un album retors qui ne sera pas facile à assimiler, et certainement moins immédiat qu’un Hacking The Holy Code. C’est qu’on retrouverait presque l’esprit d’expérimentation et d’innovation qui animait un Dødheimsgard à l’époque de 666 International. Tout reste relatif car de l’eau a coulé sous les ponts depuis, et Neo Inferno 262 se base quand même sur des codes déjà établis et explorés. Mais Pleonectic sera un album très riche, qui ira même finalement au-delà du pur black indus qu’il pratiquait sans pitié il y a 15 ans en arrière. Difficile de parler d’avant-garde ou même d’expérimental tant ce sont des termes fourre-tout surtout dans cette frange du metal extrême, mais l’esprit est bien là. Qui se fait ressentir dès un « 4.0.4.2.6.2 » qui nous met déjà dans une ambiance cybernétique et martiale à coups de partitions électroniques à foison, et bien sûr d’un black metal tranchant agrémenté dune batterie et de percussions très technoïdes, du black indus donc. Des chants plus christiques se font même déjà entendre, et cela alimente l’ambition de Pleonectic qui sera d’ailleurs bardé d’un sacré collectifs d’invités, allant de membres de Blacklodge et de Seth à Dehn Sohra en passant par Déhà, MkM d’Antaeus, Bornyhake de Borgne ou encore BST (The Order Of Apollyon, Aosoth) et bien d’autres figures du black metal français dans son ensemble… de grandes réjouissances pour un album qui s’annonce grandiose.

« SEXES » nous montre déjà toute la créativité de Neo Inferno 262 v.2023, avec un départ jazzy qui nous amène à un black indus très ténébreux et même frénétique mais un brin dandy et raffiné. Et le final électronique assez bigarré va déjà nous montrer qu’il va falloir suivre le délire. Déjà pour un « Disrupted Resurrection » beaucoup plus rampant, bourré de samples mais aussi de trémolos black metal très décharnés. Le très progressif « Cyclopyrrolones » lui emboîte le pas avec un départ assez apocalyptique, avant d’embrayer sur un black indus plus remuant aux beats ravageurs. De toute façon, le black indus plus frontal va vite retrouver ses droits histoire que Pleonectic gagne en efficacité pour contenter tout le monde. « Digital Warfare » est presque le morceau le plus proche de Hacking The Holy Code, mais avec une violence plus contenue et surtout plus de modernité. Neo Inferno 262 brode vraiment là-dessus et se permet même de pondre des bangers, avec notamment « Death Is Overrated » qui est vraiment le morceau le plus entraînant de Pleonectic, avec des assauts électroniques particulièrement savoureux. Mais la masterclass de cet album est sans conteste le passionnant « Bleak Revolution », le premier single reste au-dessus du lot avec ses déflagrations black indus démentielles qui encadrent une partie centrale plus sombre et négative vraiment prenante. Le pinacle de l’album dévoilé en premier, c’est un move risqué mais Pleonectic ne déçoit aucunement. Neo Inferno 262 réussit d’ailleurs l’exploit de livrer un album très contrôlé malgré sa densité d’informations qui aurait pu le faire partir dans tous les sens. Si la base black indus est forcément présente, on s’en éloigne souvent tout en gardant l’essence d’un metal résolument futuriste. Il faudra néanmoins y trouver son compte, de petites longueurs apparaissent notamment en première partie d’album, et adhérer aux écarts que sont le morceau-titre 100% dark ambient et le final « Of Angels and Silicone » lui totalement électronique. Mais Neo Inferno 262 signe un retour en fanfare avec un album ultra complet de black indus « mais pas que », piochant dans des styles électroniques et ambiants attenants sans jamais perdre en cohérence. Et avec des pistes réussies et mémorables comme « 4.0.4.2.6.2 », « Death Is Overrated » et « Bleak Revolution », le tableau est presque parfait. Cela reste un style de niche, comme depuis sa création au milieu des années 90 finalement, mais Pleonectic est, à défaut d’être vraiment révolutionnaire, un album réussi et réjouissant, efficace et passionnant, qui serait bien inspiré de vraiment relancer la machine infernale qu’est le black indus…

 

Tracklist de Pleonectic :

1. 4.0.4.2.6.2 (5:58)
2. SEXES (5:21)
3. Disrupted Ressurection (5:56)
4. Cyclopyrrolones (6:38)
5. Digital Warfare (3:22)
6. Pleonectic (4:50)
7. Death Is Overrated (4:47)
8. Bleak Revolution (8:20)
9. Of Angels and Silicone (5:24)