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samedi 10 mars 2018

Black Label Society + Monolord @ Toulouse

Le Bikini - Toulouse

Shawn

Anciennement responsable du webzine U-zine.org. Actuellement chroniqueur éclectique et live reporter basé à Toulouse.

Et nous revoilà encore une fois partis pour sortir en concert ! Il faut dire qu’ils sont légion ces temps-ci entre la programmation de SPM Prod (Cannibal Corpse, Heaven Shall Burn, Rhapsody), de Noiser (Hangman’s Chair, Eryn Non Dae) ou les quelques pépites metal du Bikini (notamment le retour sur scène de Pleymo). Cette fois-ci, il s’agit d’une date particulièrement intéressante et attendue avec la venue sur Toulouse de Zakk Wylde et de sa formation Black Label Society. Et dès l’extérieur, on a senti un public très hétérogène, brassant plusieurs générations, entre les die-hard fans portant fièrement leur cuir patché aux couleurs du groupes, jusqu’aux quinqua hardos.

MONOLORD

On s’était longuement demandé quel groupe allait être choisi pour ouvrir avant Black Lab’. On avait bien constaté que sur la tournée US, le père Zakk avait semblé s’intéresser à la scène de la Nouvelle Orléans avec la présence de Corrosion of Conformity et de Eyehategod (excusez du peu !), ainsi que Red Fang sur quelques dates. Un line-up qui laisse plutôt rêveur. Pour la tournée européenne, c’est sans surprise une formation du Vieux Continent qui a été choisi avec les excellents Suédois de Monolord.

Le trio avait déjà fait un tour dans le Sud Ouest l’automne dernier en co-headliner avec Conan, notamment à Bordeaux. C’était au Void, on y était, et l’ambiance de la salle, intimiste et de capacité réduite avait été un écrin parfait pour le stoner/doom brumeux distillé par Monolord. Notre crainte était donc grande lorsque l’on a réalisé que cette fois-ci ça serait sur la grande scène du Bikini. En effet, ce type de musique (très confidentielle au demeurant) a rarement l’occasion de sortir de l’ombre et de passer sous les projecteurs. Et en effet, si on regarde sur le passé, rares sont les groupes assimilés qui s’y sont produits. On se souviendra de Mars Red Sky en ouverture de Blues Pills, mais ça s’arrête là. Autrement dit : la présence de Monolord sur une telle scène est absolument exceptionnelle et tend à confirmer l’intuition selon laquelle Zakk Wylde (ou du moins du management) s’intéresse de plus en plus à la scène stoner, doom et psyché.

Sans surprise, la setlist sera réduite à sa plus simple expression. 35 minutes de set pour 4 titres. Et c’est sur « Where Death Meets The Sea » extrait de Rust, le troisième et dernier opus des suédois, que débute les hostilités. Premier constat : le son est incroyablement équilibré. Bien entendu, et c’est le genre qui veut ça, les riffs sont ultra lourd, la voix est noyée sous la reverb’ et les rythmiques sont répétitives. Scéniquement, le groupe se fait bien peu mobile, se concentrant sur la lourdeur des rythmiques, le tout encadré par leurs volumineux ampli Orange. Le titre éponyme de l’album sera bien entendu de la partie, avec son intro aux teintes religieuses jouées à l’orgue.

Mais le titre qui, sans nul doute, restera le plus en mémoire, c’est certainement Empress Rising. Magistrale démonstration de rythmiques écrasantes, offrant une fresque stoner/doom de plus de 15 minutes. C’est massif, c’est percutant, c’est servi par un son d’une propreté remarquable, mais à bien regarder le public, peu sont ceux qui ont réussi à accrocher. Car à cet instant, le public se décompose en deux catégories : les doomsters (en très large minorité), veste à patch Saint Vitus et Electric Wizard sur le dos, en quasi-transe, fumant leur pilon directement devant la scène, totalement dans l’appréciation primaire ; et il y avait ce majoritaire public de daron, vaguement attentif, mais clairement pas réceptif DU TOUT à ce qui se passe devant eux. Qu’importe, les fans en ont pris pour leur grade et c’est là l’essentiel. On se rappellera de l’interminable et délicieux riff final, qui ne semblera jamais s’arrêter et qui reprend en boucle après pas moins de 3 breaks. Magistral !

Setlist Monolord :
Where Death Meets The Sea
We Will Burn
Rust
Empress Rising

BLACK LABEL SOCIETY

Il fut un temps, pas si loin de nous que ça, où ce bon vieux Zakk Wylde était devenu une parodie de lui-même. La prestation de Black Label Society à l’Xtreme Fest 2015 en avait été tristement révélatrice. On avait alors affaire à un homme, incapable de se rendre compte de l’énorme quantité de superflu accumulé au fil du temps : des soli masturbatoires traînant en longueur (deux fois 6 minutes sur un concert…) et des ballades sirupeuses sans intérêt. Beaucoup s’accordent à dire que Zakk a un sens aigu pour le riff percutant, mais malgré ça le bougre avait arpenté des chemins de traverse là où l’efficacité est pourtant le meilleur atout.

Et en début d’année, l’espoir est revenu avec Grimmest Hits, 10ème opus de la formation californienne. Un album clairement plus intimiste, où l’artiste a curieusement laissé de coté ses pinched harmonics pourtant si caractéristiques du style, pour favoriser des rythmiques plus naturelles, plus instinctives, et souvent plus mélodique. L’occasion était trop belle pour ne pas aller constater directement l’évolution sur scène.

Comme souvent, la mise en scène est soignée, et c’est sur le mash-up Whole Lotta Sabbath (Led Zeppelin / Black Sabbath, deux des groupes préférés du guitariste) que le groupe fera son entrée en scène caché sous un immense drapeau aux couleurs de Black Label Society. Le masque tombe, et c’est directement Genocide Junkies qui est envoyé au public ! Premier constat : la mise en scène est elle aussi revenue à l’essentiel. En effet, loin du délire japonisant de la tournée de 2015, on fait ici face à un double mur d’ampli encadrant la batterie, un backdrop tout simple aux couleurs de la formation et un magnifique pied de micro mélangeant croix chrétienne et crânes des ennemis vaincus.

Du coté du line-up, on retrouvera évidemment John DeServio à la basse. Le tout petit bassiste, en poste depuis maintenant 12 ans a cette année eu une promotion interne puisqu’il est à l’origine des lignes de basse du nouvel album, là où auparavant, Zakk Wylde enregistrait tout (sauf la batterie) lui-même. Signe d’ouverture vous avez dit ? A ces cotés on trouvera Jeff Fabb à la batterie ainsi que Dario Lorina (ex-Lizzy Borden) qui nous montrera quelques talents au piano ainsi qu’à la six-cordes imitant le style et les gimmicks de Zakk avec beaucoup de soin.

Si on lorgne sur la setlist, on ne peut que constater une évidente évolution. Exit les power-ballades à l’utilité discutable, exit les soli à rallonge joué de manière statique sur scène. Cette fois-ci la setlist est équilibrée, piochant dans l’essentiel des albums majeurs de la formation : Bleed For Me et son incroyable solo, Suicide Messiah… Le riff est à l’honneur, définitivement. Malgré tout, ça n’est pas parce que l’on joue un best-of que la qualité suit, et c’est ici que le bât blesse. En effet, alors que Monolord avait été servi par un son d’une propreté remarquable, l’intégralité du set de BLS souffrira d’un niveau sonore bien trop élevé, donnant au rendu final un côté très brouillon.

Qu’importe, tant sur scène que dans le public, les sourires s’échangent. On verra ainsi quelques points notables : le poignant hommage à Dimebag Darrell sur le titre In This River, joué au clavier, qui verra le mur d’ampli recouvert de deux images géantes du regretté guitariste, ou The Blessed Hellride, interprétée à la guitare sèche. Mais le titre qui restera sûrement dans tous les esprits, c’est sans nul doute Fire it Up, lorsque Zakk Wylde a été jouer un solo au milieu du pit puis directement au balcon du Bikini (le tout en étant branché à ses amplis en filaire !). Un solo d’une durée raisonnable (ouf !) mais surtout bien plus dynamique que par le passé car partagé avec son public. L’artiste nous avait déjà fait le coup lors de sa tournée solo en 2016.

Setlist BLS:
Genocide Junkies
Funeral Bell
Suffering Overdue
Bleed for Me
Heart of Darkness
Suicide Messiah
Trampled Down Below
All That Once Shined
Room of Nightmares
Bridge to Cross
In This River
The Blessed Hellride
A Love Unreal
Fire it Up
Concrete Jungle
Stillborn

En bref, alors que l’on avait cru BLS perdu à tout jamais sur une version parodique d’eux-mêmes, revoilà le groupe en pleine forme, sans le superflu et en capitalisant sur l’essentiel. Ouf ! Maintenant, on attend plus qu’une tournée de Zakk Sabbath en Europe… L’appel est lancé !

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