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jeudi 20 septembre 2018

Ravenous Altar Festival 2018

CCO - Villeurbanne

S.

Trois ans après feu le Black Arts Ceremony, la région lyonnaise était orpheline du traditionnel festival extrême de la rentrée. Pour raviver la flamme, un collectif de quatre associations locales (Ytormis, Ondes Noires, Egregor Records et Black Cloark) s’est réuni sous la même bannière, pour proposer au public une affiche digne de ce nom. Le Ravenous Altar Festival était né. Un an de préparation aura été nécessaire pour concocter et préparer l’événement, plutôt alléchant avec au programme Cult of Fire, Grave Miasma, Grave Desecrator, Throane, Serpens Luminis et Dysylumn.

Les hostilités se déroulent dans l’antre du CCO de Villeurbanne. Outre les six groupes programmés, on retrouve plusieurs stands (Atavism Records, Asgard Hass), installés à l’entrée, ainsi qu’un point restauration (sandwiches) au bar de la salle, tenu par les bénévoles.

Quand on connaît l’intransigeance de la salle vis-à-vis de l’heure de fermeture, mieux vaut ne pas prendre du retard ; du coup, le premier groupe s’élance dès 16h30.

 

Ce sont donc les Lyonnais de Dysylumn qui ont l’honneur d’ouvrir le bal. Quelques visages sont familiers, puisque certains membres jouent également dans d’autres groupes du coin (OminousShrine, Malepeste…). Lorgnant sur les terres du Death et du Black, le projet délivre une ambiance lourde et malsaine tout au long de leurs morceaux, lesquels sont entrecoupés d’interludes mystiques. Pour autant, les cinq musiciens ne sont pas aidés par les ingé’ lumière, l’éclairage est faible et désespérément statique. C’est dommage quand on sait les possibilités de la salle. Constat similaire au niveau du son puisque nous n’aurons pas eu l’occasion d’entendre le second vocaliste, lors de ses rares interventions. Cela n’entache toutefois pas la prestation de Dysylumn, formation à surveiller qui, le jour-même, sort d’ailleurs son deuxième album « Occultation » chez Egregor Records.

Setlist :

Allégorie du Temps
Morta
Chaos Primordial
Oeuf Cosmique
Nébuleuse

 

 

 

On enchaine ensuite avec les Suisses de Serpens Luminis, qui ont mis plus de temps à allumer le cortège de bougies que de s’installer à leurs postes. Ce groupe ne m’est pas inconnu, étant donné que je les avais déjà vus au Wild Boar Legacy à Genève en février dernier. A l’époque, leur prestation ne m’avait pas marqué plus que cela. Mais ce soir, au travers des quatre titres proposés, le quintet nous assaillit d’un Black Metal à tendance occulte, teinté d’influences Death. Le groupe se démarque clairement par son vocaliste, assez fantasque et expressif sur les planches du CCO, avec ses mimiques et sa gestuelle possédée. Malgré l’effort de mise en scène, j’éprouve encore quelques difficultés à entrer dans leur musique, que j’estime trop linéaire, avec des morceaux manquant de relief. Les mélodies sont généralement trop noyées dans le mur sonore des guitares. Dans ces conditions, difficile de s’approprier leurs compositions, bien qu’une indéniable force émane de la scène. Mon jugement ne semble toutefois pas partagé, le public ayant été convaincu par leur prestation.

Setlist :

Dawn Fragrances
Revelation
Bright Euphoria
A Wreathed Skull

 

 

 

Durant l’entracte, les éléments de scène sont changés pour préparer la prestation de Throane, notamment au niveau des percussions et des décors. Les musiciens se dévoilent ensuite au public, tous habillés de la même façon : chemise en jean noire, ornée à l’arrière d’un grand patch à leur effigie. Aucun artifice, mais cette sobriété est visuellement efficace. Parmi les cinq musiciens, on note la présence d’une femme à la basse et les multiples rôles du frontman, tête-pensante du projet, Dehn Sora : outre les vocaux, il assure la gestion des samples à partir de l’ordinateur disposé sur scène, ainsi que le martèlement d’un tambour de temps à autre. Un rétroprojecteur est placé sur le balcon au fond de la salle, mais les éléments sont à peine perceptibles depuis le public.

Avec Cult of Fire, Throane est le groupe que j’attends le plus ce soir : paru l’année dernière, leur dernier album « Plus une main à mordre » est en effet une franche réussite, notamment grâce à l’atmosphère qu’il propose. Mais c’est également ma plus grosse appréhension : parviendront-ils à reproduire cette ambiance si lourde et post-apocalyptique, ce son envoûtant si particulier ? Malheureusement, pas tout à fait. Si une certaine lourdeur se répand dans la pièce, elle n’est pas aussi puissante et hypnotisante qu’en version studio, avec une restitution des titres loin d’être aussi fine. Pire encore, j’avoue n’avoir reconnu aucun de leurs morceaux, pourtant je les connais relativement bien. Je ne vous cache donc pas ma déception…

Setlist :

Aux tirs et aux traits
Aussi féroce que nous repentons
Un instant dans une torche
A trop réclamer les vers
Ceux en lesquels ils croyaient
Plus une main à mordre

 

 

 

Déjà, le nom du groupe annonce la couleur. Mais quand les musiciens s’installent sur scène, plus de doute possible, ça promet. En guise de décor, on a droit à deux cercueils ouverts dans lesquels des cadavres sont exposés au public, ainsi qu’un gros backdrop en arrière-plan. Grave Desecrator n’est pas venu pour danser le ballet, mais plutôt pour distiller un Black/Death/Thrash de haute volée. Les Brésiliens ont une vingtaine d’années d’expérience au compteur et de bons albums à leur actif : je pense en particulier à l’excellent Sign of Doom (2008). Clairement résolu à en découdre, le quatuor réalise ce soir une performance remarquable, grâce à des compositions survitaminées et un jeu de scène très dynamique. Il semblerait que cette puissance ait réveillé la régie lumière qui offre enfin du mouvement sur le plateau. Fidèle à ce que proposent traditionnellement les groupes sud-américains, le combo envoie une musique directe, violente, sans fioritures et surtout old school : le temps semble alors s’être arrêté au début des années 90’. Les temps morts sont quasi inexistants, les solos nombreux et l’énergie délivrée constante. Entre leurs illustres compatriotes de Sarcofago et la légende Destroyer 666, Grave Desecrator a surchauffé le public, qui ne s’attendait probablement pas à prendre une telle branlée !

Setlist :

Sign Of Doom
Revelations (Of The Beast)
Gods Of Death
Temple Of Abominations
Insult
Funeral Mist
A Witching Whore
Serpent Seedline
Carnal Obsession

 

 

 

Difficile de passer après une mandale pareille, pourtant c'est Grave Miasma qui s'y colle. Bien que modeste, leur discographie demeure très bonne et parle d'elle-même : ils n'ont pas grand-chose à prouver et font aujourd’hui figure de référence en matière de death/black bien poussiéreux, au même titre que les Teitanblood, Pseudogod ou Lvcifyre, pour ne citer qu’eux.
Pendant un peu moins d’une heure, le quatuor défend bec et ongles son bifteck, en délivrant ses compositions lourdes, soulignées par des vocaux puissants et une instrumentation sans faille.

Ayant eu un peu de mal à accrocher au début de leur set, du fait d'une musique que j'ai ressentie moins directe et percutante par rapport à leurs prédécesseurs, ils ont vite redressé la barre et le feeling passe finalement très bien. Les Anglais font honneur à leur réputation en proposant une performance carrée, violente et assommante !

Setlist :

Arisen Through the Grave Miasma
Gnosis of the Summon
Purgative Circumvolution
Erudite Decomposition
Eschatos
Pillars
Glorification of the Impure
Odoratus Sepulcrorum
Full Moon Dawn

 

 

 

Durant l'entracte, les techniciens s'agitent sur scène. On modifie l'éclairage à grand renfort d'échelles et un énorme backdrop est dressé (non sans difficultés). Au fond, la batterie est réajustée et d'imposants décors sont installés sur les planches : deux tables remplies de bougies et d'encens, de diverses représentations hindouistes, ainsi que les habituelles faux disposées en croix autour du micro.

Sans nul doute, c'est bien Cult of Fire qui va jouer. Les Tchèques nous offrent le privilège ce soir d'honorer leur seule date française de l'année. Les ayant vu à Bruxelles en 2014, je savais à quoi m'attendre et le quatuor n'a pas déçu. Dans une représentation assez théâtrale avec leur tunique ésotérique, le combo est assez statique sur scène : les deux guitaristes sont aussi peu mobiles que visibles derrière les tables ornées de quincaillerie indienne, le batteur est dissimulé derrière ses fûts et l'épais nuage d'encens. Seul le frontman effectue quelques gestes lents avec ses bras.

Malgré cette mise en scène particulière, Cult of Fire arrive sans problème à distiller son atmosphère avec le talent qu'on leur connait. Epiques, les mélodies sont bien audibles et l'ensemble de l'instrumentation est contrastée. Le jeu de lumière est quant à lui bien adapté, pour mettre en valeur le groupe ; et pour cause, la tête d’affiche de la soirée dispose de sa propre équipe en régie light, ce qui n’est pas un mal ; en effet, on ne va pas se mentir, ce soir le travail de la lumière est assez pauvre, bourré de contre-jours et d’infâmes lueurs rougeâtres ou bleuâtres. Niveau setlist, on retrouve une certaine diversité dans le choix des titres, entre ceux, nombreux, qui lorgnent vers l’atmosphérique (Kali Ma, खण्ड मण्ड योग…) et les quelques-uns plus rentre-dedans. Le tout est assez équilibré. Je regrette juste qu’ils n’aient pas introduit leur performance avec l’instrumental Vltava, comme sur leur DVD Kali Fire Puja. Mis à part cela, Cult of Fire a tenu toutes ses promesses et conclut son show sur le tubesque Satan Mentor, devant une assistance visiblement comblée.

Setlist :

When Death is All
Death
Kali Ma
On the Funeral Pyre of Existence
Gruesome Dance of Death
Untitled
Závěť Světu
Satan Mentor

 

 

Il est 23h30, les lumières de la salle se rallument, le public va pouvoir apprécier durant encore quelques jours l’odeur de l’encens sur ses vêtements. Les souvenirs de cette soirée, quant à eux, traverseront l’épreuve du temps.

L’heure du bilan est venue et celui-ci s’avère très positif sur de nombreux points. Tout d’abord, les six groupes ont proposé des prestations de qualité, devant un public dont l’affluence était honorable. Avec ses quelques 230 entrées environ, la pérennité du festival est assurée et les organisateurs ont d’ores et déjà annoncé la tenue d’une prochaine édition en 2019. Le rendez-vous est pris ! Merci à tous les acteurs de cet événement !

Revivez une partie de la soirée avec 10 vidéos :

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