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Livre

09 décembre 2014 - U-Zine

Nicolas Bénard

La culture Hard Rock

LabelEditions Dilecta
styleVersion abrégée de thèse
sortiemai 2008
La note de
U-Zine
9/10


U-Zine

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Nicolas Bénard, qui a soutenu sa thèse sur le Hard Rock en octobre 2007, nous propose d’en découvrir une version allégée, intitulée La culture Hard Rock, histoire, pratique et imaginaires, publiée aux éditions Dilecta depuis la fin du mois de mai 2008. Ce chercheur associé au centre d’histoire culturelle des sociétés contemporaines, tente de bousculer, à travers son ouvrage, les préjugés les plus répandus à l’encontre de notre formidable musique extrême. Nous allons voir si cet ouvrage vaut la peine qu’on s’y intéresse, et pas seulement par curiosité.

Tout d’abord, parlons de la couverture du livre : quoi de mieux qu’un empilement de billets de concerts toutes époques (en majorité des années 90) pour attirer l’attention des lecteurs sur la diversité et la durabilité du phénomène Hard Rock ?
Cette couverture, rassemblant les plus grands noms de notre musique, nous rappelle aussi 2 choses qui nous font éprouver de la nostalgie :

- Les anciens billets étaient de beaux objets qu’on conservait en souvenir. Depuis, nous avons droit aux tickets dépourvus de beauté, vendus par les grandes agences de distribution…

- Ah… La bonne époque des francs. Voir des tickets pour Iron Maiden + Trust + Anthrax + Helloween à 140 francs, Morbid Angel + Grave + Dismember à 95 francs, Megadeth + Alice In Chains + The Almighty à 100 francs, etc., c'est très évocateur du changement intervenu dans notre société depuis les années 2000 (aujourd’hui, on paierait le double facilement).
L’étape de la couverture est passée avec réussite, dans la mesure où, même après avoir lu le livre, je continue de la regarder et regarder, et regarder encore.

Nicolas Bénard a commencé son ouvrage par quelque chose qui nous a tous marqué : l’épisode de l’Eurovision 2006 Lordi a été déclaré gagnant et où 2 présentateurs dont je ne donnerai pas le nom ont fait preuve d’un manque affligeant d’ouverture d’esprit. C’est un très bon incipit car c’est un fait fédérateur dans le monde du Hard Rock, même si nous ne sommes pas forcément fans de Lordi.
Une mise au point s’impose maintenant ! Le livre porte dans son titre le terme « Hard Rock », et depuis le début, je l’ai mentionné aussi. En aucun cas ce livre ne s’arrête à la musique Hard Rock, puisqu’il touche à tous les genres du Metal et même des musiques plus anciennes (musique classique, blues, etc.) et d’autres genres actuels (rap, jazz, etc.).

Ce livre décrit de manière concise à peu près tout sur notre musique (par ordre chronologique) : l’histoire, les connexions avec des artistes qui font d’autres musiques, la description des genres du Metal (avec un très grand exposé sur le Black), les thèmes de notre musique à travers la mélodie, les textes, les attitudes scéniques, …
Le livre s’attaque ensuite à la description du son si atypique du Metal, des artistes, des fans, des sujets à controverses dans notre société, des femmes dans le Metal, de la presse Hard Rock et de son histoire en France et dans le monde, du business (labels, management, studios, merchandising, medias, cinéma, pour terminer sur une ouverture sur le futur (festivals, groupes, vente d’albums, etc.).

On peut dire que Nicolas Bénard a parcouru l’essentiel de notre musique de manière logique, qu’il a appuyé sa thèse d’exemples très concrets, d’anecdotes bien justifiées, tout en prenant le recul nécessaire pour garder une bonne objectivité. On sent que ce livre est issu d’une réflexion très longue, d’une documentation énorme, d’une expérience bien vécue et surtout d’une passion sans limite pour le Metal. Aussi, il n’a pas hésité à faire intervenir d’autres personnes à travers des citations, pour appuyer son argumentaire. C’est une chose importante qui fait vivre son livre, en ne le limitant pas à un simple et long monologue.

Je regrette cependant 2 choses : Nicolas Bénard n’a pas parlé (ou très peu) des salles françaises qui accueillent depuis des décennies les groupes. Il l’a peut-être fait dans sa thèse, mais j’aurais trouvé intéressant qu’il en parle un peu dans son ouvrage. Je suis un grand voyageur, et le retour d'expérience des concerts dans différentes villes est très enrichissant. Pour le défendre, il a plus d’une fois parlé du Hellfest, festival majeur chez nous.
Le second reproche est qu’il a abordé le Hard Rock dans le cinéma, dans les médias (écrits, visuels et internet), mais il n’a pas assez traité des autres ouvrages sur le Hard Rock (à part La bible satanique, les éditions camion blanc). Ceci est compréhensible tout de même… On n’imagine pas qu’il va faire de la publicité pour des concurrents !

La culture Hard Rock contient enfin 3 cahiers photographiques de 12 pages chacun, placés à des endroits stratégiques. De la même manière que la couverture du livre, ces illustrations attirent l’œil car elles sont variées (photos de concert, magazines, artistes, fans, albums, partition, merch), bien choisies, et surtout, elles prouvent que le phénomène Hard Rock est très vaste et regorge de centres d’intérêts. Là encore, je ne cesse de regarder les photos.

En définitive, Nicolas Bénard nous propose un livre très instructif, qui n’a pas ou peu d’erreurs et d’oublis (il a même souligné à plusieurs reprises l'influence majeure d'Hellhammer/Celtic Frost sur toute la musique extrême, pas sur la musique gothique, c'est dommage. C'est un bon point qui m'a plu), bien documenté, illustré, qui montre une vision de notre musique très juste. De plus, il est long de 156 pages, ce qui fait que ce n'est pas un monstrueux pavé, et en plus il se laisse vraiment bien lire.
Cet ouvrage se transforme aussi en quelques sortes en «avocat du diable » puisqu’il justifie le bien-fondé du Metal, va au-delà des clichés et permet à un lecteur extérieur à notre monde d’y trouver son compte. Enfin on sent de la passion, du travail et une volonté de partager tout cela avec nous. La culture Hard Rock est une réussite !

Et en plus quand je vois que je suis en page centrale du livre, sur la grande photo du Hellfest, au premier rang, 7ème personne en partant de la droite de la photo, je suis comblé ! C’est la cerise sur le gâteau ! Merci Nicolas.

N.D.L.R. : il est possible de lire la thèse complète dans pas mal de bibliothèques universitaires
de France, sur simple demande.


1. « Ce n’est pas avec ça qu’ils gagneront l’Eurovision »
2. La fabrique du Hard Rock
3. Du Hard Rock au Métal
4. L’imaginaire Hard Rock
5. La tribu Hard Rock
6. L’âme noire du Hard Rock
7. Business
8. Le feu sous la glace

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