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vendredi 29 décembre 2017

Orphaned Land

Kobi Farhi

Malice

L'autre belge de la rédac'. Passé par Spirit of Metal et Shoot Me Again.

Alors qu'Orphaned Land s'apprête à sortir son nouvel album Unsung Prophets & Dead Messiahs, qui paraîtra le 8 janvier chez Century Media (chronique à lire ici), nous avons eu l'occasion de nous entretenir avec son emblématique chanteur Kobi Farhi. Volubile, engagé et fier de son travail, il nous explique notamment le concept derrière l'album et sa vision du monde actuel ... 

Salut Kobi, merci de prendre le temps de répondre à mes questions. Nous sommes à quelques semaines de la sortie d'Unsung Prophets & Dead Messiahs ; comment te sens-tu ? Impatient, nerveux, fier ?

Très impatient ! On commence déjà à recevoir les premiers feedbacks et c'est plaisant de voir que la majorité des gens qui ont eu l'occasion de l'écouter l'ont apprécié ; j'ai aussi très hâte de tenir, enfin, l'objet entre mes mains. Mais c'est aussi une période fatigante. Nous avons mis du temps à enregistrer l'album, répéter ... nous sommes un peu fatigués, mais ça fait partie du jeu, c'est une bonne fatigue. Tout va bien !
 

J'ai moi-même eu l'opportunité d'écouter Unsung Prophets & Dead Messiahs et je dois dire que je suis plutôt impressionné, c'est un excellent album.

Merci beaucoup !
 

Nous parlerons des nouvelles chansons un peu plus tard ; pour commencer, revenons sur All Is One, sorti il y a quatre ans. Quel regard portes-tu aujourd'hui sur cet album ?

Je pense que c'est un très bon album, un de nos meilleurs. C'était la première fois que nous essayions de faire un album très direct ; je crois qu'il a amené beaucoup de nouveaux fans à Orphaned Land et nous a permis de diffuser nos idées et notre concept à plus large échelle. Il a également été très bien reçu, à la fois par la critique et par le public ! Bien sûr, au niveau des anciens fans du groupe, il y en aura toujours qui se sentiront plus proches des anciens albums des nineties, chaque opus a « ses » fans. Mais ça fait partie de notre évolution. S'attendre à ce que nous fassions la même chose que sur Sahara et El Norra Alila est une erreur, car nous sommes différents aujourd'hui ; nous jouons différemment, nous écrivons différemment, le monde est différent... Mais la majorité des fans nous suivent et acceptent ce changement. Nous prenons toujours le temps de publier l'album que nous avons envie de sortir, ils le savent.
 

Le message de All Is One était assez lumineux, porteur d'espoir jusque dans sa pochette ; le moins qu'on puisse dire quatre ans plus tard est que le monde n'est pas devenu plus lumineux, notamment dans votre région.

Hmmm... (il réfléchit). All is One était aussi très sombre, à vrai dire, très tragique ; bien sûr, ce nom d'album, cette pochette et le message du groupe parlent d'unité, mais si vous vous plongez dans les textes ... ne serait-ce que sur la chanson-titre (« Again and again, we fail to see that all is one », nda). Il y a toujours de l'espoir dans notre musique, mais il y a aussi un oeil très réaliste, notamment sur des chansons comme Children ou Let the truce be known. A l'époque, le monde devenait plus sombre déjà ... C'est ce qui nous permet, aujourd'hui, de sortir un album encore plus fort, je pense. C'est ironique : plus le monde devient sombre, meilleure est la musique.
Je pense que ce nouvel album, en un sens, est une continuation de All is One, mais dans le même temps constitue une synthèse de nos autres albums, qui étaient des albums concept ; Mabool, OrWarriOr étaient des concept-albums. Nous y sommes revenus, mais nous avons conservé le côté plus direct de All is One, ce qui constitue peut-être un mix parfait de ce qu'est Orphaned Land à ce moment précis.
 

A l'époque, tu disais que si tu étais en colère, les growls et le chant extrême feraient leur retour dans le futur ; le moins qu'on puisse dire, c'est que c'est le cas, car UP&DM compte deux titres entièrement growlés !

Oui, je suis plus en colère aujourd'hui ! We Do Not Resist est une chanson de colère, qui sera le prochain single à être tiré de l'album. Après Like Orpheus, qui était assez lumineux, ce sera donc un single plus sombre et ce sera une lyric video car le texte est très important sur ce morceau. Beaucoup de choses nous mettent en colère de nos jours et le growl est donc de retour. Quand je l'avais abandonné à l'époque pour All Is One, je voulais en réalité laisser s'exprimer au mieux mon chant clair et évoluer dans ce registre. J'ai l'impression d'être arrivé au niveau que je voulais atteindre et je me suis rendu compte que le chant extrême faisait partie de moi aussi. Et au final, même sur AiO, j'avais dit que je n'en utiliserais plus et j'ai fini par tout de même être en colère, ce qui a donné le morceau Fail (rires). Quoi qu'il en soit, c'est une part essentielle de la musique d'Orphaned Land. C'est la meilleure façon d'exprimer des sentiments négatifs.
 

A mes yeux, cette opposition entre mélodies « lumineuses » et passages plus sombres, entre des morceaux comme « All Knowing Eye » et « Only the dead have seen the end of war », est caractéristique de votre musique.

Je suis d'accord avec ça, oui. Même dans notre premier album, qui était plus extrême, on y trouve The Beloved's Cry, qui est une ballade ; ça fait partie de nous. Nous avons toujours été assez éclectiques, avec un spectre assez large d'émotions, depuis des morceaux tristes jusque des morceaux joyeux – ou plus énervés.

Cela nous mène au nouvel album ... Peux-tu nous dire qui sont ces «Unsung Prophets and Dead Messiahs » évoqués ?

Es-tu familier avec l'allégorie de la caverne, de Platon ?
 

Oui, je l'ai étudiée brièvement...(l'allégorie de la caverne évoque la peur qu'a l'homme d'accéder à la connaissance, préférant rester dans sa « caverne » plutôt qu'affronter la lumière brûlante du soleil, qui représente dans cette allégorie la connaissance).

Ce qui me fascine, c'est que Platon a écrit ça il y a plus de 2000 ans ; il a écrit cette allégorie après que les Grecs aient tué Socrate. Platon ne pouvait pas croire que les hommes tuent un sage comme Socrate, censé amener la connaissance et être un guide pour les gens, pour les aider à comprendre le monde dans lequel ils vivent. Platon a alors réalisé une chose au sujet du comportement humain : nous vivons au sein d'une « cave », notre seule réalité est l'ombre qui nous entoure et nous ne souhaitons pas forcément en sortir – et toute personne souhaitant le faire risque la mort. Pense à tout ce qui est arrivé dans notre histoire : chaque fois qu'une personne a tenté de porter un message, elle en est morte. Jésus, Gandhi, Martin Luther King, Yitzak Rabin, Sadate, JFK ... Tous ont été assassinés. Il y a bien d'autres exemples, on peut également en trouver beaucoup en France. C'est une boucle qui se répète depuis l'époque de Socrate et qui vient de la nature humaine. C'est également dans la Bible : quand Moïse veut mener les enfants d'Israël hors d'Egypte, ils ne veulent de prime abord pas quitter le pays où ils sont esclaves ; ils préfèrent le mal connu (« the devil you know », en anglais, nda) plutôt que partir pour la Terre Promise. Moïse doit les convaincre.

Donc, qui sont les « unsung prophets & dead messiahs » ? Tous ces gens que je t'ai cités – et bien d'autres – sont, en un sens, des « dead messiahs » (messies morts, nda). Martin Luther King, pour la société afro-américaine, est une icône comparable à Jésus Christ ; Gandhi pour les Indiens ... Ce sont des leaders qui aspiraient à une autre vie pour les leurs et tous ont fini assassinés. Je pense qu'il y a des exemples pour chaque pays. Quant aux « unsung prophets », ce sont des gens comme Platon. Platon a écrit l'allégorie de la caverne il y a plus de 2000 ans ; nous le voyons comme un philosophe, mais quand on y pense, ce qu'il a écrit est une forme de prophétie, qui annonçait notre comportement futur.
L'idée serait que les « prophètes » n'existent que dans la Bible, qu'il n'y en pas de nos jours, mais c'est faux. Prenons Aldous Huxley (Brave New World), Orwell (1984) ; ces livres sont des prophéties. Ce qui y est écrit arrive concrètement, dans la vie de tous les jours. Aujourd'hui, une série comme Black Mirror est une forme de prophétie qui montre vers où nous allons. Ce sont des prophéties « inchantées » car nous ignorons qu'elles en sont. Voilà le sens de Unsung Prophets & Dead Messiahs.
 

Si je devais « deviner » qui sont selon toi ces messies d'aujourd'hui – et donc peut-être ces futurs messies morts (rires) – je citerais spontanément Julian Assange, Edward Snowden ... ?

Exactement. C'est exactement ça. Edward Snowden pourrait être mort aujourd'hui. Et ce qu'il a dévoilé est précisément ce que Georges Orwell imaginait dans 1984 – Big brother, le gouvernement des USA espionnant son propre peuple ... Notre vie privée aujourd'hui n'est plus celle qu'elle est supposée être. Google, Facebook savent tout à notre sujet – jusqu'au nombre de fois où nous avons tapé le mot « révolution » dans notre moteur de recherche, les films que nous regardons ... Ils analysent tout, jusqu'à notre personnalité. Ils savent où nous sommes via nos téléphones ; c'est littéralement ce qu'Orwell a imaginé dans sa « prophétie » et Edward Snowden peut aisément faire partie de ces « dead messiahs ».
 

Parlons du single, « Like Orpheus » ; il m'a personnellement fait penser à un livre écrit par Shulem Deen (All who go do not return, en français : Celui qui va vers elle ne revient pas), dans lequel l'auteur raconte avoir été banni de sa communauté juive orthodoxe de New York pour avoir découvert l'internet, la radio, le monde moderne, choses interdites par leurs règles. Est-ce que tu connais ce livre ?

Non, mais ça m'a l'air très intéressant ! En quelque sorte, cet homme avait trouvé la lumière hors de la cave et les gens restés à l'intérieur ont voulu l'y maintenir... C'est exactement la même allégorie. Je serais curieux de lire ce livre. Dans Like Orpheus, c'est la même idée, mais expliquée à partir de la musique metal. C'est l'histoire vraie de quelques metalheads provenant de la communauté orthodoxe ; je connais personnellement quelques fans de metal portant habituellement cette tenue traditionnelle hassidique, comme dans le clip. Nous voulions raconter leur histoire, la façon dont ils sortent de leur cave puis y retournent en quelque sorte ; on voit à la fin du clip cet homme, juif, et cette fille musulmane qui attendent au même arrêt de bus sans savoir qu'ils reviennent du même concert de Kreator.  

L'image d'Orphée est utilisée car dans la mythologie grecque, Orphée avait une telle voix que lorsqu'il chantait, même les rochers et les arbres aimaient sa voix. Le personnage évoqué dans la chanson sort de la cave et est si heureux qu'il chante « comme Orphée » (nda : le parallèle peut également être fait avec le fait qu'Orphée soit allé chercher sa femme Eurydice aux Enfers, la ramenant de ce qui peut être aussi vu comme une forme de « caverne »).
 

Et pour cette belle voix d'Orphée, vous avez choisi de faire appel à Hansi Kürsch, de Blind Guardian.

Oui, car il est mon Orphée (rires). C'est à mes yeux l'Orphée des temps modernes, il a une voix si particulière ... je voulais qu'il chante ce morceau et il l'a fait comme j'aurais imaginé Orphée le faire.
 

C'est le premier album d'Orphaned Land écrit sans Yossi Sassi ; comment était-ce de travailler sans lui, qui a été un membre très important du groupe dès ses débuts ?

Yossi était une part très importante du groupe et d'une certaine façon, il en fait toujours partie, de son histoire. J'avais l'habitude de travailler avec lui, j'ai réalisé énormément de choses à ses côtés... Mais ça a été une excellente expérience de travailler sans lui car j'ai su dès qu'il avait quitté le groupe qu'Orphaned Land était un tout plus grand que ses individualités. Nous avons toujours pensé qu'il existait un « esprit » propre au groupe et que tant que cet esprit serait là, peu importe qui jouerait de la guitare (par exemple), tant qu'il comprend ce qu'est cet esprit, il serait capable d'écrire des morceaux d'Orphaned Land. Le groupe est plus grand que Kobi, que Yossi ... Je demande d'ailleurs aux gens, à ceux qui m'interviewent, s'ils ont eu ce sentiment, si la musique d'Orphaned Land leur paraît avoir ce même esprit sur Unsung Prophets & Dead Messiahs ; la plupart me répondent que oui. Il n'y a jamais eu de maître à penser dans le groupe, comme peut l'être Mikael dans Opeth ou Steven Wilson dans Porcupine Tree. Yossi était important, mais il n'était pas celui qui pensait tout. De ton côté, est-ce que tu ressens cet esprit dont je parle dans l'album ?
 

J'allais y venir ; je trouve justement qu'on ne remarque pas vraiment le départ de Yossi en termes de sonorités, le travail sur les guitares est excellent, notamment...

Merci. Chen et Idan ont réalisé un incroyable travail, ce sont des musiciens très talentueux ... qui comprennent l'esprit Orphaned Land. Mais je suis toujours ami avec Yossi, d'ailleurs ! Nous avons donné un concert à Tel Aviv pour Hanoukkah il y a quelques jours, nous avons reçu un Disque d'Or en Israël pour Mabool et je l'ai appelé pour qu'il vienne le chercher. Nous sommes toujours bons amis, nous avons juste avancé.
 

Comment se porte la scène israélienne aujourd'hui ? Est-ce plus accessible d'écouter du metal aujourd'hui au Moyen-Orient ?

Oh, en Israël, ça a toujours été facile ! Si on compare Israël aux pays qui l'entourent ... le metal et même le rock y sont considérés comme satanistes ; c'est le cas en Jordanie, en Iran, en Egypte – ce n'est pas facile d'y organiser des concerts. Il y a presque eu un concert de Sepultura en Egypte, mais ça a été annulé ; il y a presque eu un concert d'Opeth en Jordanie, mais ça a été annulé... Quand on regarde le Moyen-Orient, il y a quelques concerts à Dubaï, quelques concerts au Liban, mais c'est tout. En Israël, il y en a toujours eu beaucoup. Paradise Lost, Carcass, Kamelot, Epica, Dream Theater, Metallica (il énumère des groupes étant récemment venus). Le seul problème, je dirais, c'est l'armée, qui vous oblige à vous couper les cheveux (rires), et tout le monde doit faire son service militaire ici. Mais oui, la scène est très vivante ici ; c'est à un concert récent de Kreator que nous avons tourné les scènes du clip de « Like Orpheus ».
 

Je me permets de parler politique... Donald Trump a récemment pris la décision de déplacer l'ambassade américaine de Tel Aviv à Jérusalem. As-tu ressenti des tensions depuis, toi qui habites en Israël ?

Non, rien n'a vraiment changé, mais tu sais, la tension est toujours là en Israël. Je vis dans un pays de conflits et dans une région de conflits. La situation en Syrie, les conflits entre l'Arabie Saoudite et l'Iran, entre les Chiites et les Sunnites ... nous ne sommes qu'un conflit de plus dans un océan de conflits. J'y suis habitué depuis que je suis gamin.

Je vais être honnête avec toi : je ne suis pas fan des politiciens. They're all shit. Je pense sincèrement qu'ils ne font rien pour améliorer le monde dans lequel nous vivons. Ils sont tous assis à l'ONU, signant des papiers, prenant des décisions dont tout le monde se moque et eux les premiers. Aucun d'entre eux ne se soucie des enfants qui meurent en Syrie, aucun ne sait que chaque année 70.000 enfants sont kidnappés en Inde, aucun ne se soucie de l'Afrique... Ils se contentent de jouer à qui a la plus longue. C'est un cirque composé de personnes qui ne se soucient pas de ce qui se passera dans le futur. Il y a trop d'armes dans le monde, trop d'enfants meurent de faim, trop de femmes sont violées – il y a énormément de problèmes dans le monde mais nous ne nous préoccupons que de religion et de politique, de toutes ces conneries.
J'espère que dans le futur, nous aurons de meilleurs leaders – mais pour en revenir à l'album, chaque fois que c'est arrivé, ils en sont morts ! C'est le cycle de notre monde et c'est un drame car car quand tu jettes un regard sur l'humanité... Vois à quel point nous avons avancé ces dernières années sur les terrains de la science, de la technologie, de la médecine, de l'agriculture ... Mais dans le domaine des relations humaines, de l'autre, nous répétons toujours les mêmes erreurs. C'est intéressant et il faudrait se poser la question : pourquoi sommes-nous incapables de nous entendre les uns avec les autres ? La réponse est selon moi dans notre éducation – et dans les politiques qui ne veulent pas modifier le système éducationnel parce qu'ils veulent garder les choses telles qu'elles sont. C'est plus facile de contrôler les gens qui sont divisés, qui ont peur, qui sont addict à la télé-réalité, aux gossips, à la culture du people... C'est plus facile de les contrôler et de les manipuler. Je n'ai jamais voté en Israël, jamais.
 

Mais pour sortir de notre « cave », avons-nous besoin des ces « Prophètes et messies » ou devrions-nous plutôt trouver la lumière en nous, être en quelque sorte nos « propres messies », comme le dit une de vos chansons (« My own messiah », sur All is One, nda) ?

Oui, je pense que les gens sont la clef du changement. Albert Einstein a dit que le monde ne serait pas détruit par ceux qui font le mal mais par ceux qui ne font rien pour les en empêcher. Les gens ont le pouvoir et la clef pour un changement est dans notre éducation. Regarde ce qui arrive aux enfants aujourd'hui : le premier jouet qu'on leur offre est un faux fusil. Tu vois des gosses de 6 ans avec des faux fusils. La violence est implantée dans les esprits dès le début ; en grandissant, cela devient naturel ; la violence, les morts, la guerre, ça a du sens. Ensuite, qui sont les héros à la télévision ? Des personnes qui n'ont... rien en elles ; elles n'ont pas écrit de livre, de chansons, elles n'ont rien dit d'intelligent... Elles sont belles, célèbres. Et les gens veulent leur ressembler, les filles veulent être Kim Kardashian. Une anecdote : il y a quelques semaines, des enfants m'ont demandé « Kobi, es-tu célèbre ? »... Je leur ai répondu que j'étais un artiste et que mon art était apprécié par beaucoup de gens. Ils m'ont redemandé : « Mais es-tu célèbre » ? (rires). Voilà. La clef est l'éducation de ces enfants. Si nous leur faisions découvrir Aldous Huxley plutôt que n'importe quelle star de la télé-réalité... si nous leur apprenions à dialoguer et à mettre leurs fusils en plastique de côté, nous pourrions créer de meilleurs êtres humains – et si de meilleurs êtres humains apparaissent, de meilleurs leaders suivraient. Les gens se plaignent de Trump, mais pourquoi ? Je ne comprends pas leur surprise. Trump n'est pas apparu du néant pour devenir président des USA, les gens ont voté pour lui, c'est ce que notre société peut produire de mieux aujourd'hui. C'est notre monde, c'est le « Black Mirror » qu'il nous renvoie, celui de nos valeurs. Nous sommes accros aux télé-réalités et aux gens célèbres parce qu'ils sont riches : c'est ce qu'est Donald Trump ! De quoi se plaint-on ? Nous avons ce que nous méritons et le seul moyen d'en sortir est par l'éducation.

Durant la Seconde Guerre Mondiale, il y avait un penseur juif, Janusz Korczak, un de mes maîtres à penser, qui s'occupait d'un orphelinat et est mort avec tous ses enfants ; il a dit qu'un meilleur futur pour l'humanité ne dépendrait pas de tel ou tel parti, des Républicains, des Démocrates, des socialistes, mais de si nous arrivons à construire un meilleur être humain. Je suis d'accord.
 

Terminons sur une question plus légère après ce sujet ! L'année 2017 se termine ... y a-t-il un album qui t'a marqué ?

Oula ... Je n'ai pas eu le temps d'écouter beaucoup d'albums mais récemment, l'album qui m'a le plus touché n'est pas du metal : il s'agit de l'album Cold Little Heart de Michael Kiwanuka. Un album fantastique, qui ressemble un peu à une version moderne de Marvin Gaye. Mais pas vraiment de metal cette année, non ; Meliora de Ghost est sorti cette année ? Non, c'est en 2015... Non, vraiment rien ! J'étais très concentré sur notre album (rires).
 

Bien, alors peut-être peux-tu donner à nos lecteurs des conseils en matière de musique orientale, car je suppose que tu en écoutes pas mal... ?

Je conseillerais d'écouter Bustan Abraham ... Omar Faruk Tekbilek ... et la scène turque des années 70, des artistes comme Erkin Koray, dont nous avons repris la chanson Estarabim ; il est incroyable. Il y a aussi Selda Bagcan, qui était très positionnée politiquement et a été jetée en prison en Turquie pour ça. Sa musique est fascinante.
 

Merci beaucoup pour ton temps, Kobi.

Merci à toi, merci de raconter notre histoire et de parler de ce que nous faisons. 
 

Interviewée réalisée par Skype le 21 décembre 2017.