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lundi 17 octobre 2016

Dark Funeral + Krisiun @ Vosselaar (Belgique)

Biebob - Vosselaar

Nostalmaniac

Le Max de l'ombre. 29 ans. Rédacteur en chef de Horns Up (2015-2020) / Fondateur de Heavy / Thrash Nostalmania (2013)

Plutôt habitués aux festivals ces dernières années, les Suédois de Dark Funeral font (enfin) leur retour dans les salles européennes pour défendre comme il se doit leur dernier et très solide opus « Where Shadows Forever Reign » paru cet été chez Century Media.

Leur dernier passage en Belgique (hors festival) remonte à 2010 au... Biebob de Vosselaar. La même salle que ce soir ! Le Biebob est sans conteste l'une des salles Metal les plus connues du pays, située non loin de la frontière hollandaise et d'une capacité de 400 personnes. Une salle plutôt agréable avec son petit bar. Bon, en ce dimanche soir le concert est très loin d'afficher sold-out. Tout au plus une centaine de personnes ont fait le déplacement. Ce qui peut paraître curieux quand on sait que le groupe se fait plutôt rare en salle, mais il faut peut-être aller voir du côté du prix (26€ en prévente ou sur place) et le fait d'avoir seulement un groupe en plus (les Brésiliens de Krisiun). Un prix inchangé alors que le prometteur combo teuton Deserted Fear a été mystérieusement éjecté avant le début de la tournée.

KRISIUN

Et donc même pas de groupe local en ouverture, c'est directement Krisiun qui a la mission d'échauffer les nuques vers 20h20. Si la réputation du trio brésilien (formé début 90) est bien établie en dehors de ses frontières, ce soir il faut reconnaître que l'assistance présente n'est pas forcément venue pour eux.
Après une intro qui nous rappelle bien leurs origines sud-américaines, Krisiun démarre tambour battant avec le bien nommé "Kings of Killing". Un Death Metal conquérant joué avec vélocité. Parfois technique, mais en cherchant l'efficacité plutôt que la démonstrativité. On remarque vite que les trois frères sont assez statiques sur scène (deux batteries sur une petite scène ça n'aide pas j'en conviens) mais le vocaliste/bassiste Alex Camargo n'oublie pas d'abondamment remercier le public et de le faire réagir. Avec une belle discographie (dix albums), ils ont de quoi piocher, en plus évidemment de proposer quelques titres de leur dernier méfait en date (« Forged in Fury » sorti l'an dernier). Je noterai les très bons "Ways of Barbarism" et "Scars of Hatred" qui mélangent assez bien Death old school et Death moderne. Ce qui fait assurément leur force et leur réputation aujourd'hui, en plus de leur stabilité et de leur expérience. Le son est très bon. On peut apprécier les quelques soli de Moyses. Je ne vais pas m'épancher sur les morceaux car j'en reconnais très peu. Mais je me dois de mentionner "Conquerors of Armageddon" et ses kill, kill, kill. Après, quoi de mieux pour mettre un public dans sa poche que rendre hommage à Lemmy et reprendre le cultisime "Ace of Spades" de Motörhead avec conviction ? Bien que cela brise un peu le rythme du concert, mais la machine à blast ne s'enraye pas et gagne même en intensité avec les destructeurs "Apocalyptic Victory" et "Blood of Lions" Ce show assez convaincant mais manquant d'un brin de folie se termine avec "Black Force Domain" (morceau-titre de leur premier album), non moins ravageur. La soirée commence donc bien même si le style des Brésiliens n'est ni proche, ni vraiment complémentaire de celui de Dark Funeral et que je regrette vraiment l'absence de Deserted Fear comme véritable tour de chauffe.
 

DARK FUNERAL

Changement de décor et surtout changement complet de style. C'est la première fois que je vais voir Dark Funeral que je voulais absolument voir en salle depuis des années et surtout depuis la sortie de leur très bon dernier album. Pour planter le décor, on retrouve d'ailleurs le backdrop avec le magnifique artwork de Necrolord sur la scène.

J'avais une certaine appréhension après avoir visionné le live au Hellfest 2016 où je trouvais le nouveau vocaliste Heljarmadr (intronisé en 2014) pas encore au niveau et trop vite dans les cordes... vocalement parlant. C'est donc l'occasion de vérifier tout ça pour cette cinquième date de la tournée Shadows over Europe.

Les lumières s'éteignent, une intro inquiétante et apocalyptique assombrit l'atmosphère pendant que les cinq musiciens montent sur scène tour à tour arborant fièrement leurs grimages et combinaison de cuir. Une véritable tradition chez Dark Funeral. Titre d'ouverture du nouvel album, "Unchain My Soul" ouvre les hostilités de la meilleure des façons. Il combine tout ce qui fait la réputation du combo suédois. Des leads puissants, une ambiance malsaine et des passages ou break accrocheurs. Dark Funeral c'est aussi une présence sur scène. Les deux guitaristes Lord Ahriman et Chaq Mol, véritables piliers de la formation, restent imposants. Côté charisme, Heljarmadr n'est pas en reste même si on ne remplacera jamais vraiment Magus Caligula, mais on y reviendra. Pas de répit avec "666 Voices Inside" (tiré de « Attera Totus Sanctus » (2005) qui est pour moi leur album le moins inspiré). Rapide, typique mais pas vraiment mémorable. Les Suédois ont tellement mieux à proposer et ne pourront faire l'impasse sur leur premier long format devenu culte pour tout amateur de Metal extrême : « The Secrets of the Black Arts » (1996). Et ça tombe bien car le vocaliste annonce avec ferveur "The Dawn No More Rises". Un de leurs nombreux classiques joué ici sans fioriture. Le public est tout acquis. On sent Heljarmadr un peu moins à l'aise sur ce morceau (et les plus vieux en général). Logique me direz-vous. Néanmoins, on le sent vraiment investi dans son rôle de frontman sans pour autant copier ses prédécesseurs. Il n'hésite pas à fixer du regard les premiers rangs et à faire vivre avec sa gestuelle ces sombres paroles qui nous promettent un nouvel âge sombre. Encore de sombres promesses avec "The Arrival of Satan's Empire", un incontournable de l'ère Magus Caligula, qui ne dénote pas et fait monter un peu plus la température. La setlist est vraiment bien pensé et équilibré. Nouvelle preuve avec "Stigmata" (qui figure sur « Angelus Exuro Pro Eternus » (2009)) où le son est malheureusement un poil brouillon sur les passages plus rapides, mais le simple refrain fait son effet (Stigmata! Stigmata!).

Dominator est époustouflant derrière ses fûts. Son jeu, sa maitrise apportent énormément au concert. Sinon, on notera que Dark Funeral collectionne toujours les bassistes. Alors que je croyais Natt toujours au poste, il n'en est rien (d'ailleurs pour info, il n'est même pas crédité sur l'album, seulement sur le single "Nail Them to the Cross"). C'est le très souriant Gustaf Hielm (Pain of Salvation, Tiamat, ex-Meshuggah) qui occupe le poste sur cette tournée. Et sans vouloir lui faire injure, il aurait pu jouer la même ligne de basse tout au long du concert que je n'aurais rien remarqué. Celle-ci étant totalement noyée dans le mix. Mais bon, il faut noter aussi que tout au long du concert le son des grattes n'est pas au top non plus. Les quelques soli en font les frais, mais ça ne gâche en rien le show.

Après cette déferlante, on a droit au plus lent et mid-tempo "As I Ascend", un des nombreux extraits du dernier opus présenté ce soir. Heljarmadr alterne ici chant criard et voix claire. Ce qui donne un côté très solennel - voire cérémonial - à l'ensemble et révèle que le Black Metal des Suédois ne manque pas de subilités et variétés. Des nouveaux morceaux qui passent décidement très bien l'épreuve du live, surtout celui-ci qui me plaisait déjà beaucoup dans sa version studio. En tout cas, Dark Funeral connaît bien ses fans les plus fidèles et sait comment leur faire plaisir en continuant à fouiller dans sa riche discographie. Place donc à un "Ravenna Strigoi Mortii" sans concession mais aussi un "Shadows Over Transylvania" d'anthologie. Heljarmadr nous sort le fouet (qui aurait pu être plus impressionnant) pour un "Goddess of Sodomy" totalement intense. Second extrait de « Vobiscum Satanas » au programme ce soir,  "Thy Legions Come" et ses leads diaboliques enfoncent un peu plus le clou d'une setlist quasi parfaite. Et bien sûr on n'échappe pas comme conclusion à "My Funeral" que le public attendait avec impatience. Juste grandiose. Conclusion, vraiment ? Après une courte pause, le groupe suédois revient sur scène pour le rappel. Je retiendrai surtout un "Nail Them to the Cross" vicieux, blasphématoire et vraiment taillé pour le live et le morceau-titre "Where Shadows Forever Reign" surplombé d'une ambiance tragique avec des breaks jouissifs.

Autour de son nouveau chanteur, Dark Funeral semble bel et bien de retour décidé à faire honneur à sa sulfureuse réputation et son histoire. Heljarmadr a encore du boulot et l'ombre de Magus Caligula planera encore longtemps au-dessus de lui mais on pouvait dire pareil de Mortuus qui avait intégré Marduk et qui a depuis donné une autre dimension au groupe. C'est tout le mal qu'on lui souhaite. En tout cas, Dark Funeral en salle c'est à voir même sans effets pyrotechniques. Leur Black Metal froid et diabolique suffit.